Pier Paolo Pasolini- Agnès Varda - New York- 1967
Agnès Varda (1967)
L'oeuvre de Agnes VARDA continue à révéler ses secrets, même depuis son décès en 2019. C'est en effet sa fille, Rosalie VARDA-DEMY, directrice actuelle de la société de production familiale Ciné-Tamaris qui en faisant du rangement avec le reste de l'équipe a découvert en 2021 dans la cave de la société les pellicules d'un court-métrage que sa mère a tourné à New-York avec Pier Paolo PASOLINI en 1966. Plus exactement les images ont été tournées en 1966 mais en version muette et l'année suivante, en 1967, Agnes VARDA a mené un entretien audio avec Pasolini qu'elle a monté avec les images. A la suite de cette découverte, le court-métrage a été restauré en 2022.
Même s'il est d'une durée très courte (un peu plus de trois minutes), le film est intéressant à plus d'un titre. Il "donne à voir" (pour reprendre l'expression de Agnes VARDA) un instantané du New-York de l'époque, plus exactement de l'effervescence de 42eme rue de Manhattan où déambule tranquillement Pier Paolo PASOLINI chaussé de lunettes noires et dont Agnes VARDA filme la plupart du temps le visage en gros plan. La déambulation étant propice à la réflexion, le jeu des questions-réponses que l'on entend s'harmonise bien avec les images, aussi judicieusement choisies que les questions sont incisives. Ainsi lorsque Pasolini évoque que ce qui l'a frappé à New-York est la pauvreté, on pense aussitôt au New-York en crise dépeint par les cinéastes du nouvel Hollywood à cette époque comme John SCHLESINGER ("Macadam Cowboy") (1968) ou Jerry SCHATZBERG ("Panique a Needle Park") (1971). Autre thématique abordée par Agnes VARDA, le rapport que Pasolini entretient avec la réalité et la fiction, ce dernier terme étant récusé par ce dernier qui ne voit dans le cinéma qu'un autre niveau de réalité. Il remet d'ailleurs en cause au passage le travail des composition des acteurs en laissant entendre qu'il est impossible de tricher devant une caméra et qu'un acteur livre en fait ce qu'il est profondément. Enfin Agnes VARDA aborde la question sensible du rapport de Pasolini au catholicisme, celui-ci préférant se réfugier derrière la caution de l'art italien plutôt que de répondre étant donné son athéisme affiché. Il avoue quand même que cette question lui est obscure. Agnes VARDA filme alors longuement une spirale plane tournant derrière la vitrine d'un magasin en un plan qui rappelle celui de "M le Maudit" (1931) où le personnage de Peter LORRE tentait en vain de fuir ses démons.
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