Le film est petit mais l'histoire est grande et Anthony HOPKINS immense. "Une vie" était nécessaire pour sortir de l'ombre l'histoire de Nicholas Winton, courtier britannique qui grâce à Martin Blake un ami engagé dans le comité britannique pour les réfugiés de Tchécoslovaquie se rendit à Prague en décembre 1938 où il visita des camps de réfugiés, juifs pour la plupart et prit conscience de la gravité de la situation. A savoir l'invasion imminente du pays tout entier par Hitler après l'abandon des Sudètes par les alliés de la Tchécoslovaquie lors des accords de Munich, alliés terrifiés à l'idée d'une nouvelle guerre avec l'Allemagne. Dans un laps de temps extrêmement court entre mars et août 1939, Nicholas Winton parvint en coordination avec des organisations de secours locales à mettre en place une filière de départs vers le Royaume-Uni pour les enfants tchécoslovaques sur le modèle des kindertransport humanitaires qui venaient d'être créés pour les enfants juifs allemands et autrichiens. Le neuvième convoi qui transportait 250 enfants fut bloqué par les nazis car le Royaume-Uni s'apprêtait à entrer en guerre contre le III° Reich suite à l'invasion de la Pologne. L'action de Nicholas Winton et de ses pairs fut oubliée durant cinquante ans, au point que faute de transmission, les anciens enfants réfugiés ne savaient pas à qui ils devaient leur sauvetage. Jusqu'en 1988 où les archives conservées par Winton ne soient communiquées par sa femme à une historienne mariée à un magnat de la presse. Ce dernier fit connaître son histoire ce qui entraîna l'émission télévisée "That's life" à organiser des retrouvailles entre Winton et ceux qu'il avait sauvé. Une séquence d'archives télévisuelles reconstituée avec minutie dans le film et porté par un Anthony HOPKINS toujours aussi habité. Il campe en effet un homme qui non seulement ne se met pas en avant mais est hanté par les enfants qu'il n'a pas pu sauver et dont il a gardé des photos. S'il y a un point commun entre Oskar Shindler et lui, c'est bien dans cette culpabilité sourde liée au fait d'avoir sauvé un grand nombre de personnes mais de ne pas avoir pu les sauver tous. Pour le reste, Nicholas Winton n'a jamais mis sa propre vie en danger et étant lui-même d'origine juive, n'a pas pu être reconnu comme un Juste, titre réservé aux non-juifs. Il a cependant été honoré à la fin de sa vie par le Royaume-Uni et par la République Tchèque.
Le film qui effectue des allers-retours constants entre 1988 et 1939 possède une mise en scène assez fade. C'est particulièrement visible en ce qui concerne les scènes du passé, tournées à l'économie, façon téléfilm à l'aide de plans souvent répétitifs et purement illustratifs. La partie située en 1988 bénéficie du supplément d'âme apporté par Anthony HOPKINS mais le casting est dans l'ensemble excellent, que ce soit Helena BONHAM CARTER qui joue sa mère ou Jonathan PRYCE, l'inoubliable Sam de "Brazil" (1985) qui interprète Martin Blake âgé.
Un excellent cru que ce dernier film de Quentin DUPIEUX à ranger aux côtés des petites perles surréalistes que sont "Realite" (2015) et "Au Poste !" (2018), mes deux films préférés du réalisateur. Du premier, il partage la structure gigogne brouillant les frontières entre rêve et réalité et emboîtant même les rêves les uns dans les autres: c'est un festival de cadres dans le cadre rempli de réjouissantes surprises. Du second, il reprend l'influence de Luis BUNUEL ce qui est une évidence, les deux artistes surréalistes espagnols ayant étroitement collaboré, notamment sur "Un Chien andalou" (1929). Il pleut des chiens morts dans "Daaaaaali!" mais c'est surtout la trame de "Le Charme discret de la bourgeoisie" (1972) que l'on retrouve dans le dernier Quentin DUPIEUX. Dans le film de Luis BUNUEL, des bourgeois qui essayent de se réunir pour dîner sont interrompus par des situations plus absurdes les unes que les autres. Dans "Daaaaaali!", c'est la petite journaliste jouée par Anais DEMOUSTIER qui tente dans toutes les variations possibles et imaginables d'obtenir un entretien du peintre, lequel le fait capoter là encore de façon systématiquement absurde. Enfin, si le titre étire le nom du peintre, c'est à la fois pour souligner son comportement clownesque et parce chaque a du titre correspond à l'un des six acteurs qui l'interprète. La distorsion de l'espace-temps est l'une des caractéristiques du film de Quentin DUPIEUX. On y voit Dali se rencontrer à deux âges différents ou bien entrer dans un tunnel avec un visage et en sortir avec un autre ou bien trouver le repas si interminable qu'il en sort sur une chaise roulante ou encore (l'une des séquences que j'ai préférée), marcher le long d'un couloir d'hôtel sans pour autant se rapprocher de la journaliste incarnée par Anais DEMOUSTIER. Les différentes incarnations du peintre sont inégales et fort heureusement, Quentin DUPIEUX a laissé la part du lion aux deux meilleures, celle de Edouard BAER, impérial et celle de Jonathan COHEN, incroyablement expressif. Je l'avais détesté dans "Une annee difficile (2022)" mais là il m'a complètement bluffé!
