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Articles avec #toledano (eric) & nakache (olivier) tag

Nos jours heureux

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2006)

Nos jours heureux

Un des rares films du duo Eric TOLEDANO et Olivier NAKACHE que je n'avais pas encore vu, "Nos jours heureux" est la genèse de plusieurs de leurs films ultérieurs sur le vivre-ensemble. La gestion de la diversité par un ou plusieurs "chefs de troupe" quelque peu dépassés est en effet notamment le sujet de deux de leurs meilleurs films, "Le Sens de la fete" (2016) et "Hors Normes" (2019). "Nos jours heureux" bien que moins ambitieux les a fait connaître et est devenu leur premier film culte. Basé sur leur court-métrage "Ces jours heureux", il s'inspire également de leur expérience d'animateurs de colonies de vacances. Une situation que beaucoup de gens ont vécu et qui a donc une capacité de résonance universelle. Et ce d'autant mieux que le talent des deux réalisateurs pour filmer la diversité et l'universalité s'y exprime. Enfants et adultes sont confrontés aux mêmes problèmes (se séparer de la famille, trouver sa place et s'affirmer, faire des rencontres et séduire etc.) Alors certes, on est dans un feel good movie où "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil" et c'est incontestablement une limite par rapport à un film coup de poing comme "La Meilleure facon de marcher" (1976). Il n'y a pas non plus les nuances de tonalité à l'intérieur des scènes qui signent leurs métrages à partir de "Intouchables" (2011). Mais on suit avec plaisir Vincent, le directeur de colonie adulescent joué par Jean-Paul ROUVE et ses collègues pas plus matures que lui (et peu professionnels, un thème que l'on retrouve dans "Le Sens de la fete") (2016) ainsi que des jeunes bien écrits et très bien choisis. Et dans la scène la plus drôle du film où tout le monde se retrouve confronté aux inspecteurs sanitaires, soit à de "vrais" adultes, on a vite fait de choisir son camp!

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Une année difficile

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2023)

Une année difficile

J'attends toujours avec impatience les films du tandem Philippe TOLEDANO et Olivier NAKACHE dont j'ai beaucoup aimé également les deux saisons de la série "En Therapie" (2020). Je n'ai toutefois pas été complètement convaincue par "Une année difficile". Non que le film soit dépourvu de bonne idées. Elles ne manquent pas. En particulier l'idée de filmer au ralenti sur "La valse à mille temps" de Jacques BREL des gens se battant comme des chiens pour s'accaparer les produits en promotion lors du "Black Friday" donne un reflet peu reluisant de la société consumériste addict jusqu'au cou aux biens matériels. A l'image de l'hilarant personnage joué par Mathieu AMALRIC qui élabore toutes sortes de stratagèmes pour tenter d'entrer au casino où il est pourtant interdit de jeu. Néanmoins, assez rapidement le scénario bifurque vers une autre thématique, beaucoup plus sociale. Ainsi le personnage de Jonathan COHEN explique avoir sombré dans la spirale du surendettement pour "être à la hauteur" de son épouse, d'un milieu social plus élevé que lui. Comme un écho à sa situation, le travailleur précaire, SDF et surendetté joué par Pio MARMAI qui vit de combines tombe sous le charme d'une fille de très bonne famille (Noemie MERLANT) qui par esprit de rébellion a adopté les idéaux décroissants et vit dans un grand appartement bourgeois presque vide. Mieux encore, elle est la figure de proue d'un mouvement écologiste inspiré de "Extinction Rébellion" auquel les deux compères adhèrent surtout par opportunisme (du moins au début) et dont les membres se donnent des surnoms pour échapper aux assignations sociales. Le problème, outre que les personnages de Pio MARMAI et de Jonathan COHEN semblent trop légers et propres sur eux pour les rôles qu'ils sont censés incarner, est le manque de liant entre toutes les thématiques abordées. L'écologie (et son mal moderne, l'éco-anxiété) est traitée de façon superficielle et la fin est convenue. Rien de bien visionnaire donc dans cette confrontation entre "la fin du monde" et la "fin du mois". Un peu plus de hauteur de vue n'aurait pas fait de mal.

