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Le grand blond avec une chaussure noire

Publié le par Rosalie210

Yves Robert (1972)

Le grand blond avec une chaussure noire

Il y a quelque chose de glaçant derrière cette parodie des films d'espionnage. Ce n'est pas étonnant car les bonnes comédies (et celle-là, même avec ses imperfections l'est, sinon elle n'aurait pas imprimé les rétines et traversé le temps) ont toujours quelque chose de la "politesse du désespoir." Beaumarchais ne disait pas autre chose "Je me presse de rire de tout plutôt que d'être obligé d'en pleurer".

Ce grand blond étourdi, candide et lunaire, innocent en un mot (irremplaçable, unique Pierre RICHARD qui à lui seul porte un univers tout entier) est une proie de choix pour ce panier de crabes que sont les services secrets qui dans les années 70 -en plein contexte de Guerre froide- semblent former un "Etat dans l'Etat" dont l'éthique n'est pas la préoccupation première (euphémisme). Entre les mains de ces hommes de l'ombre, il devient à son insu une marionnette ce que souligne l'excellentissime générique, ses petits tours de passe-passe et sa petite musique ironique à la flûte de pan (à moins que ce ne soit du pipeau). Les méthodes des services secrets ont beau être tournées en dérision, elles sont effectivement "une horreur". Celles du colonel Toulouse en particulier (Jean Rochefort), grand manipulateur en chef sans scrupules qui échafaude le "piège à con" dans lequel il veut faire tomber son adjoint Milan (Bernard Blier) qui souhaite prendre sa place. Véritables animaux à sang froid, ils se livrent un duel à mort où la vie du pauvre François est prise en otage.

Mais parce que l'on est dans une comédie (qui plus est un peu surréaliste et décalée), le second de Toulouse, Perrache a davantage de scrupules que son patron car c'est lui qui s'est arrogé un pouvoir quasi divin en choisissant la victime et le fait qu'un innocent meure par sa faute tourmente sa conscience. Il y a l'ami de François, Maurice (Jean Carmet qui lui aussi habite sur une autre planète) qui devant une réalité qui dépasse la fiction "a des visions et entend des voix". Et puis il y a Christine bien sûr, alias Mireille Darc dont le visage d'ange blond se marie si bien avec celui de Pierre RICHARD. Parodiant les femmes fatales des films d'espionnage avec sa cultissime robe au décolleté ultra-plongeant, elle se retrouve entraînée dans l'univers loufoque et poétique du grand Blond (leur grande scène fait penser aussi bien aux screwball comédies de Hawks qu'à la "Party" d'Edwards) et ce pour ne plus en sortir. La boîte dans laquelle elle se dissimule ne fait-elle pas penser à un tour de magie de plus?

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