Dans un précédent avis, je disais que Georges MÉLIÈS était le chaînon manquant entre Jules Verne et les innovations technologiques de la deuxième et troisième révolution industrielle ayant permis de mettre au point les moyens de transport permettant d'aller sur la lune ou sous la mer. De fait "Le Voyage à travers l'impossible" qui est la suite de "Le Voyage dans la Lune" (1902) s'inspire très librement d'une pièce de théâtre de Jules Verne et Adolphe d'Ennery au titre éponyme. La structure du court-métrage est sensiblement la même que pour "Le Voyage dans la Lune" (1902) avec plus d'humour, de péripéties et une longueur inédite pour l'époque. Dommage que cette suite XXL consacrée au voyage vers le soleil soit restée dans l'ombre de son prédécesseur. Elle vaut la peine d'être redécouverte, notamment par les fans de japanimation. L'aspect steampunk avant la lettre du métrage saute aux yeux: ce ne sont que poulies, rouages, fumées, engins à vapeur (trains, dirigeables, sous-marins), tout un univers de SF rétro-futuriste cher au coeur des maîtres nippons du genre (à commencer par Hayao MIYAZAKI). Impossible également de ne pas relever les similitudes entre "Le Voyage à travers l'Impossible" et "Galaxy Express 999" (manga, série animée, film d'animation) de Leiji MATSUMOTO avec ce train qui s'élance le long d'un plan incliné avant de quitter les rails et de voler dans l'espace. On pense aussi bien sûr à "Train de nuit dans la voie lactée" (1985). L'imagination de Georges MÉLIÈS semble sans limites que ce soit pour l'entrée dans le soleil (différente de celle de la lune), l'excursion dans ses paysages, le moyen pour se rafraîchir, pour revenir etc. C'est enchanteur, poétique, inventif, drôle. Le professeur Mabouloff joué par Georges MÉLIÈS a des airs du capitaine Haddock et j'aime bien sa société de géographie incohérente... pas plus que dans l'univers des films de Terry GILLIAM très inspirés eux aussi par cet héritage.
Décidemment, les tours de magie de Georges MÉLIÈS me font penser à l'univers de Harry Potter. Déjà dans "Les Affiches en goguette" (1906), les portraits prenaient vie et s'amusaient à se rendre visite. Dans "Le Locataire diabolique" qui est plus tardif (1909), un peu plus long et élaboré (6 minutes, deux décors) et de surcroît colorisé à la main, image par image, c'est le principe du sac et de la malle sans fond qui est exploré. Sac que Méliès a ensuite revendu à "Mary Poppins" (1964) avant qu'il ne termine dans la chaussette d'Hermione en version miniaturisée. C'est fascinant de voir comment une idée joue ainsi à saute-mouton avec les générations de film en film, d'oeuvre en oeuvre jusqu'à nos jours.
Par ailleurs, on remarque que dans "Le Locataire diabolique", il n'y a pas que le bagage qui est magique, les meubles le sont aussi et à un moment du film, se mettent à danser pour faire tourner en bourrique le propriétaire comme trois ans plus tard ceux de "Entente cordiale" (1912) de Max LINDER. Enfin le bagage magique ne sert pas seulement à transporter l'ameublement complet d'un appartement (que par le biais des trucages, Georges MÉLIÈS transforme en cartons pliables au moment de les ranger dans le sac). Il sert aussi à déménager à la cloche de bois quand le moment de payer le loyer est arrivé. Celui-ci se débarrasse des fâcheux en les faisant disparaître (ou en disparaissant lui-même!) avant de laisser derrière lui en partant un dernier meuble enchanté pour qu'il leur joue un dernier bon tour, libre comme l'air.
