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Articles avec #ivory (james) tag

Les Européens

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1979)

Les Européens

D'une grande sensibilité littéraire, James IVORY a souvent porté à l'écran des adaptations d'écrivains célèbres. Parmi elles, trois oeuvres de Henry James: "Les Bostoniennes" (1984), "La Coupe d'or" (2000) et la première des trois "Les Européens" à la fin des années soixante-dix. L'histoire porte en effet sur l'un de ses thèmes fétiches: le choc des cultures, présent dès son remarquable deuxième long-métrage de fiction "Shakespeare-Wallah" (1965). Dans "Les Européens", le choc en question porte sur la rencontre entre deux branches de la même famille, vivant chacune de part et d'autre de l'Atlantique. D'une part les Wentworth, des bostoniens puritains vivant dans l'austérité. De l'autre, leurs cousins désargentés, un frère et une soeur venus d'Europe, plus bohèmes et libérés qui espèrent faire un beau mariage. Si la situation de Félix, jeune peintre célibataire d'une nature franche et joyeuse est parfaitement claire, ce n'est pas le cas de sa soeur, Eugénie qui porte le titre clinquant de baronne de Münster mais dont le mariage est en réalité en voie de dissolution. Par conséquent leurs destins vont diverger. Félix s'éprend de Gertrude Wentworth qui n'attendait que ça. Dès la première scène, "la messe est dite". Alors qu'elle ne connaît pas Félix, on la voit fuir le corseté pasteur Brand qui la courtise ainsi que tourner le dos à l'église où il l'invite à entrer au profit d'une nature automnale qui chez James IVORY symbolise le flamboiement des sentiments. C'est en ce lieu qu'elle rencontre Félix et celle-ci a la nature de l'évidence, finissant même par être bénie par le pasteur qui se console avec la soeur de Gertrude beaucoup plus conforme à ses attentes. Eugénie qui en revanche se comporte en grande dame s'ennuie assez vite dans la société provinciale très ascétique de ses cousins. Elle joue par ailleurs un jeu trouble entre Clifford, le fils des Wentworth qui souffre d'un penchant pour la boisson et leur riche cousin Robert Acton qui en pince pour elle mais n'ose se déclarer franchement, sans doute parce qu'elle est trop libre pour lui. Ainsi on peut penser qu'en choisissant de retourner en Europe et en renonçant à ce beau parti, elle se protège d'une nouvelle déception tout en échappant à une société qui ne convient guère à ses aspirations. Le casting, un peu inégal tout comme le rythme est dominé de la tête et des épaules par la superbe Lee REMICK dans le rôle d'Eugénie.

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Autobiographie d'une princesse

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1975)

Autobiographie d'une princesse

"Autobiographie d'une princesse" est un petit film dans la carrière de James Ivory, d'abord parce qu'il dure un peu moins d'une heure, ensuite par son caractère minimaliste et intimiste qui fait très "théâtre filmé de poche" (deux personnes prennent le thé en regardant et commentant de vieux films). Cependant il a toute sa place dans la filmographie de ce cinéaste, toujours épaulé par le producteur Ismail Merchant et la scénariste Ruth Prawer Jhabvala car il confronte deux points de vue sur une période révolue, celle de l'Inde coloniale: celui d'une princesse indienne en exil à Londres et celui de Cyril Sahib (James Mason), l'ancien précepteur anglais de son père qu'elle invite chaque année pour commémorer l'anniversaire de la mort du Maharadjah. Le ton est résolument nostalgique pour la princesse qui idéalise l'époque impériale, plus critique pour Cyril Sahib qui se souvient de la tyrannie qu'exerçait celui pour lequel il travaillait. Néanmoins le film sent un peu la poussière, cette vision aristocratique étant très éloignée des préoccupations de l'Inde contemporaine. La mise en scène très statique et l'aspect suranné des films projetés contribue à accentuer l'aspect passéiste de cette vision de l'Inde.

