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De grandes espérances

Publié le par Rosalie210

Sylvain Desclous (2023)

De grandes espérances

Le titre qui a été suggéré au réalisateur Sylvain DESCLOUS dont c'est le deuxième long-métrage de fiction par la monteuse Isabelle POUDEVIGNE se réfère volontairement au célèbre roman de Charles Dickens. On devine pourquoi. Dans les deux cas, il s'agit d'un récit d'apprentissage dans lequel un héros ou une héroïne d'origine modeste s'extrait de sa condition pour embrasser un idéal et y perd son innocence au passage. Mais la ressemblance s'arrête là. L'intrigue est mise au goût du jour, l'idéal en question n'étant plus l'amour d'Estrella mais (je cite Isabelle Poudevigne) " celles que Madeleine place en ses idées politiques et le parcours qu’elle se construit. Celles que beaucoup de gens placent en Madeleine. Ce sont enfin celles que nous plaçons tous en une politique qui puisse nous faire accéder à un monde plus juste, plus équitable et plus fraternel." Le problème est que cette politique "sociale, féministe, écologique et solidaire" confrontée à la réalité du terrain en reste à la note d'intention. Il y avait pourtant de quoi construire un scénario puissant sur le prix à payer en matière d'engagement en politique, d'autant plus si on est une femme, que l'on vient d'un milieu modeste et que l'on défend des causes progressistes. Les exemples ne manquent pas, de Simone Veil à Greta Thunberg ou Malala Yousafzai. Mais Sylvain DESCLOUS choisit de salir son héroïne avec un bon gros crime bien rouge qui tache plutôt que de laisser la réalité du terrain politique lui tanner le cuir. En terme d'efficacité dramatique, il est sûr que ce choix paye en dévastant son couple et en faisant même de son ancien amant-complice (Benjamin LAVERNHE) son ennemi numéro 1 prêt à la trahir auprès de Gabrielle, la députée auprès de qui elle travaille (Emmanuelle BERCOT qui est très bien dans un rôle de composition qu'elle a travaillé auprès de véritables femmes politiques). En terme de vraisemblance, c'est beaucoup plus discutable et il ne suffit pas de placer le drame en Corse pour en faire une tragédie grecque (je cite Sylvain Desclous). Encore faut-il que ses personnages suscitent terreur et pitié ce qui n'est pas le cas. L'interprétation de Rebecca MARDER n'est pas en cause mais le fait d'en faire un personnage versatile, tantôt perturbé par le meurtre avec des cauchemars et des absences et tantôt prêt à tout pour s'en sortir par le secret et le mensonge fonctionne mal d'autant que la juge tout comme Gabrielle acceptent sa version des faits avec une déconcertante facilité. Sans parler du rôle du père prolo qui profite du meurtre pour se rapprocher de sa fille. Bref le liant entre tous ces éléments ne prend pas vraiment, chacun excluant l'autre et on perd rapidement de vue le sujet principal qui aurait pu être passionnant au profit d'un thriller somme tout assez banal.

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