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Articles avec #comedie dramatique tag

Conte d'hiver

Publié le par Rosalie210

Eric Rohmer (1992)

Conte d'hiver

C'est peut-être parce que son sujet de départ est proche de "Le Rayon vert" (1986) (la croyance en une magie amoureuse) que "Conte d'hiver" a été celui que j'ai préféré la première fois que j'ai vu le cycle de Éric ROHMER. La présence de Marie RIVIÈRE au moment des retrouvailles entre les deux ex-amants n'est peut-être pas le fruit du hasard ^^. Le fait est que comme tant de personnages rohmériens, Félicie (Charlotte VÉRY) est une indécise, hésitant entre plusieurs lieux et plusieurs hommes dont aucun ne la convainc véritablement. Nous non plus d'ailleurs. Loïc (Hervé FURIC) est un intello chrétien ennuyeux et Maxence (Michel VOLETTI) est un coiffeur sans relief. Mais contrairement à d'autres personnages déboussolés de Rohmer, Félicie se raccroche à une croyance, celle de son amour de vacances perdu à la suite d'une erreur d'adresse. Un lapsus plutôt selon ses propres dires qui lui permet d'entretenir le rêve d'un amour idéal plutôt que de le vivre véritablement. Cela pourrait être assez pathétique s'il n'y avait pas la petite Elise à ses côtés comme preuve de l'existence de cette relation ainsi que le goût d'inachevé de son interruption. Pourtant Félicie ne cherche nullement à le retrouver étant donné qu'elle ne sait rien de lui et de son côté, Charles (Frédéric VAN DEN DRIESSCHE) avec sa fausse adresse n'a pas les moyens d'être plus entreprenant. Résultat, chacun semble être entré en hibernation et compter sur un miracle pour se retrouver.

De deux choses l'une: ou le spectateur acceptera le jeu des hasards et coïncidences du film (ou bien son système de croyances, de signes, de prémonitions) et sera enchanté par ce conte de noël ou bien non et il trouvera l'histoire invraisemblable. Au premier visionnage, j'étais plutôt dans la première catégorie. L'avoir revu m'a plutôt mis dans la seconde. C'est sans doute lié au fait que les acteurs sont tous globalement un peu fades et que ni Félicie, ni Charles ne semblent mériter les attentes qu'ils suscitent. Les discours de Loïc sont casse-pied et Hervé FURIC n'est pas Jean-Louis TRINTIGNANT qui parvenait à mieux faire passer les passages philosophiques. Reste un début vraiment enchanteur, plein de sensualité et qui en dit plus long sur le désir que n'importe quel discours.

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Conte d'automne

Publié le par Rosalie210

Eric Rohmer (1998)

Conte d'automne

Bien avant que la télévision ne s'empare du problème du célibat des agriculteurs et agricultrices avec "L'amour est dans le pré", Éric ROHMER campait une vigneronne d'âge mûr désirant refaire sa vie (Béatrice ROMAND qu'il a filmé dans chacun de ses cycles, adolescente dans l'un de ses contes moraux, "Le Genou de Claire" (1970), jeune adulte dans l'une de ses comédies et proverbes, "Le Beau mariage" (1982) avant de la retrouver à 45 ans pour "Conte d'automne"). Soit disant trop occupée mais en réalité trop fière pour se lancer elle-même dans la recherche de l'âme soeur, Magali confie cette tâche à des intermédiaires de choix: la petite amie de son fils, Rosine (Alexia PORTAL) qui est étudiante et sa meilleure amie Isabelle qui est libraire (Marie RIVIÈRE, autre habituée du cinéma de Éric ROHMER). Rosine souhaite la caser avec son ancien prof de philosophie (Didier SANDRE), deux fois plus âgé qu'elle et avec qui elle a eu une liaison. Isabelle a recourt aux petites annonces pour dénicher la perle rare et ayant le nez creux, tombe sur Gérald (Alain LIBOLT).

