Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Bacri, comme un air de famille

Publié le par Rosalie210

Erwan le Gac, Stéphane Benhamou (2022)

Bacri, comme un air de famille

Pour le deuxième anniversaire de sa disparition, France 5 rend hommage à Jean-Pierre BACRI en proposant après la diffusion de "Les Sentiments" (2003) dans lequel il joue un rôle inhabituel le documentaire de Erwan LE GAC et Stéphane BENHAMOU qui retrace sa vie et sa carrière. Narré par Gilles LELLOUCHE, le film est assez classique sur la forme, faisant intervenir des amis et des collaborateurs entre deux scènes d'archives (mais pas tous. Agnès JAOUI brille ainsi par son absence). Sans prétendre éclairer toutes les facettes de sa personnalité, le film parvient tout de même par moments à sortir de l'anecdotique ou des platitudes. Il y a déjà tous les passages où à l'occasion de remises de prix ou d'émissions radio ou tv, Jean-Pierre BACRI a marqué les esprits avec son intelligence et son franc-parler. On peut ainsi rapprocher deux moments où il manie l'ironie pour dénoncer l'hypocrisie bien-pensante sur l'écologie (se payant la tête de Hulot au passage), l'autre dans lequel il feint de n'avoir aucune revendication à porter sur la place publique, preuve selon laquelle il est bien entré dans le système. Tant sur la forme que sur le fond, on reconnaît le Bacri observateur critique de son milieu et de son époque et ne s'épargnant pas lui-même. Ensuite il y a son rapport à ses origines dans lesquelles il a refusé de se laisser enfermer. Avant sa rencontre avec Agnès JAOUI qui l'a hissé au rang de co-auteur de pièces de théâtre et de scénarios de films, Jean-Pierre BACRI était l'acteur pied-noir de service, ce type de rôle culminant dans "Le Grand pardon" (1981) qui lui a permis de connaître une certaine notoriété. Mais contrairement à Roger HANIN avec lequel il a fini par se brouiller, Jean-Pierre Bacri détestait le communautarisme sous toutes ses formes. Il y a beaucoup de lui dans Castella, le chef d'entreprise autodidacte de "Le Goût des autres" (1999) (un des rôles dans lesquels je le préfère) qui s'ouvre à l'art, à la culture et aux autres en bravant courageusement le mépris et les humiliations des chapelles d'intellos snobinards. Et côté coulisses, c'est à lui et à Agnès JAOUI que l'on doit d'avoir enfin vu au cinéma dans un rôle important Anne ALVARO, cette formidable actrice qui était jusque-là cantonnée dans le milieu du théâtre (comme Jean-Pierre BOUVIER qui lui a mis le pied à l'étrier et que j'ai eu plaisir à revoir*). Le théâtre qui est aussi la matrice de la rencontre fructueuse avec Alain RESNAIS dont pourtant il n'avait rien compris dans sa jeunesse à "Hiroshima mon amour" (1958). Cet universalisme, on le retrouve jusque dans "Le Sens de la fête" (2016) où il dirige une brigade de carpes et de lapins qu'il cherche à fédérer, tel le double du duo de réalisateurs Philippe TOLEDANO et Olivier NAKACHE qui réunissent dans un même film des acteurs jouant dans des univers très éloignés.

* Au cinéma, en dehors de Roger HANIN, son autre "parrain" a été Lino VENTURA.

Commenter cet article