Sur les 14 versions cinématographiques muettes du célèbre roman de Alexandre Dumas, deux seulement ont été retrouvées et restaurées: la fresque de plus de 3h30 du français Henri FESCOURT qui date de 1928-1929 et celle-ci, d'origine américaine qui est antérieure puisqu'elle date de 1922. Bien que divisée en deux parties comme celle de Henri FESCOURT, elle est plus courte (moins de deux heures) et de ce fait, inégale. Elle est aussi davantage abîmée, on le constate à certains sauts d'image. La moitié du métrage (la plus réussie) est consacré au complot et à l'emprisonnement de Edmond Dantès au château d'If. Le dépouillement de l'intrigue permet au réalisateur d'être par ses gros plans au plus près des émotions de Edmond Dantès que John GILBERT (célèbre autant à cause de sa relation avec Greta GARBO que pour sa déchéance avec l'arrivée du parlant qui a inspiré "The Artist") (2011) rend très émouvant. La relation avec l'abbé Faria (Spottiswoode AITKEN) bien que brièvement évoquée est dépeinte avec sensibilité. Là où en revanche cela se gâte un peu, c'est dans la deuxième partie. La vengeance du comte, simplifiée comme chez Fescourt avec quelques différences (réapparition de Danglars mais quasi-absence des Morrel) est aussi hélas expédiée en quelques scènes dans lesquels les événements se télescopent. Par conséquent, il n'y a pas assez de temps pour développer intrigues et personnages comme il le faudrait en dépit d'une interprétation globale d'excellente tenue. De plus la morale américaine se fait bien sentir dans la manière dont sont punis les ennemis de Monte Cristo (ils se tuent plus qu'ils ne sont tués et à aucun moment Monte Cristo n'exprime le moindre doute sur le bien-fondé de ses actes) ainsi que dans le dénouement, franchement consternant de conservatisme. Quoique la présence au casting de George SIEGMANN alias Silas Lynch de "Naissance d une Nation" (1915) dont le comportement odieux est associé au métissage nous sert de piqûre de rappel.
Connaissez-vous le principe des portraits qui s'animent et interagissent les uns avec les autres en se rendant visite par exemple? Et bien cela existait avant Harry Potter et avant "Toy Story" (1995) grâce à la magie du cinéma de Méliès. Le film qui date de 1906 donne à voir un mur recouvert par sept affiches publicitaires aux noms délicieusement désuets (Jean-Pierre JEUNET en a fait d'ailleurs un élément de sa propre poésie urbaine), successivement pour « Les Extraits de Bidoche Poirot », la « Poudre des Fées », « La Trouillotine », « Le Tripaulin », « Le Nouveau Dépôt », « Le Quinquina au Caca O » et les « Corsets Mignon ». Un cadre vide, initialement rempli de graffitis (« Mort aux flics »), accueille bientôt une huitième affiche : « Parisiana, l’amour à crédit ». Après cette présentation, les affiches s’animent et les personnages qui les composent deviennent des acteurs « en chair et en os » comme dans "Les Cartes vivantes" (1905) qui non seulement s'amusent entre eux mais également avec les flics qui longent le mur, jusqu'à renverser les rôles dans un final assez savoureux. Outre la performance technique (pour l'époque) et la féérie qui se dégage du procédé, on comprend que Georges MÉLIÈS n'aime guère les forces de l'ordre (de nos jours, il serait montré du doigt par toute une partie de la société pour cela) puisqu'il s'amuse à les "mettre en boîte" après les avoir enfarinés ^^. A l'inverse ses personnages de papier eux sortent des cadres dans lesquels on les a placés, séparés les uns des autres pour se rejoindre et faire la fête ensemble.
