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Articles avec #fantastique tag

La Momie (The Mummy)

Publié le par Rosalie210

Alex Kurtzman (2017)

La Momie (The Mummy)

Comparativement à "Lego Batman" qui mélangeait tout et n'importe quoi dans un climat complètement hystérique, "La Momie" 2017 est un modèle d'épure. Bien sûr c'est du cinéma commercial où les grands studios hollywoodiens (ici Universal) recyclent à l'infini leurs vieilles recettes (la première version de "La Momie" chez Universal date de 1932 et son inventeur est Louis Feuillade en 1913). Le scénario n'a ni queue ni tête et sombre parfois dans le ridicule mais les scènes d'action valent largement le détour notamment celle de l'avion en chute libre. Et puis il y a Tom Cruise. Tom et Cruise. Jeckyll et Hyde (même si c'est Russell Crowe qui le joue). Le film est un parfait condensé de sa personnalité à multiples facettes: apparence lisse et solaire dissimulant une attirance (morbide) pour les forces obscures (Kubrick en avait génialement tiré parti dans "Eyes wide shut"), sens poussé de l'autodérision (comme dans "Entretien avec un vampire"), fuite en avant à 200 à l'heure contre le temps qui passe (comme dans les "Mission: impossible"). Comme le dit Télérama "La star hante chaque plan, chaque cascade". Si vous êtes allergique à cet acteur passez votre chemin mais sinon on passe plutôt un bon moment. Outre la/les inévitables suites que ce reboot va générer, les studios iront-ils jusqu'à reprendre Tom Cruise pour les autres monstres de leur catalogue qu'ils veulent relifter? (Dracula, Frankenstein, le Loup-garou...)

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Les enfants-loups, Ame et Yuki (Ōkami kodomo no Ame to Yuki)

Publié le par Rosalie210

Mamoru Hosoda (2012)

Les enfants-loups, Ame et Yuki (Ōkami kodomo no Ame to Yuki)

"Les Enfants Loups" est le film de la maturité pour Mamoru Hosoda et celui qui a permis à un plus large public de le découvrir en France. Il s'agit d'une superbe fable qui reprend les thèmes de ses précédents longs-métrages: le temps qui passe et la nécessité de faire des choix pour se construire (comme dans son premier film, "La Traversée du temps"); l'opposition entre ville et campagne, tradition et modernité (comme dans "Summer Wars" son deuxième film). On le compare avec justesse aux "Souvenirs goutte à goutte" d'Isao Takahata à cause de son réalisme et de son caractère intimiste en forme de tranches de vie. Mais des similitudes avec l'œuvre animiste de Miyazaki existent également, notamment avec "Mon voisin Totoro".

Toutefois "Les Enfants Loups" n'a rien d'une redite. Le film développe une histoire originale traitée avec beaucoup de sensibilité et de finesse. Son sujet central n'est pas la maternité ou l'éducation comme on peut le lire ici et là mais la complexité de l'identité humaine. L'hybridité d'Ame et de Yuki, mi-humains, mi-loups est métaphorique et peut s'interpréter de plusieurs façons. Comme une double identité/culture, une mixité, un métissage lié au fait qu'ils sont issus d'un couple humain/loup-garou (lequel est lui-même hybride comme le centaure ou la sirène) qu'il faut cacher pour ne pas être rejeté de la société. Mais également comme une mise en lumière de la double nature de l'homme mi animale, mi spirituelle mise en péril par la civilisation moderne. Selon John Knight, l’un des meilleurs experts des loups japonais, l’attitude de la population japonaise envers le loup reflète son attitude à l’égard de la nature. Longtemps sacralisés, les loups ont été éradiqués à la fin du XIX° parallèlement à l'expansion urbaine du premier miracle japonais et à son occidentalisation. Le bétonnage de la nature va de pair avec celui des émotions. Les grandes villes surpeuplées comme Tokyo ont coupé le contact avec la nature et se montrent particulièrement inadaptées et intolérantes vis à vis de tout ce qui peut s'apparenter à l'animalité de l'homme. Pour survivre, la mère doit se retrancher dans son appartement avec ses enfants, menacés par les voisins et les services sociaux. Elle n'a aucun recours comme on peut le voir dans la scène ou partie pour faire soigner Ame, elle ne peut choisir entre un service pédiatrique et une clinique vétérinaire. La campagne apparaît certes comme un milieu rude et délaissé mais dans lequel il est possible de s'intégrer et de s'épanouir pleinement. Au delà des enfants loups, chacun peut composer avec sa double nature: Hana le prénom de la mère signifie "fleur", elle est aidée par un vieux paysan revêche qui ressemble à un loup solitaire etc. C'est donc là que les enfants peuvent choisir ce qu'ils veulent devenir. De caractères opposés, on les voit grandir et se tourner vers des destins complètement différents. Yuki, jeune fille bouillonnante doit apprendre à canaliser ses émotions animales pour s'intégrer au monde des humains. Ame au contraire doit larguer les amarres humaines et se séparer de sa mère pour intégrer le monde animal.