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En Thérapie, saison 2

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano, Olivier Nakache, Agnès Jaoui, Arnaud Desplechin, Emmanuelle Bercot, Emmanuel Finkiel (2022)

En Thérapie, saison 2

La deuxième saison de la série "En Thérapie" qui avait créé l'événement l'année dernière et que je viens de terminer en seulement cinq jours est une éclatante réussite. Elle est même supérieure à la première saison qui était déjà d'un niveau remarquable mais qui présentait quelques défauts qui ont disparu de cette nouvelle saison. Je pense en particulier à l'intérêt très inégal des différents patients que recevait le docteur Dayan. Le succès de la première saison a sans doute libéré le champ des possibilités d'enquête intérieure (car qu'est ce que l'analyse sinon une enquête sur soi afin que l'éclairage des zones d'ombre de sa personnalité et de son histoire vienne apaiser les souffrances, rendre compréhensible ses actes et son cheminement et ainsi permette de vivre plus en harmonie avec soi, les siens et le monde) car les scénaristes du tandem Philippe TOLEDANO et Olivier NAKACHE osent aller beaucoup plus loin et affronter le tabou de la mort ainsi que s'approcher au plus près de la véracité d'un travail analytique (actes et paroles manquées, interprétation des rêves etc.). L'intervention du psychiatre et psychanalyste Serge Hefez dans l'écriture du scénario se ressent. Exit donc les affaires de coeur et autres dissensions de couple qui polluaient la première saison à la manière d'une rengaine sentimentale un peu éculée. Le penchant du docteur Dayan (Frédéric PIERROT, extraordinaire dans sa capacité à exprimer par le moindre de ses regards, de ses expressions, par les postures de son corps tous les états d'âme de son personnage) à sortir de son rôle pour jouer les sauveurs et sa profonde culpabilité liée au fait de ne pas y parvenir sont ici profondément questionnés:

- Au travers des fantômes de la saison 1 (dont les événements sont situés cinq ans avant la saison 2 qui s'ouvre au sortir du premier confinement de l'ère covid) qui reviennent le hanter, la mort de Adel Chibane (Reda KATEB) s'étant muée en procédure judiciaire aboutissant sur un procès dans lequel intervient Esther (Carole BOUQUET), l'ancienne superviseuse de Philippe.
- Au travers de sa propre enfance et adolescence qu'il affronte avec l'aide d'une nouvelle superviseuse qui devient au fil du temps une égale et presque un miroir de lui-même, forte et fragile à la fois, remarquablement interprétée par Charlotte GAINSBOURG (qui avait déjà joué sous la direction de Philippe TOLEDANO et Olivier NAKACHE dans "Samba") (2014). Le titre de son livre est programmatique du sens de la série comme de ce qu'elle apporte à Dayan: "la psychanalyse réenchantée".
- Au travers de ses nouveaux patients qui sont tous à un titre ou à un autre en danger de mort (physique, symbolique, filiale ou sociale): l'avortement, le suicide, le cancer, le cyberharcèlement, la dénutrition poussent le docteur Dayan dans ses retranchements tandis que les acteurs qui les interprètent, tous brillants, offrent des compositions subtiles et complexes. On mesure une fois de plus le talent de Eric TOLEDANO et Olivier NAKACHE à faire travailler harmonieusement des gens d'horizons très différents voire opposés et à sortir le meilleur d'eux-mêmes que ce soit au niveau des différents réalisateurs des épisodes (Agnès JAOUI qui a également un petit rôle dans la série, Arnaud DESPLECHIN dont je me suis rappelé qu'il avait déjà abordé la psychanalyse dans "Jimmy P. (Psychothérapie d un Indien des Plaines)" (2013), Emmanuelle BERCOT, Emmanuel FINKIEL) ou bien au niveau des acteurs (Eye HAÏDARA qu'ils avaient d'ailleurs révélé dans "Le Sens de la fête" (2016), le jeune Aliocha Delmotte dont le rôle est autrement plus intéressant et touchant que celui de ses parents dans la saison 1, Suzanne LINDON, fille de qui affirme une présence forte bien à elle et enfin le grand Jacques WEBER que l'on est plus habitué à voir au théâtre et dont l'intensité des échanges, non-verbaux surtout avec Frédéric PIERROT atteint des sommets).

