Bandits, bandits (Time Bandits)
Terry Gilliam (1981)
Deuxième long-métrage de Terry GILLIAM après "Jabberwocky" (1976), "Time Bandits" (1981) est encore fortement marqué par l'influence des Monty Python. Le film est en effet construit comme une succession de sketches à dominante nonsensique jouant sur le franchissement de portes spatio-temporelles: la bataille de Castiglione pour l'épisode napoléonien, la forêt de Sherwood pour celui concernant Robin des bois (John CLEESE), la ville de Mycènes avec Agamemnon (Sean CONNERY, très charismatique comme toujours) face au minotaure, l'épisode sur le Titanic et enfin celui qui se déroule dans la forteresse des ténèbres où l'Etre Suprême qui tire les ficelles de l'ensemble ressemble beaucoup à l'historien de "Monty Python sacré Graal" (1975) et où les anachronismes sont légion.
Néanmoins, ce film marque aussi la transition vers le premier grand film de Terry GILLIAM, "Brazil" (1985). Il y a d'abord le casting, bien sûr avec Michael PALIN, coéquipier des Monty Python au scénario et dans un petit rôle, Ian HOLM dans le rôle de Napoléon et Katherine HELMOND dans celui de la femme de l'ogre. Il y a surtout une première séquence "programmatique" qui sur un mode satirique et burlesque annonce la dystopie à venir de Terry GILLIAM. On y voit deux mondes qui s'affrontent. D'un côté, celui, bassement matérialiste des parents, consommateurs frénétiques qui passent leur temps de loisir affalés sur des canapés entourés d'emballages (symbole d'hygiénisme?) à donner leur temps de cerveau disponible au dieu audimat qui leur bourre le crâne avec un stupide jeu télévisé ("Your Money or your life" présenté par Jim BROADBENT) basé sur l'appât du gain et l'humiliation. On pense à toutes les séquences de l'émission "Le Zapping" (renommée "Vu" après sa disparition de Canal + en 2016) montrant les réactions hystériques des gens au sein de jeux tels que "Money Drop" ou encore aux jeux faisant leur miel de l'humiliation des candidats ("Intervilles" par exemple ou pire encore "N'oubliez pas votre brosse à dent"). De l'autre, celui de leur fils, Kevin qui leur tourne ostensiblement le dos et s'évade dans son monde imaginaire comme le fera quelques années plus tard Sam Lowry pour échapper à un monde cauchemardesque. A tout cela, il faut rajouter des leitmotivs visuels typiques de Terry GILLIAM comme celui des nains et des géants, celui du "bout du monde" ou encore l'intégration d'œuvres d'art (Joconde, masque d'Agamemnon).
Le résultat est un film intéressant mais mal maîtrisé. Il trahit en particulier les faiblesses de Terry GILLIAM au niveau narratif, l'aspect souvent décousu de ses intrigues (ce que la richesse et l'inventivité visuelle ne compense pas), la tendance à réduire les personnages à des caricatures ce qui confère trop souvent un aspect "carton-pâte" dénué de vie à l'ensemble. C'est d'ailleurs pourquoi ses meilleurs films sont toujours l'adaptation ou la réinvention d'une œuvre préexistante ("1984" pour "Brazil" (1985), un ensemble de récits du XVIII° siècle pour "Les Aventures du baron de Münchausen" (1988) un scénario écrit par Richard LaGRAVENESE pour "Fisher King" (1991), "La Jetée" (1963) de Chris MARKER pour "L Armée des douze singes" (1995), ou le roman éponyme de Hunter S. Thompson "Las Vegas Parano") (1998)
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