On prend les mêmes et on continue: si vous avez aimé le premier volet, vous aimerez le second, "Indian Palace: suite royale". L'atout principal reste le même: le fabuleux casting qui réunit la crème des acteurs anglais que l'on a un évident plaisir à retrouver, une touche hollywoodienne en plus. Mais pour faire quoi au juste? Je me le demande encore tant le scénario de cette suite manque d'enjeux. La plupart des intrigues sont menées si mollement qu'elles s'essoufflent presque immédiatement. Il en va ainsi de la concurrence professionnelle et amoureuse entre Sonny Kapoor (Dev PATEL qui cabotine toujours aussi outrageusement) le gérant du Best Exotic Marigold Hotel et Kushal Kadania, beau gosse indien qui semble échappé de Bollywood. Ou encore d'un inspecteur mystère (Richard GERE) bien peu convaincu par sa mission mais qui dès son arrivée se met à draguer la mère de Sonny. A moins que ce ne soit Lavinia Beech (Tamsin GREIG vue dans "Tamara Drewe") (2009) qui a l'air de se demander ce qu'elle fait là. Car ce qui domine dans le film, ce sont les intrigues amoureuses entre des seniors qui pètent la forme, au point de reprendre pour certains une activité professionnelle et de se déhancher comme des diables lors d'une scène de mariage suivie d'une chorégraphie très bollywoodienne. Seule exception à cette débauche d'énergie, le personnage de Maggie SMITH qui jette un regard particulièrement mélancolique sur une fête d'où elle reste à l'écart. Alors pour conclure, il y a deux façons de voir le film. Côté pile, il s'agit d'un divertissement parfaitement superflu. Côté face, tout film qui fait jouer (a fortiori ensemble) des acteurs brillants et intègres tels que Maggie SMITH, Judi DENCH ou Bill NIGHY qui ont dû se battre pour ne pas disparaître derrière l'obsolescence programmée du monde du cinéma est digne d'intérêt.
C'est le coeur un peu serré que j'ai regardé "Indian Palace" en apprenant le décès de Maggie SMITH que j'aimais beaucoup. "Indian Palace" est le croisement improbable entre "Slumdog Millionaire" (2008) (le gérant de l'hôtel est interprété par Dev PATEL qui tenait le rôle principal du film de Danny BOYLE mais qui en fait des tonnes ici) et une "Maison de Retraite" (2020) en forme de palais délabré dont les sept pensionnaires sexagénaires ou septuagénaires appartiennent à la crème des acteurs britanniques. L'Inde n'est en effet qu'un décor exotique pour riches seniors en pleine crise existentielle et il y a quelques relents néocolonialistes dans cette approche qui enfile les clichés comme les perles sur l'Inde, ses habitants et leur culture. Il n'en reste pas moins qu'on a tellement de plaisir à retrouver cette formidable troupe d'acteurs qu'on s'attache à leurs personnages en quête d'une nouvelle vie. Judi DENCH est délicate émouvante en veuve qui réalise qu'elle n'a pas eu d'intimité dans son couple, Maggie SMITH joue avec humour et mélancolie un personnage de vieille fille aigrie complètement dévitalisée qui finit par se découvrir une nouvelle vocation. Tom WILKINSON interprète un homosexuel nostalgique qui souhaite avant de mourir retrouver son amour de jeunesse. Bill NIGHY et Penelope WILTON forment un couple en crise. Enfin Celia IMRIE et Ronald PICKUP cherchent l'aventure. Le film vaut donc avant tout pour la subtilité de ces acteurs qui à l'image de leurs personnages sont en fin de vie (outre Maggie SMITH, Tom WILKINSON et Ronald PICKUP nous ont également quittés) et chacune de leur apparition reste un cadeau, quel qu'en soit l'écrin.
Il y a des films qui au moins ne cherchent pas à masquer leur caractère de pure opération commerciale. D'autres comme celui-ci sont plus hypocrites car ils sont calibrés à la fois pour plaire au plus large public possible et pour rafler des prix prestigieux. Le tristement célèbre producteur Harvey Weinstein a ainsi fait une OPA sur la "marque" Shakespeare (auteur dont la vie reste largement mystérieuse), trouvé sa caution culturelle (le scénariste Tom Stoppard) pour reconstituer avec un sérieux de façade le théâtre élisabéthain, engagé des comédiens américains bankable bien cul-cul la praline pour les rôles principaux (un bellâtre aussi fadasse que Joseph Fiennes pour jouer un génie franchement c'est Shakespeare qu'on assassine) tout en reléguant les remarquables acteurs britanniques qui auraient été tellement plus appropriés au second voire dernier plan, fait pondre un scénario qui se veut intelligent mais qui est juste insignifiant en plus d'être truffé d'anachronismes et d'invraisemblances. Mais le tour de passe-passe a si bien fonctionné tant auprès du public que du jury des Oscars (au minimum influencés, au pire corrompus) qu'on a osé nous vendre ce film d'un financier véreux, phallocrate et criminel sexuel comme féministe! Mais il en va de ce dernier comme de Shakespeare, c'est un simple affichage derrière lequel se cache le sexisme le plus rétrograde. Le rôle de Viola (Gwyneth Paltrow), cette aristocrate (fictive) qui se travestit pour pouvoir jouer et prend un amant pour se rebeller contre son mariage arrangé est mince comme du papier à cigarette et ne tient pas la route. Les filles sont en réalité montrées comme les supports de purs fantasmes masculins: faciles, à la disposition des hommes qui n'ont qu'à claquer des doigts (ou à débiter un ou deux sonnets, c'est censé être du Shakespeare quand même!) pour les mettre à poil et les trousser avec une affligeante vulgarité. Évidemment elles adorent. Ah oui et Shakespeare est censé être un infatigable Don Juan qui puise son inspiration dans ses histoires de coeur (ou plutôt de fesses): à quand "Juliette Harlequin" et "Hamlet porno chic"? La recette est inépuisable!
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.