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Articles avec #kuperberg (julia) tag

Et la femme créa Hollywood

Publié le par Rosalie210

Clara Kuperberg, Julia Kuperberg (2015)

Et la femme créa Hollywood

"L'histoire écrite par les vainqueurs", cela vaut aussi pour les femmes, tombées dans les oubliettes de l'histoire du cinéma hollywoodien dès que celui-ci commença à transmettre par écrit la légende de son premier âge d'or autour des années 30-40. Sauf qu'il y avait eu déjà un premier âge d'or au sein des studios californiens dans les années 10 et 20. Il tenait dans un carton d'archives de la cérémonie des Oscars de ces années là. O surprise: des photos de femmes à tous les postes: réalisatrices, scénaristes, monteuses, productrices, directrices de studios. Des photos sans nom, des visages oubliés, quel que soit leur succès et leur reconnaissance de leur vivant comme Frances MARION, autrice de 300 scénarios dont beaucoup pour Mary PICKFORD et titulaire de deux Oscars ou encore Lois WEBER, à la tête du premier studio portant son nom.

La raison de cette concentration féminine dans les premières années d'existence du cinéma est très simple à comprendre. Il s'agissait alors d'une forme de divertissement expérimental auquel n'était attaché ni prestige social, ni fortune. Il était donc méprisé par les hommes et investi par les femmes. Dès que le cinéma devint un business dans l'entre-deux-guerres, surtout avec l'arrivée du parlant, les hommes prirent les commandes et renvoyèrent les femmes dans l'ombre, sauf en tant qu'actrices, seul domaine où elles pouvaient encore exercer un pouvoir leur permettant rarement d'atteindre d'autres fonctions. Le rôle des syndicats corporatistes dans cette mutation est souligné car les femmes en étaient exclues. Conséquence, alors qu'il existait une centaine de réalisatrices avant 1930, il n'y en avait plus que deux après cette date, Dorothy ARZNER et Ida LUPINO. Quant aux pionnières, elles tombèrent dans l'oubli, les soeurs Kuperberg soulignant que durant leurs études de cinéma, elles n'en avait jamais entendu parler. La transmission sélective de l'histoire de cet art comme celui des autres d'ailleurs fait que l'on met Charles CHAPLIN dans la lumière en laissant Mabel NORMAND qui l'a pourtant dirigé dans l'ombre. Et il en va de même bien entendu pour Georges MELIES et Alice GUY. Non seulement le film rend à cette pionnière du cinéma la primauté du premier film narratif de l'histoire du cinéma mais également du premier film sonore, dès 1906. Quant à Mae WEST, le film rappelle qu'elle scénarisait ses films et qu'elle avait casté pour le rôle masculin de l'un d'entre eux un parfait inconnu qui n'allait pas le rester longtemps, Cary GRANT.

Il faut quand même souligner que depuis 10 ans et la sortie du film, la situation a tout de même évolué, tant en ce qui concerne la place des femmes dans le cinéma hollywoodien de nos jours que dans la transmission de leur héritage, même s'il reste du chemin à parcourir. Aux côtés de Kathryn BIGELOW, il y a maintenant Chloe ZHAO et Jane CAMPION (la pionnière des prix!) sans parler du prix du scénario remis à Justine TRIET alors que les pionnières sortent de l'ombre, une à une.

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Gene Tierney, une star oubliée

Publié le par Rosalie210

Clara Kuperberg et Julia Kuperberg (2016)

Gene Tierney, une star oubliée

"Ce n'est pas une femme, c'est une apparition". Ces mots prononcés par Antoine Doinel/Jean-Pierre LEAUD à propos de Fabienne Tabard/Delphine SEYRIG vont comme un gant à Gene TIERNEY dont l'image la plus célèbre est le portrait que contemple fasciné le flic joué par Dana ANDREWS dans "Laura" (1944) de Otto PREMINGER. Réalisé par les soeurs Clara KUPERBERG et Julia KUPERBERG, le documentaire tente d'expliquer pourquoi cette sublime actrice qui tourna dans 34 films principalement dans les années 40 et 50 fut si peu reconnue de son vivant (une seule nomination aux Oscars et aucun prix) et ensuite relativement oubliée. Sa discrétion sans doute mais aussi son refus de s'enfermer dans un type de rôles, son caractère insaisissable, son goût pour la retenue et les silences, un jeu subtil plus européen qu'américain, des prestations souvent teintées d'exotisme. Ses drames personnels (une enfant lourdement handicapée suite à une rubéole contractée pendant la grossesse, des amours malheureuses, des dépressions, des internements) qui provoquèrent sa décision d'abandonner le cinéma jouèrent sans doute également un rôle. Mais à défaut d'avoir marqué la mémoire du grand public, Gene TIERNEY est adulée par les cinéphiles dont Martin SCORSESE qui lui voue un culte. Mais on se rend compte qu'en dehors de ses films, Gene TIERNEY a laissé peu de traces publiques. Le documentaire s'appuie donc essentiellement sur des témoignages (ceux de ses petits-enfants notamment) et sur son autobiographie dont certains doutent qu'elle en soit l'autrice. Une énigme de plus?