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En Thérapie

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2020)

En Thérapie

"En Thérapie", c'est la série-phénomène d'origine israélienne ("BeTipul") que la France, pas vraiment réputée pour sa réactivité aux événements qui la frappent a fini par adopter, après de nombreux autres pays en l'adaptant à son propre contexte. Radiographie d'un pays en crise après les attentats du 13 novembre 2015, la série de 35 épisodes de 20-30 minutes chacun dirigée par Eric TOLEDANO et Olivier NAKACHE qui mêle l'individuel et le collectif est fondée sur un dispositif très simple. On assiste à un condensé des entretiens hebdomadaires que mène Philippe Dayan, un psychanalyste (Frédéric PIERROT) avec cinq de ses patients qui défilent toujours à peu près dans le même ordre du lundi au jeudi dans son cabinet: Ariane (Mélanie THIERRY) une belle chirurgienne trentenaire complètement paumée, Adel, un agent de la BRI qui souffre de stress post-traumatique suite à son intervention au Bataclan (Reda KATEB), Camille (Céleste BRUNNQUELL), une adolescente qui a tenté de mettre fin à ses jours et enfin un couple en crise, Damien et Léonora (Pio MARMAÏ et Clémence POÉSY). Le cinquième jour, c'est Philippe qui se fait "contrôler" (entendez par là psychanalyser à son tour) par une confrère et amie qu'il n'a pas revue depuis 12 ans, Esther (Carole BOUQUET). Si les patients sont d'un intérêt inégal (la prestation la plus intense et riche revient à Reda KATEB dans le rôle de celui qui était initialement un pilote de chasse ayant abattu des civils alors que le couple de bobos est parfaitement insignifiant et tête à claques), c'est le portrait de Philippe qui s'avère le plus fascinant dans ses efforts de plus en plus désespérés pour dépasser son clivage. Opposant à ses patients parfois déstabilisants une maîtrise de soi, une patience et un professionnalisme (presque) à toutes épreuves (la fameuse "neutralité bienveillante" ponctuée de remarques destinées à établir des liens ou creuser des pistes), c'est au contraire un homme en pleine déroute que l'on voit s'épancher mais aussi ferrailler durement avec Esther, tantôt amie, tantôt ennemie, tantôt super surmoi (?). Cela va en effet beaucoup plus loin que la simple expression des affects refoulés. C'est à un véritable dynamitage en règle d'une personnalité que l'on assiste, tant sur le plan personnel que professionnel. Avec Ariane dans le rôle de l'allumeuse de mèche, véritable fil directeur qui court tout le long du générique de la série en suscitant une violente confrontation entre sensualité et déontologie. En cherchant à s'affranchir des règles pour satisfaire ses désirs, Philippe n'en questionne pas moins de façon pertinente les limites de la psychanalyse (et de toute forme d'institution, d'idéologie, de religion dans ce qui s'apparente à une crise de foi), Esther le renvoyant imperturbablement dans les cordes (sur le fil?) d'un monde sans boussole autre que celles des instincts. Instincts qui peuvent s'avérer contradictoires par ailleurs, un désir apparent pouvant en cacher un autre. Bref, cette dialectique passionnante parce que incarnée par des acteurs inspirés (Frédéric PIERROT s'avère remarquable en acteur de premier plan, c'est la première fois que j'ai remarqué qu'il avait quelque chose du regretté Bruno GANZ et Carole BOUQUET trouve là un de ses meilleurs rôles) tient autant en haleine qu'elle fait réfléchir.

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Je préfère qu'on reste amis...

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2005)

Je préfère qu'on reste amis...

"Je préfère qu'on reste amis..." est le premier long-métrage du duo formé par Eric TOLEDANO et Olivier NAKACHE. Il m'a paru manifeste que les deux hommes se cherchent, tant sur le plan thématique que sur le plan formel. Par conséquent le résultat est assez impersonnel et inabouti, sans rapport avec ce qu'ils feront par la suite. L'histoire n'a rien d'original et le tandem de contraires formé par le petit gris incapable de s'affirmer joué par Jean-Paul ROUVE et le séducteur combinard sur le retour joué par Gérard DEPARDIEU non plus. Outre que ce dernier commençait déjà à être trop vieux pour le rôle (on est loin de son abattage chez Bertrand BLIER ou chez Francis VEBER), son personnage est mal défini, les différentes pièces du puzzle qui le composent n'allant pas ensemble. Il en va de même avec l'intrigue, maladroitement menée et qui se disperse dans de nombreuses directions sans en approfondir une seule. On voit passer de très nombreux personnages, notamment féminins qui ne restent que quelques minutes à l'écran alors qu'il y aurait de quoi faire dix films avec! Si bien que celui-ci finit par ressembler à une juxtaposition de scénettes avortées sur les différents moyens modernes de rencontrer l'âme-soeur: agence matrimoniale, speed dating, écumage des bars et des cérémonies de mariage. La fin est la pire puisqu'alors qu'on croit que le film va enfin décoller pour aller quelque part, il se termine sur une voie sans issue encore plus frustrante que le reste. De plus à l'heure du numérique (et du Covid), tout cela paraît maintenant d'autant plus daté.