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La Comtesse blanche (The White countess)

Publié le par Rosalie210

James Ivory (2005)

La Comtesse blanche (The White countess)

Très beau film romanesque sur deux âmes blessées prises dans la tempête de l'histoire, "La comtesse blanche" narre la rencontre dans le Shanghai de la fin des années trente de Sofia, une comtesse russe déchue (Natasha RICHARDSON, magnifiquement mélancolique) et de Todd Jackson, un diplomate américain aveugle (Ralph FIENNES, aussi vulnérable que résilient). La première subit une double peine inique. A l'exil vient s'ajouter le rejet de sa belle-famille qui pourtant vit à ses crochets mais qui se réfugie hypocritement derrière la religion pour condamner sa manière de leur rapporter de l'argent en jouant les entraîneuses et occasionnellement les prostituées. Elle tente également par tous les moyens de la séparer de sa fille qui subit soi-disant sa mauvaise influence. Le second qui a perdu toute sa famille et la vue dans des circonstances mystérieuses décide d'ouvrir un bar-cabaret en s'associant avec un japonais Matsuda et en enjoignant à Sofia de venir travailler pour lui. Mais ce relatif havre de paix qu'est "La comtesse blanche" (le nom du bar de Todd Jackson) n'est que temporaire. L'invasion japonaise de la ville oblige les personnages à fuir. C'est au beau milieu de la panique et des bombes, dans une atmosphère de ténèbres et de mort que la vérité des sentiments se fait jour, comme souvent chez James IVORY qui aurait pu faire sienne la phrase de Léonard Cohen "Il y a une fissure en chaque chose car c'est par là que la lumière peut entrer". La fin, subtilement mélancolique est superbe. Contrairement à beaucoup de critiques qui ont trouvé le film confus, je l'ai trouvé au contraire parfaitement limpide.

A noter que "La comtesse blanche" est la dernière collaboration de James IVORY avec Ismail MERCHANT, ce dernier étant décédé peu après la fin du tournage. Le scénario est de Kazuo ISHIGURO, l'auteur du roman "Les Vestiges du jour" dont l'adaptation fut l'un des plus grands succès de James IVORY.

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The Householder

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1963)

The Householder

"The Householder" ("Le chef de famille") est le premier film du fameux trio composé du réalisateur James IVORY (qui n'avait alors réalisé que des documentaires), du producteur Ismail MERCHANT et de la scénariste Ruth PRAWER JHABVALA qui a adapté son propre roman. Contrairement aux films ultérieurs du trio situés en Inde, plus multiculturels et multiethniques (et plus pessimistes aussi quant à leur issue en raison des séquelles douloureuses de la colonisation) "The Householder" est centré sur la culture indienne et n'a presque que des protagonistes indiens. Il faut dire que l'influence de Satyajit RAY qui a soutenu la production du le film se fait sentir. D'une certaine manière, il est une figure tutélaire pour le trio. Autre lien important avec l'Inde, la rencontre avec la dynastie Kapoor, Shashi KAPOOR étant présent dans la plupart des films tournés en Inde par Ivory et ses deux proches collaborateurs. Comme plus tard dans leurs films anglais, la fidélité à des acteurs-fétiches est une marque du cinéma d'Ivory. De même l'indianité de "The Householder" n'empêche pas d'y reconnaître la thématique favorite du cinéaste: parvenir à être soi-même dans un monde régi par des conventions aliénantes. Il raconte en effet comment un mariage arrangé se transforme peu à peu en mariage d'amour en dépit des défaillances du "chef de famille" qui ne se sent pas taillé pour le rôle car trop timide pour s'imposer face à un employeur et un bailleur cupides et une mère envahissante.