Ce conte qui est sans doute mon préféré des quatre a un charme fou. Éric ROHMER parvient à faire ressortir avec beaucoup de finesse les désirs secrets de ses quadragénaires (voire pour certains quinquagénaires) et concocte un scénario irrésistible à base de quiproquos. Entre les moues boudeuses de Magali (qui de son propre aveu a un caractère de cochon accordé à ses cheveux en bataille), le goût prononcé de Etienne le prof de philo pour la chair fraîche et le jeu de séduction qui s'installe entre Gérald et Isabelle qui se fait passer pour Magali et ainsi retrouve le goût des premiers émois amoureux on se régale. Et puis Rohmer n'oublie jamais d'inscrire ses personnages dans un territoire, ici le sud de la vallée du Rhône entre les centrales nucléaires du Tricastin et Saint-Paul-Trois-Châteaux, la Drôme et l'Ardèche sans oublier bien évidemment de filmer longuement le vignoble bio de Magali qui laisse les mauvaises herbes l'envahir pour mieux l'aider à "bien vieillir": de quoi alimenter une réflexion on ne peut plus actuelle...

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Conte d'Eté

Publié le par Rosalie210

Eric Rohmer (1996)

Conte d'Eté

Si "Conte de Printemps" (1990) me faisait penser (toutes proportions gardées) à "Les Nuits de la pleine lune" (1984), c'est de "Pauline à la plage" (1983) que "Conte d'été" se rapproche le plus. De part la présence de Amanda LANGLET qui bien que devenue adulte a conservé une allure juvénile. Mais aussi de part l'ancrage dans un territoire. Car ce que l'on retient d'abord de "Conte d'été" c'est sa géographie. Les personnages passent l'essentiel du film à arpenter un périmètre bien délimité principalement entre Dinard, Saint-Malo et Saint-Lunaire. Arpenter, cheminer, labourer: il y a certes quelques moments statiques mais pour l'essentiel, Éric ROHMER fait des travellings suivant les personnages en train de marcher le long des plages ou des sentiers côtiers, ou se déplacer en bateau, à vélo ou encore en voiture. Ces êtres en perpétuel mouvement rappellent ce qui est pour moi le film fondateur du style de Éric ROHMER, "Le Signe du Lion" (1959). Un film non pas fondé sur le verbe contrairement au cliché auquel on veut le réduire mais sur une errance muette et solitaire lors d'une "vacance" d'été dans un Paris déserté. Gaspard (Melvil POUPAUD qui avait alors 23 ans mais en paraissait 18) semble lui aussi s'être "échoué" à Dinard comme une bouteille jetée à la mer. Totalement seul (il affirme à plusieurs reprises détester les groupes), il n'a durant les premières scènes personne à qui parler, sinon à sa guitare et erre comme une âme en peine d'un lieu à un autre. C'est Margot qui le remarque et engage la conversation avec lui à la plage, c'est elle qui lui propose des sorties, lui présente des amis et surtout prête une oreille à ses confidences quelque peu complaisantes. Il s'avère alors qu'à l'image du Pierre de "Le signe du Lion", Gaspard est "comme un clochard qui se réveille milliardaire": il passe du vide au trop plein, sans l'avoir vraiment cherché tant il se laisse porter par les événements. Sa passivité, son manque de caractère se confirment en effet lorsqu'il se retrouve tiraillé entre trois filles. Margot qui se pose en amie avec un copain tout aussi absent que la copine officielle de Gaspard mais qui n'hésite pas à flirter avec lui, Solène (Gwenaëlle SIMON), rencontrée via Margot, une pulpeuse brune avec laquelle il entretient un rapport de séduction et qui le somme de choisir et enfin Léna (Aurélia NOLIN) la petite amie officielle, une caricature de lui-même en girouette lunatique et irresponsable qui sème le chaos. Au final, Gaspard qui a promis à chacune d'entre elles de les emmener quelques jours à Ouessant saisit le premier prétexte pour prendre la fuite. Il faut dire qu'il aurait eu bien du mal à emmener qui que ce soit quelque part: il passe l'essentiel du film à se faire balader au sens propre par Margot et Solène (qui ont une voiture et pas lui) et au sens figuré par Léna qui souffle le chaud et le froid.

