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Articles avec #thriller tag

Le Silence des agneaux (The Silence of the Lambs)

Publié le par Rosalie210

Jonathan Demme (1991)

Le Silence des agneaux (The Silence of the Lambs)

"Le silence des agneaux" n'est pas seulement le thriller psychanalytique et horrifique qui a renouvelé le genre dans les années 90 comme l'avait fait en son temps "Psychose" (1960). C'est un film très fort qui sort des sentiers battus et bénéficie d'un scénario*, d'une mise en scène et d'une interprétation hors-pair. La comparaison avec Alfred HITCHCOCK s'impose tant la mise en scène est précise et rigoureuse, nous faisant comprendre les intentions des protagonistes à travers les mouvements de caméra sur des objets-clés tels qu'un stylo, instrument d'une scène d'évasion spectaculaire et sanglante ou un papillon symbole de la métamorphose corporelle du criminel. En même temps cette mise en scène use d'un art consommé du trompe l'œil en nous égarant jusqu'au bout sur des fausses pistes.

"Le silence des agneaux" dépeint l'envers de l'Amérique hygiéniste, puritaine et bien-pensante. Tout y est glauque, poisseux, oppressant. A l'image du puit dans lequel le tueur enferme ses victimes, on a l'impression de plonger dans une fosse à purin d'autant que les perspectives sont bouchées (dans une suprême ironie, on voit un dessin représentant la ville de Florence, temple de l'art de la Renaissance fondé sur la ligne de fuite apposé contre un mur de cachot).

Mais si ce film a marqué autant les esprits, c'est surtout pour le face à face fascinant parce qu'ambivalent entre Clarice Sterling, la jeune agent du FBI jouée par Jodie FOSTER et le psychopathe cannibale Hannibal Lecter qui a été pour Anthony HOPKINS le rôle de la consécration internationale. Ces deux êtres semblent en effet liés malgré la vitre qui les sépare et les rôles sociaux qui les opposent. Tous deux sont paradoxaux et hors-normes. Clarice est farouche, déterminée et en même temps très vulnérable. Son statut de femme-flic indépendante cache un passé traumatique que Lecter, ancien psychiatre détecte tout de suite. D'autre part en se comportant de façon asexuée, elle se heurte à beaucoup d'agressivité de la part du monde d'hommes qui l'entoure. Certains l'infantilisent, d'autres la traite avec condescendance ou bien cherchent à assouvir leurs pulsions sexuelles. La mise en scène suggère, particulièrement à la fin dans la scène inoubliable où elle affronte le tueur dans le noir qu'elle est une proie (l'agneau) face au(x) loup(s) et qu'elle rejoue son passé. La victime qu'elle vient sauver est symboliquement une sorte de double d'elle-même. Hannibal Lecter qui est supérieurement intelligent est quant à lui un mélange détonant de suprême raffinement et de suprême bestialité. Avec ses yeux qui ne cillent jamais, il semble aspirer l'âme autant que la chair, sa nature de vampire ne faisant aucun doute (d'autant que ses sens sont particulièrement aiguisés). En même temps et paradoxalement, il se donne pour mission de guider Clarice dans sa quête (extérieure et intérieure) et de la venger des prédateurs qui l'entourent. Il n'est finalement guère surprenant que ce soit lui qui lui inspire au final le plus de respect (et réciproquement).

* Adapté du livre éponyme de Thomas Harris qui forme la deuxième partie d'une tétralogie consacrée à Hannibal Lecter. Les trois autres segments, "Hannibal" (2000), "Dragon Rouge (2002)" et "Hannibal Lecter : les origines du mal" (2006) ont été depuis adaptés au cinéma mais sans le génie qui caractérise le film de Jonathan DEMME.