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Sauvages (Savages)

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1972)

Sauvages (Savages)

Film très peu connu de James Ivory, le premier tourné dans sa patrie d'origine, "Savages" est une sorte d'essai filmé d'un intérêt franchement inégal. Le début est prometteur et m'a fait penser à "L'aube de l'humanité", la première partie de "2001, l'Odyssée de l'espace" de Stanley Kubrick avec sa tribu primitive qui voit soudain surgir venue d'un autre espace-temps une balle de croquet. Le noir et blanc et le muet établissent un parallèle entre les origines du cinéma et celles de l'homme. Mais la suite qui se déroule dans une villa sudiste pendant l'entre deux guerres est beaucoup plus laborieuse. Ivory a visiblement voulu faire une satire de la société mondaine décrite dans les romans de Francis Scott Fitzgerald à la manière surréaliste de Luis Buñuel. En établissant un parallèle entre chaque membre de la tribu de sauvages et sa version soi-disant "civilisée", on comprend assez vite le message qu'il veut faire passer et qui est une déconstruction de l'idéologie coloniale fondée sur la prétendue supériorité de la culture occidentale ("mission civilisatrice" en version française, "fardeau de l'homme blanc" en version anglaise).  Mais le résultat est hélas confus et longuet. Les quelques bonnes idées de mise en scène (utiliser l'espace de la villa pour faire ressurgir les bas instincts dans la cave et dans la piscine, l'animalité dans les bois qui bordent le terrain de croquet ou l'élévation spirituelle dans le grenier) sont noyées dans des scènes inutilement étirées qui finissent par susciter l'ennui. Les personnages ne sont pas d'ailleurs assez caractérisés pour endosser des "rôles sociaux" pertinents. Les femmes en particulier sont interchangeables. Quant aux invertis, on se demande ce qu'ils viennent faire là car ils n'apportent absolument rien à l'intrigue. Intéressant donc mais inabouti.

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Shakespeare Wallah

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1965)

Shakespeare Wallah

James IVORY est un réalisateur dont je me suis sentie proche dès le premier film que j'ai pu voir de lui quand j'avais une vingtaine d'années. En approfondissant ma connaissance de sa filmographie, les raisons en sont devenues évidentes. Je partage en effet avec lui un certain nombre de caractéristiques. Tout d'abord la distorsion entre une apparence classique et une force subversive cachée. Chez James Ivory, l'académisme est un faux-semblant, de subtiles fissures craquelant les plafonds des institutions les plus vénérables. Autre point commun, lié au premier, le multiculturalisme. Ne me reconnaissant pas dans mes origines, j'ai construit ma vie à cheval sur plusieurs continents, exactement comme il l'a fait en partenariat avec le producteur indien Ismail MERCHANT (avec lequel il était en couple) et la scénariste Ruth PRAWER JHABVALA, allemande mariée à un indien, oeuvre artistique et vie intime ne faisant le plus souvent qu'un. C'est ainsi que dans la plupart de ses films, on suit deux types de personnages: ceux qui échouent à se libérer du carcan dans lequel ils sont emprisonnés et en souffrent (consciemment ou non) et ceux qui y parviennent, au prix du choix d'une certaine marginalité.

"Shakespeare Wallah", son deuxième film réalisé en 1965 raconte l'histoire d'une véritable famille d'acteurs britanniques shakespeariens, les Kendal, renommés pour le film les Buckingham (ils jouent donc leurs propres rôles, dans la vie et sur scène) qui ont choisi de vivre et de se produire dans l'Inde postcoloniale. Coupés de leurs racines mais pas vraiment intégrés à la société dans laquelle ils vivent, ils semblent évoluer dans un monde à part qui est pourtant condamné: leurs contrats se raréfient et le public se détourne d'eux pour des formes de spectacles plus modernes et plus proches d'eux culturellement, principalement le cinéma bollywoodien (même si ironiquement celui-ci s'inspire beaucoup du mode de vie bling-bling de son homologue américain). De façon très symbolique, Lizzie, la fille du couple Buckingham alias du couple Kendal (jouée par Felicity KENDAL qui avait alors l'âge de son rôle, 18 ans) tombe amoureuse d'un jeune indien riche et oisif qui mène en parallèle une liaison avec une star de Bollywood, Manjula (Madhur JAFFREY). Pourtant Sanju (Shashi Kapoor) éprouve des sentiments plus profonds pour Lizzie que pour Manjula qui est de plus dépeinte comme une gamine trop gâtée, jalouse et capricieuse (pour ne pas dire garce). Mais leur relation est entravée par la différence culturelle, Sanju ne pouvant envisager que sa femme soit une actrice en butte aux désirs concupiscents mais également aux humiliations du public. Et les parents de Lizzie se rendent bien compte avec le déclin de leur art que l'avenir de leur fille en Inde est compromis et qu'ils doivent l'envoyer dans leur pays d'origine où elle n'a jamais mis les pieds.

