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Articles avec #malle (louis) tag

Les Amants

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1958)

Les Amants

J'ai eu plaisir à revoir ce film qu'avec le temps j'avais tendance à confondre de plus en plus avec "Jules et Jim" (1962) pas revu lui non plus depuis des décennies. Il faut dire que le trait d'union est bien entendu Jeanne MOREAU, liée à Francois TRUFFAUT comme à Louis MALLE sur les plans professionnel et privé dans ces années-là. "Les Amants" est le deuxième film de Louis MALLE, il a été conçu pour l'actrice et se divise en deux parties très nettes. La première qui dure à peu près une heure est la description au vitriol du milieu bourgeois de province dans lequel végète Jeanne Tournier. Une vie factice où elle n'est en effet entourée que de gens superficiels, médiocres (son amie jouée par Judith MAGRE et son amant joué par Jose VILLALONGA) ou odieux comme son mari (Alain CUNY). Jeanne cherche à échapper à ce marasme mais ses allers-retours entre sa maison-tombeau à Dijon et sa vie mondaine à Paris ne sont guère épanouissants. Il est donc logique qu'une issue se présente lorsque sa voiture tombe en panne, l'obligeant à se faire prendre en stop par un inconnu. Inconnu certes plutôt BCBG comme en témoigne son patronyme Bernard Dubois-Lambert (Jean-Marc BORY, un peu raide hélas) mais ayant choisi de se mettre en marge de son milieu sur lequel il pose un regard critique (celui de Louis MALLE?). Dès lors, c'est la porte ouverte à la deuxième partie qui fit scandale à l'époque de par le refus d'occulter les ébats des deux amants. Certes, cela apparaît aujourd'hui comme très pudique mais suggérer les rapports sexuels et l'orgasme était tout de même osé à l'époque. Si cette deuxième partie est psychologiquement mal amenée (rien ne laisse pressentir que Jeanne et Bernard qui viennent de se rencontrer et ont eu des échanges pas spécialement chaleureux dans la voiture tombent ainsi dans les bras l'un de l'autre) elle séduit par sa sensualité, son lyrisme (magnifique photographie impressionniste de Henri DECAE) et le vent de liberté qu'elle apporte. La fin m'a fait penser à celle de "Le Laureat" (1967): on ne sait pas où on va mais on y va et tout vaut mieux que de revenir en arrière.

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Au revoir les enfants

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1987)

Au revoir les enfants

"Au revoir les enfants" est un film bouleversant. Un film à la fois juste, précis et d'une très grande sensibilité. Car il est construit au travers du regard de Julien, un enfant plus sensible que les autres (c'est à dire le réalisateur lui-même -il s'agit de ses souvenirs, même s'ils sont romancés-). Les autres, ce sont les camarades du pensionnat religieux où il étudie avec lesquels il n'a guère d'affinités. La première scène où sa mère aimante le serre dans ses bras sur le quai de gare avant le départ nous fait prendre conscience de son innocence, de sa vulnérabilité, de son besoin de tendresse. Elle renvoie à la terrible scène de la fin du film dans laquelle Julien regarde longuement, sans un mot, Joseph, l'ancien homme à tout faire du collège, celui qui a dénoncé à la Gestapo le père Jean et les trois enfants juifs qu'il cachait dont Jean Bonnet qui était devenu son ami, le renvoyant à nouveau dans sa solitude, l'innocence en moins. La scène dans laquelle Julien et Jean se retrouvent seuls, perdus dans la forêt, ce dernier lui demandant s'il n'y a pas de loups (plus tard, il lui dira qu'il a tout le temps peur) est une métaphore assez transparente de l'histoire du film tout entier si celui-ci avait été un conte. Car l'autre aspect frappant du film de Louis MALLE, c'est la précision et la justesse de sa reconstitution de la France de Vichy. Dans "Lacombe Lucien" (1974) qui avait fait scandale, il avait déjà taillé en pièces le mythe résistancialiste et montré le parcours sinueux d'un jeune homme aux motivations primaires. Il reprend le même procédé dans "Au revoir les enfants", avec Joseph qu'il définit comme "le petit cousin de Lucien". Mais il y a beaucoup d'autres personnages secondaires dans "Au revoir les enfants" dont les comportements ou les propos renvoient l'image d'un pays nageant en eaux troubles. Cela va de la religieuse qui dénonce un enfant juif du regard pendant qu'un surveillant (réfractaire du STO) essaye de le cacher à la mère de Julien qui lâche un "il ne manquerait plus que ça" (que nous soyons juifs) à un camarade de classe de Julien qui dit un "Tu crois qu'ils vont nous emmener? On a rien fait, nous, hein?" qui renvoie à une supposée culpabilité intrinsèque des juifs. La culpabilité d'ailleurs imprègne aussi le personnage de Julien (double de Louis MALLE) qui semble suggérer que c'est son regard vers Jean sous l'oeil du chef de la Gestapo qui l'a dénoncé. Le père Jean lui-même, héroïque figure de la Résistance est montré comme un homme en proie aux doutes (la scène de l'hostie le met en face d'un terrible dilemme, trahir Jean Bonnet ou trahir la religion de celui-ci) et faillible (le renvoi de Joseph édicté selon sa ligne de conduite morale est le déclencheur de la tragédie finale). Tant de nuances dans un film où si peu de mots sont prononcés mais où le regard (celui des personnages, celui de la caméra) en dit tant est tout simplement admirable.