On le voit la réflexion est riche, subtile et les graphismes sont magnifiques. Un film majeur de l'animation japonaise des dix dernières années.

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E.T. L'extra-terrestre (E.T.the Extra-Terrestrial)

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (1982)

E.T. L'extra-terrestre (E.T.the Extra-Terrestrial)

On colle à E.T. l'étiquette de "film pour enfants" mais c'est avant tout un grand film humaniste. Steven Spielberg a pris à contrepied la majeure partie des œuvres de science-fiction où les extraterrestres jouent le rôle de bouc-émissaire en endossant la part monstrueuse en nous que nous ne voulons pas assumer.

L'extraterrestre est le plus souvent une variante de la peur de l'autre. Il est associé au thème fantasmatique de l'invasion que ce soit dans la "Guerre des mondes" de H.G. Wells ou la série des années 60 "Les Envahisseurs" (génialement détournée par les Inconnus dans les années 80 pour dénoncer la peur des migrants, la soucoupe volante devenant un couscoussier puis un bol de riz). Spielberg retourne complètement ce schéma. E.T. n'entre dans la maison que parce qu'il y est invité par Elliott qui l'abrite ensuite dans sa chambre, au milieu de ses peluches. Il y a bien des scènes d'invasion dans le film mais les prédateurs sont des hommes adultes chargés d'espionner la maison d'Elliott puis de l'envahir pour s'emparer de force de l'extraterrestre. Des adultes dont l'inhumanité est soulignée par l'absence de visage. Le haut de leur corps est coupé par une caméra qui filme à hauteur d'enfant (et E.T. est lui-même à cette hauteur) puis celui-ci est dissimulé par un casque de cosmonaute.

Le visage étant le principal vecteur des émotions, on en déduit que Spielberg oppose des adultes mutilés par leur perte de contact avec elles (le symbole des clés accrochées à la ceinture d'un des chercheurs est à ce titre révélateur ainsi que celui des armes dans la version de 1982 et des talkies walkies dans la version retouchée de 2002) à des enfants encore intacts, capables de se connecter aussi bien à leur intériorité qu'au monde qui les entoure. Le thème des enfants extralucides face à des adultes aveugles a souvent été traité au cinéma des Ailes du désir de Wim Wenders (seuls les enfants voient les anges) à Mon voisin Totoro d'Hayao Miyazaki (seuls les enfants voient les esprits de la forêt). Comme chez le réalisateur japonais, capacité d'empathie et respect de la nature sont indissociables. Elliott ressent toutes les émotions de E.T. et libère les grenouilles sur le point de faire les frais du cours de dissection. C'est bien lui Adam, l'homme créé à l'image de Dieu que Michel-Ange a immortalisé au plafond de la chapelle Sixtine par des doigts qui se touchent, iconographie reprise par l'affiche et mêlée à la magie des débuts du cinéma (la lune de Méliès).

