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Articles avec #film musical tag

They Shot the Piano Player (Dispararon al pianista)

Publié le par Rosalie210

Fernando Trueba et Javier Mariscal (2024)

They Shot the Piano Player (Dispararon al pianista)

"They shot the Piano Player" est la deuxième collaboration du réalisateur Fernando TRUEBA et du dessinateur Javier MARISCAL après "Chico & Rita" (2010). On y retrouve l'animation et la musique latino mais "They shot the Piano Player" est aussi un film politique au travers d'une enquête sur la disparition d'un pianiste de jazz brésilien virtuose, Francisco Tenório Júnior, à la veille du coup d'Etat en Argentine en 1976. Plus de 30 ans après les faits, le journaliste américain fictif Jeff Harris (l'alter ego de Fernando TRUEBA) qui doit écrire un livre sur la bossa nova découvre un enregistrement du musicien disparu. Subjugué, il part à la recherche de ceux qui l'ont connu et ressuscite l'âge d'or de la musique brésilienne au travers de ses représentants les plus prestigieux dont on entend la voix au travers de leur avatar animé. Même moi qui ne suis pas une spécialiste, j'ai reconnu Chico BUARQUE, Gilberto GIL ou encore Caetano VELOSO. Et si d'autres me sont inconnus, je les connais en réalité à travers leurs oeuvres (Vinicius de MORAES qui accompagnait le pianiste lors de la tournée durant laquelle il a disparu est l'auteur des paroles de "The girl from Ipanema"). Des anecdotes impliquant également de grands noms du jazz afro-américain comme Ella FITZGERALD sont évoquées. Et le parallèle créatif avec la nouvelle vague française (bossa nova se traduit par nouvelle vague), l'influence de Francois TRUFFAUT surtout se retrouve à travers le titre, hommage à "Tirez sur le pianiste" (1960). Mais en parallèle de cette effervescence de sons et de couleurs, le film évoque la terrible période des dictatures militaires s'étant abattues en Amérique latine avec la complicité de la CIA et leur coordination au travers de l'opération condor pour traquer leurs opposants communistes ou supposés tels. Car Tenório n'étant pas politisé, il peut être considéré comme une victime collatérale de ce terrorisme d'Etat se trouvant au mauvais endroit et au mauvais moment, embarqué à cause de son apparence l'assimilant aux révolutionnaires, torturé puis exécuté pour l'empêcher de témoigner de ce qu'il avait vu et vécu. L'enquête de Jeff Harris l'amène donc à reconstituer les lieux de détention, de torture et d'exécution, la disparition des corps, les bébés enlevés à leur mère pour être adoptés par des familles soutenant le régime et les séquelles sur les survivants (la femme de Tenório privée du statut de veuve et des ressources allant avec par exemple). Un peu ardu à suivre par moments avec quelques redites et longueurs mais on y apprend beaucoup, on y voit et y entend beaucoup et on repart avec une question lancinante "Comment tant de douceur et de beauté ont pu cohabiter avec tant de barbarie?".

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Dans les oreilles de Alain Resnais

Publié le par Rosalie210

Géraldine Boudot (2019)

Dans les oreilles de Alain Resnais

Une approche du cinéma de Alain RESNAIS par le son. On retrouve dans les témoignages comme dans l'interview du réalisateur certains aspects de sa personnalité tels que l'importance de la musique dans son oeuvre, son éclectisme et sa recherche permanente de renouvellement.

L'importance de la musique dans son oeuvre se manifeste d'abord par ses films musicaux tels que "On connait la chanson" (1997) ou l'opérette "Pas sur la bouche" (2003). Mais aussi par les personnages de musiciens dans son oeuvre ("Melo") (1986) et son attention à la musicalité des voix. Personnellement, je suis particulièrement sensible à cette musicalité lors des longs monologues de Andre DUSSOLLIER dans "Melo" (1986) et de Pierre ARDITI dans "Smoking" (1992) dont les modulations sont lyriques au possible, en accord avec la corde intérieure qu'ils font vibrer. Et que dire du magnifique "L'Amour a mort" (1984) construit comme les touches d'un piano, les blanches étant privées de musique et les noires, d'image (hormis la neige qui tombe).