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Conte de Printemps

Publié le par Rosalie210

Eric Rohmer (1990)

Conte de Printemps

"Qui a deux femmes perd son âme, qui a deux maisons perd la raison" était le (faux) proverbe champenois qui illustrait "Les Nuits de la pleine lune" (1984), le quatrième des six films de la série comédies et proverbes réalisés dans les années 80 par Éric ROHMER. Au début des années 90, le réalisateur débute un nouveau cycle de films, "les contes des quatre saisons" avec un "Conte de printemps" qui constitue une variation champêtre de son précédent récit. On y rencontre en effet une jeune femme, professeure de philosophie (Anne TEYSSÈDRE) qui à l'image de nombre d'héroïnes rohmériennes ne tient pas en place ou plutôt ne se sent à sa place nulle part. Jeanne se retrouve ainsi dans la situation ubuesque de posséder les clés de deux appartements (le sien et celui de son copain) mais de n'en habiter aucun, n'y faisant que passer. L'un (le sien) est en effet occupé par un autre couple et l'autre (celui du copain) est au contraire une coquille vide muséifiée. Telle Llewyn Davis, le héros SDF des frères Coen, Jeanne la nomade se met donc à squatter le canapé d'une amie lors d'une soirée où elle fait la connaissance de Natacha (Florence DAREL) qui l'invite à dormir chez elle. Plus exactement, elle l'invite à dormir dans la chambre de son père qui soi-disant n'est jamais là. Mais voilà que ledit père, un séducteur à quarantaine fringante (Hugues QUESTER) débarque juste au moment où Jeanne prend sa douche. Et pour couronner le tout, il possède lui aussi deux maisons, l'une à Paris et l'autre à Fontainebleau, idéale pour "conter fleurette" même si le panorama, à l'image du coeur des personnages est plongé dans le brouillard. A partir de là, tout est en place pour l'éclosion du désir et le marivaudage élégant dont Éric ROHMER a le secret. Et ce d'autant plus que la très jeune copine du père, Eve (Éloïse BENNETT) est détestée par Natacha qui rêve que sa place soit prise par Jeanne tandis que le copain absent de cette dernière semble ressembler presque trait pour trait au père de Natacha...

Comme à son habitude, on ne s'ennuie pas une seconde dans ce film aux dialogues finement ciselés dans lesquels le désir vient troubler les certitudes de Jeanne. On le sait, chez Rohmer les personnages se manipulent beaucoup eux-mêmes avant de l'être par les autres. Ainsi si le plan réel ou supposé de Natacha pour la jeter dans les bras de son père semble échouer, Jeanne en ressort suffisamment ébranlée pour permettre une fin ouverte à tous les vents... printaniers. S'il n'est pas le meilleur des quatre (il recycle beaucoup de thèmes vus précédemment et le casting n'est pas le plus flamboyant de la filmographie de Rohmer), il constitue un opening de bon augure pour la suite.

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Pédale douce

Publié le par Rosalie210

Gabriel Aghion (1995)