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Zazie dans le métro

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1960)

Zazie dans le métro

J'étais curieuse de voir comment Louis MALLE avait réussi à adapter le roman de Raymond Queneau que j'ai lu pour la première fois cet été. Je pensais que ça allait donner une bouillie à l'écran. Et ce n'est pas totalement faux. Le style burlesque et cartoonesque qui caractérise "Zazie dans le métro" en version cinéma se prête davantage au court-métrage qu'au long-métrage car sur la longueur, l'hystérie générale devient lassante. C'est d'ailleurs pourquoi dans la génération de Louis MALLE, un Jacques TATI ou un Blake EDWARDS utilisaient le format long pour construire leurs gags sur la durée et pour les insérer dans une histoire pas forcément logique mais qui faisait sens. "Zazie dans le métro" au contraire se perd dans une succession de courses-poursuite sans queue ni tête. Le livre l'était aussi mais son objet, c'était le délire langagier qui présidait également aux "Exercices de style". La transposition au cinéma ne peut pas fournir d'équivalent, même si les mots de Queneau sont repris dans les dialogues. Si le début est plutôt séduisant avec un Philippe NOIRET jeune et charismatique et l'insolence lucide de la petite Catherine DEMONGEOT, la succession continue de séquences surréalistes inspirées manifestement du cinéma burlesque muet ou bien de Tex AVERY finit par devenir répétitive, ennuyeuse et le final "tarte à la crème" avec destruction du décor semble assez gratuit. Par contre, la séquence de la tour Eiffel est très bien mise en scène autour des questions gênantes (pour les adultes) de Zazie autour de la "sessualité" et m'a penser à du Jean COCTEAU (et à "Paris qui dort") (1925).

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Le Voleur

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1967)

Le Voleur

Mais qu'il est beau ce film! Je suis encore enchantée d'avoir pu l'attraper au vol, juste avant qu'il ne disparaisse sur Arte. Parfois (c'est loin d'être toujours le cas), la conjonction de talents aboutit à un résultat harmonieux, cohérent où chacun donne le meilleur de lui-même et converge dans le même sens. C'est l'un des plus beaux rôles de Jean-Paul BELMONDO qui conjugue ici l'action, l'élégance, la sobriété avec une profonde mélancolie qui le rapproche de son fabuleux personnage de "La Sirene du Mississipi" (1969). Les décors, les costumes et la photographie forment un écrin d'une rare justesse, on s'y croirait. Le tout au service d'un puissant récit contestataire de l'ordre social en phase avec le contexte historique retranscrit, la fin du XIX° siècle. L'auteur de l'oeuvre originale, Georges Darien était un libertaire, partisan de l'anarchisme, un mouvement transnational qui avait mené en France au début des années 1890 des attentats sanglants destinés à déstabiliser l'Etat bourgeois (l'assassinat du président Sadi Carnot en 1894 par exemple) avant d'être impitoyablement réprimé. Louis MALLE et Jean-Claude CARRIERE ont ainsi pu à travers son récit régler leurs propres comptes avec la bourgeoisie et faire souffler l'esprit du futur mai 68. Avant de devenir un cambrioleur professionnel (et un obsessionnel compulsif du vol de bijoux), Georges Randal est montré en effet comme une victime de cet ordre social bourgeois, personnifié par son oncle et tuteur, Urbain Randal (Christian LUDE) qui le prive de son héritage et de sa fiancée. Ce faisant, il créé un ennemi de classe au mode opératoire minutieusement retranscrit et symbolique. Il y a un côté hautement jouissif à voir cet homme se venger encore et encore en forçant les portes, fenêtres, coffre-fort et autres secrétaires des maisons patriciennes qu'il ravage systématiquement, ne laissant derrière lui que désordre et désolation. Mais ses interventions subvertissent également les stratégies de ses ennemis en matière matrimoniale comme successorale. Quant il ne se paye tout simplement pas leur tête, ceux-ci rivalisant de bêtise. Les coups de griffe n'épargnent pas le cléricalisme, coupable de sa collusion avec le milieu bourgeois. Ainsi le personnage joué par Julien GUIOMAR s'avère être un abbé escroc alors que offense suprême vis à vis de son oncle, Georges Randal le prive de funérailles religieuses en falsifiant son testament. Les femmes, quel que soit leur statut sont les meilleures alliées de Georges, trouvant à ses côtés le moyen de prendre une revanche vis à vis d'un ordre patriarcal qui les opprime. C'est l'occasion de voir un beau défilé d'actrices: Bernadette LAFONT, Genevieve BUJOLD, Marie DUBOIS, Francoise FABIAN, Marlene JOBERT ou encore Martine SARCEY.