L'éclectisme musical de Alain RESNAIS se manifeste dans les choix des compositeurs de ses musiques comme dans la variété des morceaux choisis, allant de la musique contemporaine à la variété. De même, il change de compositeur d'un film à l'autre, faisant parfois des choix surprenants comme celui de Mark SNOW qui a signé la célèbre musique de la série "X-Files" (et qui témoigne dans le documentaire). Un point commun se dessine avec deux de ses scénaristes fétiches, Jean-Pierre BACRI et Agnes JAOUI (qui témoigne dans le documentaire): le refus de s'enfermer dans une chapelle. Ainsi le cinéma de Resnais est à la fois expérimental, exigeant et pour certains de ses films, populaires.

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Annie du Klondike (Klondike Annie)

Publié le par Rosalie210

Raoul Walsh (1936)

Annie du Klondike (Klondike Annie)

Au cinéma tout est possible: faire passer Mae WEST pour une bonne soeur, c'est comme déguiser Ginger ROGERS en gamine de 12 ans ou Jack LEMMON et Tony CURTIS en femmes, et pourtant, ça marche. Bien que "Annie du Klondike" ne soit pas réalisé par Billy WILDER mais par Raoul WALSH, il a quelque chose de cet état d'esprit issu du music-hall dont Mae WEST était issue, d'autant que c'est elle qui a écrit la pièce de théâtre et l'a adaptée en scénario. Mae WEST, largement oubliée aujourd'hui a été une immense star mais a tourné dans assez peu de films. Véritable bête de scène à la verve gouailleuse et aux formes particulièrement généreuses (très loin des canons de beauté occidentaux actuels), Mae WEST a beaucoup joué au chat et à la souris avec la censure pour imposer ses dialogues remplis de sous-entendus sexuels et son tempérament de croqueuse d'hommes à l'esprit canaille. "Annie du Klondike" est un film dans lequel elle s'amuse avec son image, passant donc du statut de poule de luxe à celui d'évangéliste aux méthodes peu orthodoxes, véritable pied-de-nez à l'Amérique puritaine dont elle était on s'en doute la bête noire. Le film vaut essentiellement aujourd'hui pour la performance de l'actrice forte en gueule qui certes appartient au même monde que Jean GABIN ou Marlene DIETRICH (dont elle parodie le style dans les numéros chantés de ses films pour Josef von STERNBERG) mais qui comme cette dernière apparaît aussi comme une icône féministe moderne. Ainsi on savoure sa manière de damer le pion aux hommes en leur répondant du tac au tac, de jeter sur eux le même regard de désir qu'ils ont pour elle et on apprécie ses réparties, notamment celle qui semble parfaitement la résumer: "je préfère suivre mon instinct qu'être assujettie".

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Le monde de demain

Publié le par Rosalie210

Katell Quillévéré et Hélier Cisterne 52022)

Le monde de demain

Une des meilleures mini-séries de 2022, diffusée d'abord sur Arte puis sur Netflix. Réalisée par Katell QUILLEVERE et Helier CISTERNE dont l'intérêt pour l'histoire et les questions politiques et sociales n'est plus à démontrer, elle raconte la genèse du mouvement hip-hop en France au début des années 80, indissociable de l'émergence artistique d'une jeunesse populaire et métissée jusque là invisible dans les médias alors cadenassés par l'Etat. La mini-série suit plusieurs de ces jeunes, mettant en lumière au passage les différentes facettes du hip-hop que l'on a tendance à réduire au seul rap.