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Billy Wilder, la Perfection Hollywoodienne

Publié le par Rosalie210

Clara Kuperberg, Julia Kuperberg (2016)

Billy Wilder, la Perfection Hollywoodienne

Quatrième documentaire des soeurs Clara KUPERBERG et Julia KUPERBERG que je découvre (après ceux consacrés à Anthony HOPKINS, Ida LUPINO et Jack LEMMON), c'est aussi celui qui m'a le moins convaincu. La raison en est simple: contrairement aux autres, elles ne sont pas parvenue à capturer l'essence de l'immense réalisateur qu'était Billy WILDER. La faute d'abord à un déséquilibre patent dans la construction du documentaire. Les soeurs ont choisi de privilégier la première partie de sa carrière hollywoodienne à la Paramount (jusqu'à "Sabrina") (1954) au détriment de la deuxième, à son propre compte et beaucoup plus personnelle (elle correspond à sa collaboration avec I.A.L. DIAMOND et Jack LEMMON). Elles ne consacrent donc que quelques minutes aux chefs-d'oeuvre que sont "Ariane" (1957), "Certains l aiment chaud" (1959) et la "La Garçonnière" (1960). Quant aux pépites méconnues de la fin de sa carrière (elles aussi intimistes), elles sont passées sous silence sauf "Fedora" (1978) en raison de ses liens avec "Boulevard du crépuscule" (1949). Ce n'est d'ailleurs pas la seule lacune dans l'évocation de sa filmographie puisque "Uniformes et jupon court" (1942) est présenté comme son premier film alors que c'est inexact: il s'agit de son premier film hollywoodien mais il avait réalisé lors de son passage en France après avoir fui le nazisme un premier film en 1934, "Mauvaise graine" (1934) avec Danielle DARRIEUX. Visiblement, ce qui a le plus intéressé les soeurs Kuperberg, c'est la relation que Billy Wilder entretenait avec le cinéma hollywoodien, la façon dont il s'est approprié le film noir, a contourné le code Hays ou a montré l'envers de l'usine à rêves. Pour un portrait plus approfondi de l'homme et de l'artiste, mieux vaut se plonger dans le "Billy Wilder et moi" de Jonathan Coe.

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Jack Lemmon - Une vie de cinéma

Publié le par Rosalie210

Clara Kuperberg, Julia Kuperberg (2021)

