"Les producteurs" est le premier long-métrage de Mel BROOKS. Il s'agit d'une satire du milieu du théâtre new-yorkais, plus précisément des productions de comédies musicales de Broadway. L'histoire n'étant pas exempte d'ironie, le film a été adapté à son tour avec succès en comédie musicale en 2001 à Broadway et récemment à Paris sous la houlette de Alexis MICHALIK.
Le film se divise en trois parties. La première, principalement filmée à l'intérieur du bureau de Max Bialystock (Zero MOSTEL) montre la petite cuisine peu ragoûtante qui préside à la décision de monter le spectacle. En gros une escroquerie pour empocher l'argent d'investisseurs principalement composées des clientes âgées et fortunées de Max, une situation qui n'est pas sans faire penser à celle des vieilles, richissimes et généreuses maîtresses de M. Gustave dans "The Grand Budapest Hotel" (2013). A ceci près que Max et son bureau sont cradingues alors que M. Gustave est le raffinement personnifié. Par ailleurs Max trouve un partenaire privilégié en la personne de Leo Bloom (Gene WILDER dans son premier grand rôle), un petit comptable trouillard, efféminé et infantile (son doudou à lui n'est pas Bourriquet mais un vieux morceau de couverture ^^). La deuxième partie porte sur le choix de l'équipe qui montera la pièce, l'occasion trop belle d'offrir une galerie de personnages plus délirants les uns que les autres et des associations incongrues (un auteur nostalgique du III° Reich avec un metteur en scène gay et un acteur principal inénarrable). La troisième partie relate le spectacle lui-même "Le printemps d'Hitler", monument de mauvais goût mais qui pris au second degré par le public devient un succès retentissant au grand dam des producteurs qui espéraient capitaliser sur son échec annoncé.
Bien que j'ai personnellement trouvé le film inégalement drôle, j'ai eu plaisir à retrouver un humour juif tournant en dérision aussi bien le nazisme que le capitalisme, humour que l'on retrouve chez les Marx Brothers (d'ailleurs Gene WILDER me fait penser à Harpo MARX), chez Woody ALLEN évidemment (Groucho MARX étant l'un de ses maîtres) mais aussi chez les frères Coen. Ainsi je me suis demandé si la chorégraphie "croix gammée" à la Busby BERKELEY filmée en plongée n'avait pas inspirée celle des quilles et des boules de "The Big Lebowski" (1998) qui est aussi une satire carabinée du capitalisme américain avec une légère touche allemande.
Il n'est pas si simple de faire une parodie qui tienne la route (je me souviens du consternant "Le Silence des Jambons" (1993) avec un Billy ZANE qui s'était particulièrement fourvoyé dans le rôle de "Joe Di Fostar" ah ah ah). "La Folle histoire de l'espace" est pour filer la métaphore sexuelle de son titre original "Spaceballs" d'un autre "calibre". Bien sûr le film parodie avec soin et jubilation les films de SF les plus populaires des années 70-80 mais il y ajoute en plus une couche de satire clairvoyante voire prophétique sur les mutations d'une industrie hollywoodienne concentrée entre quelques mains, abandonnant toute ambition créative au profit d'une exploitation marchande tous azimuts des mêmes succès. Voir les sept nains ainsi catapultés (en 1987!) dans l'univers Star Wars ne peut que faire penser à une anticipation du rachat de la franchise par Disney en 2012 alors que les incursions dans la saga Indiana Jones, les Transformers ou la scène la plus culte de "Alien, le huitième passager" (1979) avec John HURT qui reprend son rôle emblématique de Kane va au-delà du cross-over: cette dernière séquence rappelle que le ver est littéralement dans le fruit ^^. Et c'est ainsi que le film multiplie les placements de produits les plus voyants et les plus grotesques de la princesse "Vespa" à "Pizza the Hutt" (qui rappelle moins son modèle de grosse limace visqueuse que M. Creosote, le monstre insatiable symbolisant la consommation à outrance du "Monty Python : Le Sens de la vie" (1982)) cousin du vorace et vomitif sans-visage de Hayao MIYAZAKI). "Spaceballs" se décline d'ailleurs en une multitude de produits dérivés, une séquence entière du film prenant la forme d'un télé-achat dans une boutique que l'on croirait toute droit sortie d'un parc Disneyland (quand je dis que ce film était prophétique ^^). Mel BROOKS le réalisateur qui joue également le rôle du président Esbroufe (et de Yahourt/Yoda) fait d'ailleurs un gros plan sur les vidéos de ses précédents films. Quant à l'inénarrable Rick MORANIS dans le rôle de "casque noir" (échangé lors d'une séquence dans le désert contre un casque colonial et des culottes courtes dignes des aventures de Tintin ou d'un autre sketch des Monty Pythons dans "Monty Python : Le Sens de la vie" (1982)), il fait penser à tous les dictateurs-nabots de la terre qui à force d'avoir (au sens propre) la grosse tête sont juste ridicules.
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.