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Les secrets de mon père

Publié le par Rosalie210

Véra Belmont (2022)

Les secrets de mon père

En regardant "Les secrets de mon père", dernier film en date de Véra BELMONT, j'ai pensé (toutes proportions gardées) à "Maus" en raison du fait que l'oeuvre dont le film est l'adaptation est le roman graphique autobiographique de Michel Kichka qui comme Art Spiegelman est un fils de rescapé de la Shoah. Mais alors que "Maus" témoigne de la transmission de la mémoire de la Shoah entre les parents survivants et leur fils, "Les secrets de mon père" raconte celle d'enfants qui grandissent avec un père qui refuse de leur parler de son passé. Un silence assourdissant étant donné les séquelles que ce passé a laissé (l'absence des grands-parents, le tatouage sur le bras que les enfants croient être un numéro de téléphone) mais aussi les dégâts qu'il continue à faire ("ce passé qui ne passe pas") en isolant les générations les unes des autres et en traumatisant la descendance jusqu'à l'irréparable quand le père se lance dans un travail de mémoire auprès des médias et du grand public mais interdit à ses enfants d'y accéder. Le choix de l'animation (très classique sur la forme en dépit de quelques envolées oniriques, dommage étant donné que l'histoire se déroule en Belgique, un des fiefs de la BD) s'explique par le support d'origine mais aussi par le fait d'être centré sur l'expérience des enfants (alors que le roman graphique de Michel Kichka s'adressait à l'origine aux adultes). On peut regretter d'ailleurs que les soeurs de Michel soient si peu développées alors que l'aînée subit aussi les effets néfastes du secret à géométrie variable qui empoisonne toute la famille. Mais Michel Kichka centre logiquement le récit sur lui-même et son jeune frère Charly qui lui colle aux basques, évoquant les moments heureux de leur enfance mais surtout la blessure de l'incommunicabilité de plus en plus grande avec les années. Même si en héritant de son talent de dessinateur, Michel Kichka a pu au final se frayer un chemin jusqu'à son père, celui-ci s'est avéré des plus douloureux et constitue le principal intérêt du film.

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Les Ombres Persanes (Tafrigh)

Publié le par Rosalie210

Mani Haghighi (2023)

Comme un air de "Matrix Révolutions"

Comme un air de "Matrix Révolutions"

Le cinéma iranien ne cesse de me surprendre par sa richesse, sa diversité, alors même qu'il est entravé par le pouvoir en place. Après les drames sentimentaux, les docu-fictions, les polars et les thrillers, "Les ombres persanes" est le premier film fantastique issu de ce pays que j'ai pu voir. Bien que l'histoire soit traitée avec réalisme, deux éléments viennent jeter le trouble. Le premier est la pluie, incessante et battante qui s'abat sur l'ensemble du film, doublée d'une atmosphère sombre et confuse qui ne cède la place à une éclaircie que lors d'un très bref moment destiné à s'avanouir aussi vite qu'il est apparu. Car pour le reste, c'est le déluge, une atmosphère de fin du monde et d'horizon bouché (à la manière parfois de "Matrix Revolutions" et cet écho fait sens) qui s'infiltre jusque dans la demeure de Tarzaneh et Jalal. Justement, Tarzaneh qui est monitrice d'auto-école croit apercevoir son mari entrer chez une autre femme. Ce qui nous amène au deuxième élément fantastique du film, à savoir qu'il existe un couple à l'apparence jumelle de celle de Tarzaneh et Jalal, formé par Bita et Mohsen, plus aisés et parents d'un petit garçon. Aucune explication rationnelle ne nous est donnée sur cette troublante ressemblance et la piste génétique est vite abandonnée. Ce que l'on remarque en revanche c'est qu'il s'agit de couples mal assortis aux polarités inversées. Tarzaneh qui est enceinte semble dépressive et angoissée alors que Mohsen est jaloux et violent. A l'inverse, Jalal est gentil et dévoué et Bita, souriante et équilibrée. Logiquement, Bita et Jalal, trop beaux pour être vrais ne peuvent que céder la place à Farzaneh et Mohsen qui incarnent les différentes formes de mal-être générées par les dysfonctionnements de la société iranienne, plus fortes que leurs différences. Taraneh ALIDOOSTI et Navid MOHAMMADZADEH peuvent ainsi comme dans de nombreux films sur ce thème éminemment cinématographique montrer différentes facettes de leur jeu. L'excellence de leur interprétation compense en partie les maladresses du scénario.