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Monty Python sacré Graal (Monty Python and the Holy Grail)

Publié le par Rosalie210

Terry Gilliam et Terry Jones (1975)

Monty Python sacré Graal (Monty Python and the Holy Grail)

Un grand film fauché qui nous sort un gag tordant à la seconde, on y perd son latin ou plutôt son anglais. Il y a au moins trois ingrédients qui expliquent cet OVNI indémodable et culte du paysage cinématographique (même si à titre personnel j'ai une préférence pour le moins connu Sens de la vie):

- Comme je le disais plus haut, le tout petit budget accordé aux Monty Python pour réaliser leur premier film les a paradoxalement servis. Ainsi le gag des noix de coco, utilisé dans les studios de doublage pour imiter le bruit du galop devient-il ici un gag du plus haut effet comique servant à ridiculiser Arthur et ses chevaliers réduits à des enfants contraints de faire semblant de "jouer à dada" sur des chevaux fantômes. On peut en dire autant d'un autre gag célébrissime du film, celui du lapin tueur.

- Noix de coco et lapin tueur ont aussi pour fonction de participer au caractère brechtien et iconoclaste du film qui casse tout effet d'illusion cinématographique. Le générique à tiroirs, à rallonge et à différents degrés a pour mission d'annoncer la couleur. La discussion avec les chevaliers du château qui demandent d'où peuvent venir les noix de coco souligne le caractère absurde du film. Enfin l'anachronisme est utilisé comme une mise en abyme réjouissante de l'époque à laquelle le film a été tourné, à savoir celle de la guerre froide USA/URSS. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre la scène de lutte des classes entre Arthur et un groupe de paysans anarcho-syndicalistes organisés en communes autonomes ainsi que l'apparition d'objets/aliments contemporains (voiture, orange...) ou la répétition d'une même scène ou l'interruption de l'action pour interpeller l'équipe du film. A partir du meurtre de l'historien par un chevalier, le Moyen-Age et l'époque contemporaine se télescopent jusqu'à être réunies dans les scènes finales. Celles-ci laissent d'ailleurs entendre qu'Arthur et ses chevaliers pourraient tout à fait être des fous échappés d'un asile en 1975. Ou bien plus subversivement que la légende arthurienne, ciment national anglais (avec le sentiment anti-français retourné contre eux et ridiculisé) n'est qu'un leurre.

-Enfin la "parodie érudite" est un autre cocktail détonnant. Terry Jones et Terry Gilliam ont une connaissance approfondie du Moyen-Age et de son iconographie. Ainsi le code d'honneur du chevalier mû par l'amour courtois est fidèlement retranscrit mais tourné en dérision. Lancelot trucide sauvagement tous ceux qui croisent son chemin pour délivrer une princesse enfermée dans sa tour qui s'avère être un prince efféminé. De même le ménestrel censé chanter les louanges de Robin se met à vanter sa couardise. Idem avec les religieux. Les moines en prennent pour leur grade mais les enluminures animées de Gilliam qui ouvrent les sketches rappellent leur fonction de copiste et d'enlumineur de manuscrits tout en détournant leur contenu. Même le lancer de vache trouve ses origines dans la ruse imaginée par les habitants d'un château assiégé par les troupes de Charlemagne. Ils avaient lancé un cochon par dessus les remparts pour leur faire croire qu'ils avaient encore de la nourriture. Ce qui avait eu pour effet d'entraîner la levée du siège.

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Les contes de la nuit 3D

Publié le par Rosalie210

Michel Ocelot (2011)

Les contes de la nuit 3D

C'est en quelque sorte la deuxième partie d'un diptyque dont le premier volet était "Princes et princesses", la nouveauté résidant dans l'usage de la 3D pour essentiellement accentuer la profondeur de champ. Si j'ai une petite réserve sur la fragmentation induite par le film à sketchs qui empêche de développer le récit et de nous attacher aux personnages, cela est largement compensé par la beauté envoûtante des images. Les fonds colorés sont de véritables œuvres d'arts (à l'exception de ceux du "garçon qui ne mentait jamais" que je trouve moins ciselés) sur lesquels se détachent d'autant mieux les personnages en ombres chinoises dont l'esthétique est tout aussi finement travaillée. L'intérêt de ces ombres est au moins double:

- L'animation en papier découpé a été la première employée par Michel Ocelot et son caractère artisanal la rend largement accessible. Le film rend hommage à la créativité et à l'imagination de deux jeunes gens et d'un vieux technicien qui réenchantent un cinéma à l'abandon.

