Hair
Milos Forman (1979)
"Hair" et son hymne "Let the Sunshine in" peut être considérée comme la première comédie musicale rock de l'histoire. Elle a été créée en 1967, en plein mouvement contestataire de la jeunesse contre la guerre du Vietnam. Une jeunesse qui rejette également les valeurs conservatrices des parents en adoptant le mode de vie hippie, son pacifisme (le flower power, l'attirance pour les religions orientales), sa liberté de mœurs (en matière sexuelle et de consommation de drogues), son rejet du productivisme, du puritanisme et de la société de consommation, son esthétique (par rejet des institutions militaires et bourgeoises corsetées, les hippies portaient des tenues décontractées et colorées, s'adonnaient au naturisme et filles comme garçons laissaient leurs cheveux pousser librement ce qui explique le titre de la comédie musicale "Hair"). "Hair" a décoiffé (et dénudé) Broadway tout comme tous les lieux par lesquels elle est passée ensuite, la troupe de comportant dans la salle comme sur scène et suscitant parfois des réactions de rejet comme à Paris en 1969 avec la tentative de l'Armée du Salut pour arrêter le spectacle.
Milos Forman conjugue donc dans son film réalisé dix ans plus tard l'esprit d'une époque avec ses thèmes de prédilection, ceux d'un cinéaste en révolte contre toutes les formes d'oppression institutionnelle. Sous sa direction, "Hair" se transforme en ballet tragi-comique autour d'une liberté ardemment recherchée mais dont l'accomplissement se paye d'un prix aussi amer que dans "Vol au-dessus d'un nid de coucou". Le système social que dépeint Milos Forman est en effet menacé par la subversion de ceux qui le défient. Dans "Hair", ils s'invitent dans la société bourgeoise pour y renverser la table et commencent à convertir à leur cause les jeunes pousses. Aussi, chez Forman, les deux camps se livrent une lutte à mort où le système ne laisse que deux possibilités à ceux qui le remettent en cause: rentrer dans le rang ou être écrasé. Berger (Treat Williams), le leader des hippies sacrifie ainsi sa vie sans le vouloir pour permettre à son ami Claude (John Savage) de recouvrer la liberté, un peu comme le faisait (symboliquement) Mc Murphy pour "Chef" dans "Vol au-dessus d'un nid de coucou". Toutes les séquences de happening filmées dans Central Park sont admirables dans leur composition, de même que celle où Berger secoue le cocotier d'un grand repas de cérémonie bourgeoise, tout comme la fin où l'hymne "Let The Sunshine in" prend une résonance poignante.
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