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Beignets de tomates vertes (Fried Green Tomatoes at the Whistle Stop Cafe)

Publié le par Rosalie210

Jon Avnet (1991)

Beignets de tomates vertes (Fried Green Tomatoes at the Whistle Stop Cafe)

"Beignets de tomates vertes" est un film que j'avais vu à sa sortie et dont j'avais gardé un très bon souvenir. A l'occasion de son passage sur France.tv, je l'ai revu et toujours autant apprécié. On peut lui reprocher quelques situations appuyées, néanmoins la recette fonctionne. Parlons-en d'ailleurs de cette recette: une pincée de "La Couleur pourpre" (1985), un soupçon de "TO KILL A MOCKINGBIRD" (1962), une louche de "Forrest Gump" (1994), quelques grains de "Bagdad café" (1987), le titre original du film étant repris du roman de Fannie Flag dont il est l'adaptation, "Fried Green Tomatoes at the Whistle Stop Cafe". Comme dans le film de Percy ADLON, il est question de femmes au bord de la crise de nerfs qui vont reprendre leur vie en main dans un environnement hostile en montant "un resto à soi" (en référence au célèbre livre de Virginia Woolf "Une chambre à soi" sur les conditions de l'émancipation féminine dans le domaine artistique). S'y ajoute un sous-texte dans lequel nourriture et sexualité sont corrélées. Ainsi la recette phare des deux amies du Whistle Stop Cafe, Idgie (Mary STUART MASTERSON) et Ruth (Mary-Louise PARKER) est végétarienne (l'un des indices crypto lesbien de leur relation) alors que le mari de la seconde, violent et raciste est comparé à un cochon destiné à finir en barbecue. Enfin, Evelyn Couch, la quadragénaire dépressive jouée par Kathy BATES compense sa frustration sexuelle par une boulimie de sucreries. A travers les deux époques traitées dans le film (l'entre-deux-guerres et les années 80) et leur ancrage commun en Alabama, c'est le modèle culturel de l'Amérique profonde qui est interrogé, le film mettant en scène une solidarité entre les femmes, les minorités et les laissés pour compte face au patriarcat et à l'extrémisme incarné par le Ku Klux Klan qui connut un âge d'or dans les années 30. Une société alternative fondée sur l'horizontalité et qui est implicitement comparée à une ruche dont la reine (surnommée "la charmeuse d'abeilles") est Idgie, jeune femme libre vivant et se comportant comme un homme, source d'inspiration pour les femmes d'aujourd'hui.

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Indiana Jones à la recherche de l'âge d'or perdu

Publié le par Rosalie210

Clélia Cohen, Antoine Coursat (2020)

Indiana Jones à la recherche de l'âge d'or perdu

"Tout a commencé en 1977 sur une plage de l'archipel d'Hawaï… ", dit la narratrice du documentaire "Indiana Jones à la recherche de l'âge d'or perdu" (2020) en préambule, et sur un échange rapide entre deux amis. « Ça s'appelle Indiana Jones, explique alors George LUCAS à Steven SPIELBERG. Ça se passe dans les années 1930. C'est un film d'aventures surnaturelles. C'est comme un serial. C'est comme un James Bond mais en mieux ».

