Pedro ALMODOVAR avait déjà approché le genre du western par le biais de citations: "Johnny Guitar" (1954) dans "Femmes au bord de la crise de nerfs" (1988), "Duel au soleil" (1946) dans "Matador" (1986). Des choix logiques au vu de son univers coloré, mû par la loi du désir et les passions violentes. Mais c'est à un autre western que l'on pense en regardant "Strange way of life": "Le Secret de Brokeback Mountain" (2005) qui avait fait date en évoquant frontalement une romance gay entre deux cowboys contrariée par les normes sociales. Plus récemment, "The Power of the Dog" (2021), Jane CAMPION remettait ça en évoquant l'homosexualité refoulée et la virilité toxique. "Strange way of life" ressemble à un prolongement ou une variation du film de Ang LEE (Pedro ALMODOVAR avait d'ailleurs été pressenti pour le réaliser) mais avec les codes propres au western classique: étoile de shérif, pistolet, ranch, fusillade, nuages de poussière. Un univers viril bien mis en valeur pour être mieux détourné par la romance entre Jake le shérif et Silva, anciens amants qui se retrouvent 25 ans plus tard autour d'un différend concernant le fils de Silva. Un simple prétexte permettant d'aborder la vraie question du film "Mais que peuvent faire deux hommes seuls dans un ranch?" ^^. On retrouve la tonalité mélancolique voire testamentaire de l'un des derniers films d'Almodovar, "Douleur et gloire" (2019), le poids des ans se répercutant dans la fiction. Ethan HAWKE dans le rôle de Jake est particulièrement convaincant. En revanche la courte durée du film ne permet pas de donner de l'ampleur à l'histoire. On voit bien qu'il s'agit à la base d'une pièce de théâtre articulée autour du dialogue entre les deux personnages, le tout filmé comme un roman-photo. De plus, son aspect publicitaire est marqué avec des placements incessants de la marque Saint-Laurent qui produit le film. Il est donc dommage que Almodovar n'ait pas été pour une fois jusqu'au bout de son désir en réalisant son premier long-métrage en anglais.
"Un homme est passé" est le premier film de John STURGES que je vois grâce au Cinéma de minuit qui comme la plupart des émissions et sites dédiés au cinéma s'est mis à l'heure du festival de Cannes. En effet Spencer TRACY y avait reçu le prix d'interprétation pour le personnage de Macreedy.
John STURGES a la réputation d'être un cinéaste inégal, "Un homme est passé" est en tout cas à placer en haut du panier. C'est une petite merveille d'efficacité dramaturgique respectant les trois unités du théâtre classique. Le décor, celui d'un western à peine modernisé par les voitures souligne à quel point le voyageur qui s'arrête à Black Rock entre dans un univers vivant sous cloche, hors de l'espace-temps. D'ailleurs, cette impression se confirme dans le contraste entre le costume moderne et urbain de Macreedy et ceux des hommes du village, tous vêtus de tenues de cow-boy. De même, l'allure des bâtiments comme leur décoration semble ne pas avoir évolué depuis un siècle. Néanmoins la suite de l'histoire évoque moins le western que le thriller, Macreedy faisant penser à un privé par son allure et par son comportement (et à Groucha, le présentateur félin de "Téléchat" avec son bras plâtré dont les séquences au Milk bar ressemblaient à celles des films noirs). Macreedy est en effet manchot ce qui ajoute une dose de mystère à sa présence en un lieu qui manifeste ostensiblement son hostilité vis à vis des étrangers. Les différents spécimens humains qu'il croise sur sa route offrent en effet autant de variations sur les tares de la communauté vivant en autarcie sous la loi mafieuse des terreurs du coin, lesquelles sont incarnées par des acteurs habitués à ce type de rôle: Robert RYAN dans le rôle du "parrain" flanqué de deux grosses brutes incarnées par Lee MARVIN et Ernest BORGNINE. La scène où Macreedy corrige ce dernier après les multiples provocations et humiliations qu'il lui a infligées est un moment hautement jouissif. Mais si Macreedy, un vétéran de la seconde guerre mondiale a du sang-froid et de l'expérience, ce n'est pas un justicier ni un redresseur de torts, encore moins un homme invincible puisqu'il n'est pas armé et est handicapé. Il se rend juste à Black Rock pour solder une dette d'honneur et appuie sans le vouloir là où ça fait mal, déclenchant un engrenage fatal. Par-delà sa dénonciation du racisme, le film, tourné dans le contexte du maccarthysme (à la même époque que "Johnny Guitar" (1954) où jouait aussi Ernest BORGNINE) épingle la lâcheté collective et les lynchages, faisant penser par son intrigue à un "Jean de Florette" (1986) à la sauce américaine bien que la présence de Spencer TRACY ait des relents de "Furie" (1936). Heureusement, son personnage n'est pas tout à fait seul. Il peut compter sur le sidekick préféré du western alias Walter BRENNAN, quatre ans avant "Rio Bravo" (1959).
