Ayant été déçue par "Les Minions" (2014) et par "Moi, moche et méchant 3" (2017), je n'avais aucune espèce d'attente pour celui-ci, ayant été le voir uniquement pour faire plaisir à mon cadet. Sans casser des briques, celui-ci est néanmoins meilleur que son prédécesseur et ce pour une raison très simple: il s'agit d'une préquelle là où "Les Minions" était un spin-off. La différence ne réside pas dans la chronologie, antérieure à "Moi, moche et méchant" dans les deux films mais dans l'équilibre entre les protagonistes. L'erreur fondamentale de "Les Minions" comme celle de "Solo: A Star Wars Story" (2018) était d'avoir transformé les adjuvants du héros (selon le schéma actanciel de Greimas) en héros sans adjuvants. Les minions, comme Han Solo sont les "sidekicks" de Gru et de Luke Skywalker et comme tout sidekick qui se respecte, ils sont chargés de faire rire (comme le fait Ron auprès de Harry Potter par exemple). Mis au centre des récits, ces personnages perdent tout intérêt car ils ne peuvent tenir la distance d'un long-métrage et a fortiori quand ils sont dénués de langage intelligible comme c'est le cas des minions. Dans ce deuxième opus, le schéma actanciel est beaucoup mieux respecté ce qui donne de l'efficacité au récit: Gru enfant est le héros/anti-héros, les minions sont à son service et une bande de (vrais) méchants joue le rôle d'opposant. Il y a même un adjuvant-mentor en la personne du vieux Will Karnage, un ex super-vilain lâché par la bande que rêve d'intégrer Gru. Les autres personnages de la saga (la mère de Gru, le professeur Nefario) sont présents mais font de la figuration. Le contexte seventies bien mis en valeur dans les costumes, les coiffures et la musique donne un petit cachet au film ainsi que quelques références cinématographiques disséminées ici et là, de "King Kong" (1931) à "Le Jeu de la Mort" (1978). Rien de transcendant mais au moins on passe un moment agréable.
"Cherche scénario désespérément" voilà le vrai titre de "Moi moche et méchant 3". En manque visible d'inspiration, le studio Illumination nous a pondu un film composé de petites histoires sans véritable lien entre elles. Gru retrouve un frère jumeau parachuté gratuitement dans l'histoire ce qui a pour effet de remiser la pauvre Lucy au placard. Ce qui est injuste car ce frère a l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarette et n'est qu'un prétexte à quelques scènes d'action spectaculaires. Pauvre Lucy dont on se demande s'il n'aurait pas mieux valu qu'elle reste célibataire, au moins elle n'aurait pas perdu son travail. Quant à sa relation avec les filles, elle est d'autant plus convenue et bâclée qu'elle est redondante avec le premier film. Les filles ont été mises de côté dès le deuxième film mais le troisième bat leur record d'inutilité. Margo se fait de nouveau draguer, Edith a deux secondes d'antenne et trois phrases et la recherche d'une vraie licorne par Agnès sert surtout à surexposer sa bouille craquante. Enfin les mignons continuent à faire bande à part pour des séquences gag à l'humour particulièrement réchauffé. Le méchant est certes plus fun et décalé que celui du 2 mais il accentue le côté clipesque de ce film qui manque sérieusement de rythme. Cependant le studio n'est pas près de lâcher le filon. Le film se termine de façon ouverte ce qui annonce une suite.
Moi moche et méchant 2 est aussi plaisant à regarder que le 1. On y retrouve le rythme enlevé, les couleurs chatoyantes, les gags des irrésistibles minions accro à leurs "bananas" ainsi que la musique de Pharrell Williams avec notamment son méga hit "Happy".
En revanche pour l'originalité du scénario, on repassera. Il n'offre aucune surprise et pioche dans la même gamelle que "Cars 2" à savoir une intrigue d'espionnage pleine de gadgets à la James Bond (qui n'en demandait pas tant). Les nouveaux personnages déçoivent, en particulier le méchant, très fade en dépit de la sauce mexicaine à laquelle on veut nous le faire manger (de ce point de vue le 3 qui renoue avec le personnage décalé sera meilleur). Quant aux anciens personnages, s'ils sont toujours aussi attachants, ils sont exploités de façon très conventionnelle. Gru en particulier s'est tellement rangé des voitures qu'il a perdu presque tout son mordant. Il y a quand même quelques moments drôles où on retrouve son caractère mal embouché, notamment lorsqu'il est en proie à une déception sentimentale ou lorsqu'il doit se déclarer au téléphone. La satire des sites de rencontre, rendez vous arrangés, jeunes play-boy à mèche et autres entremetteuses est assez réjouissante. Mais la fin en forme d'autopromotion pour le spin-off des "Minions" n'est pas du meilleur goût (à l'image des gelées que fabrique l'usine de Gru).
