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Le Samouraï

Publié le par Rosalie210

Jean-Pierre Melville (1967)

Le Samouraï

Le "Samouraï", l'un des plus grands films de Melville et Delon est un pont jeté entre une ascendance américaine (celle des films noirs) et une descendance asiatique. On ne compte plus les cinéastes japonais, chinois ou coréens qui s'en sont inspirés, Alain Delon faisant même l'objet d'un culte à Hong-Kong. Parallèlement, le film a également eu un impact sur des cinéastes occidentaux comme Jim Jarmush ("Ghost Dog, la voie du Samouraï"), Nicolas Winding Refn (dont le personnage de "Drive" découle du "Samouraï"), Michael Mann ("Heat") ou Quentin Tarantino ("Reservoir Dogs").

"Le Samouraï" est effectivement un film fascinant, de sa première à sa dernière image. Il n'est pas seulement asiatique par son titre et son exergue (soi-disant tirée du Bushido). Melville a le sens de l'épure, filme le silence avec talent et met en avant un personnage hiératique qui s'efface derrière sa mission en vertu d'un code d'honneur (exactement comme Ishiguro dans son roman "Les Vestiges du jour" avec le personnage du majordorme Stevens adapté au cinéma par Ivory). Le générique de début est une leçon de mise en scène à lui tout seul de par son dépouillement. Le décor est minimaliste, la musique est absente, remplacée par les pépiements du bouvreuil et les bruits extérieurs. Tout concourt à nous introduire dans un monde ou le maître mot est l'économie. La parole se caractérise par sa rareté, le geste par sa précision et sa répétition. A la manière d'un rituel, Jef (Alain Delon) enfile sa panoplie de tueur à gages (trench coat, chapeau, gants blancs) comme s'il revêtait une seconde peau. Il en va de même pour les lieux, strictement circonscrits (l'appartement de Jef, le garage, le métro, le commissariat, le club de jazz, l'appartement et l'immeuble de Jane jouée par Nathalie Delon alors l'épouse d'Alain). Jef les arpente encore et encore à la manière d'un géomètre du crime. Alain Delon interprète avec beaucoup de talent (et de charisme) ce personnage de loup solitaire froid comme le serpent dont le masque d'impassibilité ne se fend qu'avec le personnage de la pianiste (jouée par Cathy Rosier). C'est lors de leurs échanges de regards (particulièrement à la fin du film) que l'on réalise tout ce que le personnage de Jef Costello a de tragique. Au sens premier du terme puisque le club de jazz où a lieu le dénouement possède une scénographie proche du théâtre.

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