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Juniors

Publié le par Rosalie210

Hugo P. Thomas (2023)

Juniors

Un teen-movie rural à la française, ça fait penser à "Teddy" (2020) ce qui n'est pas surprenant, le réalisateur, Hugo P. THOMAS ayant fréquenté Ludovic BOUKHERMA et Zoran BOUKHERMA à l'école de la Cité du cinéma avant de réaliser plusieurs courts-métrages et un long-métrage avec eux, "Willy 1er" (2016). Mais "Juniors" est son premier long-métrage en solo. Néanmoins cette comédie dramatique sur les affres de l'adolescence est bien plus proche de "Les Beaux gosses" (2008) que des films de genre horrifiques et régionalistes qu'affectionnent les Boukherma. L'histoire tourne autour de deux amis de 14 ans, Jordan et Patrick qui s'ennuient ferme dans leur petit village au point de regretter de ne pas habiter en banlieue pour avoir des bâtiments à taguer (comme quoi l'article du journal "Le Monde" de Thomas Piketty sur le malaise territorial français englobant rural profond et banlieues sensibles voyait juste). Ils passent leur temps à jouer aux jeux vidéos jusqu'à ce que la Playstation de Jordan rende l'âme. Ils décident alors de monter une cagnotte en ligne en faisant passer Jordan pour malade afin de trouver l'argent nécessaire à son remplacement. Evidemment ce gros mensonge va finir par les dépasser. Si tout n'est pas parfaitement vraisemblable, le scénario est écrit avec une certaine finesse en décrivant avec humour les bénéfices sociaux que la cagnotte mensongère leur offre dans un premier temps. Elle attire l'attention sur eux, les rend populaires, leur permet d'obtenir une série de petits privilèges dans leur collège et de se rapprocher des filles qu'ils convoitent*. En même temps elle révèle combien ces ados sont livrés à eux-mêmes, la famille de Patrick n'apparaissant dans le lointain qu'à la fin et celle de Jordan se limitant à un père hors-champ et à une mère infirmière dont l'absence est soulignée par les post-it qu'elle laisse sur le frigo (Vanessa PARADIS). D'ailleurs face aux ennuis que rencontre son fils lorsque sa supercherie est démasquée, celle-ci est amenée à faire un début d'introspection sur ses choix de vie et on se dit que son cas n'est effectivement pas si différent des jeunes de banlieue élevés dans des familles monoparentales dont le parent travaillant en horaires décalés ne peut en même temps s'occuper de son enfant. La fin du film n'est d'ailleurs pas exempte d'une certaine mélancolie qui souligne qu'il y a un prix à payer pour grandir. Hugo P. THOMAS a donc une approche assez juste de la jeunesse territorialement défavorisée et son film est prometteur en dépit d'un titre passe-partout qui le dévalorise.

* Tout à la fait dans la lignée de la série "Mytho" (2019) qui reposait sur le même mensonge afin de souligner cette fois le mal-être de la femme au foyer.

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