"Just Pals" ("Juste des potes") est le premier film de John FORD réalisé pour les studios Fox après avoir travaillé plusieurs années durant pour Universal. Par sa durée mais surtout par sa thématique, il fait penser à "Le Gosse" (1921) réalisé un an plus tard par Charlie CHAPLIN. Une version champêtre du kid reposant sur l'amitié qui se noue entre Bim (Buck JONES), le "bon à rien" du village et Bill (Georgie STONE), un jeune vagabond orphelin qu'il adopte par hasard. John FORD créé deux personnages attachants dont il met en avant les qualités morales face à une communauté villageoise remplie de préjugés et dont certains individus à l'apparence respectable dissimulent une âme de crapule, essentiellement par l'argent. C'est le cas des "Thénardier locaux" qui veulent arracher Bill des mains de Bim parce qu'ils le confondent avec un enfant kidnappé et recherché contre une grosse récompense par son père fortuné. C'est aussi le cas du soupirant de la jolie institutrice du village (Helen FERGUSON) dont Bim est également amoureux mais qui n'hésite pas à la compromettre en la persuadant de lui remettre la caisse de l'école. Après la découverte du forfait et du corps de l'institutrice qui a tenté de se noyer, tous les soupçons se portent sur Bim qui est également surpris au beau milieu du hold-up de la banque et compromis par les malfaiteurs. La promptitude avec laquelle les villageois lui mettent la corde au cou révèle à quel point cet intrus les dérange. Mais Bill qui a retrouvé à l'école les enfants des lyncheurs de Bim n'a pas l'intention de les laisser faire. Toutes ces intrigues qui relèvent de la chronique villageoise, du western, du mélo, du film d'action et d'aventures et de la comédie sont traitées de façon aussi limpides que trépidantes et en plus, on ressent beaucoup de tendresse pour ces déclassés inassimilables mais à l'âme intacte. Un petit régal.
Je n'ai pas aimé "Ave, César" qui m'a rappelé le film qui m'avais temporairement fâchée avec les frères Coen, "Le Grand saut" (1994). "Ave, César" a en commun avec ce dernier de rendre hommage au septième art. La forme en est toutefois différente. Au lieu de construire un film bourré de clins d'oeil à d'autres films, "Ave, César" qui adopte un ton plutôt satirique nous plonge au coeur des studios hollywoodiens des années cinquante. Alors certes, les reconstitutions de scènes de tournage des différents genre en vogue à l'époque sont belles (comédie musicale, western, péplum et chorégraphie aquatique à la Busby BERKELEY avec une Scarlett JOHANSSON dans le rôle d'une nouvelle Esther WILLIAMS) mais cela ne fait pas un film, tout au plus une suite de tableaux mal reliés entre eux. Le problème se situe au niveau des personnages, mal écrits à l'exception de Eddie Mannix (Josh BROLIN) qui est le fixeur des studios Capitole c'est à dire qu'il a pour mission d'étouffer dans l'oeuf tout potentiel scandale relatif aux stars employées par le studio avant qu'ils n'éclatent dans la presse spécialisée. Celle-ci est incarnée par deux soeurs jumelles concurrentes jouées par Tilda SWINTON, une habituée du dédoublement mais cette variante du "bonnet blanc et blanc bonnet" fait ici chou blanc tant les soeurs sont peu différenciées (le spectateur peu attentif peut croire que c'est la même personne). La narration se disperse en autant de sous-intrigues que de cas à régler par Mannix (lui-même étant sous exploité, puisque son rôle se résume à passer les plats) dont le manque d'intérêt est flagrant. Le pire est le personnage joué par George CLOONEY, un crétin (pour changer) qui est kidnappé par des communistes aux propos interminables et nébuleux: ennuyeux au possible! Quand on compare ce film à "Babylon" (2021) qui sur le fond en est assez proche, on mesure le gouffre qui les sépare.
