La Rose et la Flèche (Robin and Marian)
Richard Lester (1976)
C'est un film qui m'a marquée par son réalisme et sa dureté aux antipodes de la légende glorieuse entourant la figure de Robin des bois. Les années 70, contestataires, étaient propices à la démythification. Par delà la légende de Robin des bois c'est toute une image idéalisée du Moyen-Age qui vole en éclats.
-Tout d'abord l'un des thèmes principaux du film est le vieillissement, véritable tabou de nos sociétés jeunistes. La première image du film montre des pommes vertes. Il s'agit de Robin et Marianne jeunes, sujet central de la légende mais pas du film. Ces pommes deviennent mûres dès la deuxième image. 20 ans ont passés, Robin et Marianne ont vécu, vieillis, perdus leurs illusions et ce sont à ces personnages quadragénaires interprétés par des acteurs eux-mêmes vieillissants (Sean Connery et Audrey Hepburn) que s'intéresse le film. La dernière image reprend le même symbolisme mais cette fois les pommes sont pourries car Robin et Marianne sont parvenus à la fin de leur vie.
- Le rythme du film est conditionné par ces esprits fatigués et ces corps usés mais aussi par une volonté de réalisme quasi-documentaire refusant le spectaculaire. Les gestes de Robin sont lourds, lents, il a du mal à se lever et à manier les armes. Le combat contre le shérif de Nottingham (Robert Shaw) montre deux hommes vieux (pour l'époque) suer sang et eau pour soulever leurs épées et se mouvoir dans leurs armures.
- La société féodale que dépeint le film est obscurantiste et barbare. Les nobles sont des rustres qui dédaignent le shérif parce qu'il sait lire (ce qui était plus ou moins réservé au clergé). Le roi Jean (Ian Holm) persécute les catholiques. Son frère, Richard cœur de lion (joué par Richard Harris) est un orgueilleux despote mû par la cupidité et une cruauté sans limites. Les atrocités qu'il ordonne contre les femmes et d'enfants lors des croisades font penser à la Shoah mais sa violence est aussi sociale lorsqu'il traite Robin de "paysan" ne supportant pas qu'il s'oppose à lui. La révolte de Robin trouve ses racines dans l'injustice sociale qui place les nobles dans l'impunité alors que les pauvres sont châtiés pour un oui ou pour un non. La forêt de Sherwood est une contre-société libertaire utopique dont l'existence apparaît plus qu'hypothétique. Face au pot de fer, le pot de terre ne fait pas le poids.
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