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Missing/Porté disparu (Missing)

Publié le par Rosalie210

Costa-Gavras (1982)

Missing/Porté disparu (Missing)

Le film Missing, l'un des meilleurs Costa-Gavras, palme d'or au festival de Cannes en 1982 est une adaptation du livre de Thomas Hauser "The Execution of Charles Horman: An American Sacrifice" sorti quatre ans auparavant. Il évoque le destin authentique d’un jeune Américain de gauche « disparu » au Chili dans les jours tumultueux qui ont suivi le coup d’État militaire du 11 septembre 1973. Il retrace également l’enquête, douloureuse et compliquée, à laquelle se livrèrent sur place le père du « disparu », Ed, et l’épouse, Joyce (renommée Beth dans le film à sa demande), jusqu’à découvrir enfin que Charles avait été exécuté par les militaires chiliens, avec la complicité des autorités américaines, parce qu’il en savait trop sur la participation de celles-ci à l’organisation du putsch du général Pinochet. 

La réussite de Costa-Gavras réside dans le fait d'avoir su convertir ces événements historico-politiques en expérience humaine sensible. On n'est pas prêts d'oublier le cauchemar dans lequel sont plongés les civils, confrontés sans cesse à des visions d'horreur et à un stress intense. Costa-Gavras rend palpable le régime de terreur instauré par Pinochet avec une bande-son riche en coups de feu, en crissements de pneus, en vrombissements de pales d'hélicoptères. Il montre aussi visuellement la violence s'abattant sur des femmes attendant à un arrêt de bus parce qu'elles portent des pantalons (un signe d'émancipation abhorré par le fascisme réac, de même que les cheveux longs pour les hommes) ou bien frappant au hasard des personnes embarquées de force dans des voitures sous les yeux de leurs enfants. Les exactions prennent également des tournures symboliques comme la scène où Beth assiste à la course éperdue d'un magnifique cheval blanc poursuivi par les soldats. Un autre animal-totem subit également leur brutalité, le canard qui servait de modèle à Charles pour ses dessins de BD. Les écrits sont d'ailleurs une cible, les scènes d'autodafés, "crimes contre l'esprit" étant nombreuses. Jack Lemmon qui déploie toute sa puissance de jeu humaniste (et a reçu un prix d'interprétation mérité à Cannes) nous fait vivre de l'intérieur la descente aux enfers de son personnage d'américain conservateur découvrant l'hypocrisie et le cynisme des autorités de son pays: un voyage de l'autre côté du miroir qui lui permet par contraste de découvrir la vraie valeur de son fils, de Beth (Sissy Spacek) mais aussi la sienne, cette part de lui-même qu'il a transmis inconsciemment à Charles et qu'il avait toujours dénigré jusque là. Bouleversant.

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