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Articles avec #la cava (gregory) tag

Pension d'artistes (Stage Door)

Publié le par Rosalie210

Pension d'artistes (Stage Door)

"Pension d'artistes" est comme l'année précédente "Mon homme Godfrey" (1936) un grand cru de Gregory LA CAVA. Il se distingue par son fabuleux casting d'actrices, ses dialogues brillants et sa grande résonnance contemporaine. En effet bien que réalisé en 1937, "Pension d'artistes" évoque l'ère "#Me Too" dans le monde du spectacle hollywoodien, sans doute parce qu'en 80 ans, la distribution inégalitaire des rôles sociaux n'a guère changé. Aux hommes, les postes de pouvoir, dont celui de faire et de défaire les carrières au gré de leur bon plaisir. Aux femmes, les postes de subordonnées contraintes de se soumettre à un mécénat qui ressemble furieusement à une promotion canapé. Les scènes entre le producteur Anthony Powell (Adolphe MENJOU) et les jeunes actrices sont extrêmement révélatrices, qu'il les fasse attendre pour rien ou qu'après avoir fait son "marché" il ne tente de les séduire avec de fallacieuses promesses tout en s'assurant de leur soumission (la censure l'empêche de leur sauter dessus comme Harvey Weinstein mais on y pense forcément d'autant que les poses devant le canapé sont suggestives).

A cet aspect d'inégalité des sexes, Gregory LA CAVA ajoute comme dans "Mon homme Godfrey" (1936) une dimension d'inégalités sociales. La riche héritière Terry Randall (Katharine HEPBURN) décroche un rôle convoité parce que son père a graissé quelques pattes alors qu'elle répète d'une manière désespérément atone et s'embrouille avec tout le monde. Bref, face à la concupiscence et à la corruption, le talent qui devrait être le seul critère du choix des actrices (avec la motivation) ne pèse pas bien lourd et les âmes trop fragiles comme celle de Kay Hamilton (Andrea LEEDS) le paieront au prix fort.

Mais le film de La Cava, en dehors d'une séquence franchement dramatique (et très émouvante) se tient constamment dans un entre-deux doux-amer comme pouvait l'être "La Garçonnière" (1960) de Billy WILDER qui était une féroce et drolatique satire sociale tout en étant tendre et mélancolique. Face au joug masculin, la pension de Mrs Orcutt où logent les aspirantes actrices est un espace de liberté où les énergies se libèrent et les personnalités s'expriment sans retenue, avec une verve d'enfer. Le personnage de Jean à la langue particulièrement acérée a ainsi été pour Ginger ROGERS une façon de montrer une autre facette de son talent.

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Mon homme Godfrey (My Man Godfrey)

Publié le par Rosalie210

Gregory La Cava (1936)

Mon homme Godfrey (My Man Godfrey)

Gregory LA CAVA est l'un des maîtres de la comédie américaine au même titre que Howard HAWKS, Leo McCAREY, Ernst LUBITSCH ou George CUKOR. Cependant contrairement à eux il a été oublié, surtout en Europe alors qu'il a réalisé quelques pépites de l'âge d'or d'Hollywood.

"Mon homme Godfrey" est son film le plus célèbre et le plus célébré tant par la qualité du scénario, l'écriture des dialogues que par l'excellence de l'interprétation. A la trame classique de la screwball comédie (la guerre des sexes), Gregory LA CAVA superpose un enjeu de classe. Il faut dire que le film a été réalisé en 1936, pendant la grande crise que traversaient les USA. Dès les premières images, il annonce la couleur en faisant coexister de grands immeubles bourgeois et une décharge publique avec des cabanes de SDF. Le malaise se renforce lorsque Cornelia Bullock (Gail PATRICK) vient proposer à Godfrey, l'un des SDF (William POWELL) en échange de 5 dollars de se prêter à un "jeu" qui m'a fait penser à "Le Dîner de cons" (1998) en ce que le clochard fait partie d'une liste "d'objets" à ramener comme trophée d'un concours pensé par des bourgeois désoeuvrés. Godfrey refuse l'humiliant marché et envoie bouler la bourgeoise dans un tas d'ordures. Une belle remise en place qui suscite l'enthousiasme de la sœur cadette Irène (Carole LOMBARD). Pour ses beaux yeux, Godfrey accepte de lui faire gagner le concours puis d'entrer au service de la famille en tant que majordome. On passe ainsi d'une peinture de la misère la plus extrême à celle de la bourgeoisie la plus décadente avec "God"frey en position d'observateur extérieur. Car on le comprend très vite, Godfrey est un transfuge social qui s'est donné pour mission (divine?) de rétablir un peu de justice et d'humanité dans tout ce bazar. Ce n'est pas un révolutionnaire (on est aux USA!) mais un homme bon qui veut utiliser son expérience pour aider son prochain en sortant les pauvres de la misère et en responsabilisant les riches. C'est aussi un homme échaudé par une expérience amoureuse malheureuse qui n'a pas très envie de "replonger" dans son milieu d'origine, incarné par des femmes aussi envahissantes que frappadingues: la mère et son ridicule Carlo pique-assiette (j'ai longtemps cru qu'il s'agissait du toutou de la famille, c'est dire ^^), Cornelia qui utilise son intelligence à des fins perverses et Irène qui s'avère stupide, capricieuse et hystérique. Le forcing de cette dernière face aux réticences de Godfrey a autant plus de saveur que Carole LOMBARD et William POWELL rejouent en quelque sorte leur histoire: ils étaient divorcés dans la vraie vie après avoir (brièvement) formé un couple mal assorti dont elle était l'élément extraverti et lui, l'élément réservé.

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