"By Indian Post" est l'un des plus anciens films de John FORD (sous le nom de Jack FORD) qui nous soit parvenu, bien qu'amputé de quelques minutes. On estime en effet que seuls trois de ses cinquante premiers films ont survécu (à ce jour). Un western de jeunesse de deux bobines plutôt réjouissant mêlant action et humour dans une veine burlesque alors en vogue dans le cinéma muet. Une histoire d'amour contrariée entre un cow-boy et la fille de son patron qui ne voit pas d'un bon oeil cette union, une vie en communauté, un indien qui s'improvise courrier du coeur (d'où le titre) en dévalisant le dortoir des cow-boys au passage, une course-poursuite dynamique, une arrestation musclée et une fin à la mise en scène virtuose et acrobatique jouant sur différentes hauteurs, portes et fenêtres. C'est léger mais la patte du maître est déjà présente sur plusieurs séquences (la course-poursuite très enlevée et le final, brillant) et c'est l'occasion de découvrir un cinéaste à ses tout débuts: une rareté.
Je ne connaissais pas ce western de Anthony MANN qui est pourtant un maître du genre, en particulier pour son fabuleux quinté avec James STEWART. Si "Du Sang dans le désert" (titre français tapageur sans rapport avec le film destiné à accrocher le public, un procédé fréquent dans ces années-là) ne se hisse pas au même niveau et est l'un des plus méconnus de son auteur, cela reste de la belle ouvrage. On sent la présence du maître dans la précision de la mise en scène, de la première scène (l'arrivée assez sinistre de Hickman) à la dernière (son départ rempli d'espérance). Ce que l'on peut reprocher au film, c'est son scénario convenu, archi-classique, vu 100 fois dans d'autres films. Par exemple le récit d'apprentissage d'un jeunot inexpérimenté par un vieux briscard désabusé ou le surgissement sous les yeux émerveillé d'un enfant d'un justicier sorti de nulle part ("Shane" (1953) es-tu là?), ou encore la solitude du shérif chargé de faire respecter la loi face au chef de bande qui fédère derrière lui tout un village. Tout cela au détriment de sujets comme le racisme qui dans les années cinquante commençait à se frayer un chemin dans le western. La question est abordée par le biais de la relation filiale qui ne noue entre Hickman (Henry FONDA) et le jeune Kip qui vit avec sa mère à l'écart du village parce qu'elle est la veuve d'un indien ou encore à travers les deux frères hors-la-loi McGaffey (l'un d'entre eux étant joué par un Lee VAN CLEEF encore dans l'ombre) que leur métissage expose particulièrement au risque de lynchage. Cependant, la courte durée du film ne permet pas de véritablement approfondir la question. Mais le duo composé par Henry FONDA et Anthony PERKINS fonctionne vraiment bien, le premier prenant le second sous son aile et le second redonnant foi en l'humanité au premier.
A l'image de son indien fou mais terriblement perspicace (Serge REGGIANI dans un rôle de bonze étonnant), le film de Marco FERRERI tourné dans la foulée de "La Grande bouffe" (1973) avec la même équipe n'est pas aussi absurde qu'il en a l'air. Dans les années 70, époque du Nouvel Hollywood contestataire, l'heure est à la déconstruction des mythes et le genre du western ne fait pas exception à la règle. Terminée l'ère de la glorification raciste de la colonisation américaine porteuse de "civilisation" face aux méchants indiens vus comme des "sauvages". Le traumatisme de la guerre du Vietnam est passé par là et a renversé les rôles. Désormais les indiens sont dépeints comme des victimes de la sauvagerie des blancs dans des films dénonciateurs comme "Soldat bleu" (1970) ou "Little Big Man" (1970) ou bien la sauvagerie des uns et des autres est renvoyée dos à dos dans des films comme "Fureur apache" (1972). C'est donc dans ce contexte que Marco FERRERI décide de tourner une parodie de western dans un décor a priori improbable: le trou des Halles, l'ancien "ventre de Paris" dépeint par Zola qui était au début des années 70 un immense chantier de démolition cerné de tous côtés par les immeubles haussmanniens qui le surplombaient. Y tourner un western révisionniste dans lequel les héros d'hier sont tournés en dérision créé un télescopage entre deux réalités qui se répondent: la conquête de l'ouest au détriment des indiens d'un côté, les débuts de la gentrification au détriment des classes populaires parisiennes de l'autre (la notion de frontière y est la même). C'est avec un pincement au coeur que l'on assiste à la destruction d'un des pavillons Baltard dont on sait par quelles horreurs ils ont été remplacés. Marco Ferreri ne s'arrête d'ailleurs pas là avec des allusions à la guerre d'Algérie, au coup d'Etat au Chili etc. au point de paraître brouillon, surtout si on ne connaît pas bien les faits. Mais le ton du film n'est pas à la tristesse mais à la bouffonnerie avec de nombreux anachronismes et un aéropage d'acteurs français et italiens qui cabotinent à qui mieux mieux. La parodie se retrouve jusque dans la musique de Philippe SARDE qui tourne en dérision les trompettes de la cavalerie alors que la star de ce qui s'apparente à un grand cirque est Buffalo Bill joué par un Michel PICCOLI entouré d'une caravane digne du tour de France sponsorisée par Conforama (la capitalisme en prend aussi pour son grade, la bourse du commerce étant surnommée ironiquement "notre chapelle Sixtine"). Son grand rival, Custer devient un général d'opérette joué par un Marcello MASTROIANNI obsédé par son apparence (sa coiffure ridicule notamment) et son effet sur les dames de la bonne société est résumé par le personnage de ravissante idiote jouée par Catherine DENEUVE (les deux acteurs étaient alors en couple à la ville et jouait dans des films improbables comme "L Événement le plus important depuis que l homme a marché sur la Lune") (1973). Un film qui à l'époque connut un échec retentissant et que l'on peut trouver au choix aujourd'hui soit réjouissant, soit complètement raté.
