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Articles avec #ford (john) tag

Just Pals

Publié le par Rosalie210

John Ford (1920)

Just Pals

"Just Pals" ("Juste des potes") est le premier film de John FORD réalisé pour les studios Fox après avoir travaillé plusieurs années durant pour Universal. Par sa durée mais surtout par sa thématique, il fait penser à "Le Gosse" (1921) réalisé un an plus tard par Charlie CHAPLIN. Une version champêtre du kid reposant sur l'amitié qui se noue entre Bim (Buck JONES), le "bon à rien" du village et Bill (Georgie STONE), un jeune vagabond orphelin qu'il adopte par hasard. John FORD créé deux personnages attachants dont il met en avant les qualités morales face à une communauté villageoise remplie de préjugés et dont certains individus à l'apparence respectable dissimulent une âme de crapule, essentiellement par l'argent. C'est le cas des "Thénardier locaux" qui veulent arracher Bill des mains de Bim parce qu'ils le confondent avec un enfant kidnappé et recherché contre une grosse récompense par son père fortuné. C'est aussi le cas du soupirant de la jolie institutrice du village (Helen FERGUSON) dont Bim est également amoureux mais qui n'hésite pas à la compromettre en la persuadant de lui remettre la caisse de l'école. Après la découverte du forfait et du corps de l'institutrice qui a tenté de se noyer, tous les soupçons se portent sur Bim qui est également surpris au beau milieu du hold-up de la banque et compromis par les malfaiteurs. La promptitude avec laquelle les villageois lui mettent la corde au cou révèle à quel point cet intrus les dérange. Mais Bill qui a retrouvé à l'école les enfants des lyncheurs de Bim n'a pas l'intention de les laisser faire. Toutes ces intrigues qui relèvent de la chronique villageoise, du western, du mélo, du film d'action et d'aventures et de la comédie sont traitées de façon aussi limpides que trépidantes et en plus, on ressent beaucoup de tendresse pour ces déclassés inassimilables mais à l'âme intacte. Un petit régal.

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By Indian Post

Publié le par Rosalie210

John Ford (1919)

By Indian Post

"By Indian Post" est l'un des plus anciens films de John FORD (sous le nom de Jack FORD) qui nous soit parvenu, bien qu'amputé de quelques minutes. On estime en effet que seuls trois de ses cinquante premiers films ont survécu (à ce jour). Un western de jeunesse de deux bobines plutôt réjouissant mêlant action et humour dans une veine burlesque alors en vogue dans le cinéma muet. Une histoire d'amour contrariée entre un cow-boy et la fille de son patron qui ne voit pas d'un bon oeil cette union, une vie en communauté, un indien qui s'improvise courrier du coeur (d'où le titre) en dévalisant le dortoir des cow-boys au passage, une course-poursuite dynamique, une arrestation musclée et une fin à la mise en scène virtuose et acrobatique jouant sur différentes hauteurs, portes et fenêtres. C'est léger mais la patte du maître est déjà présente sur plusieurs séquences (la course-poursuite très enlevée et le final, brillant) et c'est l'occasion de découvrir un cinéaste à ses tout débuts: une rareté.

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Qu'elle était verte ma vallée (How Green Was My Valley)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1941)

Qu'elle était verte ma vallée (How Green Was My Valley)