Georges MÉLIÈS est en ce moment à l'honneur sur Arte dont le replay propose plusieurs de ses courts-métrages sous le thème de la fantaisie et du rêve. Et j'ajouterai, de la magie. Car "Les cartes vivantes" comme beaucoup de ses films est un numéro d'illusionnisme "boosté" par les moyens du cinéma. Georges MÉLIÈS n'est pas le père des effets spéciaux pour rien. Il a compris le premier que le cinéma permettait de transcender les limites physiques et de rendre possible l'impossible en ouvrant un espace imaginaire illimité. Il est parfaitement logique qu'il ait donc pu aller sur la lune bien avant Neil Armstrong comme un chaînon manquant entre la littérature de Jules Verne et la technologie qui a rendu cet exploit réalisable dans le réel. Cependant il n'existe encore aucun moyen de devenir invisible, de traverser les obstacles sans leur causer de dommage ou bien de transformer un objet inanimé en une personne vivante. Il s'en donne donc donc à coeur joie avec ce tour de cartes durant lequel celles-ci changent de taille, de nature en finissant même par lui jouer un bon tour! les trucages artisanaux lui permettent d'apparaître et de disparaître à volonté, d'escamoter des objets, de les transformer ou bien de se dupliquer à l'écran. L'essence même du cinéma est mise en abyme quand la reine de coeur et le roi de trèfle passent du statut d'images inanimées en deux dimensions à celui d'image animée (toujours en deux dimensions certes, époque oblige) d'une personne vivante évoluant dans un espace qui lui est en trois dimensions, préfigurant ainsi l'avenir des effets spéciaux.
Ayant toujours été terriblement déçue par les adaptations récentes du roman d'Alexandre Dumas dans lesquelles je ne retrouve nullement la fascination qu'exerce sur moi l'oeuvre originale, je suis allé chercher du côté des versions muettes. Celle-ci, réalisée par Henri FESCOURT entre 1928 et 1929 est tout simplement excellente et je la recommande à tous ceux qui comme moi sont amoureux du roman. Comme celui-ci, on ne peut plus la lâcher une fois commencée. Superproduction de plus de trois heures trente en deux parties qui a bénéficié d'une superbe restauration après avoir été perdue pendant soixante-dix ans, elle a conservé l'état d'esprit du roman d'origine. Certes, celui-ci est élagué, des personnages et des intrigues (dont certaines que j'aime beaucoup) sont supprimés. Mais le résultat est parfaitement lisible, cohérent et a du sens. Ce qui ressort en effet, c'est le caractère de mascarade sociale du roman de Dumas que la vengeance du comte va s'employer à pulvériser. Ses ennemis sont des usurpateurs qui se sont employés à se hisser jusqu'au sommet de la hiérarchie sociale par des moyens malhonnêtes, crapuleux, criminels. Tous ont des secrets à cacher. Le comte s'invente lui aussi une identité pour entrer dans le grand monde avec un gros coup de pouce du destin mais c'est pour mieux démasquer faux comtes et faux barons. Le summum du grotesque, particulièrement bien mis en valeur dans cette version est atteint avec Benedetto, bébé abandonné puis bandit et bagnard qu'en un tournemain, le comte transforme en prince Cavalcanti pour exciter la vanité des nantis. Le contexte historique de la monarchie de Juillet est parfaitement restitué. Villefort a des airs typiques de Jean-François Bertin peint par Ingres qui symbolisait la bourgeoisie triomphante de 1830 alors que les rites sociaux comme les soirées à l'opéra, les bals mondains, les procès, les duels sans oublier l'orientalisme sont minutieusement recréés. Le caractère grandiose de ces scènes n'est pas préjudiciable à l'intrigue, au contraire, ce sont autant de scènes de théâtre dans lesquelles le regard perçant et précis du réalisateur nous amène toujours à saisir l'essentiel de ce qui se joue. D'ailleurs il a rajouté une scène qui fait penser à "Hamlet" avec une mise en abyme de la trahison de Fernand Mondego auprès du pacha de Janina sous forme de représentation théâtrale pour mieux le démasquer. La complexité du personnage d'Edmond qui passe du statut de victime à celui de vengeur se prenant pour dieu avant d'être assailli par le doute est préservée pour l'essentiel, de même que le fait qu'il tente de compenser ce qu'il détruit en protégeant ceux qu'il aime. La famille de l'armateur Morrel est ainsi mise en avant ainsi que Valentine et Haydée, les deux jeunes femmes qui incarnent l'espoir d'un avenir moins corrompu.