Les soeurs Kuperberg ont réalisé depuis une quinzaine d'années de nombreux documentaires pour Arte ou pour OCS, scrutant l'envers du décor hollywoodien, recherchant la vérité derrière la légende ou bien éclairant ses angles morts. Leur travail sur Jack LEMMON, un de mes acteurs préférés, "muse" d'un de mes réalisateurs préférés, Billy WILDER (à qui elles ont également consacré un documentaire) est remarquable par sa clarté et sa pertinence. Elles montrent en premier lieu que dès son premier film "Une femme qui s'affiche" (1953), cet acteur venu du théâtre et de la télévision s'est inscrit en rupture avec l'image véhiculée jusque là par les acteurs hollywoodiens, façonnés pour être des stars inaccessibles. Jack LEMMON avec ses allures de "monsieur tout le monde" auquel n'importe quel quidam pouvait s'identifier pensait d'ailleurs à l'origine que le cinéma n'était pas pour lui. Mais s'il n'avait été que cela, il ne serait certainement pas sorti du lot. C'est Billy WILDER qui a "inventé" en quelque sorte Jack LEMMON au cinéma (pour qui il a tourné sept films). Dès "Uniformes et jupon court" (1942), Billy WILDER avait compris que pour contourner la censure du code Hays, il fallait jouer les illusionnistes en camouflant le sous-texte scabreux de ses films à l'aide d'un personnage principal candide: Ginger ROGERS jouant une petite fille de 12 ans, Audrey HEPBURN et ses couettes dans "Ariane" (1957) et bien sûr Jack LEMMON et sa bouille si attachante. La puissance d'incarnation de ce dernier et son talent tragi-comique donne vie à des personnages a priori sulfureux mais qui "passent crème" auprès du spectateur. C'est ainsi que l'air de ne pas y toucher, le voilà parti pour incarner à dix reprises (dont trois sous la houlette de Billy WILDER) le binôme "féminin" du "Drôle de couple" (1968) qu'il forme à l'écran avec Walter MATTHAU, contribuant à façonner le genre du Buddy movie (et toutes les ambiguïtés qui vont avec). Mais le rôle qui l'a fait entrer dans la légende du cinéma va encore plus loin puisqu'avec "Certains l'aiment chaud" (1959), Jack Lemmon compose un personnage travesti qui se métamorphose de façon irréversible (ce n'est pas par hasard que son personnage s'appelle Daphné) et forme avec Osgood ce que beaucoup considèrent comme étant le premier couple homosexuel du cinéma "grand public". D'ailleurs Tony CURTIS avait lancé une vanne particulièrement percutante au sujet de son binôme "« De toutes mes partenaires féminines, la seule avec qui je n'ai pas couché, c'est Jack Lemmon.» Tout au long de ses quarante ans de carrière, il aura ainsi incarné des personnages subversifs voire sombres sous une apparence lisse. Pour Wilder encore, il incarne des personnages de déviants compromis dans la prostitution avant d'évoluer vers la fin de sa carrière vers des rôles politiquement engagés et progressistes.

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Gentlemen & Miss Lupino

Publié le par Rosalie210

Clara Kuperberg, Julia Kuperberg (2021)

Gentlemen & Miss Lupino

Deuxième documentaire des soeurs Kuperberg que je découvre après "Hannibal Hopkins et Sir Anthony" (2020), "Gentlemen & Miss Lupino" s'avère tout aussi passionnant. Le titre fait référence aux assemblées générales de la Directors Guild of America, le syndicat des réalisateurs de cinéma qui commençaient par la formule "Gentlemen and Miss Lupino" parce que sur les 1300 membres de l'organisation, elle était la seule femme. La raison de cette exception à la règle est très bien expliquée au début du documentaire. Lorsque le cinéma hollywoodien est devenu une industrie puissante au début des années 20 en se structurant au sein des grands studios les femmes qui étaient jusque-là nombreuses dans tous les types de poste ont été exclues de la production et de la réalisation des films, c'est à dire des postes de pouvoir. Le syndicat qui représentait les intérêts de l'industrie hollywoodienne a beaucoup fait pour en faire un club exclusivement masculin. Si Ida LUPINO a pu intégrer l'organisation en 1950, c'est en raison du succès de ses premiers films, réalisés de façon indépendante grâce à la fondation de son propre studio avec son mari de l'époque, Collier YOUNG. A l'origine, Ida Lupino ne souhaitait être que scénariste et productrice mais la défaillance cardiaque de Elmer CLIFTON sur le tournage de "Avant de t aimer" (1949) lui fit sauter le pas de la réalisation. En tant qu'actrice, elle était déjà une rebelle qui se faisait régulièrement suspendre parce qu'elle refusait de se plier aux diktat des studios. Le documentaire analyse ensuite ses films, en rupture avec le classicisme hollywoodien et qui par bien des aspects annoncent la nouvelle vague du cinéma français et indépendant US (la parenté avec John CASSAVETES m'a frappé, particulièrement dans "Le Voyage de la peur") (1953). Les thèmes traités, tabous pour l'époque sont également un défi posé à une Amérique alors au sommet de son modèle social conservateur dans lequel la femme ne peut exister que dans le rôle d'épouse et de mère au foyer. Le viol, la maladie, la grossesse non désirée, l'adultère viennent bousculer le conformisme ambiant. Enfin, le documentaire explique les raisons pour lesquelles Ida Lupino n'a réalisé que sept longs-métrages de cinéma, sa société ayant fait faillite prématurément suite à de mauvais choix de ses associés. Si elle a pu se reconvertir avec succès dans la réalisation d'épisodes de séries pour la télévision, son identité s'y est retrouvée noyée dans la masse et son travail pour le cinéma est sombré dans l'oubli, la réalisatrice n'ayant pas en dépit de son succès suscité d'intérêt auprès des médias et des spécialistes. Dernier point à souligner, outre les intervenants extérieurs qui apportent des éclairages sur ses films et son parcours, le documentaire est parsemé d'extraits de l'autobiographie (non traduite) de Ida Lupino, "Beyond the Camera" dans laquelle elle explique que pour se faire respecter du milieu masculin dans lequel elle travaillait, elle endossait le rôle de "Mother of all of us" (Notre mère à tous) qui était écrit en lieu et place de son nom sur son fauteuil de réalisatrice. Et elle pratiquait l'art de la suggestion plutôt que celui de l'injonction.