Un portrait très intéressant de Jodie FOSTER mais pouvait-il en être autrement avec une personnalité aussi riche? On associe Jodie FOSTER à l'intelligence, à la précocité, à sa maîtrise parfaite du français qui l'a même fait passer
pour franco-américaine ou new-yorkaise. Pourtant, c'est plus compliqué et Jodie FOSTER est une énigme, à la fois un pur produit hollywoodien et en même temps complètement à part. Le documentaire apporte quelques éléments de réponse à cette énigme. La mère de Jodie FOSTER apparaît déjà comme quelqu'un de paradoxal. D'un côté, elle a été une "stage mother" c'est à dire l'agent de la carrière de ses propres enfants si bien que Jodie FOSTER a été une enfant-star, jouant dès l'âge de 3 ans dans les publicités ou pour des programmes familiaux "american way of life" à la télévision. De l'autre, elle lui a fait connaître les films européens de la nouvelle vague dont elle était fan, a milité pour les droits des minorités, s'est installée en couple avec une femme (surnommée "tante Jo" d'où est né le surnom de l'actrice) après s'être séparée du père de ses enfants et a mis Jodie FOSTER au lycée français de Los Angeles. C'est de cette éducation multiculturelle qu'est issue la capacité de Jodie FOSTER à se réinventer et ce dès l'adolescence où par chance elle croise la route du nouvel Hollywood en la personne de Martin SCORSESE qui lui donne un rôle dans "Alice n'est plus ici" (1974) avant celui d'Iris dans "Taxi Driver" (1976) qui casse son image et la propulse sur la scène internationale: la petite américaine jouant dans le Doris Day Show devient l'égérie du festival de Cannes. Par la suite, l'actrice multiplie les cordes à son arc, devenant réalisatrice, productrice, s'inscrivant à l'université de Yale dont elle sort diplômée, tournant dans des films américains mais aussi français (sous la direction de Claude CHABROL notamment un pilier de la nouvelle vague, est-ce étonnant?) Au sein même des films américains, sa filmographie oscille entre des rôles insignifiants de femmes traditionnelles et d'autres au contraire extrêmement signifiants de femmes pionnières ou vengeresses qui lui valent ses deux Oscar. J'aime beaucoup en particulier dans le documentaire l'analyse de "Le Silence des agneaux" (1989), le soutien que lui apporte Hannibal Lecter contre les autres hommes montrés comme les vrais prédateurs (c'est toujours comme cela que j'ai perçu le film). Enfin, le documentaire évoque le fardeau de sa notoriété publique, de l'affaire John Hinckley aux pressions des mouvements LGBT lui reprochant sa discrétion quant à sa vie privée vue comme un moyen de ne pas se mouiller, un choix pleinement assumé et qu'elle a défendu en dénonçant le devoir de transparence.
Je ne suis pas du tout fan de sports mécaniques mais j'ai passé un bon moment devant ce film qui reconstitue le championnat du monde de rallye 1983 ayant vu s'affronter l'écurie allemande Audi contre les italiens de Lancia. Aux premiers l'avantage technologique avec les quatre roues motrices, aux seconds la créativité. Plusieurs qualités m'ont sauté aux yeux: c'est immersif, sans aucun temps mort et les acteurs sont ultra charismatiques, surtout Riccardo SCAMARCIO dans le rôle de Cesare Fiorio, le directeur sportif de Lancia. Je ne l'avais pas vu depuis "Eden a l'ouest" (2008) et il s'est sacrément bonifié avec le temps, d'autant plus qu'il co-signe le scénario et co-produit également le film. Face à lui, un acteur non moins charismatique, Daniel BRUHL dans le rôle de Roland Gumper, le directeur sportif d'Audi. On l'avait déjà vu jouer une dizaine d'années auparavant Niki Lauda dans le film "Rush" (2013), autre compétition entre champions de course automobile mais dans "Race for Glory" ce sont les directeurs sportifs qui sont mis à l'honneur beaucoup plus que les pilotes. Basé sur le témoignage de Cesare Fiorio et utilisant de véritable modèle de l'époque, le film se veut réaliste et ne recherche aucun effet facile du genre sous-intrigue sentimentale propre à de nombreux biopics. La course, rien que la course et ses enjeux, c'est ce qui m'a plu.