Le seul véritable intérêt que j'ai trouvé à ce film réside dans le fait qu'on y voit deux actrices de talent qui ont disparu depuis: Annie GIRARDOT qui est assez confuse (elle était déjà atteinte de la maladie d'Alzheimer ce qui est aussi le cas de son personnage mais elle n'est plus vraiment en état de jouer et cela fait de la peine de la voir ainsi) et Valérie BENGUIGUI qui s'est ensuite fait un nom avec "Le Prénom" (2011) peu de temps avant d'être emportée par un cancer. Toutes deux n'apparaissent cependant que le temps de quelques scènes, à l'image des autres personnages féminins du film.

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Samba

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2014)

Samba

Eric TOLEDANO et Olivier NAKACHE aiment mettre des coups de projecteur sur les passerelles qui font communiquer des mondes a priori étanches les uns aux autres mais qui partagent une expérience commune de l'exclusion.

"Samba", réalisé trois ans après "Intouchables" (2011) n'est pas aussi immédiatement séduisant mais ce qu'il perd en efficacité, il le gagne en subtilités et en nuances. Le plan séquence remarquable d'ouverture a une valeur programmatique. Il part d'une soirée mondaine pour nous entraîner ensuite jusqu'au coin le plus reculé des coulisses, c'est à dire à la plonge où officie Samba (Omar SY) un sénégalais en situation irrégulière vivant en France depuis dix ans grâce à de petits boulots et à l'aide de son oncle*. On ne peut mieux dire cinématographiquement à quel point la société française a besoin pour fonctionner de ces travailleurs de l'ombre auxquels elle n'accorde pourtant pas de place. C'est pourquoi Samba survit dans les interstices et doit toujours se cacher, fuir et mentir sur son identité à l'aide de "papiers d'emprunt" au point de ne plus savoir qui il est. Ce manque de repères est également moral. Samba n'est pas un modèle de droiture. Le personnage de Jonas (Issaka SAWADOGO) sert à révéler la part sombre de lui-même. Sa part lumineuse est incarnée quant à elle par le joyeux "Wilson" (Tahar RAHIM) qui a compris que pour mieux se faire accepter il valait mieux se faire passer pour brésilien plutôt qu'algérien (un appariement récurrent dans le cinéma français, dans "Le Nom des gens" (2010), l'héroïne passait son temps à répéter que son prénom Bahia n'était pas brésilien mais algérien).

Au cours de l'un de ses moments de galère, Samba rencontre Alice (Charlotte GAINSBOURG) au sein d'une association qui vient en aide aux sans-papiers. Elle ne s'appelle peut-être pas ainsi par hasard étant donné que Alice est quand même un prénom que l'on associe à la traversée du miroir (pas vraiment de pays des merveilles ici ^^). Alice dont l'apparence et le comportement trahissent son appartenance à la bourgeoisie est complètement incongrue dans cet endroit. Elle est même tellement perdue qu'elle fait tout de travers. En résumé, elle aussi a un gros problème de place et d'identité. Samba comprend tout de suite qu'il a affaire à quelqu'un de "spécial" c'est à dire qui sort de la norme. Au cours d'un échange intimiste en pleine nuit dans une station-service qui fait penser à une séquence similaire de "Intouchables" (2011) elle lui confie qu'elle est en congé maladie depuis qu'elle a agressé un collègue dans l'entreprise où elle travaillait en tant que DRH après des années sous tension et que depuis elle ne parvient plus à reprendre pied. Mise sur la touche, elle tente de reprendre le contrôle de sa vie à travers des activités très simples et très concrètes. Son personnage à fleur de peau semble rencontrer des problèmes dérisoires comparés à ceux de Samba mais il n'y a aucun problème dérisoire à partir du moment où ils vous rongent de l'intérieur. Le burn-out est une pathologie de nos sociétés modernes productivistes qui touche particulièrement ceux qui ont des postes à responsabilité. C'est ainsi qu'en mettant face à face les deux extrémités du spectre d'un monde du travail malade, les réalisateurs font ressortir les similitudes de Samba et d'Alice, en particulier leur solitude et leur mal-être que seul leur rapprochement peut soulager.

