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Les Belles Années de miss Brodie (The Prime of Miss Jean Brodie)

Publié le par Rosalie210

Ronald Neame (1969)

Les Belles Années de miss Brodie (The Prime of Miss Jean Brodie)

Film méconnu en France, "Les belles années de Miss Brodie" est un film de la fin des années 60 adapté d'un roman de Muriel Spark publié en 1961. Il a souvent été rapproché du "Le Cercle des poètes disparus" (1989) et de "La Vague" (2008) en raison du fait qu'il s'interroge sur les dérives fascistoïdes de la relation entre un professeur et ses élèves. Il y a cependant deux différences notables avec les films pré cités: le professeur est une femme et le contexte est celui du début des années 30, donc il coïncide avec la montée du fascisme en Europe. Si la réalisation fait un peu trop théâtre filmé, la finesse d'écriture du scénario et la qualité de l'interprétation, dominée par une Maggie SMITH magistrale (elle a d'ailleurs reçu un oscar pour le rôle si complexe et délicat de Jean Brodie) méritent amplement le détour.

L'histoire se déroule à Edinbourgh dans une école huppée de jeunes filles, Marcia Blaine où une professeure anticonformiste, Jean Brodie suscite l'émoi, tant au sein du personnel que parmi les élèves. Son objectif, aider ses élèves à s'élever et s'épanouir, est louable mais ses méthodes pour y parvenir le sont beaucoup moins. Miss Brodie a en effet un ego surdimensionné. Le simple fait de se positionner en chantre de l'antisystème est problématique en soi mais très rapidement, Miss Brodie s'avère manipulatrice avec ses élèves, jouant sur la corde émotionnelle en leur racontant les détails malheureux de sa vie amoureuse pour illustrer la première guerre mondiale et surtout en sélectionnant un petit club de quatre jeunes filles qui répondent à ses attentes narcissiques et qu'elle souhaite façonner à son image. Elle les surnomme d'ailleurs les "Brodie girls" ou bien "la crème de la crème" puisque ces jeunes filles jugées supérieures reçoivent des privilèges tels que des pique-niques ou des invitations à boire le thé avec elle. On voit donc rapidement se dessiner toutes les dérives qu'une telle attitude de la part d'une personne charismatique faisant autorité peut engendrer. Outre le caractère discriminatoire du principe du "petit club fermé" formé de manière arbitraire, son existence donne des pouvoirs exhorbitants à celui qui l'a créé puisqu'il a un contrôle absolu sur ses membres là où tout le corps professoral ainsi que la direction se partagent l'autorité dans le reste de l'établissement*. Bien avant que Miss Brodie ne révèle dans la deuxième partie du film son admiration pour Mussolini et Franco (dont elle a par ailleurs une vision romantique consternante de naïveté) et ne bourre le crâne de ses élèves avec ses dangereuses idées de "beauté du sacrifice héroïque", son besoin pathologique d'exercer un pouvoir absolu est ainsi démontré dans toute sa splendeur. Miss Brodie est une control freak qui s'avère en réalité ne rien contrôler tant elle manque de repères, de maturité et de lucidité tant dans sa vie professionnelle que dans sa vie privée (Robert STEPHENS qui était alors l'époux de Maggie SMITH joue le rôle de Teddy Lloyd, le professeur d'arts plastiques marié qui entretient une liaison à la fois avec Miss Brodie et l'une de ses élèves, Sandy jouée par Pamela FRANKLIN, la seule qui finit par se révolter contre sa professeure). Elle mélange d'ailleurs allègrement les deux, s'avérant aussi dangereuse qu'irresponsable. Les dégâts sur de jeunes esprits malléables n'en seront que plus grands.

* On peut dresser un parallèle intéressant avec le manga de Riyoko Ikeda "Oniisama E..." ("Très cher frère" en VF) adapté en animé dans les années 90 qui analyse exactement la même dérive du "club select" arbitraire mené par une personnalité tyrannique au sein d'un collège de jeunes filles.

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