A travers ce titre composé d'allitérations en M, le documentaire rend hommage à une actrice dont le demi-siècle de présence sur les écrans a fait oublier justement à quel point sa carrière est atypique et exceptionnelle. Comment expliquer sa longévité et le fait qu'elle se soit bonifiée en vieillissant alors que la majorité des actrices ne parviennent pas à franchir l'étape de la cinquantaine? Comment expliquer que nombre des personnages qu'elle a incarné soient restés dans les mémoires alors qu'ils marquent généralement moins les esprits que leurs homologues masculins? A toutes ces questions, le documentaire apporte quelques éléments de réponse, même s'il n'épuise pas le sujet:
- Ses débuts au cinéma, fortement liés à sa relation avec John CAZALE rencontré sur les planches et qui est mort d'un cancer peu de temps avant la sortie de "Voyage au bout de l'Enfer (1978).
- La combativité de l'actrice qui a dû souvent convaincre les cinéastes de lui donner des rôles dans lesquels ils ne la voyaient pas (Alan J. PAKULA et Sydney POLLACK en particulier).
- Son implication dans ses rôles, au point parfois de participer à leur écriture. Robert BENTON a par exemple été bien inspiré de lui demander de rédiger la plaidoirie de Johanna dans "Kramer contre Kramer" (1979) car il ne parvenait pas à adopter le point de vue féminin.
- Son oreille musicale et sa facilité à apprendre les langues étrangères grâce à laquelle elle a pu jouer de façon crédible des immigrées comme la polonaise Sophie dans "Le Choix de Sophie" (1982) ou l'italienne Francesca dans "Sur la route de Madison" (1995).
- L'éventail de son jeu a également été très utile pour lui permettre de se reconvertir dans la comédie durant les années 80 où son succès dans le registre dramatique était moindre. Elle a ensuite alterné avec bonheur les deux genres, de "Sur la route de Madison" (1995), l'un de ses plus grands rôles à "Mamma Mia !" (2008).
- Enfin son talent pour donner à ses personnages une richesse émotionnelle qui les entraîne hors des clichés, qu'ils soient aimables ou détestables de prime abord.
Une des meilleures mini-séries de 2022, diffusée d'abord sur Arte puis sur Netflix. Réalisée par Katell QUILLEVERE et Helier CISTERNE dont l'intérêt pour l'histoire et les questions politiques et sociales n'est plus à démontrer, elle raconte la genèse du mouvement hip-hop en France au début des années 80, indissociable de l'émergence artistique d'une jeunesse populaire et métissée jusque là invisible dans les médias alors cadenassés par l'Etat. La mini-série suit plusieurs de ces jeunes, mettant en lumière au passage les différentes facettes du hip-hop que l'on a tendance à réduire au seul rap.
Le premier d'entre eux est le DJ Dee Nasty alias Daniel Bigeault (Andranic MANET) qui a joué un rôle fondateur méconnu et pourtant essentiel. Passionné par ce mouvement qu'il a découvert à San Francisco et qu'il importe en France, il mixe et scratche dans des clubs, enregistre le premier album de rap français en 1984, anime des soirées en plein air, ouvre l'antenne des radios libres au rap et aux rappeurs, notamment sur Radio Nova entre 1988 et 1989. Tout cela en autodidacte et dans une marginalité dont il ne sortira jamais vraiment. Il est dépeint sous les traits d'un jeune homme passionné, sensible, introverti et qui s'affirme peu. Tout le contraire de son explosive compagne Béatrice (Leo CHALIE), personnage fictif mais très fortement inspiré par le parcours et la personnalité de Catherine Ringer (et Daniel a d'ailleurs des points communs avec Fred Chichin). Ce n'est d'ailleurs pas le moindre exploit de la série que de mettre en avant des femmes fortes dans un univers très masculin, à l'image de la graffeuse Lady V (Laika BLANC-FRANCARD) qui fut la compagne de Kool Shen alias Bruno Lopes, l'un des deux membres du groupe NTM.