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Les Chasses du comte Zaroff (The Most Dangerous Game)

Publié le par Rosalie210

Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel (1932)

Les Chasses du comte Zaroff (The Most Dangerous Game)

Voilà un film méconnu en réalité très connu puisqu'il a été repris, en tout ou en partie dans de multiples autres œuvres, entre remakes et source d'inspiration pour des classiques comme "Les Yeux sans visage" (1960) et "Délivrance" (1971) jusqu'aux jeux vidéos contemporains. Pour ma part, j'en ai découvert la trame toute petite sans le savoir avec le vingtième épisode de la série "Ulysse 31", "Le Magicien noir" (la série de Jean CHALOPIN et de Nina WOLMARK reprend énormément d'éléments de films de SF et fantastiques, de "Alien" et "2001" pour Shyrka à "L'invasion des profanateurs de sépulture" qui est la base du scénario du "Marais des doubles" en plus d'être une formidable réinterprétation SF de l'œuvre d'Homère).

"Les chasses du comte Zaroff" est l'œuvre jumelle de "King Kong" (1932) à ceci près que Merian C. COOPER se contente d'en être le producteur préférant se concentrer sur le tournage de "King Kong" (1932) que Ernest B. SCHOEDSACK rejoindra, une fois "Les chasses du comte Zaroff" terminé. C'est pourquoi les deux films partagent non seulement les mêmes décors, le même compositeur, une partie de l'équipe technique et de la distribution mais ils ont aussi la même philosophie, d'une actualité brûlante. Cet aristocrate russe dégénéré (pour ne pas dire psychopathe) qui pour tromper son ennui n'a pas trouvé mieux que de de piéger et de pourchasser ses congénères n'est pas seulement l'incarnation du fait que l'homme peut être un loup pour l'homme. Il illustre "l'inconsistance de la civilisation [occidentale]". Alors que "les animaux qui tuent pour assurer leur subsistance sont appelés sauvages" (ce que Isabelle Filiozat appelle l'agressivité biophile, au service de la vie), "l'homme qui tue pour le sport est qualifié de civilisé" (ce que la même auteure qualifie de destructivité qui est à l'origine des guerres et aujourd'hui du désastre écologique nourrissant les appétits des prédateurs de la finance et de leurs obligés politiques et médiatiques). Et Bob le chasseur de renchérir en précisant que "ce monde est divisé en deux catégories: les chasseurs et les chassés. Par chance je suis un chasseur, et rien ne pourra changer cela". Et pourtant, le simple fait de refuser de chasser le gibier préféré du comte Zaroff qui incarne cette "morale" jusque dans ses prolongements les plus extrêmes suffira à faire basculer Bob du côté des chassés dans une lutte pour la vie tout à fait annonciatrice de l'idéologie nazie (le film date de 1932 soit peu de temps avant l'arrivée de Hitler au pouvoir). Si le film est si marquant, c'est aussi qu'il frappe l'inconscient collectif avec des images (la jungle, les marais, le brouillard) qui ont la puissance d'un conte tel que "Barbe-Bleue" dont la découverte de la "chambre secrète" équivaut à un arrêt de mort ou "Le petit Poucet", sa forêt profonde et son ogre terrifiant (et tellement d'actualité avec ce français d'origine russe coupable d'innombrables crimes pédophiles sur plus de 40 années).

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Agent secret (Sabotage)

Publié le par Rosalie210

Alfred Hitchcock (1936)

Agent secret (Sabotage)