Très complet et didactique, le film, sorti à l'occasion de la présentation au festival de Cannes du cinquième volet de la saga se penche sur sa genèse avant d'analyser le phénomène. On y apprend une foule de choses. A commencer par la mue de Steven SPIELBERG alors en disgrâce auprès des studios en raison de l'échec de "1941" (1979) et de sa réputation à dépasser le budget et les délais à qui George LUCAS donna une seconde chance qu'il sut saisir pour gagner en rigueur et devenir un pilier du blockbuster hollywoodien. Les sources d'inspiration, sérials à suspense et petit budget diffusé dans les cinémas de quartier pour divertir les foules et James Bond mais aussi grands films d'aventures de l'âge d'or hollywoodien, genre alors tombé en désuétude comme le western ou la comédie musicale. La création de l'icône à partir d'éléments composites: le look de Charlton HESTON dans "Le Secret des Incas" (1954), le cynisme de Humphrey BOGART dans "Le Trésor de la Sierra Madre" (1947), la droiture de Stewart GRANGER dans "Les Mines du roi Salomon" (1949), l'humour et la décontraction de Jean-Paul BELMONDO dans "L'Homme de Rio" (1964) que Steven SPIELBERG adorait, faisant ainsi entrer sans le savoir une touche "Tintin" dans l'univers qu'il était en train de créer. Les conséquences enfin de l'énorme succès de la saga qui a relancé la vogue du film d'aventures, suscitant une foule de déclinaisons et un énorme merchandising tout en générant un mythe moderne à l'égal de celui des chevaliers Jedi.

Car le documentaire contient une dimension critique en contextualisant l'oeuvre de George LUCAS et Steven SPIELBERG. "Indiana Jones" comme "Star Wars" a contribué à refermer le chapitre contestataire des années 70 marqué par le cinéma du nouvel Hollywood au profit des grosses franchises de divertissement des années 80 empreintes d'idéologie reaganienne. Le comportement de Indiana Jones face aux indigènes (forcément barbares) est celui de l'occidental "civilisé" conquérant et un peu arrogant. S'y ajoute une dimension consumériste (les produits dérivés, le concept de franchise, le cinéma "pop-corn") et régressive: pour emporter l'adhésion du plus grand nombre, il ne faut plus faire réfléchir mais divertir et procurer des sensations d'où l'utilisation d'une mécanique d'action frénétique faisant penser à un rollercoaster. Les auteurs vont jusqu'à montrer à raison l'aspect plutôt conservateur des "Indiana Jones" quant au statut des femmes par rapport à certains films ultérieurs reprenant ses codes comme "À la poursuite du Diamant vert" (1984) (Robert ZEMECKIS a beau être un disciple de Steven SPIELBERG, il a ses obsessions propres et les femmes fortes en font partie).

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Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal (Indiana Jones and the kingdom of the crystal skull)

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (2007)

Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal (Indiana Jones and the kingdom of the crystal skull)