Malgré le manque de moyens, le film est de toute beauté (la scène d'amour dans un brouillard pourtant produit artificiellement est assez extraordinaire d'expressivité et ce alors que de l'aveu même de James Ivory, il la croyait ratée) et très marqué par une autre fructueuse collaboration: celle de James IVORY et de Satyajit RAY qui signe la musique.

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Les Bostoniennes (The Bostonians)

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1984)

Les Bostoniennes (The Bostonians)

Film peu connu du trio Ivory-Merchant-Jhabvala, "Les Bostoniennes" est l'adaptation d'un roman de Henry James qui aborde des sujets d'avant-garde pour son époque: le féminisme et plus discrètement mais de façon tout de même assez évidente pour un lecteur d'aujourd'hui, l'homosexualité féminine. Comme dans "Chaleur et poussière", deux camps se disputent le corps et la voix d'une jeune femme qui hélas s'avère être une marionnette du désir des autres (son père, sa mère, Olive, Basil) du début à la fin. Le fait que l'actrice qui l'interprète, Madeleine Potter soit assez fade n'est donc finalement pas si gênant que ça étant donné le manque de caractère du personnage. Quant aux leaders des deux camps qui se l'arrachent, ils sont inégalement intéressants. Basil (Christopher Reeves alias Superman) est un mâle tout ce qu'il y a de plus alpha. Les engagements militants de Verena et le chaperonnage d'Olive ne sont à ses yeux qu'un piment supplémentaire pour la conquérir. Que pèse le bla-bla féministe à côté de son sex-appeal irrésistible? A ses yeux, une femme est faite pour être une bonne épouse et une bonne mère et Verena correspond au profil. Ce n'est évidemment pas le cas d'Olive (Vanessa Redgrave), vieille fille coincée qui met toute son âme à défendre la cause des femmes mais qui ne s'estime pas suffisamment pour oser s'avancer sur le devant de la scène. La découverte de Verena et la passion qu'elle inspire à Olive donne des ailes à James Ivory qui n'est jamais meilleur que dans la description des désirs et des sentiments inavouables et donc refoulés dans les sociétés corsetées. Il y a comme une préfiguration du "Portrait de la jeune fille en feu" de Céline Sciamma dans les plans qui unissent ces deux femmes, notamment lorsqu'elles se laissent aller à des gestes de tendresse au bord de la mer. L'esthétisme très soigné de la reconstitution historique et l'étroite connexion établie entre les élans du coeur et ceux de la nature y sont aussi pour beaucoup. Vanessa Redgrave hérite donc du plus beau personnage du film, personnage dont elle retranscrit d'autant mieux les tourments intérieurs et la profonde tristesse que le moindre frémissement de son regard est capté par la caméra de James Ivory. Une souffrance qui n'est pas stérile car au terme du voyage, elle parvient à s'accomplir autrement mieux que la poupée dont elle s'était éprise et qui a préféré partir au bras du bellâtre de service.

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Chaleur et Poussière (Heat and Dust)

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1983)

Chaleur et Poussière (Heat and Dust)

Avant de se focaliser dans les années quatre-vingts dix avec une finesse remarquable sur les moeurs exotiques de la société british d'avant-guerre dans ce qui constitue la partie de sa filmographie la plus connue et la plus primée, James IVORY a réalisé une importante oeuvre anglo-indienne sur une période allant du début des années soixante au début des années quatre-vingts. Il faut dire que James IVORY est indissociable de son producteur indien immigré à New-York Ismail MERCHANT passionné de cinéma et originaire de Mumbai, Mecque du cinéma bollywoodien ainsi que de l'écrivaine et scénariste Ruth PRAWER JHABVALA à l'identité encore plus complexe (allemande mais élevée en Angleterre et mariée à un indien). Les films issus de ce trio et de leur société de production, Merchant Ivory Productions (MIP) portent donc logiquement la marque de leur collaboration multiculturelle.