"Agent secret" (le titre en VO "Sabotage" est bien plus pertinent) fait partie de la période britannique de Alfred HITCHCOCK et a été tourné après "Les 39 marches" (1935) et "Quatre de l'espionnage" (1936). Mais contrairement à ces deux derniers films "Sabotage" est un drame austère d'une noirceur absolue. Si le principal point faible du film réside dans l'écriture bâclée des personnages et une interprétation dans l'ensemble peu convaincante, la mise en scène est déjà au sommet. En témoigne deux scènes restées dans les annales. D'une part celle où le jeune Steve transporte sans le savoir au cœur d'un Londres bondé une bombe dont nous savons à la minute près quand elle doit exploser et où en lui faisant subir divers contretemps (et en insérant sadiquement de nombreux plans d'horloge montrant l'heure qui tourne) Alfred HITCHCOCK joue avec nos nerfs. Cette scène a acquis par ailleurs au XXI° siècle un caractère prophétique: impossible de ne pas penser en voyant le bus exploser aux attentats de juillet 2005 qui avaient notamment soufflé l'étage supérieur d'un autobus à impériale à Tavistock Square et fait 56 morts (dont 14 parmi les passagers du bus)*. Et de l'autre celle de la scène d'explication à table entre Verloc (l'auteur de l'attentat) et son épouse (Sylvia SIDNEY) qui a découvert qu'il était responsable de la mort de son petit frère. La mise en scène (qui pallie le jeu terne des acteurs) suggère si habilement son envie de meurtre à elle et son envie de suicide à lui qu'il devient impossible de savoir qui a accompli le geste fatal. A la limite, ce qui est le plus expressif dans ce passage, c'est le couteau, ou plutôt la caméra qui l'anime. Si le personnage de Verloc (Oskar HOMOLKA) est assez opaque (en dehors de l'argent, on ne comprend pas vraiment ses motivations), celui de son épouse donne une idée assez déprimante de la condition de la femme, celle-ci apparaissant résignée et dépendante. Triste constat.

* Hitchcock pensait qu'il avait eu tort de faire mourir un enfant parce qu'il trouvait que c'était une manipulation détestable des sentiments des spectateurs (qui d'ailleurs ont rejeté le film à l'époque précisément pour cette raison). Mais cela contribue à donner à la scène son caractère réaliste dans lequel on peut reconnaître les sociétés d'aujourd'hui.

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Alien 3 (Alien³)

Publié le par Rosalie210

David Fincher (1992)

Alien 3 (Alien³)

Le chapitre millénariste et nihiliste de la saga Alien a le mérite de proposer quelque chose de différent des deux premiers volets même s'il se situe soigneusement dans leur continuité: les premières images reprennent celles de la fin du film de James CAMERON, la logique du sacrifice d'un groupe au profit d'intérêts militaires et géopolitiques est respectée ainsi que le climat claustrophobique du premier volet et c'est Pete POSTLETHWAITE qui reprend le cultissime "kitty, kitty" que Harry Dean STANTON prononçait dans le film de Ridley SCOTT. De plus le film file la métaphore de l'Alien comme une projection du "monstre qui est en nous" bien plus explicitement que ne le faisaient les deux premiers films. En se situant dans une prison composée de dangereux psychopathes mais aussi en faisant de Ripley (Sigourney WEAVER, de plus en plus androgyne) un être maudit. Maudit parce que condamné à errer sans fin dans l'espace, maudit parce que condamné à voir ses compagnons de route périr et elle seule survivre, maudit parce qu'ayant trop côtoyé l'Alien pour rester extérieure à lui, maudit parce que destiné à perpétuer son espèce. De ce point de vue David FINCHER est aux antipodes de James CAMERON. Alors que ce dernier dans le chaos ambiant s'évertuait à préserver l'humanité de ses personnages et à recréer un cocon familial (bref à rassurer, à redonner des repères), David FINCHER détruit tout le dispositif (au grand dam de Cameron d'ailleurs) pour faire au contraire de Ripley la mère du monstre, la "mauvaise" mère, celle-ci étant obligée de disparaître avec lui pour s'en débarrasser. Le même pessimisme est à l'œuvre d'ailleurs en ce qui concerne les robots androïdes. Alors que James CAMERON avait donné beaucoup d'humanité à Bishop, tendant à faire penser que son créateur était un homme de bien, David FINCHER en fait au contraire l'un des dirigeants qui souhaite s'emparer de l'alien pour en faire "l'arme ultime". Cette confrontation de points de vue est donc tout à fait intéressante car elle complète la réflexion de la saga sur l'altérité féminine vue comme un potentiel danger (ce n'est pas un hasard si de film en film Ripley se masculinise toujours plus) et surtout la maternité qui est un processus qui échappe encore largement au contrôle humain et qui est de ce fait le lieu de tous les fantasmes. Il n'en reste pas moins que la mise en scène est parfois redondante (la traque, fuite, capture du monstre ressemble à un jeu vidéo qui n'en finit pas), la photographie chromatique finchienne est très glauque et il faut supporter son goût pour l'organique (insectes et vers sur les cadavres, autopsie filmée de façon à voir l'intérieur du corps etc.). Si la mue de l'alien, né d'un animal et ayant pris son apparence est intéressante, les effets spéciaux apparaissent aujourd'hui un peu grossiers, l'incrustation de la créature dans l'image est notamment par trop visible.

