Death Mills
Billy Wilder (1945)
Death Mills ("Les moulins de la mort" en VF) est le premier documentaire montrant ce que les alliés découvrirent lorsqu'ils libérèrent des camps de concentration et d'extermination en 1945. Il s'inscrit dans le cadre de la politique de dénazification menée par les USA dans l'Allemagne occupée. Il était destiné à être projeté aux allemands et aux autrichiens dans le but de leur ouvrir les yeux sur les crimes de leurs dirigeants. C'est pourquoi il fut tourné à l'origine avec une bande-son allemande et c'est pourquoi il insiste tant sur la notion de responsabilité collective. Il montre notamment comment les américains ont obligé les habitants des villes qui se trouvaient à proximité des camps à venir voir de leurs propres yeux les horreurs qui s'y trouvaient et à enterrer les cadavres de leurs propres mains.
Le manque de recul du documentaire (que l'on peut qualifier d'exemple "d'histoire immédiate") explique la large confusion qui y règne dans la qualification des crimes commis par les nazis. Les américains et leurs alliés ont principalement libéré des camps de concentration allemands (Dachau, Buchenwald, Bergen-Belsen etc.) Par conséquent la litanie des crimes égrenée par la voix off dans le documentaire témoigne de l'horreur concentrationnaire (privations de toutes sortes, exécutions, expériences médicales et autres tortures diverses) et non de la spécificité de la Shoah qui fut connue bien plus tard. En effet la Shoah se concentra dans 6 centres de mise à mort en Pologne dont 4 furent totalement rasés par les nazis en 1943. Les deux autres (Maidanek et Auschwitz) étaient mixtes c'est à dire qu'ils combinaient la concentration et l'extermination et ne furent que partiellement détruits. Ces deux camps furent libérés par les russes alors alliés des USA. Dans le documentaire, on voit surtout des images du camp de concentration d'Auschwitz I (les camps de concentration portaient l'inscription ironique "Arbeit macht frei") néanmoins et sans en mesurer le caractère spécifique, le documentaire évoque l'extermination des juifs à Birkenau (le pillage des biens des juifs, l'exploitation des corps, le gazage au Zyklon B qui contrairement à ce qu'il affirme n'était utilisé qu'à Birkenau, les fours crématoires).
Billy Wilder qui avait fui le nazisme et perdu une partie de sa famille à Auschwitz a réalisé ce film coup de poing entre Assurance sur la mort et Le Poison. Deux films aux titres assez évocateurs même si leur intrigue n'a rien à voir avec les crimes nazis. Le meilleur témoignage qu'il apportera sur l'après-guerre dans un film de fiction sera La Scandaleuse de Berlin en 1947.
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