Parmi la nouvelle génération de talents que Dee Nasty a contribué a révéler, la série se focalise en effet sur Didier Morville (Melvin BOOMER) et Bruno Lopes (Anthony BAJON) qui traversent toutes les strates de ce mouvement sans véritable solution de continuité. Ils sont d'abord danseurs, puis graffeurs (stade durant lequel ils inventent leurs pseudos, JoeyStarr et Kool Shen) et enfin rappeurs. Tout cela dans une sorte de bouillonnement culturel propre à l'époque. L'histoire s'arrête en effet avant leur starisation et ne cherche jamais à les extraire de leur milieu. Celui-ci est dépeint avec beaucoup de réalisme et c'est ce qui est passionnant. On voit par exemple leurs "battles" avec d'autres groupes de danse et de rap. On voit également comment leurs milieux familiaux à la fois proches et opposés les ont forgés. D'un côté la famille chaleureuse et unie de Bruno Lopes dont il ne veut pas s'éloigner ce qui lui fait renoncer à une carrière de footballeur. De l'autre la jeunesse chaotique de Didier Morville cherchant à échapper à un père violent. L'une de mes séquences préférées est celle où le père ouvrier de Bruno Lopes voit son fils pour la première fois à la télévision dans "Mon Zénith à moi" à l'initiative de Nina Hagen qui a connu NTM via son compagnon, Frank Chevalier qui est alors le manager du groupe: choc culturel garanti!
A la fin de "Emily", j'étais en colère. Et pourtant cela aurait pu être un bon film. Il y a des moments où la réalisatrice, Frances O'CONNOR se laisse aller à de la pure sensorialité en faisant écouter les bruits de la lande, en laissant ses héroïnes se mouiller, en donnant à Emily (Emma MACKEY) l'occasion de courir cheveux au vent, en imaginant une scène de quasi-spiritisme. Certes, Andre TECHINE avait posé ces jalons dans son film "Les Soeurs Bronte" (1979). Mais il avait conservé l'austérité et la rudesse de cette vie imprégnée de rigorisme protestant et en même temps de magie païenne de la première à la dernière image et n'avait pas cherché à broder. Dans "Emily" au contraire, Frances O'CONNOR cherche non seulement à combler les trous de l'histoire d'Emily Brontë mais surtout à expliquer la grande énigme que tout le monde se pose à son sujet: où a-t-elle puisé son inspiration pour écrire "Les Hauts de Hurlevent". Disons-le, la réponse est d'une platitude, d'une médiocrité qui fait injure à cette grande autrice, ainsi qu'à Charlotte, dépeinte comme une jeune femme conformiste et jalouse du talent de sa soeur qui n'aurait trouvé l'inspiration que grâce à elle. Ne parlons même pas de Anne qui fait de la figuration. Si la relation fusionnelle entre Emily et Branwell (Fionn WHITEHEAD) donne lieu à quelques moments intéressants, Frances O'CONNOR ne cherche pas un seul instant à s'aventurer dans les eaux troubles de leur relation. Elle préfère jeter entre les pattes d'Emily un vicaire (Oliver JACKSON-COHEN) qu'elle commence par mépriser puis on ne sait pourquoi, dont elle s'éprend et réciproquement ce qui nous vaut les sempiternelles images de troussage dans la grange, si loin de la réalité du XIX° dominé par la répression et la violence sexuelle. Mais grâce à cette passion sortie d'on ne sait où, passion contrariée par la jalousie de Branwell et par la culpabilité du vicaire (horriblement mal jouée, on ne croit pas un instant avoir affaire à un homme de foi) puis par sa mort, Emily va enfin trouver de quoi écrire. Car c'est grâce au vicaire qu'elle a pu entendre la mer, elle n'en était pas capable toute seule! Cette incapacité à sortir des schémas rebattus (j'aime bien l'article du journal Libération qui parle de "la péroraison sur l'inspiration qui vient aux femmes par convention sentimentale éplorée") ne donne qu'une envie: se replonger au plus vite dans les romans d'origine et dans leur mystère heureusement insoluble.
"Dumb money" est basé sur une histoire vraie, l'affaire GameStop survenue en 2021 et qui avait affolé les marchés boursiers. En pleine période du covid, la bourse américaine s'est ouverte aux petits investisseurs en leur permettant d'acheter ou de revendre des actions à l'aide d'une application nommée "Robinhood" (rien que ce titre en dit long) qui ne prélève pas de commission. Un analyste financier au look de pirate du web, Keith Gill également surnommé Roaring Kitty et DeepFuckingValue a alors misé sur les actions de la maison-mère de Micromania alias la chaîne de magasins de jeux vidéos GameStop pour contrarier les manoeuvres d'un fond spéculatif américain qui pariait sur la baisse des actions de l'enseigne. Grâce à son forum spécialisé sur les réseaux sociaux, il a réussi à entraîner ses followers à en faire de même, faisant flamber temporairement le cours des actions de GameStop et enrichissant les pauvres tout en dégarnissant les riches. Bref l'éternelle histoire du pot de terre contre le pot de fer ou de David contre Goliath. Une sorte d'écho lointain de l'appel lancé par Eric Cantona en 2010 à faire la révolution en retirant l'argent des banques pour que le système s'écroule. Bien qu'aux USA, l'idée ne soit pas de détruire le système capitaliste mais de remettre sur le devant de la scène le rêve américain dans toute sa splendeur (réussite à partir de rien, liberté d'entreprendre etc.)