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Aliens, le retour (Aliens)

Publié le par Rosalie210

James Cameron (1986)

Aliens, le retour (Aliens)

"Aliens, le retour" est une suite réussie de "Alien, le huitième passager" (1979). James CAMERON qui était alors au début de sa carrière établit des éléments de continuité avec le chef d'oeuvre de Ridley SCOTT tout en développant son style propre. Si l'on retrouve donc une grande quantité d'éléments faisant écho au premier film (personnages, objets, plans, éléments de mise en scène dont une dernière demi-heure de climax particulièrement prenante se terminant par l'explosion non d'un vaisseau mais d'une planète et l'expulsion de l'alien caché du vaisseau de secours), on a affaire ici à une version XXL spectaculaire remplie d'action et d'effets spéciaux qui fait plus penser à un film de guerre SF du type "Starship Troopers" (1997) qu'au huis-clos anxiogène intimiste du premier volet. Mais James CAMERON a un véritable talent pour jouer sur les échelles. Il ne perd jamais de vue son personnage principal et lui donne même une ampleur qu'il n'avait pas chez Ridley SCOTT. Avec James CAMERON, Ripley (Sigourney WEAVER) devient l'un de ces personnages féminins particulièrement forts qu'il affectionne. Et si le titre du film de Cameron est au pluriel (car de même que les protagonistes humains, le nombre d'aliens à combattre est démultiplié), Ripley se retrouve à livrer un duel avec la reine-mère des aliens et l'un des enjeux du film se focalise sur la maternité (il y a quelque chose de "L'origine du monde" jusque dans le titre). L'exploration de l'espace dans le premier film cède ici la place à sa colonisation avec le même cynisme des dirigeants consistant à envoyer au casse-pipe les citoyens ordinaires pour s'emparer de terres et de spécimens extra-terrestres afin on l'imagine de les transformer en machines de guerre à leur service. C'est contre cette monstruosité que s'insurge Ripley qui défend toujours l'humain contre les intérêts géopolitiques ou militaires. Dans le premier film, elle affrontait Ash, le robot androïde scientifique programmé par la compagnie pour ramener l'alien. Dans le deuxième, elle affronte son avatar, Burke (qui bien que fait de chair et de sang est bien moins humain que le robot androïde les accompagnant, Bishop. Cameron souligne à plusieurs reprises que les robots sont à l'image des humains qui les créent). C'est pourquoi le combat de Ripley contre la reine-mère alien peut se lire à plusieurs niveaux. Au premier degré, il s'agit de sauver Newt, la seule survivante de la colonie que Ripley adopte comme une fille de substitution (sa fille biologique étant décédée sans descendance au cours des 57 ans que Ripley a passé à dériver dans l'espace en hyper-sommeil entre le premier et le deuxième film). Au second, ce combat a pour enjeu l'avenir de l'humanité car si en tant que femme et mère, Ripley n'agit pas, sa destruction est programmée. Une vision des années 80 toujours aussi pertinente de nos jours.

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Autopsie d'un meurtre (Anatomy of a Murder)

Publié le par Rosalie210

Otto Preminger (1959)

Autopsie d'un meurtre (Anatomy of a Murder)

Ayant vu très jeune presque en même temps "Autopsie d'un meurtre" et "Douze hommes en colère" (1957) réalisé deux ans auparavant, j'avais fini comme beaucoup de gens par les mélanger et croire que c'était Henry FONDA qui défendait Ben GAZZARA contre James STEWART.

