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La Fille à la valise (La Ragazza con la valigia)

Publié le par Rosalie210

Valerio Zurlini (1961)

La Fille à la valise (La Ragazza con la valigia)

Autant ma première incursion dans le cinéma de Valerio ZURLINI avec "Le Professeur" (1972) m'avait laissé une impression mitigée, autant "La Fille à la valise" m'a profondément touchée. Les ingrédients sont pourtant les mêmes: une atmosphère particulière, souvent hors du réel, un contexte plutôt glauque, une histoire d'amour impossible. Mais alors que "Le Professeur" baignait dans un climat poisseux, décadent et nihiliste avec des personnages sinistres, "La Fille à la valise" est illuminé par deux acteurs rayonnant de vitalité, de jeunesse et de beauté: Claudia CARDINALE et Jacques PERRIN. Alors certes, le déterminisme social y est souligné à gros traits. Avec l'argent qui remplace les mots qui ne peuvent se dire, tirant la romance vers le commerce (la satisfaction des pulsions contre celle des besoins matériels). Avec la morale religieuse incarnée par un prêtre qui vient faire la leçon à Aïda (une fille-mère perturbant les études d'un adolescent bourgeois, ce n'est pas convenable). Mais posséder un tel prénom quand on est une jeune fille pauvre c'est vivre dans la contradiction permanente. Car lorsque Aïda descend l'escalier de la demeure où vit Lorenzo après avoir pris son bain (et symboliquement lavé ses impuretés), c'est sur la musique du célèbre opéra de Verdi: on entrevoit alors cet autre monde que cherche Aïda dans son éternelle errance et qu'elle parvient à toucher du doigt avec Lorenzo, trop jeune pour être encore vraiment corrompu, le temps de quelques parenthèses hors du temps. Le climax étant atteint lors d'une séquence d'intense proximité dans le désert (d'une plage) où les deux amoureux, magnifiquement photographiés se retrouvent dépouillés de leur masque social: ils sont alors juste beaux à pleurer dans une gémellité qui préfigure celle que sublimera Jacques DEMY dans "Les Demoiselles de Rochefort" (1966). Cette séquence se rapproche de la grâce des photos de "La Jetée" (1963) qui arrachait également au temps des instants d'éternité. Peu importe au fond que la pesanteur du réel avec ses désillusions, son amertume, son fatalisme social ne reprenne ensuite le dessus puisque ces moments auront existé et que le cinéma les aura fait passer à la postérité.

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