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Hannibal Hopkins & Sir Anthony

Publié le par Rosalie210

Clara Kuperberg, Julia Kuperberg (2020)

Hannibal Hopkins & Sir Anthony

Le début des années 90 correspond au moment où j'ai commencé à fréquenter les cinémas art et essai. C'est justement à ce moment-là que Anthony Hopkins est devenu célèbre pour son interprétation de Hannibal Lecter dans "Le Silence des Agneaux". Mais je suis bien d'accord avec lui, ce n'est pas sa plus grande interprétation. Sa plus grande interprétation, celle qui en dit le plus sur lui est celle du majordome Stevens dans "Les Vestiges du jour" sorti en 1993. La même année sortait "Les Ombres du coeur" de Richard Attenborough (qui avait déjà fait tourner Anthony Hopkins à la fin des années 70 dans "Magic") et dans lequel son personnage était un prolongement de celui du majordome Stevens. J'ai dû aller voir ce film au moins trois fois au cinéma et c'est aussi à cette époque que j'ai acheté un grand poster de l'affiche anglaise de "Les Vestiges du jour" tout en me plongeant dans le roman de Kazuo Ishiguro. A cette époque, le cinéma représentait pour moi ce qu'il représentait pour Woody Allen dans ses films des années 80: un refuge dans lequel Cecilia venait sécher ses larmes et oublier sa triste vie dans "La rose pourpre du Caire" et Mickey retrouver goût à la vie devant "La Soupe aux Canards" après avoir frôlé le suicide dans "Hannah et ses soeurs". J'avais instinctivement reconnu en Anthony Hopkins des problématiques qui étaient aussi les miennes et qui sont sans cesse évoquées dans le portrait que Arte diffuse jusqu'en janvier 2023: la sensation d'être coupé du monde et des autres, de venir d'une autre planète et d'être incapable de communiquer avec son environnement d'origine ("je ne comprenais rien à ce qu'on disait"), la solitude, les difficultés d'apprentissage et le harcèlement scolaire, le manque de confiance en soi, la nécessité de l'exil face à l'incapacité de s'intégrer ("Je ne supportais plus le théâtre anglais, je ne m'y sentais pas à ma place (...) quand je suis arrivé en Californie c'était comme être sur une autre planète. Les gens semblaient appartenir à une espèce différente (...) Comment peux-tu vivre ici? C'est comme vivre sur la lune. J'ai dit que c'est très bien, je me plaît ici."), un déracinement géographique mais aussi social, Anthony Hopkins étant un transfuge de classe (son père était boulanger, lui a été anobli). Les difficultés sociales et relationnelles d'Anthony Hopkins qui l'ont poursuivi toute sa vie sont bien résumées par Jodie Foster qui raconte qu'elle le fuyait parce qu'il lui faisait peur avant d'apprendre à la fin du tournage de "Le Silence des Agneaux" que lui aussi avait peur d'elle. Dommage que le film qui date de 2020 soit déjà daté. Il ne peut évoquer le rebond actuel de sa carrière à plus de 80 ans (nouvel Oscar pour "The Father", rôle dans le dernier James Gray) et fait l'impasse aussi sur le fait qu'il a été diagnostiqué comme étant atteint de troubles autistiques à plus de 70 ans ce qui rend évident l'ensemble des manifestations de son mal-être en société ("je ne suis pas grégaire du tout, j'ai très peu d'amis, j'aime beaucoup la solitude, je préfère ma propre compagnie") et de sa difficulté à en déchiffrer les codes ("Je suis naïf et facilement dupé, c'est ma principale faiblesse").

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