Noblesse Oblige (King Hearts and Coronets)
Robert Hamer (1949)
"Noblesse oblige" est la comédie la plus brillante des studios Ealing dont l'activité s'étendit sur une dizaine d'années entre la fin de la seconde guerre mondiale et le milieu des années cinquante. Il s'agit d'un jeu de massacre qui reprend la comptine des "6 petits nègres" (motif récurrent, on le retrouve implicitement dans "Tueurs de dames") et plusieurs codes du film noir. Le premier d'entre eux consiste à adopter le point de vue du serial-killer qui nous offre la confession de ses crimes peu avant son exécution. Le film est donc un long flashback ponctué par les remarques aussi flegmatiques que cyniques de ce narrateur qui est aussi le protagoniste principal de l'histoire. Le deuxième est de lui adjoindre en tant qu'âme sœur une garce blonde, vénale et manipulatrice. Décrit ainsi on se croirait dans "Assurance sur la mort" sauf que le bureau du détective, les chapeaux de feutre et les trench coat sont remplacés par d'élégants châteaux anglais où l'on peut s'entretuer élégamment entre aristocrates. Le film est une satire sociale qui fonctionne à plein régime et où tout le monde en prend pour son grade. Louis, le personnage principal (Dennis Price) est du moins en apparence un arriviste dont l'ascension sociale s'effectue au fur et à mesure qu'il élimine les obstacles qui le séparent de son titre de duc. Sibella (Joan Greenwood), son pendant féminin, cherche avant tout à faire un beau mariage. Quant à la famille d'Ascoyne, elle représente l'aristocratie dégénérée dans toute sa splendeur. Le fait que Alec Guiness joue les 8 rôles est une idée géniale. Cette octuple performance hautement comique n'est pas gratuite. Elle souligne de façon frappante la tare de l'endogamie qui est la reproduction du même. Louis a le tort de représenter l'altérité, le métissage, sa mère a fait une mésalliance avec un chanteur italien et a été reniée par la famille. Ses actes criminels ont pour réelle motivation le désir de vengeance des humiliations, du rejet et du mépris subis par lui et par sa mère. Cela fait de lui une sorte de Monte-Cristo qui en plus de détruire les d'Ascoyne ne s'épargne pas lui-même comme le montre la fin du film.
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