"Chaleur et Poussière" est le dernier film de cette mouvance anglo-indienne du cinéma d'Ivory. Le scénario est écrit par Ruth PRAWER JHABVALA qui adapte son propre roman au titre éponyme. Il n'est guère surprenant que l'histoire qui se déroule sur deux périodes distinctes (les années 20 quand l'Empire britannique était encore puissant et les années 80) se focalise sur deux femmes occidentales unies par un lien de parenté (la première est la grand-tante de la seconde) et une communauté de destin. Bien que les allers-retours entre les deux époques se fassent avec beaucoup de fluidité et d'élégance, c'est la partie coloniale que j'ai trouvé de loin la plus intéressante. Comme dans tous ses films historiques, James IVORY va au-delà de la reconstitution académique pour sonder la vérité profonde des êtres. L'insistance lourde avec laquelle Douglas (Christopher CAZENOVE), petit fonctionnaire en poste à Sitapur tente d'éloigner son épouse Olivia (Greta SCACCHI) avec la complicité de toute la communauté et la résistance de celle-ci montrent que ce n'est pas tant la chaleur du climat qui est le fond du problème mais plutôt celui du corps d'Olivia, attirée par le prince indien local (Shashi KAPOOR). Ce dernier utilise d'ailleurs lui-même ce corps comme moyen de résistance et outil de vengeance face à l'impérialisme britannique qui le démet peu à peu de ses pouvoirs et donc de sa virilité. Le politique et l'intime ne font ainsi plus qu'un, comme ce sera également le cas dans "Les Vestiges du jour" (1993). La partie moderne, plus apaisée ne contient pas de tels enjeux conflictuels politiques ou civilisationnels*. Elle est nettement plus individualiste, à l'image de l'évolution des sociétés. Néanmoins, la quête d'identité du personnage d'Anne (Julie CHRISTIE) qui suit les traces de son aïeule ne manque pas d'intérêt notamment parce qu'elle rencontre des gens comme elle, en quête de sens à leur existence pour qui l'Inde fait figure de Graal. Contrairement à sa grand-tante qui subit une "mise à mort sociale", Anne choisit de vivre en marge avec le fruit de son amour éphémère pour un indien.

* Le racisme anglo-saxon, fondé sur la biologie ou plutôt le fantasme de la pureté du sang exècre le métissage. Par conséquent, il n'est guère étonnant que l'obsession des colons tourne autour de la protection de leurs femmes car il est dit dans le film que les indiens ne rêvent que d'une chose "le faire" avec une blanche. Crainte que l'on retrouve à l'identique aux Etats-Unis à la même époque.

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Quartet

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1981)

Quartet

"Quartet" de James IVORY (d'après le roman semi-autobiographique de Jean Rhys) est un sombre mais magistral récit d'emprise psychologique qui décortique avec finesse les tortueux ressorts d'une relation malsaine entre trois personnages avec un quatrième en arrière-plan. Trois plus un et non quatre car sinon il y aurait au moins parité et donc davantage d'égalité. Tandis que le film explore deux niveaux d'emprise: celle qu'exerce un couple bourgeois britannique sur une jeune fille créole privée de ressources après l'arrestation de son mari et celle que l'homme bourgeois exerce sur les femmes, y compris la sienne. L'inégalité fondée sur l'origine, la classe sociale et le genre se rejoignent ainsi impitoyablement.