Un homme d'une soixantaine d'années dont on entend la voix mais dont on ne verra pas le visage est sur le point de quitter définitivement le village de mineurs dans lequel il a grandi au Pays de Galle. Il se souvient alors avec nostalgie de son enfance à la fin du XIX° siècle et nous fait entrer (littéralement) dans le quotidien de sa famille et de sa communauté. Un quotidien routinier marqué par les journées de labeur et les traditions (le patriarcat, la religion) avec ses joies (mariages, naissances) et ses peines (les accidents) que le jeune Huw (Roddy McDOWALL) souhaite perpétuer, refusant les autres perspectives qui lui sont offertes. Cependant, John FORD (qui s'est inspiré de sa propre famille) décrit un monde confronté au changement. Sous l'effet du surpeuplement, de l'exploitation capitaliste et des conflits sociaux, la famille Morgan se défait. Quand les fils ne meurent pas à la mine, ils sont obligés d'émigrer, celle-ci licenciant ses travailleurs les mieux payés pour en prendre d'autres à plus bas salaires. Le même délitement touche les institutions. L'école s'avère injuste envers les plus pauvres. L'Eglise se transforme en tribunal clouant au pilori les pécheurs (et surtout les pécheresses). La communauté réagit de façon grégaire, attaquant le père Morgan parce qu'il refuse de faire grève puis plus tard, l'ensemble de la famille lorsque des rumeurs courent sur une liaison entre la fille des Morgan (Maureen O HARA) et le pasteur (Walter PIDGEON). La décision de ce dernier de ne pas l'épouser s'avère à tous points de vue un désastre qui jette une ombre sur cet homme par ailleurs pétri d'aura humaniste. John FORD nous fait ressentir admirablement l'ambivalence de cette vallée, nourricière et mortifère à la fois à l'aide d'une série de plans saisissants, beaux comme des tableaux vivants. Ceux-ci embrassent la rue principale du village, pentue et bordée de corons avec tout au fond de l'image, la mine en surplomb. Cette composition du cadre dévoile les enjeux du film comme le fera plus tard celle qui ouvre et ferme "La Prisonnière du désert" (1956)".

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L'aigle vole au soleil (The Wings of Eagles)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1957)

L'aigle vole au soleil (The Wings of Eagles)

Jamais je n'aurais regardé ce film s'il n'avait été réalisé par John Ford. Le sujet en effet ne m'attirait pas du tout. Mais avec un tel réalisateur aux manettes, ça ne pouvait être que bien. Plus que bien même, c'est un excellent film d'autant que l'alchimie avec John Wayne (brillant une fois de plus) fait encore une fois merveille. On s'attend à un biopic édifiant sur la personnalité héroïque et résiliente de Frank "Spig" Wead (qui était un ami du réalisateur lui-même haut gradé dans la marine) ou bien d'un film de guerre bien nationaliste mais John Ford déjoue nos attentes. Tout d'abord il tourne en dérision la rivalité entre l'armée de terre et la marine en s'inscrivant dans la plus pure tradition de la comédie burlesque muette avec pugilat, lancer de tarte à la crème et comique de répétition (l'entrée en scène des forces de l'ordre venus mater la baston entre les troupes de Wead et celles de son homologue de l'armée de terre). Tout cela tourne au concours de bistouquettes ce qui n'est pas très glorieux pour l'armée d'autant qu'elle apparaît assez bornée face aux idées novatrices de Frank Wead qui veut doter dans les années qui suivent la première guerre mondiale l'US Navy d'une force aéronavale alors que lui-même n'a pas le brevet de pilote (cascades hasardeuses assurées qui font encore une fois désordre). Ensuite, après un accident domestique, Frank Wead se retrouve paralysé des pieds à la tête et sa rééducation, longue et laborieuse ne lui permet pas de retrouver totalement sa mobilité puisqu'il doit marcher avec des cannes: ce n'est pas vraiment l'image traditionnelle de la virilité. D'autant qu'il doit alors troquer ses rêves d'action et d'aventure pour le papier et le stylo afin d'écrire des scénarios à la manière de Miyazaki qui à cause de sa myopie n'a jamais pu devenir pilote et a donc transposé son désir d'évasion dans la création artistique (c'est évidemment aussi le cas de John Ford que la guerre a éborgné). Et alors qu'il a repris du service après Pearl Harbor, un nouvel ennui de santé sur la fin l'oblige à prendre sa retraite anticipée et à quitter ses hommes en larmes assis dans une chaise qui le transfère du porte-avion sur un navire militaire. Enfin, la plus grande souffrance de cet homme réside dans le fait d'avoir sacrifié sa vie de famille à son travail dans l'armée et à sa passion pour l'aviation. Sa femme utilise la métaphore des tiroirs encastrés façon poupées russes pour lui signaler qu'elle est la dernière roue du carrosse (Maureen O'Hara, habituée à jouer les épouses de John Wayne pour John Ford). Un plan magnifique de cadre dans le cadre dont John Ford a le secret montre Frank noyé dans l'ombre au premier plan et sa femme éclairée au second, tous deux terrassés par la douleur de la perte d'un enfant mais isolément l'un de l'autre comme si le premier n'était qu'une ombre dans le foyer. Plus tard il sera une image furtive sur un écran pour ses filles et non un père réel, au point qu'elles finiront par ne plus le reconnaître. Sa chute dans les escaliers due à la précipitation en entendant l'une d'elle crier peut être comprise comme une tentative de se racheter mais aussi comme un aveu d'impuissance puisqu'il ne parviendra jamais à les rejoindre et devra se contenter lui aussi de les voir en photo. Derrière le rire, omniprésent et la générosité incarnée par Carson (Dan Dailey) qui joue le rôle du pote indéfectible, infirmier, rééducateur, bouclier humain, clown de service etc. et un personnage auto-parodique, celui de Dodge (Ward Bond), le film est poignant et profondément humain. Voilà donc une pépite méconnue de la filmographie du cinéaste et de son acteur fétiche qu'il faut absolument redécouvrir.