Le premier d'entre eux est le DJ Dee Nasty alias Daniel Bigeault (Andranic MANET) qui a joué un rôle fondateur méconnu et pourtant essentiel. Passionné par ce mouvement qu'il a découvert à San Francisco et qu'il importe en France, il mixe et scratche dans des clubs, enregistre le premier album de rap français en 1984, anime des soirées en plein air, ouvre l'antenne des radios libres au rap et aux rappeurs, notamment sur Radio Nova entre 1988 et 1989. Tout cela en autodidacte et dans une marginalité dont il ne sortira jamais vraiment. Il est dépeint sous les traits d'un jeune homme passionné, sensible, introverti et qui s'affirme peu. Tout le contraire de son explosive compagne Béatrice (Leo CHALIE), personnage fictif mais très fortement inspiré par le parcours et la personnalité de Catherine Ringer (et Daniel a d'ailleurs des points communs avec Fred Chichin). Ce n'est d'ailleurs pas le moindre exploit de la série que de mettre en avant des femmes fortes dans un univers très masculin, à l'image de la graffeuse Lady V (Laika BLANC-FRANCARD) qui fut la compagne de Kool Shen alias Bruno Lopes, l'un des deux membres du groupe NTM.

Parmi la nouvelle génération de talents que Dee Nasty a contribué a révéler, la série se focalise en effet sur Didier Morville (Melvin BOOMER) et Bruno Lopes (Anthony BAJON) qui traversent toutes les strates de ce mouvement sans véritable solution de continuité. Ils sont d'abord danseurs, puis graffeurs (stade durant lequel ils inventent leurs pseudos, JoeyStarr et Kool Shen) et enfin rappeurs. Tout cela dans une sorte de bouillonnement culturel propre à l'époque. L'histoire s'arrête en effet avant leur starisation et ne cherche jamais à les extraire de leur milieu. Celui-ci est dépeint avec beaucoup de réalisme et c'est ce qui est passionnant. On voit par exemple leurs "battles" avec d'autres groupes de danse et de rap. On voit également comment leurs milieux familiaux à la fois proches et opposés les ont forgés. D'un côté la famille chaleureuse et unie de Bruno Lopes dont il ne veut pas s'éloigner ce qui lui fait renoncer à une carrière de footballeur. De l'autre la jeunesse chaotique de Didier Morville cherchant à échapper à un père violent. L'une de mes séquences préférées est celle où le père ouvrier de Bruno Lopes voit son fils pour la première fois à la télévision dans "Mon Zénith à moi" à l'initiative de Nina Hagen qui a connu NTM via son compagnon, Frank Chevalier qui est alors le manager du groupe: choc culturel garanti!

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Tár

Publié le par Rosalie210

Todd Field (2023)

Tár

D'abord il faut traverser l'interminable logorrhée du début où Lydia Tar fait le show, en (re)présentation promo, en conférence, en répétition. C'est trop long (le film est trop long de toute façon) mais j'ai tenu bon parce que j'étais intriguée par le fait qu'il existe dès la première image un double discours. Il y a le flux de paroles émises par Lydia qui envahit l'espace. Il y a derrière ce flux ce sentiment de toute-puissance qui l'habite, qui occupe l'éloquente affiche en contre-plongée, ses gestes de cheffe d'orchestre, une main fermée sur un globe invisible, elle qui se revendique "maîtresse des horloges" et l'autre menant son monde à la baguette. On l'aura compris, tout en elle respire l'ivresse du pouvoir, celui des cimes, des dieux, des empereurs et des rois avec leur sceptre et leur couronne. Le pouvoir de vie et de mort, elle en use et en abuse selon son bon plaisir, elle qui élève la jeune violoncelliste Olga et brise parallèlement la carrière et la vie de Krista ou bien humilie devant ses camarades un étudiant arrogant qui juge la valeur artistique d'une oeuvre en fonction d'un prisme moral et idéologique (ce que l'on désigne sous le terme de "cancel culture" mais je n'aime pas cet anglicisme fourre-tout). Bref Lydia qui parle d'elle au masculin est imprégnée de phallocratie jusqu'au bout des ongles, preuve que le pouvoir de domination et sa toxicité n'est pas le monopole d'un genre, même s'il est largement accaparé par des hommes.