Ayant toujours été terriblement déçue par les adaptations récentes du roman d'Alexandre Dumas dans lesquelles je ne retrouve nullement la fascination qu'exerce sur moi l'oeuvre originale, je suis allé chercher du côté des versions muettes. Celle-ci, réalisée par Henri FESCOURT entre 1928 et 1929 est tout simplement excellente et je la recommande à tous ceux qui comme moi sont amoureux du roman. Comme celui-ci, on ne peut plus la lâcher une fois commencée. Superproduction de plus de trois heures trente en deux parties qui a bénéficié d'une superbe restauration après avoir été perdue pendant soixante-dix ans, elle a conservé l'état d'esprit du roman d'origine. Certes, celui-ci est élagué, des personnages et des intrigues (dont certaines que j'aime beaucoup) sont supprimés. Mais le résultat est parfaitement lisible, cohérent et a du sens. Ce qui ressort en effet, c'est le caractère de mascarade sociale du roman de Dumas que la vengeance du comte va s'employer à pulvériser. Ses ennemis sont des usurpateurs qui se sont employés à se hisser jusqu'au sommet de la hiérarchie sociale par des moyens malhonnêtes, crapuleux, criminels. Tous ont des secrets à cacher. Le comte s'invente lui aussi une identité pour entrer dans le grand monde avec un gros coup de pouce du destin mais c'est pour mieux démasquer faux comtes et faux barons. Le summum du grotesque, particulièrement bien mis en valeur dans cette version est atteint avec Benedetto, bébé abandonné puis bandit et bagnard qu'en un tournemain, le comte transforme en prince Cavalcanti pour exciter la vanité des nantis. Le contexte historique de la monarchie de Juillet est parfaitement restitué. Villefort a des airs typiques de Jean-François Bertin peint par Ingres qui symbolisait la bourgeoisie triomphante de 1830 alors que les rites sociaux comme les soirées à l'opéra, les bals mondains, les procès, les duels sans oublier l'orientalisme sont minutieusement recréés. Le caractère grandiose de ces scènes n'est pas préjudiciable à l'intrigue, au contraire, ce sont autant de scènes de théâtre dans lesquelles le regard perçant et précis du réalisateur nous amène toujours à saisir l'essentiel de ce qui se joue. D'ailleurs il a rajouté une scène qui fait penser à "Hamlet" avec une mise en abyme de la trahison de Fernand Mondego auprès du pacha de Janina sous forme de représentation théâtrale pour mieux le démasquer. La complexité du personnage d'Edmond qui passe du statut de victime à celui de vengeur se prenant pour dieu avant d'être assailli par le doute est préservée pour l'essentiel, de même que le fait qu'il tente de compenser ce qu'il détruit en protégeant ceux qu'il aime. La famille de l'armateur Morrel est ainsi mise en avant ainsi que Valentine et Haydée, les deux jeunes femmes qui incarnent l'espoir d'un avenir moins corrompu.
"Blancanieves" c'est une version années 1920 de Blanche-Neige* qui emprunte son vocabulaire au cinéma muet et au "Freaks" (1932) de Tod BROWNING, le tout transposé dans l'Andalousie de la corrida et du flamenco. Comme les mythes, les contes sont plastiques et peuvent donc être accommodés à toutes les sauces. Celle de Pablo BERGER est un bel objet d'art très élégant, très travaillé mais qui manque de sens et d'incarnation. L'ensemble donne une terrible impression de formol, le réalisateur semblant plus obsédé par la forme de son film que par son contenu. Les personnages relèvent de la simple imagerie alors que leurs relations pouvaient donner lieu à une exploration de thématiques subversives qui sont à peine effleurées (l'impuissance du père, la marâtre manipulatrice et castratrice, la relation trouble de Carmen avec les nains, la nécrophilie avec un parallèle qui apparaît notamment à la fin avec "Vertigo") (1958). Reste outre la photographie, un art du découpage cinématographique et des transitions assez bluffant qui donne lieu à de belles idées de mise en scène: le mauvais présage lors de la corrida, la superposition du visage de la mère et de celui de la marâtre ou encore la robe blanche de communion qui devient celle, noire du deuil.