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La Dernière fanfare (The Last Hurrah)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1958)

La Dernière fanfare (The Last Hurrah)

"La Dernière fanfare" est comme "L Homme qui tua Liberty Valance" (1962) un film crépusculaire et testamentaire de John FORD, une oeuvre méconnue (parce que plus difficile d'accès) mettant en scène la dernière campagne électorale du vieux maire d'une grande ville de Nouvelle-Angleterre d'origine irlandaise Frank Skeffington (Spencer TRACY). John FORD réussit comme dans nombre de ses autres films le croisement de l'intime et du politique et donne un bel éclairage sur la société de son temps alors en mutation. Bien que ses méthodes soient plus que douteuses (chantage, instrumentalisation d'événements de la vie civile à des fins politiques sans parler de certains membres de son entourage qui ont pour lui une dévotion fanatique qui confine au déni de réalité), Skeffington est montré comme un personnage positif qui se soucie du sort des petites gens et aime aller à leur contact. Mais il est usé par ses quatre précédents mandats et dépassé par les nouvelles technologies, notamment l'importance croissante de la télévision. Bien que la scène dans laquelle son jeune adversaire apparaît dans la petite lucarne est volontairement caricaturale, elle annonce l'importance de ce média dans la vie politique: on pense au débat ayant opposé en 1960 Nixon à Kennedy, ce dernier ayant pris l'avantage grâce à sa plus grande maîtrise de l'outil médiatique. Sensibilité politique et appartenances religieuses et culturelles vont également de pair: Skeffington est logiquement catholique (comme John FORD et Spencer TRACY, tous deux d'origine irlandaise, le personnage de Skeffington étant un double d'eux-mêmes) alors que son adversaire bien que présenté également comme irlandais est la marionnette des WASP (white anglo-saxons protestants) qui représentent le groupe dominant, beaucoup plus conservateur*. La fracture est en effet également sociale, la mère de Skeffington (que l'on devine être un "self made man") ayant été humiliée par le père de l'un de ses adversaires acharné, le journaliste Amos Force (John CARRADINE) chez qui elle était domestique. Pour enfoncer le clou, on apprend que ce journaliste a appartenu au KKK. C'est donc en filigrane à une analyse des fractures de l'Amérique (plus que jamais d'actualité) qu'effectue John FORD, doublé du portrait d'un homme vieillissant qui livre le combat de trop. Si la première partie du film est solaire, la deuxième est mélancolique et funèbre. Privé de l'adrénaline de l'arène politique, le personnage tombe dans l'abîme des problèmes de santé (Ford et Tracy étaient eux-mêmes malades) et de la solitude. Sa famille est en effet inexistante. Comme dans "La Charge héroïque" (1949), l'homme est un veuf qui n'a pas fait le deuil de son épouse alors qu'aucune communication n'est possible avec son insupportable fils trop gâté. Enième élément d'identification puisque John Ford ne cachait pas l'amertume que lui inspirait son fils alors que l'avènement de la télévision avait pour conséquence la crainte des cinéastes d'être marginalisés.

