Charlotte et son jules
Jean-Luc Godard (1958)
Dans les courts-métrages de Jean-Luc GODARD, "Tous les garçons s appellent Patrick" (1957) et toutes les filles s'appellent "Charlotte et Véronique" (1957). Mais si le trio devait autant sa paternité à Jean-Luc GODARD qu'à Éric ROHMER, "Charlotte et son jules" est une esquisse de "À bout de souffle" (1959). En effet, bien que sorti sur les écrans en 1961 dans la foulée du premier long-métrage de Godard, il a été tourné juste avant, en 1958 avec une actrice inconnue (et qui allait le rester) et un acteur inconnu de 25 ans (mais qui n'allait pas le rester longtemps, lui). "Charlotte et son jules" scelle en effet la rencontre de deux iconoclastes du cinéma tel qu'il se pratiquait alors, Jean-Luc GODARD, qui allait devenir un des réalisateurs phare de la nouvelle vague et l'acteur Jean-Paul BELMONDO dont le physique hors-norme (par rapport au style du jeune premier canonique de l'époque) lui faisait manger de la vache enragée. Encore que dans ce film, Belmondo ne prête que son corps à la caméra étant donné que sa voix est celle de Godard lui-même, l'acteur étant indisponible au moment de la post synchronisation (film fauché oblige!). On ne peut pas mieux figurer la fusion entre un acteur et un cinéaste (Vanityfair évoque un monstre à deux têtes qui s'appellerait Belmondard ou Golmondo!) Quant au film lui-même, il fonctionne tout entier sur une méprise, celle de "Jules" qui croit que Charlotte qui l'a quitté veut revenir avec lui. S'ensuit 12 minutes de quasi-monologue de misogyne aigri durant lequel la belle dont les interventions sont réduites pour l'essentiel à des onomatopées semble ouvertement se moquer des propos de son ex ce que confirme une chute très ironique qui renverse complètement la perspective du film: l'identité de l'idiot n'est pas celle que l'on croit.
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