* On reconnaît la trame de leur film suivant, "Le Sens de la fête" (2016)

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Hors Normes

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2019)

Hors Normes

Avec Eric Toledano et Olivier Nakache, "Le silence des justes" (le nom réel de l'association prenant en charge les autistes) s'est transformé en "La voix des justes". Les Justes, ce sont des hommes et des femmes qui pendant la seconde guerre mondiale ont aidé des juifs persécutés par les nazis de façon désintéressée. Près de huit décennies plus tard, Toledano et Nakache se penchent sur quelques-unes de ces personnes qui font leur simple devoir d'être humain auprès des nouveaux parias de la société. Et ils le font sans misérabilisme, en adoptant le ton de la comédie mais sans rien cacher de la dureté des situations abordées. Leur film est engagé, militant et met le doigt sur ce qui fait mal. A savoir deux inspecteurs du ministère de la santé qui se réveillent 15 ans après pour enquêter sur un réseau parallèle englobant associations, médecins et parents agissant en marge de la légalité auprès d'enfants et d'adultes autistes complètement laissés pour compte. Mais tout en dressant un constat implacable des failles de notre société incapable d'intégrer ces personnes différentes, ne sachant qu'en faire et par conséquent les laissant croupir entre les 4 murs d'une chambre d'hôpital (alors qu'ils ne sont pas malades) ou chez leurs parents désemparés, le film est avant tout, comme dans "Intouchables" un récit qui dégage une formidable chaleur humaine et qui est axé sur des rencontres. Celle de Bruno (Vincent Cassel), le fondateur de "La voix des justes" et de Joseph, jeune autiste Asperger. D'un côté ce qui devait être à l'origine une association juive et que Bruno a transformé en auberge espagnole où se côtoie toute la diversité du monde unie par la problématique du handicap autistique. De l'autre ce jeune homme hyper doué pour réparer les machines à laver (mais que son comportement éloigne du marché du travail) et sa mère désemparée (formidable Hélène Vincent dont le monologue résume si bien la détresse des parents de jeunes autistes livrés à eux-mêmes). Bruno et Joseph, Bruno et Hélène qui ne sait le remercier qu'en lui confectionnant toujours le même gâteau à l'ananas. Bruno et Malik (Reda KATEB), le dirigeant de l'association "L'Escale" qui réinsère les jeunes des cités exclus du monde du travail en les plaçant auprès des jeunes autistes de "La voix des justes". Dylan (l'un de ces jeunes d'origine immigrée) et Valentin atteint d'un autisme sévère. Il porte un casque de boxeur pour l'empêcher de se faire mal quand il se tape la tête contre les murs. Et il se terre dans les recoins comme un animal terrifié. A ces jeunes, "La voix des justes" propose surtout de prendre l'air, eux qui ont passé l'essentiel de leur temps enfermé. Danser, caresser et monter des chevaux, faire des gâteaux, dormir ailleurs que chez eux ou à l'hôpital. Et pour Joseph, faire un trajet complet en RER sans paniquer, se faire embaucher dans une entreprise à l'essai (elle n'est visiblement pas prête à faire plus, faute d'information suffisante).

Le personnage clé du film, c'est Bruno. Tout tourne autour de lui. Bruno est ce juste du XXIe siècle qui tend la main à plus démuni que lui en faisant imploser sa propre communauté. De façon assez ironique, des rendez-vous arrangés lui sont proposés durant tout le film mais c'est de façon totalement imprévue et hors de tout cadre et de toute norme que s'esquisse un début de relation. Et contrairement à nombre de films où j'ai pu le voir, ce n'est pas l'arrogance qui émane de Vincent Cassel mais l'humanité un peu cassée de son père Jean-Pierre lorsqu'il donne une capsule de cyanure au mourant qui partage sa cellule dans "L'armée des ombres" afin d'abréger ses souffrances.

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Intouchables

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2011)

Intouchables

L'ouverture d"Intouchables" mériterait d'être enseignée dans les écoles de cinéma. Elle témoigne de l'art subtil du glissement de tons à l'intérieur d'une même scène dont sont capables Toledano et Nakache. On passe en effet en quelques minutes du drame au thriller puis à la franche comédie exactement comme on passe du piano de Ludovico Einaudi au funk de Earth, Wind & Fire.