Revoir les deux films m'a permis de remettre les pendules à l'heure car si ce sont des films de procès remarquables par leur façon d'analyser le rôle du facteur humain dans la machine judiciaire, leur philosophie est assez différente. "Douze hommes en colère" (1957) est un grand film humaniste qui démontre de manière magistrale le poids de la subjectivité dans les prises de décision des jurés et les rappelle à leur devoir de responsabilité. "Autopsie d'un meurtre" joue sur les apparences et les comportements qui finissent par brouiller complètement les enjeux du procès. On oublie très vite la gravité des faits en se faisant embobiner par le numéro de l'avocat de la défense joué par James STEWART qui réussit à faire rire le public toutes les trois secondes et à transformer le coupable en victime d'un "crime passionnel" (une bonne excuse qui fonctionne toujours très bien en tant que circonstance atténuante). A l'inverse l'avocat général apparaît profondément antipathique, n'hésitant pas à user de méthodes douteuses comme le harcèlement ou la subordination de témoin. Pour corser les choses, l'accusé (Ben GAZZARA) et son épouse (Lee REMICK) sont tous deux des personnages troubles. Le lieutenant Manion est dépeint comme un tueur de sang-froid mais toujours pour la bonne cause: endiguer le communisme en Corée, venger sa femme (et surtout réparer son amour-propre) face au viol qu'elle a subi. Mais il apparaît clairement qu'il se montre violent avec elle. Laura quant à elle se comporte en allumeuse un peu provocante (elle fait des avances très claires à son avocat) tout en portant aux nues son mari qui la bat. Bref elle a tout de la femme complètement aliénée qui a bien du mal à rendre crédible le fait qu'elle a été victime d'un viol. Pourtant des détails irréfutables sont produits pendant le procès (c'était d'ailleurs la première fois qu'un film abordait frontalement le sujet).

A noter que si le film est essentiellement un huis-clos théâtral, il se permet des digressions en extérieur notamment au travers de la passion de l'avocat de la défense pour la pêche à la ligne et la musique de jazz. On le voit jouer aux côtés de Duke Ellington par ailleurs compositeur de la BO du film.

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The Woman Condemned

Publié le par Rosalie210

Dorothy Davenport (1934)

The Woman Condemned

Dorothy DAVENPORT (également connue sous son nom marital, Mrs. Wallace Reid) née en 1895 est issue du monde du théâtre. Elle a suivi la voie de ses parents et sa carrière a été précoce. Elle a fait ses débuts sur les planches dès l'âge de six ans et au cinéma dès l'âge de 15 ans en tant qu'actrice, notamment pour D.W. GRIFFITH. Elle en aurait tourné plus d'une centaine, surtout des courts-métrages pour les Studios Nestor (premier studio de cinéma hollywoodien, absorbé ensuite par Universal), dont une grande partie avec Wallace REID qui devint son époux en 1913. Mais blessé lors d'un tournage en 1919, Wallace REID tomba dans la dépendance à la morphine ce qui précipita sa mort en 1923. Devenue veuve, Dorothy DAVENPORT continua à porter son nom en sa mémoire. C'est également à cette période qu'elle commença à scénariser, produire et à réaliser des films, pour l'essentiel des productions à petit budget pour des studios indépendants. Elle continua une carrière de scénariste jusqu'au milieu des années 50.

"The Woman Condemned" ("La femme condamnée") est le dernier film qu'elle a réalisé en 1934. Il s'agit d'une curiosité, l'occasion de voir un film d'exploitation pré-code avec un point de vue féminin. Les personnages principaux de ce thriller de série B sont en effet des femmes et alors que les apparences en font des victimes, suscitant de façon très classique l'intervention de sauveurs-chevaliers servants, il s'avère qu'en réalité il pourrait bien s'agir d'une manipulation dont elles tirent elles-mêmes les ficelles. Cette originalité de point de vue mérite donc qu'on s'attarde sur ce film malgré ses défauts manifestes: scénario invraisemblable et confus, longueurs, jeu peu convaincant des acteurs.

