Quand Harry rencontre Sally (When Harry meet Sally)
Rob Reiner (1989)
Rob REINER a réalisé nombre de films cultes: "Princess Bride" (1987), "Stand By Me" (1986) et bien sûr "Quand Harry rencontre Sally" (1989) qui est devenu la référence de la comédie romantique, genre que je ne prise guère en soi tant tout y est prévisible et cliché. Mais sans être révolutionnaire, le film de Rob REINER s'élève au dessus du lot grâce à une heureuse conjonction de talents (réalisateur, scénariste, chef op, acteurs...) mais pas seulement.
L'amour peut-il résister à l'usure du temps? Ou plutôt comment faire pour que l'amour passe l'épreuve du temps? C'est à cette question en fait que répond "Quand Harry rencontre Sally" bien plus qu'à la certitude de Harry (Billy CRYSTAL) selon laquelle un homme et une femme ne peuvent être seulement amis. Quel est l'intérêt de poser des définitions figées sur ce qui justement est en évolution perpétuelle? Peut-être s'agit-il de se rassurer. Mais ce qui pour moi fait l'originalité de cette comédie romantique, c'est qu'elle traque le mystère de l'alchimie entre deux personnes qui traversent la vie ensemble. Mystère qui échappe donc à notre volonté. On le voit particulièrement bien dans la séquence dans laquelle Harry et Sally (Meg RYAN) invitent au restaurant leurs amis respectifs Mary (Carrie FISHER) et Jess (Bruno KIRBY) dans l'espoir de les caser avec leur ami(e). C'est le contraire qui se produit: Mary et Jess se découvrent spontanément des affinités alors que les tentatives de conversation avec l'ami(e) de leur ami(e) tournent court (exactement comme dans le film de Éric ROHMER, "L Ami de mon amie") (1987). C'est aussi le sens des séquences de témoignages face caméra de vieux couples qui racontent le moment où ils se sont rencontrés. Hasard ou destin selon les croyances de chacun, le fait est que leur âge témoigne pour eux de la longévité de leur union, de même que leurs regards complices. Le montage expressif suggère ainsi fortement que Harry et Sally possèdent cette alchimie mais refusent de s'y abandonner en s'inventant diverses mauvaises excuses qui ne font que leur faire perdre du temps et accumuler les expériences malheureuses. Le split screen ou le montage alterné les rapprochent (ils font ou pensent la même chose au même moment) mais ils sont isolés dans le cadre ou bien séparés par une cloison étanche qui souligne leur solitude. A cela s'ajoute d'évidentes qualités de rythme et d'écriture (exemple, la célèbre chute drolatique de la séquence non moins célèbre d'orgasme simulé par laquelle Sally ébranle les certitudes de Harry sur les femmes) ainsi que d'interprétation: Harry et Sally sont très bavards pour créer des écrans de fumée entre eux mais ce sont leurs regards qui en disent le plus, notamment ceux, très expressifs que Billy CRYSTAL lance à sa partenaire (timides et tendres, à l'opposé de son comportement tête à claque). Enfin, le charme n'agirait pas de la même façon sans la photographie de Barry SONNENFELD qui magnifie New-York à la manière d'un film de Woody ALLEN mais avec sa thématique propre: celle du temps qui passe et le risque de passer à côté de sa vie à force d'orgueil mal placé, d'aveuglement et de peurs (de l'échec, de l'intimité etc.) Les feuilles mortes se ramassent à la pelle même si convention oblige tout est bien qui finit bien pour le couple de tourtereaux.
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