En même temps, ce qui m'a tenu en haleine dans un film qui sinon ressemblerait beaucoup à "Whiplash" (2014), c'est comme je le disais dès le début, son caractère double. Car il se passe beaucoup de choses à l'insu de Lydia, elle qui croit tout contrôler. Dès les premières images, on voit qu'elle est filmée sur un smartphone par quelqu'un d'autre alors qu'elle s'est endormie au cours d'un trajet en avion. La personne qui la filme et dont l'identité ne sera pas révélée tient en même temps une discussion instantanée par SMS qui dévoile son opinion négative sur ce qu'elle filme. Le caractère malveillant et récurrent de ces agissements apparaît donc bien avant qu'il ne porte ses fruits lorsqu'un montage de la conférence où elle a humilié l'étudiant est publié sur les réseaux sociaux. Effet garanti car Lydia s'est fait beaucoup d'ennemis et à cet endroit précis, elle est rattrapée par son genre, ses origines sociales (modestes comme on le découvre sur la fin) et les conséquences de ses actes. Dans "Whiplash" (2014), le professeur mis en cause pour harcèlement perdait certes son poste mais conservait une autorité sur son élève. Lydia perd tout avec une extrême rapidité et se retrouve bannie de la "bonne" société new-yorkaise. Si en surface, elle ne laisse rien paraître de sa déchéance (et le visage-masque de Cate BLANCHETT est de ce point de vue parfait), continuant son activité tout au bas de l'échelle du prestige (voir la très ironique séquence finale), son inconscient s'agite à sa place durant tout le film dans un délire de plus en plus paranoïaque: cauchemars, bruits divers, disparition d'objets, harcèlement de la voisine ne lui laissent aucun moment de répit.

La grande sacrifiée dans toute cette histoire, c'est la musique. Il n'y a aucune place pour elle, jamais de temps, jamais d'espace, ni physique, ni mental. Lydia aurait pu tout aussi bien être ministre ou cheffe d'entreprise, l'histoire aurait été la même. "Tar" (2022) est un clou de plus enfoncé dans le rapport névrotique que les WASP entretiennent avec la musique où l'émotion est remplacée par la compétition acharnée. Le petit milieu élitiste dépeint par ce film sec comme une trique se résume à une galerie de monstres sans âme ni coeur. C'est aussi sa limite, ne montrer que des ombres habillées au goût du jour.

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Oh, oh, oh, jolie tournée!

Publié le par Rosalie210

Jacques Rozier (1984)

Oh, oh, oh, jolie tournée!

Un OVNI que ce documentaire de Jacques ROZIER de qualité VHS et pollué par un timecode apparent qui aussi incroyable que cela paraisse raconte en fait la genèse improbable sinon de la totalité de "Maine Ocean" (1986), du moins celle de la séquence "Le roi de la samba". Pourtant à priori, on est très loin de l'univers du cinéma. Le documentaire nous plonge en effet au coeur de la tournée du "Podium-Europe 1" de l'année 1984. Présentés par Michel Drucker, la série de concerts ressemble à une déclinaison "vacances à la mer" de son émission "Champs-Elysées". Au menu, Linda de Suza, Claude Barzotti et Bernard MENEZ avec son tube "Jolie Poupée" qui cartonnait alors dans les hit-parades. Or sans être aussi schizophrène que Takeshi KITANO (qui avant sa consécration à Venise comme grand cinéaste était aux yeux des japonais un humoriste de télévision) Bernard MENEZ était déjà en 1984 l'un des interprètes fétiches de Jacques ROZIER. "Du cote d'Orouet" (1971) qui avait lancé sa carrière lui avait d'ailleurs ouvert les portes de la nouvelle vague puisque deux ans plus tard, il figurait à l'affiche de "La Nuit americaine" (1973) de Francois TRUFFAUT (ce qui ne l'avait pas empêché de jouer aussi dans des comédies populaires). C'est donc pour les beaux yeux de Bernard MENEZ que Jacques ROZIER tourne le documentaire "Oh oh oh jolie tournée". L'acteur-chanteur est en effet de presque tous les plans et quand il ne chante pas sur scène, Jacques ROZIER le suit partout: à l'hôtel, en séances de dédicaces, dans la maison de vacances de Michel Drucker (à propos de ce dernier, il fait une remarque amusante, se demandant dans quelles vitamines il puise son énergie). L'air de rien, Jacques ROZIER capte donc l'air d'un temps révolu où les émissions, chansons et stars de variétés étaient reines, montre sa fascination pour le monde de la télévision et des vacances à la mer et fait le portrait d'un homme qui pourrait être le voisin de palier, en décalage par rapport au cirque qui l'entoure*. Un cirque auquel participe en toile de fond une troupe de danseurs brésiliens (dont Rosa-Maria GOMES, future Dejanira de "Maine Ocean") (1986) que Jacques ROZIER filme dans les coulisses se moquant de Bernard MENEZ chantant sur scène avec une danseuse blanche comme deux faces de la même médaille. Lorsqu'ils sont réunis sous la caméra de Jacques ROZIER après le spectacle, Bernard MENEZ dit "Le Brésil et moi, on était fait pour s'entendre". C'est sur ce malentendu que le cinéaste va construire"Maine Ocean" (1986).