Dans les années 80, je regardais à la TV la série "Nord et Sud" (1985) qui racontait l'histoire d'une amitié entre deux américains, l'un du Nord et l'autre du Sud qui s'étaient rencontrés à l'académie militaire de West Point mais par la suite s'étaient retrouvés dans des camps ennemis lors de la guerre de Sécession. "La Piste de Santa Fe" qui se déroule quelques années avant l'éclatement de la guerre civile américaine est également une histoire de camaraderie entre jeunes officiers formés à West Point, école montrée comme le creuset des USA lors de la cérémonie de remise des diplômes où les Etats dont sont originaires les jeunes officiers sont mentionnés. Cet aspect de propagande patriotique s'explique par le contexte du tournage alors que la seconde guerre mondiale avait débuté et que les USA étaient divisés sur le principe d'une intervention en Europe. Bien que la plupart des officiers mis en avant dans la film aient réellement existé et qu'ils se soient affrontés durant la guerre de Sécession (ce que prédit dans le film une vieille indienne, ne récoltant qu'une incrédulité hilare de la part des principaux concernés), le film met en avant une communauté de valeurs qui transcende les clivages. La cohésion du groupe est assurée par le combat contre "l'ennemi de l'Union", John Brown (Raymond MASSEY), un abolitionniste fanatique prêt à mettre les USA à feu et à sang pour sa cause, certes noble, mais qu'il dessert par les méthodes jusqu'au-boutistes qu'il emploie. Face à lui, Jeb Stuart le sudiste (joué par l'élégant Errol FLYNN dont c'était la onzième collaboration avec Michael CURTIZ, la plus connue étant "Les Aventures de Robin des Bois" (1937) où il est d'ailleurs déjà accompagné par Olivia de HAVILLAND qui sera sa partenaire à huit reprises) ne cesse de répéter que le Sud trouvera lui-même la solution à l'esclavage si on lui en laisse le temps (ce qui n'a pas été le cas). Il est secondé par un nordiste, George Custer joué par Ronald REAGAN, futur président des USA qui reste dans son ombre.
Même si l'aspect historique de ce western est fort intéressant, surtout au vu du contexte actuel où les clivages du passé refont surface, le plaidoyer en faveur de l'unité des USA semble une fois de plus bien embarrassé par la question afro-américaine. Certes, on est plus au temps de "Naissance d une nation" (1915) mais les quelques personnages noirs que l'on voit dans le film ont bien peu de temps d'écran et sont montrés comme les otages silencieux d'une querelle entre blancs. De même, comment ne pas sourire devant les nombreux cartons situant l'action à la frontière de la "civilisation" (la seule, l'unique!!), un terme qui rappelle au spectateur d'aujourd'hui que la conquête de l'ouest a été une forme de colonisation. Il est donc nécessaire de prendre du recul par rapport au discours du film. Par ailleurs, son réalisateur, Michael CURTIZ réussit de spectaculaires scènes d'action, bien secondé par Errol FLYNN: celle de la grange en flammes et celle de l'assaut final à Harper's Ferry sont dirigées de main de maître.
