Le Crime était presque parfait (Dial M for murder)
Alfred Hitchcock (1954)
En revoyant "Le Crime était presque parfait", j'ai été frappée par ses similitudes avec "La Corde" (1948) encore plus nombreuses qu'avec son film suivant, "Fenêtre sur cour" (1954). Outre le fait que "Le Crime était presque parfait" qui est adapté d'une pièce de théâtre se déroule presque totalement à huis-clos c'est le cynisme du personnage principal, Tony Wendice (Ray MILLAND) qui m'a fait penser à "La Corde" (1948). Même si les motivations de Tony sont crapuleuses, dans les deux cas, le criminel prend la place du cinéaste: il scénarise et met en scène le crime avec audace, ingéniosité et sang-froid en improvisant au besoin. Ainsi Tony n'est pas déstabilisé par la tournure imprévue des événements (l'homme qu'il a payé pour tuer sa femme et qui est finalement tué par elle). Au contraire il rebondit, tel un acteur devant improviser sur une scène pour semer ou dissimuler des indices sur et autour du cadavre destinés à faire accuser sa femme de crime avec préméditation afin qu'elle soit condamnée à mort. Néanmoins Tony n'est pas omniscient et c'est le petit détail qui lui échappe qui causera sa perte grâce à un inspecteur particulièrement perspicace qui lui aussi est un pro de la mise en scène à chausse-trappe. C'est au moment où il effectue sa fausse sortie que j'ai réalisé tout ce que la série "Colombo" lui devait. Enfin, "Le Crime était presque parfait" partage avec "La Corde" et son simili plan-séquence unique un caractère expérimental. "Le Crime était presque parfait" avait en effet bénéficié à sa sortie d'une technique avant-gardiste: la 3D! (qui comme le son ou la couleur existait bien avant son exploitation à grande échelle). Mais trop peu de cinéma étaient équipés ce qui n'a pas permis à la majorité du public d'apprécier le rendu sur les objets importants de l'histoire tels que les ciseaux et la clé.
D'autre part "Le Crime était presque parfait" est resté célèbre parce qu'il est le premier des trois films de Hitchcock tournés avec Grace KELLY qui incarne à la perfection la blonde hitchcockienne faussement froide fantasmée par le cinéaste. La scène des ciseaux est devenue iconique et le plan de la main ouverte est repris quasiment à l'identique dans "Psychose" (1960) sauf qu'au lieu de se refermer sur une arme castratrice lui permettant de se défendre (d'un mari qui ne supporte pas sa richesse et sa liberté de moeurs), elle étreint son futur linceul.