* L'analyse de la filmographie de John FORD permet de mesurer à quel point il ne correspondait pas à l'étiquette de "traditionnaliste" qu'on lui a collée à la peau que ce soit dans son regard sur les femmes ou les minorités, lui-même ayant vécu des situations de discrimination. Il n'entrait en réalité dans aucune case.

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Frontière chinoise (Seven Women)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1966)

Frontière chinoise (Seven Women)

Dernier film de John Ford, "Frontière chinoise" possède l'un de ces titres français cache-sexe (au sens propre!) destinés à camoufler la part de sensibilité féminine de ses films dans un but grossièrement commercial*. Pourtant, difficile de masquer le fait que celui-ci (qui se nomme "Seven women" en VO) n'a que des femmes pour protagonistes principaux. Film méconnu n'existant pas en DVD en France (comme nombre de classiques), "Seven women" est pourtant un très beau film-testament qui reprend la plupart des motifs fordiens.

Si la part féminine des films de John Ford est évidente pour qui connaît un peu sérieusement le cinéaste, elle reste le plus souvent dans l'ombre. Elle constitue la plupart du temps un terreau ou un socle sur lequel peuvent pousser et s'appuyer les personnages masculins du cinéaste, terreau sans lequel ils sont condamnés à s'égarer. Dans "La Charge héroïque", la boussole du capitaine est la tombe de son épouse où il vient régulièrement se recueillir. Sans la femme aimée et perdue, Ethan Edwards ("La Prisonnière du désert") aurait été un être définitivement maudit. Sans Dallas, Ringo Kid ("La Chevauchée fantastique") serait resté un hors-la-loi. Et ne parlons même pas des bandits transformés en "godfathers" par la grâce d'une femme mourante qui leur confie son bébé dans "Le Fils du désert". Car donner, sauver, protéger la vie est une mission sacrée chez John Ford. C'est elle qui constitue la principale boussole morale de ses films. Et "Seven Women" ne déroge pas à la règle. Le fait que pour son dernier film, John Ford ait mis les femmes sur le devant de la scène est donc aussi pour lui une manière de reconnaître l'importance qu'elles ont eu dans sa vie et son cinéma.

La trame de "Seven women" ressemble beaucoup à celle de "La Chevauchée fantastique". Soit une cohabitation-confrontation dans des circonstances de plus en plus dramatiques et dans un espace clos d'un groupe de femmes missionnaires pétries de principes puritains et d'une femme-médecin athée, masculine et libérée. Les épreuves qu'elles vont endurer vont avoir valeur de révélation. Alors que leur directrice (Margaret Leighton) psycho rigide (et rongée par ses frustrations) s'avère impuissante face aux malheurs qui les frappent (elle est même du genre à les aggraver par son comportement borné et son dégoût du sexe et de l'enfantement), le docteur Cartwright en qui se mêlent Dallas, Ringo kid et le docteur Boone prend des décisions destinées à leur sauver la vie ainsi que celle de l'enfant à naître de l'une d'elles, quitte à sacrifier la sienne**. Ce personnage admirable (et remarquablement interprété par Anne Bancroft) devrait figurer depuis longtemps au panthéon des femmes les plus fortes jamais créées par le cinéma américain. Néanmoins, aucun personnage féminin n'est sacrifié. Des nuances subtiles apparaissent entre elles selon leur âge, leur vécu ou leur personnalité. Un enjeu se dessine autour de la plus jeune des missionnaires (jouée par Sue Lyon, aux antipodes de son rôle de Lolita chez Kubrick), la seule qui a encore la vie devant elle. Un temps influencée par la directrice, elle finit par trouver un mentor en la personne du docteur Cartwright. Cette femme en apparence désabusée, revenue de tout (des hommes et d'une société qui l'a privée de la carrière qu'elle aurait mérité si elle avait été un homme), John Ford lui rend un ultime hommage en lui donnant une réplique d'homme rageuse et percutante (celle qu'il aurait prononcé s'il avait été dans sa situation) puis en éteignant les lumières, lui conservant l'intimité de ses derniers instants. 