Je n'avais jamais eu envie de voir le quatrième épisode des aventures d'Indiana Jones bien qu'il ait fait couler beaucoup d'encre, plutôt négativement. Au final, sans atteindre la dimension mythique du premier ou l'intensité du troisième, c'est un film qui se regarde avec plaisir, même s'il est trop bavard et un peu longuet. Le poids des ans se fait ressentir et il est difficile d'anticiper le vieillissement des effets spéciaux numériques qui sont très présents dans le film. Mais la scène d'ouverture est tout aussi brillante que celle des opus précédents et nous plonge en immersion dans les années cinquante ou plutôt dans l'immense cinémathèque consacrée à cette période. Steven SPIELBERG et George LUCAS voulaient conserver l'aspect "série B" de leur saga en mixant l'aventure dans la jungle à la manière des aventures de Bob Morane avec les histoires de science-fiction souvent à connotation paranoïaque dans un contexte de guerre froide. Alors ils s'en donnent à coeur joie, parfois en s'auto-citant, de "American Graffiti" (1973) à "E.T. L'extra-terrestre" (1982) en passant par "Rencontres du troisième type" (1977) ou en citant les amis avec l'allusion à la première version du scénario de "Retour vers le futur" (1985) dans lequel la machine à voyager dans le temps fonctionnant à l'énergie nucléaire était un réfrigérateur. D'ailleurs le film de Robert ZEMECKIS transportait le héros dans les années cinquante et citait "L'Invasion des profanateurs de sépultures" (1956) également mentionné dans le film de Steven SPIELBERG. Quant à la cité maya construite par des aliens, elle aussi constitue un thème important de l'ufologie des années cinquante, soixante et soixante-dix dont on trouve l'héritage dans ce qui est un de mes souvenirs d'enfance "Les Mystérieuses cités d'or" (1983). Donc, respect vis à vis de tout ce travail d'assimilation et de restitution qui est d'une grande cohérence tout comme d'ailleurs l'autre aspect majeur du film, la saga familiale, amorcée dans le deuxième, affirmée dans le troisième et pleinement exploitée dans le quatrième. Steven SPIELBERG et George LUCAS sont tout autant mythologues que cinéastes et Harrison FORD est loin d'avoir rendu son dernier soupir. Même s'il doit faire équipe avec un petit jeune aux faux airs de James DEAN et de Marlon BRANDO joué par Shia LaBEOUF, aucun ancien, vivant ou non n'est oublié que ce soit Karen ALLEN (Marion Ravenwood), Sean CONNERY (Henry Jones senior) ou Denholm ELLIOTT (Marcus Brody) remplacé par Jim BROADBENT dans le rôle du doyen de l'institut où enseigne encore Indiana Jones qui lui aussi a vu sa retraite repoussée puisqu'il doit reprendre du service cette année pour un cinquième volet.

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Le choix de Jane (Miss Austen Regrets)

Publié le par Rosalie210

Jeremy Lovering (2008)

Le choix de Jane (Miss Austen Regrets)

Dans "Une chambre à soi", Virginia Woolf énumérait les raisons pour lesquelles les femmes ne parvenaient pas à produire une oeuvre littéraire et qui se résumaient dans leur dépendance vis à vis des hommes, détenteurs du pouvoir financier mais également des normes culturelles infériorisant les femmes en les cantonnant au rôle d'épouse et de mère et en les privant des conditions nécessaires à la liberté créatrice ("de l'argent et une chambre à soi"). C'est exactement ce que démontre de manière convaincante "Le choix de Jane". Pour avoir bravé les conventions de son époque en refusant de se marier par intérêt à un homme riche, Jane Austen se retrouve dans une situation si difficile qu'elle n'est sans doute pas étrangère à son décès prématuré. Le téléfilm de Jeremy LOVERING évoque en effet les dernières années de l'écrivaine alors âgée d'une quarantaine d'années et confrontée aux conséquences douloureuses de ses choix. Si ses romans débouchent sur un mariage heureux en guise de consolation/compensation, Jane tout comme sa soeur Cassandra et tout comme 1/4 des femmes de cette époque a opté pour le célibat. Soit comme je le disais plus haut par refus de se vendre à un homme riche, soit parce que sa situation financière ne lui permettait pas de s'unir à un homme pauvre (ou dépendant d'un tuteur riche décidant pour lui). On le constate, le mariage à cette époque est une affaire d'argent qui domine d'ailleurs tous ses romans. Et l'argent appartient aux hommes puisque les femmes de la gentry britannique du début du XIX° siècle n'ont pas accès à l'emploi ni à l'héritage. Lorsqu'un homme chasse une dot, il s'unit en réalité à un autre homme, celui qui la détient, la femme n'étant qu'un instrument de la transaction financière. Lorsque cette dot n'existe pas, comme dans le cas de Jane et sa soeur, le mariage relève de la prostitution, donner son corps et sa liberté en échange d'un toit et d'une place à table. En le refusant, Jane se met dans la précarité ainsi que sa mère et sa soeur (le révérend Austen, mort en 1905 les a laissées sur la paille). Elle dépend de fait de ses frères dont deux seulement sont présentés dans le film qui la soutiennent, l'un en négociant les droits de vente de ses romans et l'autre en mettant à sa disposition son cottage pour écrire. Mais parce qu'ils sont écrits par une femme, ils sont dévalués et les droits du frère sur le cottage sont attaqués ce qui contribue un peu plus à l'usure prématurée de Jane. "Un peu plus" car tout dans son quotidien lui rappelle qu'elle n'est pas dans la norme, que ce soit les reproches de sa nièce Fanny pour qui elle s'improvise marieuse (comme son héroïne "Emma") ou ses anciens flirts ou encore sa mère. Olivia WILLIAMS est très convaincante dans le rôle-titre et le film, éclairant sur la réalité de la condition féminine à cette époque.

