La course de Broadway Bill (Broadway Bill)
Frank Capra (1934)
J'ai passé un très agréable moment avec ce film de Frank CAPRA réputé mineur dans sa filmographie. C'est frais, léger, drôle, pétillant et la leçon de vie passe sans lourdeur. Le thème des courses de chevaux ne m'attire guère mais ce n'est finalement pas là qu'est l'essentiel. Comme dans "Vous ne l emporterez pas avec vous" (1938) réalisé quatre ans plus tard, Frank CAPRA interroge le sens de la vie dans une société pour qui l'argent est la valeur suprême. Soit un magnat, Higgins (Walter CONNOLLY) qui à force d'accumuler du capital a racheté une ville entière qui s'appelle bien entendu Higginsville. Il a quatre filles et trois gendres qu'il a mis en coupe réglée. Sa fille aînée Margaret (Helen VINSON) est mariée à Dan Brooks (Warner BAXTER), un passionné de courses hippiques qui préfère faire courir son pur-sang Broadway Bill que de s'occuper des affaires familiales. Lorsque Higgins enjoint à Brooks de se débarrasser de son cheval, celui-ci refuse et claque la porte, perdant sa position et son épouse au passage pour une hasardeuse vie de bohème. Mais une femme peut en cacher une autre: la seule fille célibataire d'Higgins, Alice (Myrna LOY) au caractère indépendant applaudit des deux mains son choix et décide de l'aider à gagner sa liberté. Mais le couple de déclassés se retrouve confronté à un milieu qui n'est pas tendre avec les sans-le-sou et les sans-grades: les galères s'accumulent et la course qui pourrait changer le destin de Dan Brooks est de plus en plus compromise.
C'était sans compter sur la chance et le destin. A l'aide d'une mécanique habile (et remarquablement mise en scène) fondée sur de fausses rumeurs et les manipulations de parieurs concurrents, Broadway Bill se retrouve projeté de lanterne rouge à outsider puis d'outsider à favori. La course elle-même est une métaphore de l'Amérique: Broadway Bill représente le self made man, les deux autres représentent la pègre et les nouveaux riches. Cependant le dénouement, inattendu est assez amer et vient contredire l'image d'indécrottable optimiste du cinéaste. Lequel peut être sans risque identifié à Dan Brooks, le milieu hippique étant un substitut de l'industrie du cinéma. Frank CAPRA affirme ainsi sa volonté d'indépendance face aux Higgins-producteurs tout-puissants. Il veut être reconnu comme un auteur, avoir le contrôle de ses films et montre qu'il est prêt à en payer le prix.
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