 

* Les exemples les plus célèbres sont "La Charge héroïque" ("She wore a yellow ribbon" en VO) et "La poursuite impitoyable" ("My Darling Clementine" en VO).

** C'est sans doute une coïncidence mais il y a des points communs entre la trame de "Seven women" et celle de "Breaking the waves". Soit une femme qui se sacrifie dans un noble but en étant pointée du doigt par tout ou partie de la communauté dans laquelle elle vit parce que pour y parvenir elle est contrainte de se prostituer.

Frontière chinoise (Seven Women)

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L'Homme tranquille (The Quiet Man)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1952)

L'Homme tranquille (The Quiet Man)

J'adore John FORD lorsqu'il fait des westerns et des drames situés aux USA, le ton y est toujours très juste. Mais sa comédie irlandaise "L'Homme tranquille" me fait rire jaune. Les qualités cinématographiques du film, je les voie, notamment la beauté des paysages, volontairement artificialisés par la photographie et le cadre pour souligner le caractère fantasmée d'une Irlande de carte postale. Mais je n'adhère pas du tout à l'histoire que je trouve affreusement réactionnaire en dépit de toutes les démonstrations qui tentent de prouver le contraire. Réactionnaire et content de l'être sur l'air de "ah c'était le bon vieux temps, celui des verts pâturages où l'on savait vivre, où l'on était bien entouré par la chaleur humaine de la communauté et où on ne souffrait pas de maux existentiels tant chacun et chacune savait rester à sa place". Sauf que cette petite communauté villageoise certes joviale et conviviale mais où l'on pratique l'entre-soi et la beauferie autosatisfaite n'accueille Sean l'américain (John WAYNE) que parce qu'il a ses racines dans le pays. La scène du bar montre bien que s'il n'avait pas eu le bon mot de passe, celui de ses origines, il aurait été exclu. D'autre part si Sean retourne au pays de ses ancêtres c'est pour se ressourcer après un drame (remarquablement filmé et intégré dans le récit) qui lui a coûté sa combativité, c'est à dire sa virilité. Laquelle revient le titiller sous la forme d'une mégère très près de ses sous (Maureen O HARA) et de son frère caractériel (Victor McLAGLEN) avec lequel il se lance dans un concours de bistouquette… euh non, de poignée de main (c'est qui-qui se-rrera le plus fort, Trump ou Macron? ^^^^^). Heureusement le bain de jouvence à base de traditions qui fleurent bon le terroir, bastons, parties de pêche, fêtes de la bière, course de chevaux avec pour trophée le chapeau des spectatrices (forcément spectatrices des exploits de ces messieurs) fonctionne à ravir. Mary Kate peut jubiler, elle a réussi à réveiller le fauve, celui qui la traîne devant tout le village sur le mode primate "Moi Tarzan, toi Jane" et pour lequel elle va se hâter de confectionner de bons petits plats. Parce qu'une femme de caractère, c'est juste une frustrée en attente de l'homme qui viendra la dompter et réveiller ses instincts de ménagère accomplie. De ce point de vue, la mission est réussie.

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Rio Grande

Publié le par Rosalie210

John Ford (1950)

Rio Grande

"Rio Grande" est considéré comme légèrement plus faible que les deux autres films de la trilogie que Ford a consacré à la cavalerie. Ce qui est discutable car certains des reproches qui lui sont fait (le sentimentalisme, le scénario trop lâche) valent aussi pour "La Charge héroïque". "Rio Grande" est même sur la fin plus palpitant et tendu que son prédécesseur. L'autre reproche que l'on a fait à ce film est son apparent manichéisme car comme dans "La chevauchée fantastique", de pauvres civils sans défense, femmes et enfants, sont attaqués par de méchants indiens. Ces deux films ont d'ailleurs contribué à forger la réputation d'un Ford réac et raciste.

