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La mission de Fatty (Moonshine)

Publié le par Rosalie210

Roscoe Arbuckle (1918)

La mission de Fatty (Moonshine)

Le neuvième court-métrage de Roscoe Arbuckle avec Buster Keaton n'existe plus aujourd'hui qu'à l'état de fragments d'une durée de six minutes environ sur les vingt-quatre ou vingt-cinq initiales. Il existe deux façons de le regarder: soit en version amputée avec des cartons pour remplacer les passages manquants (DVD Lobster), soit en version intégrale (sur Youtube) avec des images d'une si mauvaise qualité qu'elles sont tout simplement illisibles.

L'intérêt majeur de ce qui nous reste du film réside dans un gag surréaliste: celui où une cinquantaine d'hommes sortent d'une voiture. Cet ancêtre du gag de la cabine de "Une Nuit à l'Opéra" a été réalisé avec un trucage très simple. Les hommes montaient par la gauche et sortaient par la droite mais la caméra n'enregistrait que la partie droite du cadre, la partie gauche ayant été oblitérée par un cache. Ensuite la séquence a été rembobinée et le cache déplacé à droite pour ne filmer que la partie gauche de la voiture dans un champ vide avec la portière fermée. C'est l'association des deux moitiés qui créé l'illusion.

Pour le reste il s'agit d'un film très classique avec Roscoe Arbuckle dans le rôle du héros (un douanier bouffon qui subvertit sa mission), Buster Keaton dans le rôle du second couteau zélé et Al St John dans le rôle du méchant. Quant à Alice Lake, elle joue le rôle de la victime du patriarcat entre un père tyrannique, un premier fiancé lubrique et un deuxième fiancé qui lui reproche de ne pas être assez soumise. Ça marche, elle tombe dans ses bras à la façon du cliché raciste (mais qui vaut aussi pour le sexisme): "battue et contente": elle a trouvé un (mâle)maître, un vrai!

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Bohemian Rhapsody

Publié le par Rosalie210

Bryan Singer (2018)

Bohemian Rhapsody

Le titre du film porte le nom de la chanson emblématique du groupe Queen, "Bohémian Rhapsody". Emblématique parce que hybride et même multiface comme le dit Brian May (Gwilym Lee) dans le film. Comme les 4 membres du groupe et l'identité éclatée de son chanteur, elle mélange 4 styles: balade, rock, opéra et hard-rock pour un résultat hors-norme qui leur donna du fil à retordre pour parvenir à leurs fins: en faire un tube planétaire.

De fait le premier mérite de ce biopic est de donner une grande place à la musique du groupe dont on redécouvre la puissance fédératrice et la flamboyance. Grâce à l'implication de Roger Taylor et de Brian May sur le film, on assiste à la genèse de plusieurs titres (le riff de guitare de "Another one bites the dust", le battement en mesure de "We will rock you", l'ambiance bucolique de la composition de "Bohémian Rhapsody"). Ils insistent sur l'importance du travail collectif dans leur élaboration (alors que les médias ne s'intéressaient qu'à la diva Freddie Mercury). L'alchimie entre les acteurs fonctionne bien et la ressemblance avec les membres du groupe est bluffante. La séquence finale de 18 minutes du concert de Wembley de 1985 où le groupe enchaîne quatre titres est tout simplement euphorisante. On en redemande !

Le second mérite du film réside dans la performance de Rami Malek dans la peau de Freddie Mercury. Certes au début on ne voit que ses dents proéminentes (exagérées sur les bords, je n'y avais jamais fait attention avant) mais par la suite on les oublie. Des dents constitutives de son identité problématique et qu'il a voulu garder en dépit des pressions. Ce qui m'a le plus impressionné, c'est moins le mimétisme en concert que ces moments plus intimes de transe dans lesquels il semble possédé par ce qu'il compose.

Là où le film est moins convaincant, c'est dans son traitement de la quête d'identité de Freddie Mercury, tant vis à vis de ses racines iraniennes, indiennes et africaines qu'en ce qui concerne sa bisexualité. La question des origines et du racisme est traité superficiellement. L'ennuyeuse petite amie Mary Austin (Lucy Boynton) prend trop de place au détriment d'une homosexualité réduite à la portion congrue alors qu'elle est essentielle dans la vie du chanteur. Celle-ci a d'ailleurs plusieurs facettes. Au début de sa carrière, Freddie Mercury apparaît frêle, efféminé, timide et extravagant à la fois, puis il devient musclé et hyper-viril avec un look moustache-cuir tout en conservant sa fragilité intrinsèque (comparable à celle du héros du film "Moonlight"). Quant aux orgies, elles sont évoquées en mode subliminal. C'est conforme à ce que voulait Freddie Mercury: suggérer plutôt que montrer (il y a les films x pour ça). Néanmoins il aurait fallu développer davantage le sujet car il est indissociable de son inspiration créatrice (alors que l'influence de Mary se réduit au très dispensable "Love of my life").

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