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Fifi martingale

Publié le par Rosalie210

Jacques Rozier (2001)

Fifi martingale

"Fifi martingale" est le film invisible de Jacques Rozier. Réalisé quinze ans après "Maine Océan" en 2001, il n'est jamais sorti en salles et n'a été diffusé qu'en de rares occasions sur Canal + qui l'a co-produit. Le décès du cinéaste a conduit la chaîne à proposer le film sur sa plateforme de vidéos à la demande.

Dans "Fifi martingale", Jacques Rozier a voulu se faire plaisir en filmant sa compagne, Lydia Feld (dont le nom de scène est Lili Vonderfeld) et en rendant hommage à Jean Renoir, aux Marx Brothers et à Marcel Carné. Le résultat est déconcertant car on se retrouve avec un film qui se résume pour l'essentiel à du (mauvais) théâtre filmé dont on assiste aux répétitions hasardeuses jusqu'à plus soif avec un fil conducteur tout aussi nébuleux et une écriture remplie de jeux de mots assez pitoyables. Rien à voir avec le sens des répliques d'un Carné ou d'un Renoir. Au milieu du film a lieu une échappée en voiture et on croit alors avoir retrouvé le Rozier que l'on aime. Sauf que c'est pour mieux retourner au théâtre où l'on assiste cette fois à la répétition d'une opérette avec Luis Rego. Bref, n'en jetez plus ce film de plus de deux heures est dans l'ensemble assez indigeste et fait penser à "au théâtre ce soir" avec en plus un côté amateur dû au style Rozier qui s'avère incompatible avec le film de chambre et des acteurs qui semblent tout aussi peu dirigés. Jean Lefebvre semble être à la ramasse et on imagine ce que le film aurait pu donner si Bernard Tapie (le premier choix de Jacques Rozier) avait interprété son rôle. Le tournage chaotique du film, interrompu à plusieurs reprises qui a conduit l'acteur-entrepreneur à jeter l'éponge explique sans doute ce résultat décevant.

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Emma

Publié le par Rosalie210

Jim O'Hanlon (2009)