* Pour reprendre les propos de l'émission que France Culture lui a consacré, "Souvent dans le cinéma, on lui reproche les succès du théâtre Michel et de la chanson populaire. Les êtres avec physique d’homme en vacances et lumière de 30 juin, ça fait des jaloux. Bernard Menez aime raconter la dernière scène du film de Jacques Rozier, Maine Océan : un contrôleur des trains qui veut changer de vie. Bernard Menez a changé de métiers mille fois, il a le physique d’un homme en vacances, c’est-à-dire un homme disponible à rêver et à changer- lui qui a aussi eu envie de faire bouger les lignes en politique. Bernard Menez donne envie de repenser nos physiques d’hommes et de femmes pressés, nos physiques de l’année, nos physiques de septembre pour en faire des physiques de juillet".

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La Vie est un roman

Publié le par Rosalie210

Alain Resnais (1983)

La Vie est un roman

Tout au long de sa carrière, Alain RESNAIS n'a cessé d'expérimenter des formes nouvelles, de jouer sur les rapports entre vérité et artificialité et de télescoper les temporalités. "La vie est un roman" est un titre programmatique et autre aspect récurrent du cinéma de Resnais, l'unité de lieu est ici un château comme dans "L'Annee derniere a Marienbad" (1961). Une scène unique pour trois histoires d'époques différentes (Moyen-Age, première guerre mondiale, époque contemporaine du film) dont le lien paraît assez ténu. Il est question de recherche du bonheur et de l'idéal par l'utopie (ré)éducative, façon secte ou façon débat d'idées. Le tout entrecoupé de jeux d'enfants et d'un conte de fées. En dépit du talent de monteur de Resnais, la mayonnaise ne prend pas vraiment tant le résultat paraît théorique et artificiel. La seule touche de naturel du film provient de Sabine AZEMA qui entamait une fructueuse collaboration avec celui qui allait partager sa vie. Elle apporte de la fraîcheur à un film par ailleurs empesé et kitsch dans lequel la plupart des acteurs cabotinent à mieux mieux faute d'avoir des rôles substantiels. Même si c'est toujours intéressant de comprendre les sources d'influence d'un réalisateur et que l'on discerne par exemple dans "La vie est un roman" les prémisses de "On connait la chanson" (1997), le film est à l'image de son château: une grosse meringue indigeste et décousue.

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Underground

Publié le par Rosalie210

Emir Kusturica (1995)