Pour se démarquer de ses concurrents (Disney-Pixar, la Fox, Dreamworks), Illumination entertainment, filiale d'Universal a décidé de choisir un "Détestable moi" ("Despicable me" en VO) pour héros. Gru est un méchant de la vieille école, socialement et écologiquement incorrect. Il pollue avec son véhicule mastodonte, chasse la faune protégée pour peupler sa maison de trophées, pistogèle les clients pour ne pas faire la queue, emboutit leurs voitures pour se garer, menace de tuer le chien de son voisin qui a fait ses besoins sur ses plate-bandes et fait tourner en bourrique un petit garçon innocent. Il doit cependant lutter pour ne pas se faire complètement ringardiser par le jeune Vector, un méchant 2.0 qui est en quelque sorte la caricature du geek. Un surdoué en informatique entouré de gadgets high-tech qui passe son temps vautré sur le canapé en train de grignoter d'où une bedaine peu glorieuse qui accompagne une coupe au bol et de grosses lunettes du meilleur effet!
Cette caractérisation originale des méchants est le meilleur aspect du film avec les gags potaches des inénarrables minions qu'on ne présente plus. Avec leur 2 ans d'âge mental et leur sabir incompréhensible, on ne peut que s'attendrir lorsqu'ils offrent une "papuche" alors que les plus jeunes s'esclafferont à les voir se photocopier les fesses. Les plus rationnels pourront s'interroger sur le sens à donner à leur présence. Minion signifie en VO larbin (et non adorable) et en effet ils occupent tour à tour le rôle de domestique, soldat, cobaye, ouvrier le tout dans la joie et la bonne humeur puisqu'ils ne peuvent vivre sans maître comme le dévoilera le spin-off. On est pas loin des slogans racistes et paternalistes du genre "battu et content" avec le hit de Pharrell Williams en prime dans le 2.
Enfin je ne suis pas du tout fan de l'histoire des orphelines, trop convenue. Même si la petite Agnès est très attachante ("J'aime les licornes, beaucoup, beaucoup") et qu'il y a de belles scènes de tendresse avec Gru il est dommage que l'aspect sentimental prenne autant de place, spectacle familial oblige. On sent déjà dans ce premier volet la contradiction entre la volonté de se démarquer avec un aspect grinçant et satirique et celle de plaire à tous en rentrant dans le rang. Le deuxième film accentuera encore plus l'aspect papa-gâteau de Gru et se chargera de parachever sa métamorphose en lui trouvant une épouse, anéantissant partiellement ce que le premier film pouvait encore avoir de réjouissant et d'original.
Un film d'animation du studio Illumination (Moi Moche et Méchant 1 et 2, Les Minions, Comme des bêtes) divertissant qui fait penser irrésistiblement au télé-crochet de la nouvelle star en version animale, plus précisément à l'étape du théâtre. Si Buster Moon le directeur du théâtre aux abois est un personnage assez stéréotypé et la fin du film, convenue et par moments tire-larmes (on aurait pu largement se passer de la réconciliation père-fils), la galerie des personnages sélectionnés tient la route. Ils ne sont que 5 ce qui permet de dresser un portrait efficace de chacun d'eux et de leur associer un style différent de musique (rock, pop, variété, disco, jazz). Leur seul point commun est d'être empêtré dans une situation personnelle qui constitue un obstacle à la réalisation de leur rêve. L'inventivité qu'ils déploient pour contourner ces obstacles fait sourire plus d'une fois. D'ailleurs nombre de ces obstacles sont liés au patriarcat. On pense à la mère de famille qui croule sous ses marmots et ses tâches ménagères avec un mari qui se laisse porter, à l'ado punk qui ne peut pas s'exprimer sans déclencher la jalousie de son petit ami (qui finit par la plaquer et la remplacer par un clone plus obéissant), au fils de délinquant à la voix d'or qui cultive son jardin secret dans le dos de sa famille, à la souris crooneuse, machiste, imbue d'elle-même et bling-bling qui coupe l'herbe sous le pied de l'éléphante timide... Si on rajoute un large panel de chansons ultra-connues appartenant à plusieurs époques (de Sinatra et Billie Holliday à Elton John en passant par Wham, Queen, Lady Gaga, Katy Perry, Taylor Swift...) un graphisme agréable et un bon sens du rythme, on passe un bon moment.
Le dernier né d'Illumination la filiale animation d'Universal n'est ni original ni bien maîtrisé. Il lorgne trop du côté du Toy Story des studios Pixar en substituant des animaux aux jouets. Mais surtout il multiplie les personnages et les références sans les approfondir. D'où une impression de superficialité et de remplissage qui ne dissimule pas la vacuité du scénario. C'est dommage car le design est agréable, certains gags sont bien trouvés, il y a du rythme mais des personnages incohérents et un gros manque de sens. Bref c'est un film bâclé en dépit d'un inéniable savoir-faire. A noter la présence en première partie d'un court métrage des minions certes niveau pipi-caca mais bien plus drôle que le film sorti l'année dernière.
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.