Emma

A l'exception de "Raison et Sentiment" (2008) qui souffre de sa comparaison avec le film de Ang LEE scénarisé et interprété par la divine Emma THOMPSON, j'ai systématiquement préféré les adaptations des romans de Jane Austen en mini-série pour la BBC aux déclinaisons cinématographiques de ces mêmes romans. Je n'avais pas aimé l'adaptation sans relief de "Emma" réalisée par Douglas McGRATH avec Gwyneth PALTROW dans le rôle-titre qui correspondait à un filon commercial exploité par la Weinstein et cie dans les années 90. Rien à voir avec la mini-série en quatre épisodes scénarisée par Sandy WELCH déjà à l'oeuvre sur la formidable adaptation de "Jane Eyre" (2006) réalisée par Susanna WHITE. Le résultat est d'une grande fidélité au roman tout en maintenant l'intérêt du spectateur sur la durée. "Emma" est comme la plupart des livres de Jane Austen un récit initiatique de passage à l'âge adulte mais d'un point de vue féminin. Les contraintes qui pèsent sur les jeunes filles de la gentry (petite noblesse rurale, milieu social auquel elle appartenait) ont une très grande importance. Comme dans "Jane Eyre" autre récit initiatique au féminin (mais plus sauvage, Charlotte Brontë considérait les romans de sa consoeur comme un jardin trop bien ordonné), l'héroïne compense l'impossibilité d'apprendre en se déplaçant par un voyage intérieur. Jane s'évadait dans les livres, Emma se fait des films à partir des gens qui l'entourent, imaginant des intrigues amoureuses entre les uns et les autres qu'elle aide à se concrétiser afin d'avoir un rôle actif et valorisant. Mais sans expérience de la vie et nourrie de préjugés de classe, Emma manque de discernement et multiplie les maladresses et les bévues au point de compromettre sa propre situation à force d'aveuglement. Ce que j'ai aimé dans la série, c'est le regard bienveillant sur Emma (très bien interprétée par Romola GARAI) qui agace certes au début ("la petite fille gâtée qui croit mieux savoir ce qui est bon pour les autres qu'eux") mais évolue très vite. Bien que ses agissements relèvent de la manipulation, elle est trop naïve pour maîtriser les tenants et aboutissants de ses actes et c'est elle qui finalement devient une victime (d'elle-même mais aussi de prétendants plus aguerris). A cela s'ajoute le fait qu'après la mort de sa mère et les mariages de sa soeur et de sa gouvernante, elle se retrouve seule à tenir compagnie à un père particulièrement anxieux qui n'aime pas qu'elle s'éloigne de lui (Michael GAMBON, le Albus Dumbledore de la saga Harry Potter à partir de l'épisode 3). Heureusement, elle a un ami et mentor en la personne de son voisin et beau-frère, George Knightley (Jonny LEE MILLER), plus âgé qu'elle et ayant une meilleure connaissance des codes sociaux et du coeur des hommes mais qui contrairement à Frank Churchill ou à Mr. Elton ne cherche pas à profiter d'elle mais à lui ouvrir les yeux sur ses erreurs. Pour un spectateur qui ne connaît pas le roman et qui donc va s'identifier à Emma, il n'est pas si simple de démêler le vrai du faux et donc de comprendre ce qui se trame vraiment entre les uns et les autres. Et pour celui qui le connaît, il peut une fois de plus admirer la profondeur de l'étude de moeurs de Jane Austen qui nous met face à une galerie de personnages écrasés par leur condition sociale qui dicte souvent leurs actes ce qui fait penser à la phrase de Jean RENOIR, "chacun a ses raisons".

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Indiana Jones et la dernière croisade (Indiana Jones and the last crusade)

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (1989)

Indiana Jones et la dernière croisade (Indiana Jones and the last crusade)