Pédale douce

"Pédale douce" est une comédie inégale mais beaucoup plus habile que ne le laissent penser ses oripeaux criards des années 90 (tubes à foison, vision tape à l'œil des homosexuels comme s'il s'agissait d'une faune à part, ressorts comiques boulevardiers etc.) Les bonnes comédies disent toujours quelque chose de leur époque. Le choc culturel frontal entre le monde bourgeois pétri de valeurs conservatrices d'Alexandre Agut (Richard BERRY) et celui du monde de la nuit débridé représenté par le restau-club d'Eva (Fanny ARDANT) ne sont que les deux faces d'une même pièce schizophrénique. Eva vient du même milieu mais donne l'impression d'avoir mis les doigts dans la prise. Ce qui est presque le cas: Alexandre lui offre un bouquet d'ampoules électriques après l'avoir vu en voler une chez lui. Mais par-delà sa crinière ébouriffée, c'est surtout par elle que le scandale arrive puisqu'avec son look de tigresse et son franc-parler, elle révèle les faux-semblants du couple Agut, et plus largement, les turpitudes qui se cachent derrière les convenances bourgeoises. Tous les personnages qui gravitent autour d'elle ont un double fond, à l'image du salon privé de son restaurant qui représente "la face cachée de la lune". Ainsi, lorsque Alexandre décrit l'image qu'il avait de son employé André Lemoine (Jacques GAMBLIN) avant qu'il ne le découvre en plein strip-tease libérateur dans le salon privé d'Eva (un fameux plan-séquence sur le tube de Dalida "Salma ya Salama"), on a l'impression qu'il se décrit lui-même: trop sérieux, voire ennuyeux. Adrien, le collègue d'André Lemoine et ami fusionnel d'Eva (Patrick TIMSIT) est le plus clivé de tous. Obsédé par les apparences, c'est lui qui a l'idée de présenter Eva comme sa femme chez les Agut, introduisant sans le savoir le loup dans la bergerie. On rit beaucoup de ses efforts pour ne pas vieillir et ne pas paraître gay mais dans le fond, c'est un personnage qui illustre assez bien les difficultés de nombre d'homosexuels de l'époque qui pour faire carrière devaient cacher leur homosexualité et ne pouvaient pas se mettre en couple ou fonder une famille (ou alors comme dans le film, d'une manière bancale et en faisant souffrir tout le monde). Sans parler de l'ombre du sida qui s'invite au beau milieu de la fête dans l'appartement des Agut transformé en boîte de nuit sous l'impulsion de Marie (Michèle LAROQUE) qui ne sait plus quoi inventer pour que son mari la regarde à nouveau. Tout le film repose ainsi sur des quiproquos et des malentendus entre des personnages déboussolés qui cachent leur mal-être sous l'extravagance ou sous les convenances. La pirouette finale qui fait penser à "Les Valseuses" (1974) est plutôt bien trouvée dans le sens où le film de Bertrand BLIER s'attaquait lui aussi aux conservatismes sociétaux même s'il s'atteint pas le même degré de méchanceté subversive. Le film de Gabriel AGHION en dépit de ses répliques acides signées Pierre PALMADE est plus bon enfant que véritablement dérangeant.

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Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu (You will meet a tall dark stranger)

Publié le par Rosalie210

Woody Allen (2010)

Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu (You will meet a tall dark stranger)

"Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu" porte bien son titre car il fait partie des films restés quelque peu dans l'ombre du prolifique cinéaste. Pourtant, il ne manque pas de qualités. Le titre justement est fort bien trouvé car ce "bel et sombre inconnu" peut tout aussi bien être le prince charmant que la grande faucheuse comme si l'illusion de l'un n'allait pas sans la réalité de l'autre (ou permettait de la supporter). Il est donc beaucoup question de désirs et de mort dans le film au travers des tribulations d'une famille, les Shepridge traitée à la fois avec beaucoup d'humour et un arrière-goût d'amertume et de mélancolie qui en fait tout l'intérêt. Anthony HOPKINS fait une composition pleine d'autodérision en homme qui, sentant sa fin approcher envoie promener toutes les convenances pour se payer une bimbo qui espère-t-il, lui donnera un héritier, quitte à prendre du viagra, à fréquenter les salles de musculation, les cabines à UV et les boîtes de nuit. Son ex-femme Helena (Gemma JONES) se réfugie quant à elle dans les sciences occultes, un avatar de la magie du cinéma (Cristal, la diseuse de bonne aventure lui suggère une belle prophétie autoréalisatrice) alors que le gendre, Roy (Josh BROLIN), tente un gros coup de poker à la "Match point" (2005) pour relancer sa carrière littéraire en berne tout en lorgnant sa jolie voisine qui n'est plus sûre de vouloir se marier. Enfin Sally (Naomi WATTS), la fille des Shepridge, épouse frustrée de Roy, s'éprend de son patron Greg (Antonio BANDERAS) sur lequel elle cristallise tous ses fantasmes. Sa déception n'en sera que plus cruelle. Même les intrigues vouées à réussir portent en elle leur fantôme maléfique: l'auteur du roman que s'est approprié Roy le hantera à jamais de même que Claire, la femme décédée de Jonathan sera toujours présente dans son couple avec Helena.