-L'ombre chinoise est un espéranto visuel. Les contes d'Ocelot se déroulant aux 4 coins du monde et mettant en scène des personnages d'origine très variée, l'ombre permet une identification et une incarnation universelle.

On remarque également que si les contes varient temporellement et géographiquement (civilisation Aztèque du XV° siècle, Moyen-Age et Renaissance en occident, Afrique, Antilles et Tibet à une époque indéterminée), le message est toujours le même. Il s'adresse à la jeunesse et à ses capacités émancipatrices vis à vis des préjugés, abus de pouvoir et traditions obscurantistes incarnées par les anciens. C'est particulièrement évident dans "L'élue de la ville d'or" qui s'insurge contre les sacrifices humains et la soif de l'or, "Ti Jean et la Belle-sans-connaître" où le héros rejette les conseils malavisés d'un vieil homme ce qui lui sauvera la vie ou encore "La fille-biche et le fils de l'architecte" où la métamorphose permet d'échapper à un mariage forcé.

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Kirikou et la sorcière

Publié le par Rosalie210

Michel Ocelot (1998)

Kirikou et la sorcière

Où est mon père? Où sont les frères de mon père? Où sont les frères de ma mère? Pourquoi la source s'est tarie? Pourquoi Karaba est-elle si méchante?

Ces questions sont autant de brèches contre le poids de la fatalité qui accable un village d'Afrique de l'ouest quelque part entre le Sénégal (d'où viennent les doubleurs qui prêtent leurs voix aux personnages ainsi que le compositeur Youssou N'Dour) et la Guinée (où Michel Ocelot a vécu enfant). Ce village s'est résigné à mourir à petit feu sous l'emprise de la terrible sorcière à qui ils attribuent tous leurs malheurs. Mais Kirikou qui a été actif dès le début de sa vie puisqu'il s'est enfanté tout seul ne se résigne pas. Il veut comprendre et il veut agir. Et il n'a pas peur. Tout le contraire des villageois qui rivalisent d'obscurantisme, de pusillanimité, de bêtise et de préjugés. La taille lilliputienne de Kirikou et son jeune âge leur inspirent le plus grand mépris. Ils refusent d'écouter ses conseils et refusent de l'aider. Et leur mémoire de poisson rouge leur fait bien vite oublier leur sauveur. Kirikou est tout seul. Sa mère et son grand-père sont de son côté mais sa mère est prisonnière du village et son grand-père de la montagne. Une seule autre personne subit un tel ostracisme: la sorcière qui vit à l'écart du village. Pas étonnant qu'elle fascine Kirikou qui ne veut pas seulement l'empêcher de nuire. Il veut la délivrer de la haine des hommes qui la ronge, sachant sans doute confusément que son sort et le sien sont liés. Et ils le sont effectivement. Karaba a été meurtrie dans sa chair et sa soif de vengeance est d'abord une volonté de contrôler ceux qui l'ont fait souffrir (elle transforme les hommes en objets fétiches, ainsi ils ne pourront plus lui faire du mal). La terreur qu'elle inspire se nourrit aussi de préjugés puisque Kirikou découvre qu'elle n'a pas fait le mal qu'on lui prête. En la délivrant, il se délivre aussi puisqu'un baiser (de réconciliation entre l'homme et la femme) suffit à le métamorphoser en prince.

Outre la profondeur de son histoire et ses personnages marquants, Kirikou et la sorcière scelle un mariage particulièrement réussi entre la culture occidentale et la culture africaine. Michel Ocelot est un trait d'union entre ces deux civilisations qu'il mêle harmonieusement. La forme est aussi somptueuse que le fond. Musique de Youssou N'Dour, esthétique inspirée du Douanier Rousseau, de Klimt et de l'Egypte antique, inspiration puisée dans les contes de fée occidentaux... Mais à l'image de Kirikou, il a fallu une détermination sans faille à Michel Ocelot pour résister aux pressions qui voulaient dénaturer son œuvre en la privant de son identité africaine. Ceux qui voulaient que les personnages soient doublés par des français et ceux qui voulaient rhabiller les corps dénudés, un tabou pour les sociétés anglo-saxonnes. Mais ils ont dû plier devant "l'innocence toute nue et l'intelligence toujours en éveil": le succès bien mérité de Kirikou a été planétaire.