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Signes (Signs)

Publié le par Rosalie210

M. Night Shyamalan (2002)

Signes (Signs)

Entre "Alien, le huitième passager" (1979) (pour les indices sonores et visuels d'une présence longtemps invisible ou furtive faisant monter l'angoisse) et "La Guerre des mondes" (2005)" (pour le thème de l'invasion extra-terrestre et l'histoire du père qui tente de protéger ses enfants), "Signes" bénéficie de la touche M. Night SHYAMALAN qui vient jeter le trouble dans une histoire qui possède plusieurs facettes. Comme dans ses films ultérieurs, "Le Village" (2004) et "La Jeune fille de l'eau" (2006), "Signes" raconte l'histoire d'une cellule (ici familiale) repliée sur elle-même à la suite d'un traumatisme et confrontée depuis à la peur de "l'étrange étranger" pour reprendre le titre du poème de Jacques Prévert. M. Night SHYAMALAN (qui aime bien comme l'un de ses réalisateurs favoris, Alfred HITCHCOCK faire des apparitions dans les films qu'il réalise) se réserve d'ailleurs un rôle très significatif dans le film. C'est (involontairement) par lui que le malheur a frappé la famille Hess, or il représente l'étranger d'origine indienne dans un monde WASP. Par conséquent les membres de la famille Hess sont prédisposés à ne voir dans les extra-terrestres que des ennemis. Ils sont prédisposés à la méfiance et à la peur. Et ce d'autant plus qu'ils avalent sans aucun recul les propos catastrophistes des médias. De façon très significative, lorsque l'alien apparaît enfin, c'est à travers le reflet d'un écran de télévision (les surcadrages abondent dans le film, symbolisant l'enfermement des personnages). Les flashbacks revenant sur la mort de Colleen (Patricia Kalember), l'épouse de Graham (Mel Gibson) sont là pour nous faire comprendre que celui-ci pense qu'il revit la même histoire avec ses enfants (les garants de l'avenir familial) pour enjeu. Morgan le fils aîné asthmatique achète un livre désignant les aliens comme des êtres hostiles et destructeurs. Les intentions qu'il leur prête sont des projections de celles des humains: explorer et coloniser. Et Bo, sa petite sœur est obsédée par l'eau contaminée. D'ailleurs le chien, reflet de ses maîtres en pisse de peur. C'est toujours leur point de vue qui nous est donné. C'est leur peur qui rend les aliens effrayants. Or à aucun moment du film, leur présence n'est montrée comme irréfutablement hostile. Tous les gestes de violence proviennent de Graham et de son frère Merill (Joaquin Phoenix). Et c'est cela qui est extrêmement troublant: prendre fait et cause pour deux personnages dont l'un coupe des doigts et l'autre flanque des coups de batte de baseball à un être humanoïde à l'apparence fragile (au vu de l'effet que provoque l'eau sur lui) et qui lâche un gaz sur Morgan évanoui que Graham interprète comme une tentative de meurtre mais qui pourrait tout aussi bien être ce qui l'a sauvé (c'est d'ailleurs la pensée qui m'est venue spontanément). La dernière image où on le voit devant le "miracle" reprendre sa défroque de pasteur qu'il avait lâchée au moment de la mort de sa femme pourrait donc bien être d'une ironie bien amère. Mais nous ne le saurons jamais puisque contrairement à Steven SPIELBERG dans "Rencontres du troisième type" (1977), il n'y a aucune tentative d'établir une quelconque communication avec les aliens ni même de déchiffrer leurs étranges signes. Dans un monde où règne la peur, cette espèce a le tort d'ouvrir des clairières dans les champs de maïs qui entourent la maison forteresse (comme la forêt d'épines du château de la Belle au bois dormant) et de finir par entrer dedans en dépit de toutes les barricades érigées par Graham et Merill pour se protéger du mal (incluant la ville comme dans "Le Village") (2004). Sauf que le mal n'est pas extérieur à eux, il est en eux.