Mais cette image simpliste est -une fois de plus- un contresens. Comme dans les deux autres films de la trilogie, Ford montre que le peuple indien est pluriel, comme le sont tous les peuples. Il met au premier plan des indiens pillards et cruels mais il montre aussi des indiens se battant aux côtés de la cavalerie et ce dès les premières images. Quant aux longues scènes de massacres d'indiens, elles avaient en fait pour but de rallonger leurs jours de tournage afin de mieux les payer car ils étaient menacés par la famine.

Enfin les aspects sentimentaux du film, admirablement joués et mis en scène sont essentiels au propos. La mise en scène relie en effet intrinsèquement le collectif et l'individuel. Ainsi le film s'ouvre sur le régiment qui rentre au fort après une bataille, transportant ses blessés et ses morts sous les yeux angoissés des femmes qui cherchent leur proche. La fin du film reprend la scène à l'identique mais cette fois, le regard féminin s'est personnalisé sous les traits de Kathleen (Maureen O'hara) qui cherche son mari blessé, le colonel Kirby York (John Wayne). Entre ces deux scènes, le couple, séparé depuis 15 ans à cause des séquelles de la guerre de Sécession s'est retrouvé au fil de petites touches pleine de délicatesse (des regards qui se cherchent, une musique du passé qui émeut etc.)

Ajoutons que le travail sur la lumière est somptueux et les cadrages toujours aussi parfaits.

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La Charge héroïque (She Wore a Yellow Ribbon)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1949)

La Charge héroïque (She Wore a Yellow Ribbon)

"La charge héroïque", il ne faut pas se le cacher, peut rebuter aujourd'hui à cause de personnages caricaturaux dans leur majorité et d'une intrigue mollassonne qui entraîne rapidement l'ennui. Pour comprendre son intérêt, il faut aller au delà de cette impression négative car si le film n'est pas spontanément passionnant, il le devient lorsqu'on l'analyse plus en profondeur.

Le titre français est un pur et simple contresens. Il annonce un film viril, guerrier, triomphant, conquérant, bref un film à la gloire des mâles blancs dominateurs à la fois racistes et macho (c'est quand même l'image dont souffre aujourd'hui le genre du western). Or il prend le contrepied de tout cela et je vais démontrer (une fois de plus) que John Ford et son alter ego à l'écran John Wayne ne correspondent pas à l'étiquette négative qui leur colle à la peau.

Le vrai titre du film c'est "She wore a yellow ribbon". Un titre au féminin qui annonce une intrigue sentimentale dans le milieu de la cavalerie. En fait il s'agit d'une sous-intrigue assez superficielle qui parcourt tout le film sous la forme d'un triangle amoureux entre Olivia (Joanne Dru), la nièce du commandant major de la garnison et deux lieutenants épris d'elle, Cohill (John Agar) et Penell (Harry Carey Jr) qui se disputent ses faveurs. Mais ce titre a une portée bien plus large et plus intéressante que cette seule sous-intrigue.

"She wore a yellow ribbon" approfondit le portrait du capitaine joué par John Wayne dans le premier volet de la trilogie "Le massacre de Fort Apache": un homme de terrain et un homme de paix très éloigné des poncifs entourant la masculinité des films de guerre que l'on en juge:

- C'est un "vieil homme" sur le point de prendre sa retraite (John Wayne a été vieilli de 20 ans pour l'occasion).

- Sa dernière mission consiste à accompagner deux femmes en lieu sûr et il finit par se retrouver à la tête d'un convoi comprenant également un blessé et deux enfants.

- Soucieux d'empêcher les effusions de sang, il fait des détours pour éviter les indiens à qui il donne le temps d'attaquer la garnison où ils doivent se rendre, provoquant l'échec de sa mission.

