Kirikou et les hommes et les femmes
Michel Ocelot (2012)
Pour ce troisième opus de la saga Kirikou, les fans du petit héros de Michel OCELOT évolueront en terrain connu. "Kirikou et les hommes et les femmes" est un copié-collé de la structure de "Kirikou et les bêtes sauvages (2005). D'abord parce qu'il se situe lui aussi dans la temporalité de "Kirikou et la sorcière" (1998) avant la transformation de Karaba et ensuite parce qu'il s'agit encore d'un film à épisodes, les aventures de Kirikou étant toujours racontées par son grand-père. Autrement il s'agit là encore d'un film assez anecdotique plutôt destiné au très jeune public.
Du moins en surface car ces histoires sont moins lisses qu'elles n'en ont l'air. A travers ce film, Michel OCELOT répond aux pays qui ont censuré la trilogie à cause de la nudité des personnages. Ceux du Moyen-Orient mais également les pays anglo-saxons comme les USA ou le Royaume-Uni. Face à cette dictature du puritanisme religieux -qui quoique moins ostensiblement prégnante en France a toujours une emprise sur les mentalités bien plus forte que ce que l'on peut croire- Michel OCELOT dépeint un monde qui n'a pas connu la Genèse, un monde où la nudité est restée innocente tout comme ses corollaires, l'érotisme et la sensualité c'est à dire non associée au mal, au péché. Un monde proche de la nature où il est possible de vivre intensément les sensations dans son corps, aucun obstacle ne le coupant du reste de l'univers. Dans la première histoire, celle de la "Femme forte", une tempête balaye le village et les enfants qui vivent entièrement nus en profitent pour aller danser sous la pluie, les mères les contemplant avec envie. Il existe une scène similaire dans "Lady Chatterley" (2006) le film de Pascale FERRAN adapté de l'œuvre de D.H. Lawrence qui était justement une déclaration de guerre au puritanisme britannique. Histoire d'une libération et d'une reconnexion à la nature, on y voit les deux amants jouer nus sous la pluie c'est à dire retourner à l'état d'enfance, cette innocence primitive qui leur a été volée. Dans une autre histoire "Kirikou et le monstre bleu" qui narre la rencontre entre les enfants du village et un jeune touareg, derrière le choc des civilisations, c'est la question du relativisme culturel qui est abordée. Comme les héros sont noir africains et que l'on s'identifie à eux, Michel OCELOT peut déconstruire nos propres normes. Pour les enfants du village de Kirikou, la pâleur de la peau de Anigouran et ses vêtements sont associés à la maladie et ils ont peur de le toucher. Ils ne raisonnent que par rapport à leurs normes culturelles: nudité et couleur de peau foncée. A travers eux, Michel OCELOT nous tend un miroir: Seule l'ouverture d'esprit et des expériences hors de la communauté permettent de dépasser les préjugés comme le montrent Kirikou et sa mère.
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