La manière dont le couple de prédateur piège sa proie rappelle par certains aspects "Les Yeux sans visage" (1960) de Georges FRANJU. En effet il s'agit dans les deux cas de se faire passer pour des bienfaiteurs en offrant un toit à une jeune fille en détresse pour mieux l'utiliser et la jeter ou la détruire par la suite. La femme du couple joue les rabatteuses de gibier pour son mari affamé de chair fraîche. Mais elle-même est sous son emprise car c'est l'homme qui définit les règles du jeu, ce que démontrait déjà Agnès VARDA dans "Le Bonheur" (1965). C'est ainsi que le syndrome de Stockholm dont est victime Marya (Isabelle ADJANI qui a obtenu pour le rôle le prix d'interprétation à Cannes) qui tombe amoureuse de son tortionnaire fait écho à la soumission de Lois (Maggie SMITH) aux caprices de "HJ" (Alan BATES) qu'elle veut garder à tout prix. Derrière l'artiste mondaine cynique et hautaine perce l'amertume de la femme bafouée, avilie et humiliée qui cherche à sauver les apparences. Sous le vernis du mécénat se cache ainsi un sombre trafic de prostitution qui ne dit pas son nom. Mais à défaut de le dire, James IVORY montre dès les premières images le sort qui attend Marya avec en contrebas de sa chambre d'hôtel (plan annonciateur de sa chute) une "grue" qui lève un client. Et le dénouement sans issue la montre sur le point de passer entre les mains d'un autre pseudo "protecteur".

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Bombay Talkie

Publié le par Rosalie210

James Ivory (1970)

Bombay Talkie

De James IVORY, on connaît surtout les joyaux british des années 1990 qu'il a réalisé et le récent succès de "Call Me by Your Name" (2017) a mis en lumière son talent de scénariste. Mais cette vision n'est que parcellaire. En effet James IVORY l'américain a bâti une œuvre transcontinentale sur quatre décennies avec le producteur indien Ismail MERCHANT et l'écrivaine-scénariste allemande d'origine polonaise (et indienne par alliance!) Ruth PRAWER JHABVALA. Il est donc logique que leur travail créatif touche chacun des continents où ils sont nés. "Bombay Talkie" réalisé en 1970 est parfaitement représentatif de cette multiculturalité. le titre fait référence au cinéma bollywoodien que de son propre aveu, James IVORY a voulu parodier. On retrouve donc dans le film cette image d'une Inde huppée et occidentalisée avec Vikram, le séducteur au sourire ultra-brite (Shashi KAPOOR) toujours au bras d'un prix de beauté sur une gondole à Venise ou sur fond de chorégraphie sixties anglo-saxonne. Cette parodie s'étend à un autre cliché que véhicule l'Inde auprès des occidentaux, à savoir les retraites spirituelles dans les ashrams avec un gourou-charlatan pour qui les plus grands spirites sont les riches américains qui savent mettre la main au portefeuille. Sans cette acidité et cette acuité de regard propre au trio, on se croirait chez Liz Gilbert ("Mange, Prie, Aime"). Car l'Europe n'est pas oubliée dans le film, bien au contraire puisque le personnage principal de l'histoire est l'écrivaine-scénariste britannique Lucia Lane (Jennifer KENDAL) dont le trio dresse un portrait remarquable de finesse (rehaussé par l'excellente interprétation de l'actrice). Lucia est une femme mûrissante plus immature que sa propre fille et dont l'égocentrisme n'a d'égale que la profonde détresse intérieure. Se comportant comme une petite princesse ne supportant pas qu'on lui résiste, elle sème la désolation autour d'elle en ayant une relation passionnelle avec Vikram dont elle détruit le mariage tout en manipulant Hari le scénariste (Zia MOHYEDDIN), homme de l'ombre au physique moins avantageux qui a le malheur d'être tombé amoureux d'elle. En même temps, Lucia est une étrangère incapable de s'intégrer en Inde ce qui donne tantôt des scènes comiques (celles de l'ashram), tantôt des scènes profondément mélancoliques. Le personnage aliéné qui ravage sa vie et celle des autres et finit par contempler tristement son désert affectif annonce Hugh GRANT dans "Maurice" (1987) ou Anthony HOPKINS dans "Les Vestiges du jour" (1993).

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