* Avec quelques réminiscences de "Cendrillon" et de "La Belle au bois dormant" dedans.
"La Foule" est un film étonnant, par sa forme mais aussi par son propos sur l'envers du rêve américain qui démonte au passage le cliché de "l'usine à rêves". Réalisé dans les dernières années du muet par King Vidor, il voit naître un personnage appelé à revenir ultérieurement dans sa filmographie, John Sims. Avec sa femme, Mary, ils représentent la petite classe moyenne dont la vie se caractérise par la banalité et les difficultés du quotidien. Pourtant, John Sims est né un 4 juillet et selon son père, il est appelé à devenir "un homme important" c'est à dire l'un de ces self made men qui nourrissent le rêve américain. Mais la mort prématurée de son père lorsqu'il a 12 ans met un coup d'arrêt à son ascension programmée dans une scène expressionniste filmée dans un escalier. Dès qu'il atteint l'âge adulte et se rend à New-York pour y faire fortune, King Vidor met sans cesse en tension cet individu et la masse dont il cherche à s'extraire. Les plans d'ensemble sur les bureaux en open space de la compagnie d'assurances dans laquelle il est employé font de lui un simple rouage parmi des centaines d'autres absolument identiques. Ces plans préfigurent ceux des films critiquant les trente glorieuses tels que "La Garçonnière" et "Playtime". Assez rapidement, on se rend compte que la haute opinion qu'il a de lui-même ne correspond pas à ses capacités réelles. John (James Murray) est un tâcheron au bureau et un poids mort chez lui, l'entretien du foyer reposant sur les épaules de Mary (Eleanor Boardman) qui doit en plus se coltiner les jérémiades d'un époux immature. De ce côté là aussi, le film fonctionne sur une désillusion entre la magie de la rencontre amoureuse dans les manèges de Coney Island et la morosité du train-train quotidien ponctué de disputes. Qu'un dramatique accident surgisse et le peu d'efforts que John avait fait pour s'élever retombe comme un soufflé. S'il ne sombre pas complètement grâce à son fils, il connaît une déchéance relative, se retrouvant dans la peau du clown sandwich qu'il méprisait au début du film. Les derniers plans, remarquables sont extrêmement expressifs: La caméra s'éloigne de John Sims et de sa famille qui finissent par se fondre dans l'anonymat de la foule avant qu'elle ne se referme sur eux.
"Gosses de Tokyo" est le vingt-quatrième et dernier film muet réalisé par Yasujiro Ozu en 1932. Contrairement aux films muets occidentaux, il n'y a pas d'accompagnement musical pour briser le silence ce qui peut être déconcertant pour un néophyte. D'ailleurs lors des projections, les spectateurs bénéficiaient des commentaires d'un bonimenteur qui animait la séance.
"Gosses de Tokyo" frappe par ses qualités d'observation et la précision de sa mise en scène qui restitue dans les moindres détails aussi bien la rigidité des codes sociaux japonais que le naturel désarmant de gamins qui singent leurs aînés tout en se rebellant contre eux. Le film oppose ainsi le monde des enfants à celui des adultes en étant centré sur deux frères qui font les "Quatre cent coups" parce qu'ils rejettent le modèle paternel. Le regard de Ozu, bienveillant avec les enfants s'avère cruel pour leur père. Quelques plans burlesques suffisent à déboulonner la statue patriarcale, l'homme important s'avérant être le ridicule pantin servile d'une comédie sociale dont Ozu montre les ficelles comme le faisait à la même époque Jean Renoir dans "La Règle du jeu". Mais le style Ozu est beaucoup plus proche du néoréalisme et de la nouvelle Vague que de la théâtralité du film de Renoir. Son aspect sociologique déborde d'ailleurs l'étude des rapports hiérarchiques au travail ou dans la famille (la mère est un modèle de soumission comme il se doit) pour montrer l'étalement urbain au travers d'un paysage de banlieue encore très campagnard colonisé par les pavillons et parcouru par une voie ferrée, les passages des trains ponctuant le récit.
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.