- Il ne peut se résoudre à prendre sa retraite sans avoir tenté d'empêcher la guerre entre le fort qu'il commande et les indiens. Après avoir rencontré un vieux chef tout aussi pacifiste et impuissant que lui, il imagine un raid qui désarmera les indiens en ne coûtant la vie de personne (magnifique scène des chevaux libérés qui en galopant s'interposent entre les fusils et les hommes).

- Lorsqu'il n'est pas en mission, on le voit se recueillir sur la tombe de sa femme et de ses filles ou longuement contempler leurs portraits avec une émotion palpable. Et lorsque son régiment lui offre une montre pour son départ à la retraite, il est ému aux larmes.

- L'évitement des affrontements en dépit d'un contexte de violence omniprésent (les indiens spoliés veulent récupérer leurs terres et se livrent pour cela à des exactions) rend le film profondément méditatif et contemplatif. Ford en fait une véritable œuvre picturale animée où chaque plan en technicolor du paysage de Monument Valley (de près, de loin, de jour, de nuit, sous le soleil au zénith, sous le soleil couchant, sous l'orage etc.) est à tomber par terre de beauté.

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Le Massacre de Fort Apache (Fort Apache)

Publié le par Rosalie210

John Ford (1948)

Le Massacre de Fort Apache (Fort Apache)

La conclusion de ce film célèbre, le premier de la "trilogie de la cavalerie" de Ford, fait penser à la fameuse citation de "L'Homme qui tua Liberty Valance": "Quand la légende dépasse la vérité alors on imprime la légende."

Mais la vérité et la légende ne se trouvent pas forcément là où on les attend. Ford s'est inspiré d'un événement historique réel transformé en mythe national: la bataille de Little Big Horn en 1876 où le général Custer fut défait par les Sioux. Tout en réaffirmant la nécessité des mythes dans la construction d'une nation, Ford rétablit un certain nombre de vérités humaines qui font la richesse de son film, par ailleurs d'une beauté et d'une majesté à couper le souffle.

Il paraît que fasciné par Dickens, Ford aurait exigé que chaque personnage possède une biographie complète. Cela se ressent tant les portraits des principaux protagonistes sont fouillés. Et celui du général Custer (alias Owen Thursday dans le film) dynamite complètement l'image du héros national forgé par la mémoire collective. Thursday se rapproche plutôt des généraux des "Sentiers de la gloire" de Kubrick. Comme eux, c'est un psychorigide autoritariste qui n'écoute personne et envoie ses hommes à la mort autant par orgueil que par mépris de classe. Quant à l'adversaire indien, il éprouve à son égard un racisme qui justifie toutes les bassesses à leur égard. Henry Fonda n'a pas attendu Sergio Leone pour endosser un rôle qui est à la fois antipathique et pathétique: son "héroïsme" est autant fait de bêtise que d'inconscience et ressemble à un suicide collectif.

A l'opposé, le capitaine Kirby Roy, un sous-fifre de l'ombre, est montré comme un modèle d'humanisme et de pragmatisme, un homme de terrain, un homme ouvert, un homme respectueux et humble, un diplomate et un pacifiste plutôt qu'un homme d'action (ce qui lui vaut d'être traité de poltron, un grand classique de la manipulation psychologique devant le refus d'obéir aux ordres que l'on retrouve aussi dans les "Sentiers de la gloire"). Et c'est John Wayne qui endosse ce rôle de sage, un Wayne impeccable de sobriété dont l'aura ne cesse de grandir au fur et à mesure que le comportement individualiste et obtus de Thursday devient de plus en plus insupportable. Je ne cesse de clamer de film en film mon admiration pour ce grand acteur qui est à l'opposé des clichés forgés par ses (stupides) détracteurs.

Enfin les indiens sont anoblis par la caméra de Ford. Cochise et ses troupes apparaissent comme des hommes dignes dont les revendications sont légitimes et qui ne se battent que pour défendre leurs droits. Ford démontre de façon éclatante que la guerre se retourne toujours contre ceux qui l'ont provoquée alors qu'elle s'éteint d'elle-même face à ceux qui la refusent.

Loin des clichés qui ont forgé la réputation de ce cinéaste.

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