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Les Amants passagers (Los Amantes Pasajeros)

Publié le par Rosalie210

Pedro Almodovar (2012)

Les Amants passagers (Los Amantes Pasajeros)

Pedro ALMODÓVAR en panne sèche dans ce qui est l'un de ses plus mauvais films. Bien plus mauvais que ceux de ses débuts qui avaient pour eux une certaine fraîcheur. Là, ça sent franchement la viande avariée dans cet avion qui tourne en rond-rond (comme le scénario du film). Moins une métaphore de l'Espagne en crise qu'une régression communautariste sans pour autant que l'énergie de la Movida n'anime le film. Ce qui est révolu ne peut être ranimé. Aussi le spectateur lambda se retrouve dans la situation du passager classe éco qui sous l'effet de ce puissant somnifère sombre peu à peu dans une douce torpeur et est exclu de la fête (à l'exception de celui qui, bien gaulé peut servir de poupée gonflable à Lola DUEÑAS). Seuls les initiés peuvent s'éclater à l'image des passagers classe affaire et de l'équipage qui s'envoient joyeusement en l'air durant 90% de l'histoire. Mais ils sont bien les seuls avec leurs cocktails à la mescaline et leur déchaînement de libido 100% "La Cage aux Folles" (1973): les personnages sont caricaturaux, les intrigues sont insignifiantes et décousues, le rythme est poussif, la construction, foutraque (la séquence initiale entre Antonio BANDERAS et Penélope CRUZ tombe comme un cheveu sur la soupe ou plutôt comme le téléphone depuis le pont du viaduc qui vient briser le huis-clos du reste du film) La seule scène un peu sympa est celle de la chorégraphie des trois stewards sur "I'm so Excited" des The Pointer Sisters, autrement dit, une séquence-clip. C'est trop peu.

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Mina Tannenbaum

Publié le par Rosalie210

Martine Dugowson (1993)

Mina Tannenbaum

J'avais beaucoup entendu parler de "Mina Tannenbaum" à sa sortie. Force est de constater qu'aujourd'hui il est un peu oublié, sans doute parce qu'il a mal vieilli. C'est en tout cas l'impression que j'ai eu en le regardant. Il y a évidemment les deux actrices qui crèvent l'écran, Elsa ZYLBERSTEIN et Romane BOHRINGER auxquelles il faut rajouter une cousine hors-sol commentant leurs faits et gestes qui est devenue également célèbre, Florence THOMASSIN. Mais autour d'elles, force est de constater que c'est un peu le désert: personnages secondaires inconsistants, environnement qui manque de vie, passage du temps abstrait (leurs looks improbables n'aident pas et comme il y a peu de choses autour, on a du mal à se situer) et même au final une certaine difficulté à nous faire ressentir le poids de leurs origines familiales et culturelles dans leurs existences alors que c'est censé être essentiel. Tout cela fait que je me suis assez vite désintéressée de leurs petits problèmes amoureux (tous leurs Jules sont insipides à part celui joué par Jean-Philippe ÉCOFFEY qui avait un vrai potentiel mais hélas sous-exploité) aussi bien que de leurs ambitions professionnelles ou artistiques. En résumé, le talent et le charisme des actrices dissimule un film anémique. Lorsque des séquences entières sont occupées par des citations musicales ou cinématographiques restituées telles quelles, ce n'est en général pas bon signe. L'étendard qu'il a pu constituer pour une partie des jeunes filles de l'époque a dissimulé sa pauvreté intrinsèque.

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Mandibules

Publié le par Rosalie210

Quentin Dupieux (2020)

Mandibules

Dans "Mandibules", la trouvaille fantastico-absurde de Quentin DUPIEUX n'est ni un pneu psychopathe, ni un blouson en daim qui ne supporte pas la concurrence mais une mouche géante nommée Dominique trouvée dans un coffre de voiture volée par deux losers SDF particulièrement bas de plafond, Manu (Grégoire LUDIG) et Jean-Gab (David MARSAIS). Le genre à enchaîner les gaffes, à avoir un débit de "mongol", trois mots de vocabulaire et aucune suite dans les idées. De quoi bien s'entendre avec la mouche donc. Pas désarçonnés pour deux sous par cette étrange découverte, ils décident d'apprivoiser la bête pour l'utiliser comme drone à leur service. Là où le film devient carrément jubilatoire c'est lorsqu'à la suite d'une méprise, les deux compères quelque peu attardés se retrouvent avec leur passager clandestin dans une superbe villa avec piscine avec une bande de jeunes bourgeois pas très fute-fute eux non plus. Les quiproquos hilarants s'enchaînent portés par une Adèle EXARCHOPOULOS dans un rôle à contre-emploi. Elle est la seule "fine mouche" du groupe mais comme elle est handicapée dans son élocution suite à un accident, elle passe pour une complète agitée du bocal qui fait la paire avec les deux zigotos.