Le seul film de Quentin TARANTINO que je n'avais pas vu était "Les 8 Salopards". La raison? "Il y a des têtes qui explosent" m'avait-on dit et cela avait suffi à me bloquer. En réalité, la violence est tellement exagérée qu'elle en perd tout son côté horrifique (le terme "grand-guignol" convient parfaitement au film qui est en réalité très supportable) et "Les 8 Salopards" n'est au final pas plus violent que "Pulp Fiction" (1994). Mais celui auquel il ressemble le plus est sans conteste "Reservoir Dogs" (1992), le premier film de Tarantino, comme si celui-ci avait voulu revenir aux sources*, l'habillage western en plus (d'ailleurs Michael Madsen est présent dans les deux films). Car "Les 8 Salopards" a beau être un huis-clos façon panier de crabes dans lequel tout le monde finit par s'entretuer à la manière des polars d'Agatha Christie, l'habillage est quant à lui super classe. Il y a d'abord une atmosphère très particulière: le film commence dans les grands espaces mais ceux-ci sont brouillés par le blizzard qui oblige les hommes à se confiner d'abord dans une diligence puis dans la mercerie de Minnie où se déroule la majeure partie de l'intrigue. A cette photographie (bi)polaire vient s'ajouter la bande originale composée par Ennio MORRICONE qui lui valut sur le tard l'Oscar de la meilleure musique de film et qui donna enfin à Quentin TARANTINO l'occasion de travailler avec son compositeur de prédilection. Ensuite, si le film comporte des longueurs et est un poil trop bavard, il reste néanmoins assez jouissif grâce à une mise en scène maîtrisée qui lorgne ouvertement du côté de Alfred HITCHCOCK. Ainsi lorsque le Major Warren (Samuel L. JACKSON) pénètre dans la mercerie, il se focalise (et la caméra également) sur des indices (un bonbon orange coincé entre deux planches de parquet et un bocal de bonbons manquant sur l'étagère) qui permettront plus tard au spectateur d'anticiper les événements. Il en va de même avec une diligence garée près de la mercerie que l'on retrouvera plus tard, preuve que chaque détail a son importance et que le film des événements se reconstitue comme un puzzle dans lequel chaque pièce s'emboîte parfaitement avec les autres. Par delà l'aspect ouvertement ludique du film, c'est (une nouvelle fois) la question du racisme qui est au coeur de l'histoire et le film pourrait tout à fait s'appeler "la revanche du major Warren", sa principale antagoniste étant la tueuse manipulatrice Daisy Domergue (Jennifer JASON LEIGH de plus en plus tuméfiée et peinturlurée au cours du film, certains pensent que c'est un hommage à "Carrie au bal du diable" (1976), moi je pense que c'est surtout un moyen -très efficace au demeurant- de dissimuler son visage lifté).
* "Réservoir Dogs" et "Les 8 Salopards" ont tous deux pour modèle avoué par Quentin Tarantino le désormais classique film d'horreur de John CARPENTER, "The Thing" (1982) et pour mieux enfoncer le clou, son acteur fétiche, Kurt RUSSELL joue l'un des principaux rôles dans "Les 8 Salopards" sans parler du trait d'union effectué par Ennio MORRICONE compositeur de BO inoubliables pour les westerns de Sergio LEONE mais aussi du film de John CARPENTER.
Stan LAUREL eut une carrière artistique avant son duo avec Oliver HARDY, d'abord sur les planches (notamment en tant que doublure de Charles CHAPLIN) puis au cinéma dès 1917. "Un homme courageux" est l'un des 16 courts-métrages le mettant en vedette entre 1923 et 1925. Il avait à cette époque signé un contrat de 12 films pour le producteur Joe ROCK et travaillait également pour les studios de Hal Roach. "West of hot dog", réalisé par Percy PEMBROKE (une production Joe ROCK) transpose son personnage décalé et lunaire dans l'univers du western où il n'est évidemment pas à sa place. D'ailleurs pour bien marquer sa différence avec les brutes patibulaires qui le malmènent, il ajoute à son air ahuri une énorme paire de lorgnons. Le film, d'une durée de deux bobines enchaîne des gags allant du plus simple (les mains en l'air qui font tomber le pantalon) aux plus sophistiqués (la partie de cache-cache dans la maison qui transforme Laurel en héros alors que les bandits meurent les uns après les autres suite à une série de hasard et coïncidences parfaitement orchestrés). Entre les deux, une scène spectaculaire, celle de la lecture du testament où les brutes ne cessent de passer le pauvre Laurel par la fenêtre, le faisant tomber de plusieurs étages mais celui-ci revient aussitôt par la porte presque comme si de rien n'était. Une sacré prouesse!
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.