Deux Jones pour le prix d'un dans cette dernière croisade au rythme échevelé, aux rebondissements incessants et aux ressorts comiques imparables. Ce troisième volet d'Indiana Jones est aussi pour moi le meilleur car le  plus personnel de Steven SPIELBERG. On retrouve ainsi les ennemis absolus, les nazis à la recherche d'un nouvel objet sacré, le saint graal dont ils espèrent s'emparer pour obtenir la toute-puissance. S'y superpose une histoire familiale qui était maladroitement esquissée dans "Indiana Jones et le temple maudit" (1984) mais qui trouve dans cet opus une expression magistrale. D'abord en la personne de River PHOENIX dans le rôle d'Indiana adolescent lors une scène d'ouverture d'anthologie qui n'est autre que la Genèse du personnage (son chapeau, son fouet, sa cicatrice, sa phobie des serpents et... sa relation difficile avec son père). Ensuite avec Sean CONNERY qui forme un duo irrésistible avec Harrison FORD en père indigne qui concurrence son fils aussi bien sur le plan scientifique que dans le domaine des conquêtes féminines. De toutes manières, cette confusion des rôles est entretenue par le fait qu'ils ont le même prénom. D'où le surnom "Indiana" auquel le père préfère "junior" pour se placer en position de supériorité, alors qu'il agit comme un vieux gamin. La première scène où ils jouent ensemble donne le ton, Henry Jones se souciant davantage du vase qu'il a cassé en frappant par erreur Indiana que de l'état de santé de celui-ci. Le saint graal devient alors la quête du lien père-fils qui n'a jamais pu s'établir jusque là. Et bien que l'on reste toujours dans une atmosphère légère et bondissante, c'est le film qui des trois ressemble le moins à une BD. On est plus proche du style James Bond (Sean Connery oblige!) avec un fort caractère parodique qui sera repris plus tard par Michel Hazanavicius pour ses OSS 117. 

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Indiana Jones et le temple maudit (Indiana Jones and the Temple of Doom)

Publié le par Rosalie210

Steven Spielberg (1984)

Indiana Jones et le temple maudit (Indiana Jones and the Temple of Doom)

La suite des aventures de "Indiana Jones" est en réalité ce que le jargon hollywoodien appelle aujourd'hui une préquelle. L'histoire se déroule en effet en 1935 soit un an avant "Les Aventuriers de l'arche perdue" ce qui permet en réalité de ne pas avoir les mains liées par un scénario préexistant et rapproche encore plus la saga des serials, cartoons et autres comics dont elle s'inspire avec une succession de morceaux de bravoure ébouriffants. L'introduction est aussi magistrale que celle du premier opus avec ses hommages simultanés aux comédies musicales et aux films de gangsters des années 30, une ambiance très "Lotus bleu", un clin d'oeil à "Star Wars" (le club s'appelle "Obi Wan"!), un autre à James Bond et encore une autre à "19413 (1979) (le gong qui se détache comme le faisait la grande roue) et cette incroyable mise en scène où les personnages courent après un diamant et un antidote qui ne cessent de se dérober au moment où ils vont les attraper: un véritable ballet! Il en annonce un autre, celui de la course-poursuite en wagonnet qui fait de ce "Temple maudit" un film "rollercoaster" qui sera ensuite décliné à Disneyland (tout comme Star Wars). S'y ajoute la scène du pont suspendu qui est également spectaculaire.

Cependant, des trois Indiana Jones que j'ai vu, c'est celui que j'aime le moins. Autant "L'Empire contre-attaque" (1980) réussit à avoir des accents de tragédie shakespearienne (merci Akira KUROSAWA!) autant les pérégrinations souterraines de Indiana Jones et de ses amis m'ont paru relever du grand guignol bien plus que d'une descente aux enfers (les effets spéciaux vieillis n'arrangent rien). Et si Willy Scott (Kate CAPSHAW) en chanteuse de cabaret perdue dans la jungle façon "la ferme célébrités" ou confrontée à des plats exotiques peu ragoûtants ou encore assaillie de bestioles plus que jamais "Ford Boyard" est drôle au début, sa mue est ratée: elle devient tout simplement une potiche lambda pendue au cou de son aventurier préféré. Dommage car on reconnaît à travers le trio du film une ébauche de la famille dysfonctionnelle chère à Steven SPIELBERG avec un père immature voire défaillant qui annonce la relation père-fils de "Indiana Jones et la dernière croisade" (1989). Il y a même un petit côté "Joueur de flûte de Hamelin" dans le film en ce sens que Indiana Jones à la recherche d'un artefact magico-mystique doit choisir entre ses réflexes d'archéologue occidental pilleur de trésor et sa promesse de le rendre aux villageois à qui il a été dérobé, leur permettant par là même de retrouver leurs enfants eux aussi volés, donc leur avenir.

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