Underground

Voilà un film qui n'existait dans ma mémoire que par sa formidable BO que, à l'image de "Arizona Dream" (1993), je n'ai cessé d'écouter en boucle. A cela s'ajoutait quelques images oxymoriques d'une mariée volant à l'intérieur d'une cave. Mais l'histoire, je l'avais complètement oubliée car je n'avais sans doute pas à l'époque compris les enjeux. "Underground" est une fresque historique de la Yougoslavie s'étirant sur plus d'un demi-siècle, de la seconde guerre mondiale jusqu'à la guerre de Bosnie (qui n'était pas terminée quand Emir KUSTURICA a tourné le film) par le biais d'un traitement allégorique, celui de la caverne platonicienne. En effet comme le titre l'indique, la majeure partie des personnages du film vivent confinés dans une cave pendant près de deux décennies, manipulés par un profiteur qui par intérêt personnel les maintient dans l'illusion que la seconde guerre mondiale n'est pas terminée. On pense à "Goodbye Lenin" (2001) qui repose sur un postulat semblable (un fils cache à sa mère alitée les changements historiques en cours en inventant un monde parallèle dans lequel le communisme ne se serait pas effondré) et plus près de nous à "Onoda, 10 000 nuits dans la jungle" (2021) où en vertu des ordres qui lui ont été donné et de son abandon par l'armée japonaise sur une île isolée, Onoda se persuade pendant trente ans que la guerre n'est pas finie. Cette manière de produire un récit uchronique à l'intérieur d'un récit historique est une évidente métaphore du cinéma créateur de fictions au coeur du monde réel. D'ailleurs à la manière d'un Robert ZEMECKIS, Emir KUSTURICA retouche les images d'archives pour y introduire ses personnages de fiction. La confusion entre les deux dimensions est telle que lorsque Blacky et son fils Jovan sortent enfin de la cave, ils tombent en plein tournage d'un film qui reconstitue leur histoire pendant la guerre mais croient qu'il s'agit de la réalité. Et d'une certaine manière, ils ont raison. Car l'imaginaire slave mis sous cloche durant un demi-siècle par la dictature communiste a rejoué sans cesse la même partition belliqueuse qui lui a tenu lieu d'identité. C'est encore le cas en Russie qui vit dans la nostalgie de l'URSS et des victoires contre le nazisme. Aussi l'image des partisans fabriquant de façon immuable des armes à la chaîne sur un atelier circulaire ou bien l'orchestre tzigane tournant sur lui-même comme une toupie illustre bien la folie autarcique s'étant emparé des peuples de l'est emmurés vivants et coupés de l'histoire en marche. Peuples qui une fois déconfinés retournent leur folie guerrière contre leurs semblables sous forme de règlements de comptes et de fractures religieuses, métaphoriquement illustrée par la dérive des continents. Mais le film-somme de Emir KUSTURICA se caractérise aussi par son caractère baroque, ses images oniriques (à l'exemple de la mariée qui vole ou qui nage au fond des eaux) et son rythme frénétique martelé par une fanfare tzigane qui est un personnage du film à part entière. Film paradoxal ayant existé en amont sous forme de pièce de théâtre (grâce à son unité de lieu) et en aval sous forme de mini-série (grâce à son caractère de fresque historique). Oeuvre définitivement hors-norme et quelque peu ogresque qui a valu à son réalisateur d'obtenir sa deuxième Palme d'or en 1995.

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Hedwig and the angry inch

Publié le par Rosalie210

John Cameron Mitchell (2001)

Hedwig and the angry inch

"Hedwig and the Angry Inch" est à l'origine une comédie musicale créée par John Cameron MITCHELL en 1998. C'est également lui qui l'adapte pour le cinéma en 2001. Mais le personnage d'Hedwig avait déjà fait des apparitions sur scène à partir de 1994. Biographie chantée subvertie par l'esprit queer et transcendée par l'énergie rock, "Hedwig" met en lumière la part d'ombre des stars "crypto-gays" symbolisées par le chanteur américain Tommy Gnosis (Michael PITT). Hedwig, transexuel originaire de Berlin-est a en effet été son mentor avant que Tommy ne s'enfuie en lui volant les chansons qu'il avait créé pour lui. Ainsi en parallèle des images de concert soulignant le succès de Tommy, on assiste aux galères quotidiennes d'Hedwig contraint pour survivre de se produire dans des lieux miteux avec son groupe "The Angry Inch". Une allusion à l'opération ratée de changement de sexe subie par Hedwig au moment de passer à l'ouest. La symbolique du mur de Berlin qui coupe en deux la ville jusqu'en 1989 rejoint la problématique de Hedwig qui a été charcuté physiquement de telle façon qu'il n'est ni tout à fait un homme, ni tout à fait une femme et qui est à la recherche sentimentalement et sexuellement de sa moitié perdue (ce qu'exprime la chanson "The Origin of love"). Cette symbolique du mur était aussi celle des chanteurs de rock ayant servi de modèle à Hedwig à savoir "The Berlin Three" (David BOWIE, Lou REED, Iggy POP). S'il y a d'ailleurs une chanson qui définit Hedwig au point qu'il la fredonne c'est "Walk on the wild side". Pourtant malgré le caractère périlleux du sujet, le film n'est pas graveleux. John Cameron MITCHELL dont l'abattage impressionne interprète un Hedwig sensible à la recherche de lui-même et de l'âme soeur. Un personnage cash et candide aux émotions à fleur de peau que ce soit dans les larmes ou la colère qui équilibre l'emballage drag exubérant et les sujets explosifs qu'il charrie avec lui. D'autant que à certains moments, il n'y a plus d'emballage, John Cameron MITCHELL n'hésitant pas à se mettre à nu, au propre comme au figuré. La BO est somptueuse.