L'univers décalé de Quentin DUPIEUX fait donc encore une fois mouche ^^, nous délivrant une délicieuse petite comédie dont il a le secret, absurde en apparence mais qui retombe parfaitement sur ses pieds. Manu et Jean-Gab semblent coincés dans une réalité parallèle où le temps n'existe pas (ils vivent dans l'insouciance de l'instant) pas plus que l'ancrage dans un espace (ils vivotent dans la précarité la plus complète, dorment dans leur voiture volée déglinguée ou à la belle étoile, mangent ce qui leur tombe sous la main et ont une hygiène douteuse en contraste total avec les luxueuses villas qu'ils sont amenés à visiter ce qui n'a pas l'air de les affecter). D'une certaine manière, ils vont de pair avec la mouche qui vit dans les décharges et se nourrit de rebuts.

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A nous la liberté

Publié le par Rosalie210

René Clair (1931)

A nous la liberté

Impossible en regardant "A nous la liberté" de ne pas penser à "Les Temps modernes" (1934) et même à "Le Roi et l'Oiseau" (1979). Non seulement pour sa critique du travail à la chaîne comme instrument d'un système politique coercitif mais aussi pour le primat de l'image et de la musique sur la parole, associée au monde mécanique. Ce n'est pas seulement un choix lié à la proximité de deux de ces oeuvres avec le cinéma muet. C'est aussi un acte politique alors que les années 30 voyaient se multiplier "le viol des foules par la propagande politique" pour reprendre le titre du livre de Tchakhotine. L'homme nouveau des régimes totalitaires n'était en effet rien d'autre qu'un outil standardisé fabriqué à la chaîne pour servir les désirs de grandeur de leurs chefs: soldat, ouvrier ou les deux. En cela "Le Roi et l'Oiseau" en est leur parfait héritier, transformant en conte universel et atemporel l'expérience de la déshumanisation provoquée par les révolutions industrielles du XIX° siècle et les régimes totalitaires du XX° siècle et faisant par contraste l'apologie de la liberté individuelle et de la résistance à l'oppression, y compris à travers les objets du monde industriel délivrés de leur servitude (une idée reprise ensuite par Hayao MIYAZAKI dans "Le Château dans le ciel") (1986).

"A nous la liberté", l'un des premiers films parlant de René CLAIR est à l'image de ses films muets. Un pied dans l'avant-garde, architecturale notamment (le style Bauhaus des décors de Lazare MEERSON), l'autre dans le rétroviseur et plus précisément dans le burlesque muet dont la mécanique propre, celle de la course-poursuite endiablée, vient dérégler celle de l'usine. Il est d'ailleurs amusant de souligner que René CLAIR et Charles CHAPLIN se sont rendus mutuellement un hommage bien plus qu'ils ne se sont copiés. Le premier en créant des personnages de vagabonds libertaires qui ne peuvent se conformer ni au système de la prison, ni à celui de l'usine (qui est montrée sur le fond et la forme comme une nouvelle prison, évoquant même de façon anticipée la célèbre devise nazie affichée au portail des camps de concentration "le travail rend libre" mais aussi et c'est moins connu au fronton des usines chimiques de sa société IG Farben dont une succursale était installée à Auschwitz) en préférant partir sur les routes, le plan de fin reprenant celui de "The Tramp" (1915). Le second en maximisant les potentialités comiques du dérèglement de la machine à rendement et en terminant son film en ajoutant au vagabond s'éloignant vers l'horizon un autre personnage, celui de sa compagne plutôt que de son compagnon. Car se manifeste dans le film parlant de René CLAIR comme dans ceux de la même époque de Julien DUVIVIER une défiance vis à vis des femmes typique du cinéma français des années 30. Autre différence essentielle: Charles Chaplin ne manifeste pas la même naïveté que René Clair vis à vis du progrès technique qui viendrait délivrer l'homme de son aliénation.

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