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Lacombe Lucien

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1974)

Lacombe Lucien

"Lacombe Lucien" fait partie de ces films des années 70 qui contribuèrent à réveiller la mémoire juive et la mémoire du régime de Vichy occultées par le mythe de la France résistante du général de Gaulle. Il y avait urgence. Le négationnisme prospérait sur ce silence, entretenu par les anciens collaborateurs ("A Auschwitz on a gazé que des poux" disait Louis Darquier de Pellepoix en 1978) tandis que Pompidou amnistiait le milicien Paul Touvier en 1971.

"Lacombe Lucien" fit scandale à sa sortie et aujourd'hui encore, il est entouré d'une aura sulfureuse qui entrave la vision objective du film. Dès qu'un auteur ou un réalisateur tente de comprendre la "banalité du mal", il est accusé de complaisance voire de complicité. Le réalisme et la finesse avec laquelle Louis MALLE questionne les agissements de son héros font peur car ils ouvre une brèche dans les abysses humaines que la plupart ne veulent pas voir. Ils préfèrent être rassurés par des histoires bien manichéennes dans lesquelles le bien et le mal sont clairement identifiés avec une belle catharsis où le bien l'emporte et où le mal est châtié. Or c'est cette vision simpliste qui conduit au fascisme (tant il est facile ainsi de construire un bouc-émissaire accablé de tous les maux) et non celle que dépeint Louis Malle.

Lucien (Pierre BLAISE) est un personnage qui dépasse largement le contexte historique et géographique du film. Il peut s'appliquer à nombre de jeunes paumés qui se font enrégimenter par les systèmes totalitaires d'hier (nazisme, communisme) et d'aujourd'hui (Daech). Lucien est en effet un candidat idéal:

-Il est sans éducation, par conséquent il ne comprend pas les enjeux qui le dépassent, agit et raisonne bêtement ce qui le rend très facilement manipulable.

-Il est privé de père (qui est prisonnier de guerre), sa mère couche avec le patron pour qui il est un intrus. Il n'a donc ni foyer, ni repère moral.

-Son boulot de déclassé consiste à nettoyer et vider les pots de chambre d'un hospice.

-Les humiliations et rejets cumulés font de lui une boule de frustrations et de rage prête à exploser comme on peut le constater dans son attitude envers les plus faibles que lui (il passe sa colère sur les animaux).

-Son engagement n'est pas politique mais social. Il se lie avec ceux qui lui apportent de la reconnaissance, du respect, du pouvoir, un statut, sans questionner la nature de leurs agissements ni leur nature tout court. Ce qui fait de lui un opportuniste sans scrupules, notamment lorsqu'il largue une serveuse antisémite (Cécile Ricard) pour une juive bourgeoise (Aurore CLÉMENT) qui ne l'aurait même pas regardé dans d'autres circonstances. L'erreur de l'instituteur résistant à qui il propose d'abord ses services est de l'avoir méprisé. Erreur réitérée de la part d'un autre résistant qui tente de le faire changer de bord mais en le tutoyant. Un minimum de connaissance de la nature humaine aurait pu les éclairer. Malle avait en tête un texte de Jean Genet extrait de "Pompes funèbres" décrivant une France terrifiée durant l'occupation par des gosses de 16 à 20 ans jouant au petit chef (dans la milice ou comme Lucien, dans les forces supplétives de la Gestapo). Mais ce phénomène de revanche sociale et générationnelle se retrouve tout aussi bien dans les dictatures d'extrême-gauche, sous le régime des khmers rouges par exemple, pour la plupart de jeunes paysans prenant sur revanche sur les citadins, les bourgeois, les intellectuels.

