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L'Ami de mon amie

Publié le par Rosalie210

Eric Rohmer (1987)

L'Ami de mon amie

"L'Ami de mon amie" est le dernier des six films du cycle des "Comédies et proverbes" réalisés par Éric ROHMER dans les années 80. Il illustre à la perfection le proverbe "les amis de mes amis sont mes amis" mais aussi la définition géographique du cinéma comme science de disposition des corps dans un espace. Il s'agit en effet de l'histoire des trajectoires sentimentales entrecroisées de quatre jeunes gens gravitant dans le même milieu dans le cadre de la ville nouvelle de Cergy Pontoise. L'unité de lieu autant que celle de l'atmosphère estivale contribue à enfermer les personnages dans une ambiance de village où tout le monde se connaît et ne cesse de se croiser alors même que Cergy, issu d'une politique volontariste a hérité d'une architecture des années 60-70 pas vraiment à taille humaine et qui a très mal vieillie. Mais au lieu de ne montrer que les aspects oppressants de cette utopie urbaine, Éric ROHMER utilise astucieusement les contrastes du paysage comme révélateur de ses personnages et tout particulièrement de Blanche (Emmanuelle CHAULET). Sa situation sentimentale aride au début du film est reflétée par son cadre de travail austère à la mairie de Cergy et encore plus par son appartement de la tour Belvédère du quartier Saint-Christophe aménagé par Ricardo Bofill (les délires monumentaux rétro-futuristes de ce dernier parsèment la région IDF du 14° arrondissement de Paris à Noisy-Le-Grand avec la cité Abraxas filmée dans "Brazil") (1985). Grâce aux "amis de son amie", Léa (Sophie RENOIR), nettement plus fun et nomade dans son approche de la vie au point de servir de fournisseuse de contacts masculins ^^, Blanche se dégèle même si elle se trompe longtemps de cible, poursuivant une chimère alors que l'amour lui tend les bras. Et se dégel est symbolisé par les espaces de loisirs de Cergy, sa célèbre base aménagée mais également la nature qui l'environne et qui offre encore quelques recoins qui semblent être "originels" (ce n'est pas un hasard si la scène de révélation amoureuse s'y déroule). Même s'ils sont en réalité artificiels puisque retouchés par l'homme, ce sont ces lieux qui semblent être restés les plus vivants comme l'a montré récemment le documentaire "L'Ile au trésor" (2018) qui leur attribue même une mémoire. Quant au dénouement fondé sur un quiproquo, il est très drôle et plein d'ironie devant ces couples censés être fondés sur la recherche de l'âme soeur mais qu'un jeu de couleurs nous présente comme étant le fruit d'une recomposition à partir d'éléments interchangeables.

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