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Dancing Pina

Publié le par Rosalie210

Florian Heinzen-Ziob (2023)

Dancing Pina

Encore un documentaire sur Pina BAUSCH? Oui mais celui-ci a la particularité de s'intéresser à la transmission du travail de la célèbre chorégraphe allemande décédée en 2009 et à démontrer son caractère universel. Le film évolue en effet entre deux scènes aussi contrastées que complémentaires. La première est celle de l'opéra Semper à Dresde où l'on assiste aux répétitions et à la première de "Iphigénie en Tauride". Bien que l'on reste en Allemagne, la compagnie de ballet de l'opéra de Dresde est la première à avoir reçu l'autorisation de danser la chorégraphie que Pina Bausch avait inventé pour son théâtre de la danse à Wuppertal. Et Iphigénie est incarnée par Sangeun Lee, une danseuse sud-coréenne. La seconde est celle de l'école des Sables, centre international dédié aux danses africaines traditionnelles et contemporaines qui recrute et forme des danseurs venus des quatre coins de l'Afrique. Basée au sud de Dakar, elle présente une version décoiffante de la chorégraphie de Pina Bausch sur le "Sacre du printemps". Dans les deux cas, les danseurs sont encadrés par des piliers de la compagnie du théâtre de la danse de Wuppertal. Ainsi, Sangeun répète sous la direction de Malou AIRAUDO qui comme on le découvre sur des images d'archives a créé de nombreux rôles dansés imaginés par Pina dont Iphigénie dans les années 70. Du côté de l'école des Sables, c'est Josephine Ann Endicott, elle aussi ancienne soliste dans la troupe de Pina BAUSCH qui dirige les répétitions assistée par Jorge Puerta Armenta.

Disons-le franchement: le résultat est magique et émouvant. Les allers-retours incessants entre l'Allemagne et le Sénégal créent un contraste saisissant entre nature et culture, entre d'un côté un cadre néoclassique qui fait penser à l'opéra Garnier et de l'autre, un espace ouvert sur le désert et la mer où les danseurs évoluent à même la terre et le sable. Et en même temps des similitudes émergent autour de l'idée d'imperfection et de diversité en contraste cette fois avec la danse classique qui exige perfection et uniformité. Sangeun Lee complexe sur sa grande taille, Josephine Ann Endicott (venue du classique) évoque ses kilos en trop, d'autres danseuses parlent de leur carrure trop large et ce en de multiples langues: allemand, anglais, français mais aussi portugais car parmi les 14 pays africains représentés, Lucieny Kaabral, l'une des danseuses les plus impressionnantes, proche de la transe est d'origine cap-verdienne. Cette diversité est aussi celle des styles de danse, certains venant du classique, d'autres de la danse traditionnelle, d'autres de la danse contemporaine etc. A travers leurs témoignages, c'est un portrait en creux qui se dessine, celui de Pina BAUSCH, artiste anticonformiste et visionnaire dont l'art semble se couler avec un naturel confondant dans tous les corps et tous les environnements. La dernière scène sur la plage est renversante.

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