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Le Feu follet

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1963)

Le Feu follet

"Le Feu Follet" est la première adaptation cinématographique du roman de Pierre Drieu La Rochelle publié en 1931 en hommage à un ami écrivain surréaliste qui s'était suicidé deux ans auparavant. Drieu finira d'ailleurs de la même façon en 1945. Louis Malle a légèrement modifié le texte du livre pour l'adapter à son époque, 1963 en pleine période des 30 Glorieuses (on voit d'ailleurs les grands ensembles de banlieue en construction). Près de cinquante ans plus tard, le norvégien Joachim Trier fera sa propre version, ce sera "Oslo 31 août". Le "Feu Follet" de Malle se situe quant à lui à Versailles et dans le Paris germanopratin. Il dresse le portrait d'un milieu bourgeois délétère dans duquel navigue un héros en pleine dépressurisation existentielle. Naguère séducteur mondain porté sur la bouteille, il sort de quatre mois de cure de désintoxication avec l'envie d'en finir. Auparavant, il revient sur les lieux dans lesquels il a vécu, revoit les gens (le plus souvent décadents) qu'il a connu, repartant un peu plus amer et dégoûté à chaque fois.

Film profondément mélancolique et morbide, bercé par les airs d'Erik Satie, le "Feu Follet" réussit à nous communiquer le sentiment d'impuissance de son héros, son incapacité à ressentir et à créer qui fait de lui un mort-vivant en sursis. Louis Malle filme en très gros plan les moments cruciaux où Alain tente d'entrer en communication avec autrui, surtout les femmes. Mais ici une vitre, là un miroir ou encore une porte (représentant symboliquement le pouvoir social, celui de l'argent ou celui de la force virile) dressent des murs infranchissables entre elles et lui, entre la vie et lui. Maurice Ronet fait une remarquable prestation. Il porte le film sur ses épaules, la caméra ne lâchant presque jamais son visage en train de se désagréger peu à peu au fil de son errance urbaine sans issue.

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Ascenseur pour l'échafaud

Publié le par Rosalie210

Louis Malle (1958)

Ascenseur pour l'échafaud

Bien avant de voir "Ascenseur pour l'échafaud", je l'ai entendu. Le cinéma art et essai dans lequel j'ai découvert la plupart des classiques diffusait en effet systématiquement l'air de Miles Davis dans les salles avant chaque projection. Quelle envoûtante entrée en matière qui confirme tout ce que le film doit à sa BO.

Ce qui est fascinant dans le premier long-métrage de fiction de Louis Malle, ce sont toutes les influences qui l'animent et qui en font un film carrefour entre la France et les USA, la tradition et la modernité.

L'influence du film noir américain est très forte, notamment le rôle de la fatalité, la tension permanente, le suspense permettant de dresser un portrait psychologique des personnages. On retrouve également les thèmes du thriller hitchcockien; crime (presque) parfait, blonde fatale et faux coupable. L'influence du cinéma classique français est également présente avec un scénario bien ficelé et des seconds rôles bien marqués comme le pilier de bar joué par Félix Marten ou le commissaire joué par un débutant plein d'avenir, Lino Ventura.

D'autre part le film oscille entre un cinéma de genre conventionnel (le polar adultère) et enfermé en studio (comme l'assassin dans son ascenseur-cercueil) et une liberté de mouvement qui annonce la nouvelle vague, surtout celle du cinéma indépendant US. Jeanne Moreau, magnétique, filmée caméra à l'épaule erre dans la nuit en décors réels sur une mélodie jazzy plaintive et mélancolique improvisée exactement comme les héros des films de Cassavetes. Un passage inoubliable qui a suffi à faire entrer le film dans la légende! La photographie, très belle est signée d'un opérateur emblématique de la nouvelle vague Henri Decaë. Et la cavale de Georges Poujouly et Yori Bertin annonce, certes en mode beaucoup plus mineur celle de Poiccard-Patricia dans "A Bout de Souffle".

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