Le film de Craig GILLESPIE (réalisateur de "Moi, Tonya") (2017) essaye de transformer l'aridité de l'histoire en comédie satirique enlevée. Il n'y parvient pas tout à fait. Entre le jargon financier indigeste que le spectateur doit avaler sans aucune pédagogie et un style visuel frénétique qui donne mal à la tête et m'a rappelé "Don't look up : Deni cosmique" (2021), on est tout de même assez souvent largué et essoré. Pas tout à fait quand même. Les grandes lignes de l'intrigue du combat des petits contre les gros sont universelles et Paul DANO dans le rôle de Keith Gill excelle à jouer les leaders charismatiques d'opposition au système.
Un portrait de femme combattif et libre, vraiment? Au vu de l'affiche, j'espérais une sorte d'épopée montrant les démêlés de la navigatrice Florence Arthaud (dont le film propose une biographie romancée) avec le monde de la mer et des marins et je trouve qu'on en voit bien trop peu. Il y a d'ailleurs des questions que je me suis posé et auxquelles le film n'apporte aucune réponse comme de savoir par exemple comment elle a acquis et amélioré son savoir et sa technique, comment elle a obtenu son premier bateau pour faire la route du Rhum etc. Au lieu de quoi, le film raconte de façon ultra répétitive des anecdotes sur ses frasques diverses et variées (alcool, fête, accidents, aventures) qui ne lui donnent aucune envergure. Alors qu'il y avait de quoi faire un portrait puissant à la "All is lost" (2013) d'une "dompteuse d'océans" ou bien un roman d'apprentissage au féminin, le scénario est d'une désespérante platitude. Visiblement, la peur de perdre le grand public avec un développement trop pointu du monde des marins conduit à la superficialité malgré quelques beaux passages (la route qu'elle a gagné et la fin). L'actrice principale (Stephane CAILLARD) est bluffante dans le rôle et il y a de belles images mais ce que le public risque de retenir, c'est moins ses exploits que sa liaison animale avec un Olivier de Kersauson "plus macho tu meurs". Pfff...
Avec son titre faisant écho à "Naissance d'une nation" (1915), William KAREL a réalisé un film documentaire consacré à l'éclosion d'une star dont il fut le témoin en tant que photographe de plateau sur les deux derniers films de Francois TRUFFAUT, "La Femme d'a cote" (1981) et "Vivement dimanche !" (1983). La relation amoureuse entre le cinéaste et la jeune actrice qui fut révélée à lui par "Les Dames de la cote (1979) avant qu'il ne la propulse au sommet forme le réacteur du film qui propose une autre originalité. Elle consiste à confronter la biographie réelle des années de jeunesse de Fanny ARDANT déjà peuplée d'anecdotes romanesques à une version fictionnelle imaginée avec l'artiste dans les années 80 qui s'en donne à coeur joie, réinventant ses premières années sous le prisme de l'histoire du cinéma, de "Le Cuirasse Potemkine" (1925) à "Le Diabolique Docteur Mabuse" (1960). Le résultat d'une belle complicité avec le réalisateur-photographe et au-delà, avec la caméra et le conte. On est presque surpris de voir défiler à toute vitesse ses quarante années de carrière dans les dernières minutes, jusqu'au récent "Les jeunes amants" (2020) mais ce choix se défend. En effet de son propre aveu, sa passion pour Truffaut fut le climax de sa vie, "Huit Femmes" (2002) de Francois OZON semble être un prolongement de sa vie fictionnelle au milieu des géants du cinéma alors que ses derniers films mettent l'accent sur ce qui en elle ne vieillit pas et notamment sa voix si particulière qui pourtant lui avait valu d'être renvoyée dans sa jeunesse.
Analyse de classiques et de films récents par une passionnée du 7eme art. Mes goûts sont éclectiques, allant de la nouvelle vague française au cinéma japonais (animation incluse) en passant par l'expressionnisme allemand et ses héritiers et le cinéma américain des studios d'Hollywood aux indépendants.