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Angels in America

Publié le par Rosalie210

Mike Nichols (2003)

Angels in America

Angels in America ("Fantaisie gay sur des thèmes nationaux") est à l'origine une pièce de théâtre en deux parties "Le Millenium approche" et "Perestroïka" écrite par Tony Kushner au début des années 1990. La pièce qui prétend fort modestement rien de moins que saisir "l'éclat tragique de la fin de ce siècle" est une fresque des USA des années Reagan confrontés à l'émergence de l'épidémie de sida. Kushner mélange la chronique intimiste, la réflexion politico-historico-religieuse et les échappées oniriques dans le fantastique (ouf!). Le résultat est comme on peut l'imaginer très grandiloquent mais brillant. Kushner n'a pas volé son prix Pulitzer.

C'est Mike Nichols qui a réalisé la mini-série de 6 épisodes d'une heure adaptée de la pièce en 2003. En effet il était impossible de faire tenir un projet aussi démesuré dans un format cinéma classique. Le résultat a été acclamé à l'époque puisque la série a reçu de nombreux prix (Emmy Awards, Golden globes etc.) Avec le recul et un nouveau visionnage, je suis plus critique.

Les parti-pris assez gonflés de la pièce et de la série peuvent dérouter: soit on adhère, soit on rejette. Ainsi, les délires sous substances psychotropes donnent des résultats inégaux. Les apparitions de l'ange (joué par Emma Thompson) et plus globalement toutes les références mythologico-religieuses paraissent assez lourdingues pour ne pas dire grotesques. Ce n'est pas mieux avec les tableaux écolos autour d'un antarctique en train de fondre (avec couche d'ozone trouée en prime). En revanche la rencontre hallucinogène d'Harper en princesse et de Prior en drag-queen dans les décors du château de la Belle et la Bête de Cocteau a quelque chose de magique (et quel bel hommage!)

En faisant abstraction de ce barnum parfois indigeste, il est intéressant de suivre ces personnages marginaux issus de minorités (juive, mormone, afro-américaine) en proie à leurs démons intérieurs dans une Amérique puritaine, intolérante et conservatrice. Les qualités d'écriture permettent d'apprécier certaines saillies comme celle de la définition du parti républicain "pour une moitié des fanatiques religieux voulant contrôler chaque citoyen, pour l'autre des cow-boys libertaires égo-anarchistes criant haro sur l'Etat." Et si le talent d'Emma Thompson est hélas gâché par des rôles qui ne la mettent pas en valeur de même que celui de Meryl Streep dans des rôles ectoplasmiques, on a droit à un sommet grandiose entre Al Pacino dans le rôle de l'avocat véreux Roy Cohn homophobe, raciste et maccarthyste se mourant du sida et sa "négation", Belize, l'infirmier afro-américain et gay joué par le génial Jeffrey Wright. Roy Cohn, personnage historique dont l'action fut à l'origine de l'exécution d'Ethel Rosenberg représente le visage le plus hideux de l'Amérique en "phase terminale, démente et méchante." Mais Al Pacino lui donne comme à d'autres personnages tragiques de sa filmographie une vraie densité. Il apparaît dans sa haine des autres (reflet de sa haine de lui-même) comme une figure autodestructrice de l'Amérique que la compassion que finissent par lui porter ceux qu'il hait vient neutraliser.

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Baby Boss (The Boss Baby)

Publié le par Rosalie210

Tom McGrath (2017)

Baby Boss (The Boss Baby)

Je n'ai pas aimé ce film qui en dépit de quelques bonnes scènes a provoqué surtout chez moi tantôt l'ennui et tantôt la consternation.

