Wonder Wheel
Woody Allen (2017)
Le titre et l'affiche ne mentent pas: c'est la circularité qui caractérise ce film.
D'abord parce qu'il recycle (avec brio toujours mais c'est quand même du recyclage) les thèmes, personnages et références du cinéaste. Ginny la flamboyante rousse interprétée par Kate Winslet est une lunatique dont l'humeur fait des tours de montagnes russes (celles de Coney Island qui sert de toile de fond au film). Et quand elle est en bas (ce qui est souvent le cas) on reconnaît en elle une nouvelle "Blue Jasmine" sortie de l'univers de Tennessee Williams. Le chef opérateur Vittorio Storaro joue beaucoup avec ces deux couleurs pour dépeindre les états d'âme successifs de son héroïne qui oscille entre d'un côté ses rêves de gloire évanouis et sa quête chimérique d'amour et de l'autre sa frustration liée à sa vie minable somatisée sous forme de maux de tête récurrents.
Ensuite parce que la circularité de "Wonder Wheel" est également liée à son caractère de tragédie familiale en huis-clos. Avec "Hamlet", "Œdipe" et "Winchester 73" pour références, on comprend que l'on va avoir droit à une histoire d'inceste et de meurtre en boucle. Pas étonnant que Ginny se sente oppressée par un sentiment de claustrophobie. Il est bien réel car c'est une vision noire de la famille qu'a Woody Allen (et qui fait couler tant d'encre depuis quelque temps). Et c'est du besoin irrépressible de s'évader de cette situation sans issue que naît le drame. L'infidélité de Ginny à son premier mari qui fait exploser sa famille et transforme son fils en pyromane. Puis son infidélité envers son deuxième mari pour un homme plus jeune et sa rivalité avec sa belle-fille qui est au cœur de l'intrigue. Kate Winslet est remarquable dans ce rôle ingrat d'épouse et de mère indigne qui s'autodétruit alors que les autres personnages peinent à exister.
Wonder Wheel malgré ses couleurs pimpantes est donc un film désespéré qui exprime la noire misanthropie de son auteur comme dans "Blue Jasmine", "L'homme irrationnel", "Crimes et Délits", "Match Point" ou "Le rêve de Cassandre".
Commenter cet article