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Suspense

Publié le par Rosalie210

Lois Weber et Phillips Smalley (1913)

Suspense

En 1913, Lois WEBER (la première réalisatrice américaine de l'histoire) et son mari Phillips SMALLEY réalisent le thriller parfait, modèle de tous ceux qui viendront par la suite. Ils se sont inspirés de films antérieurs (D.W. GRIFFITH a largement défriché le terrain) mais leur degré de maîtrise de la mise en scène et des effets techniques est impressionnante. Ceux-ci sont aussi sophistiqués que l'histoire est simple voire même primaire: une jeune femme seule avec son bébé dans une maison isolée (Lois WEBER elle-même) est confrontée à un visiteur indésirable (Sam KAUFMAN) qui cherche à s'introduire dans la maison. L'un des premiers plans vus depuis le trou de la serrure annonce bien le thème principal du film. La montée de la tension est admirablement orchestrée:

- D'abord par la mise en scène. Il y a par exemple une séquence où la jeune mère qui sent monter en elle une sourde inquiétude ferme les fenêtres du salon qui étaient ouvertes. Deux secondes plus tard, le rôdeur apparaît derrière les vitres, cherchant un moyen pour entrer. Autre moment remarquable, un plan fixe (type "Lumière") qui joue avec nos nerfs à partir du relief et de la profondeur de champ. Le mari (Val PAUL) qui est en effet parti secourir sa femme a "emprunté" une automobile et est pourchassé par son propriétaire (Douglas GERRARD) et la police. Il manque renverser un piéton et met un certain temps pour repartir. Evidemment le spectateur ne manque rien du spectacle qui se joue au premier plan mais aussi à l'arrière plan où les poursuivants se rapprochent dangereusement.

- Mais le film est surtout célèbre pour l'efficacité de son montage alterné et ses points de vue originaux (mais aucunement gratuits), certains obtenus par l'angle de prise de vue, d'autres par des trucages. Il y a d'abord un célèbre gros plan du visage du rôdeur vu en plongée depuis le premier étage de la maison. C'est le point de vue de la jeune femme qui le regarde avec terreur mais aussi du spectateur qui se demande s'il va trouver la clé sous le paillasson (le spectateur en connaît l'existence pour avoir vu la domestique l'y déposer au début du film avant de quitter la maison). Il y a à la fin du film un autre plan de ce type où on voit le rôdeur monter l'escalier puis se rapprocher de plus en plus de la caméra pour entrer dans la chambre où se terre la jeune femme ce qui le rend très menaçant. La façon dont il démolit la porte fait d'ailleurs penser à "Shining" (1980). Le split screen, utilisé à deux reprises permet de montrer simultanément trois événements: le coup de fil de la jeune femme à son mari, la réaction d'abord rassurée puis effarée de celui-ci et enfin le rôdeur en train de trouver la clé ou d'entrer dans la maison histoire de faire monter le mayonnaise. Le montage alterné en forme de course contre la montre se met ainsi en place tout naturellement. Et pour augmenter la dose d'adrénaline, on nous met deux petits plans sur le rétroviseur afin de montrer les poursuivants qui tentent d'arrêter la voiture conduite par le mari. C'est d'une efficacité diabolique.

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Alien, le huitième passager (Alien)

Publié le par Rosalie210

Ridley Scott (1979)

Alien, le huitième passager (Alien)
Alien, le huitième passager (Alien)


"Alien, le huitième passager" fait partie de ces films mythiques que j'ai vu sur le tard un peu à reculons tant mes nerfs supportent mal le genre horrifique. Mais il s'agit d'un grand film, à la mise en scène admirable de maîtrise (notamment par sa gestion du suspense dans la plupart des scènes, suscitant une montée progressive de l'angoisse) et à la thématique extrêmement riche. De ce fait, bien que réalisé en 1979, il a conservé intacte toute sa force de frappe.