L'ennui car chez Dreamworks visiblement, on ne recherche ni la cohérence du scénario, ni l'épure de la mise en scène. Il faut remplir, remplir, remplir le cadre à tout prix. Empiler, s'empiffrer à l'image des gros bébés de l'histoire. Il ne doit pas y avoir de temps mort. Alors certes, Baby Boss est moins hystérique que Madagascar 3 mais tout aussi incohérent et superficiel. Par exemple on multiplie les personnages inutiles au lieu d'approfondir ceux qui existent. Les bébés qui entourent le "Baby boss" par exemple surgissent du néant et retournent au néant aussitôt après avoir fait leurs scènes. En plus ce sont des clones des télétubbies et d'Agnès de Moi moche et méchant. Idem pour la dirigeante à lunettes de Baby Corp. On dirait une version humaine de Germaine de Monstres et Cie. On l'entrevoit 5 secondes avant qu'elle ne soit éclipsée par la vengeance du méchant caoutchouc de l'histoire, une grosse baudruche que les héros ont (trop) vite fait de dégonfler. Il en est de même avec les thèmes, les styles et les références. Il y aurait de quoi faire 4 ou 5 films avec les sujets abordés (monde imaginaire de l'enfance, rivalité fraternelle, guerre commerciale, récit initiatique etc.) mais tout cela se superpose de façon brouillonne et incohérente. Par exemple comment expliquer que les parents ne soient pas étonnés de recevoir par taxi un bébé de la baby corp en costard-cravate et attaché-case alors que l'on a vu un peu plus tôt la mère enceinte? Parce qu'une partie du film se passe dans la tête du grand frère Tim qui a une imagination débordante tiens! Sauf que cette imagination lorsqu'elle apparaît à l'image est censé bénéficier d'une esthétique 2D cartoons ou comics. Or rien de tel lorsque le baby boss arrive dans la famille et en repart. Idem lorsque Tim entend les bébés parler, idem lorsqu'il enregistre leurs paroles sur une cassette audio et qu'ils tentent de la lui reprendre. Si on suit les codes du film on est donc à ces moments là dans la réalité. On nage donc en pleine incohérence puisque le film fait cohabiter dans la même dimension la grossesse naturelle et la fabrique à bébés, les areu et le costume de manager, la voiture à pédales et l'explosion atomique. L'avalanche de références (certaines sont quand même assez drôles comme la parodie de Mary Poppins ou la bave du bébé qui fait penser à la goutte de sueur de Cruise dans Mission Impossible) ne fait que brouiller encore plus le message.

Un message qui tantôt semble faire un appel du pied aux petits enfants (gags caca-prout, mignons petits chiots type peluches Ty) et tantôt semble lancer des œillades aux adultes avec une soi-disant satire du monde de l'entreprise qui ne casse pas 3 pattes à un canard et s'avère de plus hypocrite. Car si mon sentiment dominant a été l'ennui devant ce grand n'importe quoi (au vu des critiques, certains y trouvent leur compte, tant mieux pour eux), c'est de la consternation que j'ai ressenti devant la dernière scène qui m'a fait l'effet d'une douche froide. Celle où le baby boss devient juste un boss qui continue à résoudre tous les problèmes en jetant des liasses de fric au visage. Ca ne m'a pas fait rire du tout.

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Le Château dans le ciel (Tenkū no shiro Rapyuta)

Publié le par Rosalie210

Hayao Miyazaki (1986)

Le Château dans le ciel (Tenkū no shiro Rapyuta)

"Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entier, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées (...) Elam, Ninive, Babylone." Ce texte de Paul Valéry écrit sur des décombres fumantes de la première guerre industrielle de l'histoire peut parfaitement s'appliquer à l'île volante de Laputa (titre du film en VO). Issue d' un passage des Voyages de Gulliver de Jonathan Swift, elle évoque à la fois la tour de Babel et le mythe de l'Atlantide. Elle permet à Miyazaki outre d'époustouflantes scènes aériennes et célestes de développer un discours sur l'hubris des hommes, leur désir fou d'égaler Dieu qui les aveugle et les détruit. Il montre également que cette vanité est vaine et que la nature reprend toujours ses droits. L'île de destruction massive se débarrasse de son dôme inférieur rempli d'engins de mort, libérant les racines de l'arbre géant qui en est le centre. Quant aux robots soldats (ou robots bombes) qui peuplent l'île, dès qu'ils ne sont plus contrôlés dans un but guerrier, ils deviennent des jardiniers protecteurs de la faune et de la flore ou finissent cassés et recouverts par la mousse. L'ambivalence de ces robots qui peuvent être destructeurs comme protecteurs s'inspire de la bergère et du ramoneur de Paul Grimault, première version du Roi et l'Oiseau. Sheeta est une bergère qui découvre en chemin ses origines royales. Comme dans le château de Cagliostro (et chez Grimault) elle doit être unie de force à l'héritier du roi de Laputa. Ce dernier, Muska représente les ténèbres alors que Sheeta n'est que lumière (ce que symbolise le cristal bleu qu'elle porte autour du cou et qui lui permet entre autre de léviter). Muska est un tyran dont le seul but est de s'emparer de Laputa pour dominer le monde. Mais comme le lui fait remarquer Sheeta, Laputa est déserte car déracinée de la terre, aucun homme ne peut supporter d'y vivre longtemps. Sheeta se croit donc condamnée à périr avec Muska ou de sa main. Mais le ramoneur veille, un jeune mineur au cœur pur du nom de Pazu qui a le même rôle de preux chevalier auprès d'elle que Lupin auprès de Clarisse dans le château de Cagliostro. Les scènes d'action et de contemplation s'enchaînent avec une parfaite fluidité et atout supplémentaire, le film bénéficie de la musique de Joe Hisaichi.

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On your mark (On Yua Māku)

Publié le par Rosalie210

Hayao Miyazaki (1995)

On your mark (On Yua Māku)

Au Japon, le clip musical On Your Mark fut projeté en salles en ouverture du film Si tu tends l'oreille de Yoshifumi Kondô en 1995. Il illustre la chanson du même nom, du célèbre groupe Pop-Rock japonais Chage and Aska (Chage&Aska à l’époque du clip). Le film a permis pour la première fois à Hayao Miyazaki d’utiliser le format du clip musical, caractérisé par une durée très courte et dépourvu de dialogue, et au studio Ghibli de se familiariser avec les images de synthèse qu’il utilisera intensivement deux ans plus tard pour le film Princesse Mononoke.

Bien que d'une durée très courte, la réalisation de Miyazaki est aussi forte, originale et personnelle que dans ses longs-métrages. Ce qui ne l'empêche pas de s'abreuver de multiples références.

Une catastrophe nucléaire (manifestement inspirée de Tchernobyl) a anéanti la civilisation humaine à la surface de la terre. Ceux-ci se sont réfugiés sous terre (comme dans la Jetée ou Docteur Folamour) et ont construit des métropoles tentaculaires semblables à celles de Metropolis ou de Blade Runner. Une descente de policiers masqués dans les locaux d'une secte cagoulée (l'église sainte Nova) permet de mesurer le degré de deshumanisation atteint par cette nouvelle civilisation. On pense aux bonzes Dork de Nausicaa mais aussi à Twentieth Century boys d'Urasawa avec la secte d'Ami et le logo de l'œil sur les cagoules ("Dieu vous surveille"). Deux policiers (les membres du groupe Chage et Aska) enlèvent leurs masques lorsqu'ils découvrent une mystérieuse jeune fille ailée, évanouie et enchainée au fond d'un vide-ordure (qui représente à peu près tous ce que les hommes ont renié: la beauté, la liberté, l'innocence...). Mais ils vont être obligés de remettre des masques pour l'aider à s'évader lorsqu'elle est récupérée par des scientifiques avides de l'utiliser comme cobaye. Ils la relâchent à la surface, dans un paysage post-apocalyptique où la nature a repris ses droits (thème de Nausicaa, de Laputa...) ou bien ils meurent avec elle. Le film propose en effet deux fins. Une fin tragique et une fin heureuse. Les dénouements chez Miyazaki ne sont en effet jamais totalement heureux et après avoir vu ces deux fins, le doute subsiste sur la capacité de l'homme à retrouver la raison en même temps que ses racines.

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