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Take Shelter

Publié le par Rosalie210

Jeff Nichols (2011)

Take Shelter

A sa sortie, le film de Jeff NICHOLS avait été encensé mais je n'avais pas du tout accroché. Depuis, les critiques ont réévalué le réalisateur à la baisse alors qu'en revoyant son deuxième film j'ai réévalué mon opinion à la hausse tout en conservant de sérieuses réserves. La principale est que je ne parviens jamais à ressentir la moindre ambiguïté quant à la dimension où se déroule l'apocalypse décrite dans le film. Hormis la dernière scène (qui du coup me semble complètement artificielle), nous n'avons que le point de vue de Curtis LaForche (Michael SHANNON) qui nous est montré (de façon répétitive qui plus est!) se réveillant dans son lit après des cauchemars ou visions de plus en plus terrifiants. Par conséquent, l'interprétation qui l'emporte largement de mon point de vue est celle d'un dérèglement mental interne (lourdement) appuyé par ses visites aux psychologues et à sa mère diagnostiquée schizophrène paranoïde. La vision des éclairs zébrant le ciel que Curtis est seul à voir fait également penser aux fissures qui apparaissent dans les murs de "Répulsion (1965)" de Roman POLANSKI, film qui parlait également d'un personnage s'enfonçant peu à peu dans la folie. La désagrégation mentale du personnage se traduit par la perte de contrôle de sa vie: il s'endette, perd son travail, se débarrasse de son chien, tourne le dos à ses amis, met sa femme à distance. En revanche il adopte un comportement fusionnel avec sa fille sourde-muette (donc atteinte d'un handicap qui la coupe du monde, comme lui?)

Si je trouve cette lecture individualiste plutôt convaincante bien que non exempte de maladresses (d'autant que Michael SHANNON est excellent), je le suis moins dès qu'il s'agit de la relier au cosmos. Pour que la croyance en une apocalypse prenne, il aurait fallu décentrer le regard du personnage principal et montrer un microcosme globalement déréglé comme le fait Gus Van SANT dans "Elephant" (2003), film choral dépeignant les derniers instants d'une communauté avant sa désintégration ou Alfred HITCHCOCK dans "Les Oiseaux" (1962), film auquel on pense forcément lorsqu'on évoque le thème du jugement dernier. La scène où Curtis se la joue prophète de malheur dans la salle des fêtes tombe comme un cheveu sur la soupe étant donné que dans toutes les scènes qui précédaient, il semblait convaincu que le problème venait de lui même si cela affectait ses rapports aux autres et au monde. Et ces "autres" et ce "monde" sont trop peu développés pour que l'on y croie. Si bien qu'au bout d'un moment le film finit par sérieusement se déliter et nous repousser loin des personnages.

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