Le premier long-métrage de Ridley SCOTT s'intitulait "Les Duellistes" (1977). Il s'agissait déjà d'une lutte pour la survie entre un "sage" et un "fou" en milieu hostile, tellement hostile d'ailleurs que le décor semblait déjà absorber les personnages, les fondre en lui. Pas étonnant qu'à l'opposé de l'intérieur du vaisseau de "2001, l'odyssée de l'espace" (1968) froid, net et clinique, celui du Nostromo soit sale, sombre, nébuleux et obstrué, comme l'intérieur d'un corps vivant. C'est Ridley SCOTT qui l'a rendu ainsi pour accentuer la sensation d'oppression et de claustrophobie caractéristique du film qu'il souligne également par de nombreux surcadrages notamment lorsqu'il filme les sas qui se referment comme les mâchoires d'un monstre sur les personnages. Car ce qui est au cœur "d'Alien", ce qui est aboli par ce dispositif, c'est la limite claire et nette entre l'humain et l'inhumain, la chair et l'acier, le "nous" et le "eux". Il y a bien sûr la nature même des animatroniques qui font leur apparition à la fin des années 70 et qui sont des robots recouverts de latex permettant de donner aux monstres une dimension charnelle et sensuelle, voire même humanoïde (ce qui préfigure la thématique principale de "Blade Runner") (1982). Il y a les peintures d'êtres biomécaniques du plasticien Hans Ruedi Giger qui a conçu le vaisseau alien du film et avec d'autres, l'alien lui-même, être sans visage, sans regard et donc sans âme à la forme hybride et mutante entre insecte, parasite et animal, entre amas de chairs molles et mâchoire d'acier. Il y a enfin le goût de Ridley SCOTT pour les univers brumeux qui estompent les contours et surtout son obsession de l'écoulement liquide qui s'infiltre partout. Dans "Alien", plus le film avance et plus on nage dans une ambiance moite et visqueuse (comme dans l'intérieur d'un corps humain, encore une fois). Les mâchoires de l'Alien sont en acier mais pleines de filaments de bave. Au fur et à mesure que l'étau se resserre, les corps se recouvrent de sueur. L'affrontement entre Ash (Ian HOLM) le fou et Ripley (Sigourney WEAVER) la sage est aussi un affrontement d'humeurs: le visage du premier se recouvre d'une substance blanchâtre épaisse qui trahit sa nature inhumaine alors que le sang sort de la narine de la seconde qui est 100% humaine. Le liquide semblable à de l'acide que contiennent les pinces de la créature (sous sa forme de "facehugger") est capable de percer toutes les coques du vaisseau et bien entendu elle s'avère également capable sous cette forme non seulement de se greffer sur le visage humain en le privant de son identité mais aussi de le pénétrer et de le féconder ce qui est à la racine du dégoût ou de la peur qu'inspirent certains invertébrés, les araignées et nombre d'insectes à la plupart des êtres humains. Ce sont en effet les nombreuses pattes et tentacules qui inquiètent de par leur capacité invasive. A l'inverse, le vaisseau est filmé comme un amas de boyaux qui digère les membres de son équipage un par un à la façon des "Dix petits nègres" de Agatha Christie (bien qu'ils ne soient que sept parmi lesquels on reconnaît aussi John HURT dans le rôle de Kane et Harry Dean STANTON dans celui de Brett). "Alien", influencé par le cinéma du nouvel Hollywood est de ce fait indissociable de son contexte, celui d'une Amérique traumatisée par la guerre du Vietnam qui lui a fait perdre son innocence en lui faisant réaliser que le mal n'était pas à l'extérieur d'elle mais en elle. Car "Alien" est aussi un film engagé, un film politique. Comme dans les "Les Sentiers de la gloire" (1957), le film met en scène (en hors champ) des décideurs cyniques face à des exécutants (cols blancs et cols bleus) qui ne savent pas qu'ils sont destinés à servir de chair à canon (du moins jusqu'à ce que Ripley le découvre). Comme pour "Blade Runner" (1982), Ridley SCOTT avait imaginé une fin radicalement pessimiste qu'il a dû "adoucir" mais qui a eu le mérite de proposer une alternative crédible à l'apocalypse: faire émerger une grande héroïne de SF, véritable icône féministe comme alternative à la civilisation techniciste machiste et faire accéder à la célébrité son interprète dont c'était le premier rôle majeur.

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