Drame tout d'abord car les premières images du film reviendront à la fin, remises dans leur contexte. Et c'est bien à un moment de drame que l'on assiste. Philippe (François Cluzet) n'est pas encore remis de l'enfer qu'il a vécu après le départ de Driss, son visage est encore marqué par le poids d'une souffrance insondable. Au point qu'un peu plus tard en plein milieu d'une scène de comédie où Driss s'amuse à lui faire des moustaches de plus en plus improbables, il lui demande d'en finir. Un bref instant de désespoir entre deux accès de légèreté qui en dit long sur le calvaire vécu par le personnage. Quant à Driss, un délinquant déraciné qui a bien du mal à trouver sa place dans la société, il émerge d'une longue nuit cernée de problèmes et on est frappé par les scènes où il est filmé dans sa cité, d'un réalisme quasi documentaire.

Thriller ensuite car la course-poursuite entre Driss/Philippe et la police est une assez bonne métaphore d'une relation qui se construit en dehors de toutes les normes et de tous les cadres. La magie du film, c'est l'évidence, la fluidité des échanges entre deux hommes que tout oppose à priori mais qui en réalité sont embarqués sur le même bateau et se découvrent humainement extrêmement proches. On peut d'ailleurs souligner le talent des réalisateurs à faire jouer ensemble deux acteurs venus d'univers aussi différents que François Cluzet (que je n'aime pas d'habitude, trop froid, trop cassant, mais là il est comme éclairé de l'intérieur) et Omar Sy (dont le sourire est irrésistible).

Comédie enfin car tels deux sales gosses, Driss et Philippe jouent un bon tour à la police qui après les avoir pourchassés deviennent leur escorte quasi présidentielle. En résumé après avoir été Intouchables (au sens d'indésirables) ils deviennent intouchables (inatteignables, invincibles) et ce par la simple magie de leur alchimie et de leur humour.

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Le sens de la fête

Publié le par Rosalie210

Eric Toledano et Olivier Nakache (2017)

Le sens de la fête

Réaliser une bonne comédie n'est pas donné à tous, il faut élaborer ce qui s'apparente à une mécanique de précision pour conserver le bon tempo et faire en sorte que le soufflé ne retombe jamais pendant 2 heures. De plus une bonne comédie a toujours quelque chose de subversif en elle, sinon elle ne ferait pas vraiment rire. La comédie du duo Toledano-Nakache possède ces deux qualités.

Tout d'abord elle tire son énergie de l'art qu'ont les cinéastes chefs d'orchestre de jouer avec la gamme des acteurs du cinéma français dans toute sa diversité. Avoir choisi pour le rôle principal un patron de la comédie dans ce qu'elle a de meilleur est un coup de génie. En organisateur de festivités nuptiales, Jean-Pierre Bacri est en quelque sorte le "double" de cinéma du duo de réalisateurs. Il doit faire travailler ensemble et harmonieusement des personnalités que tout oppose exactement comme Toledo et Nakache doivent équilibrer la partition d'un Lellouche beau-beauf et d'un Macaigne bobo (je n'aime ni l'un ni l'autre mais dans ce film, le mélange de ces deux extrêmes est plutôt amusant). Entre les deux, il y en a pour tous les goûts. J'ai bien aimé le choc des générations entre le petit stagiaire de troisième geek et le photographe pique-assiette (Jean-Paul Rouve) dont le métier est has-been, le duo des plongeurs pakistanais et l'"extra" qui ne comprend les mots que dans leur sens littéral ce qui entraîne quelques gags sympas avec le vocabulaire de cuisine.

L'autre intérêt du film réside dans son point de vue. Le cinéma français, on feint de l'oublier est un art détenu majoritairement par des bourgeois. Les films de mariage sont l'une des expressions de cette culture bourgeoise. Tolenado et Nakache eux choisissent le point de vue des larbins, les petites et grandes mains qui s'affairent en coulisses. Et pour que l'on comprenne bien que les classes sociales (et la violence qui va avec) ça existe toujours, on les oblige à servir en livrée et perruque, comme au bon vieux temps de "Gosford Park", "Downton Abbey" et autres "Vestiges du jour" (le cinéma anglo-saxon contrairement au cinéma français regorge de châteaux, de maîtres et de serviteurs) . Bacri n'est qu'une sorte de super majordome traité avec un mépris insupportable par le marié, véritable tête à claques arrogante et suffisante. Heureusement les larbins investiront le champ des invités et finiront au premier plan alors que le marié, lors d'une des scènes les plus réussies du film finira dans les choux après s'être ridiculisé.

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