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Il était une fois la Révolution (Giù la Testa)

Publié le par Rosalie210

Sergio Leone (1971)

Il était une fois la Révolution (Giù la Testa)

A l'inverse des puristes, j'adore ce qui est hybride. Par conséquent, je suis totalement fan du film "bâtard" qu'est "Il était une fois la Révolution", film charnière de sa trilogie sur l'Amérique mais dont l'un des autres titres "A Fistful of Dynamite" suggère le prolongement avec la trilogie du dollar. De fait le début de "Il était une fois la Révolution" rappelle l'univers picaresque de ses westerns, surtout "Le Bon, la brute et le truand" (1966). L'histrion Juan Miranda (Rod STEIGER) ressemble beaucoup à Tuco (le rôle avait été d'ailleurs écrit à l'origine pour Eli WALLACH) alors que son partenaire John Mallory (James COBURN) adopte le flegme canaille du clown blanc Blondin. Mais déjà dans "Le Bon, la brute et le truand" (1966) on notait un net infléchissement de la bouffonnerie vers le drame historique lorsque les deux compères étaient malgré eux plongés en pleine guerre de Sécession. Et le personnage truculent de Tuco acquérait une dimension chaplinesque de vagabond solitaire lorsqu'il était confronté à son frère. C'est la même chose, de façon plus ample et plus approfondie dans "Il était une fois la Révolution". Bien que très drôle, la scène du pillage de la diligence est également nourrie par une rage sociale que la mise en scène de Leone amplifie. Il faut voir ces bourgeois dont Leone filme l'aspect animal et carnassier avec de gros plans sur leurs bouches voraces vomir leur haine des pauvres et des minorités en aboyant à qui mieux mieux des "brutes, "imbéciles", "nègres" et "animaux" à l'adresse de Juan Miranda qui s'est glissé parmi eux. Les voir finir à poil dans la porcherie a tout de la revanche cathartique ("les bourgeois, c'est comme les cochons"). Juan Miranda passe d'ailleurs très rapidement même si c'est involontairement du statut de bandit à celui de héros au cours de la scène du braquage de la banque de Mesa Verde dont il ne sait pas qu'elle s'est transformée en prison politique (contrairement à John Mallory qui le manipule). Au lieu d'y trouver de l'or, il libère plus d'une centaine d'opposants. Cette scène est de l'aveu même de Leone directement inspirée de celle du film de Charles CHAPLIN "Les Temps modernes" (1936) où le Vagabond y devenait par hasard le porte-drapeau des chômeurs.

Mais la véritable rupture de ton survient lorsque la guerre s'invite dans le film au travers de l'impitoyable répression des opposants. Celui-ci bascule alors dans la tragédie. Car ce que Leone ravive, ce n'est pas la révolution mexicaine des années 1910 mais le traumatisme des massacres perpétrés en Italie par les nazis en 1943 et 1944 et plus largement, toutes les grandes tueries du XX° siècle. Si l'une des fusillades fait penser au tableau de Goya "Tres de Mayo", la liquidation de centaines d'opposants dans des fosses fait penser à la Shoah par balles en URSS. Pour enfoncer le clou de la liquidation finale, le chef des troupes (Antoine SAINT-JOHN) porte un nom allemand, Günther. Face à ce rouleau compresseur impitoyable, John et Juan se radicalisent et révèlent leur nature profonde. Le premier apparaît de plus en plus comme un desperado nihiliste embarqué dans une odyssée suicidaire. Les flashbacks cotonneux de son passé d'activiste de l'IRA en Irlande révèlent qu'il a tué son meilleur ami qui l'avait trahi avant de partir en exil. Ce passé le hante comme si c'était une partie de lui-même qu'il avait tué (interprétation renforcée par le fait que le prénom "Sean" au cœur de la superbe BO de Ennio MORRICONE peut aussi bien être son vrai prénom que celui de son ami et qu'ils aiment la même fille qui peut également représenter leurs idéaux). C'est avec une profonde ironie que John Mallory dit à Juan que le docteur Villega (une troisième version de "Sean" joué par Romolo VALLI) est mort "en grand héros de la révolution". Car peu de temps auparavant il avait envoyé à la mort la plupart de ses camarades en parlant sous la torture. Que lui reste-t-il à part le suicide kamikaze pour se racheter? Quant à Juan, il change profondément après le massacre de ses six fils ("Pour la première fois je les ai comptés" peut se traduire par "pour la première fois, ils ont compté pour moi"). Bien qu'il hésite lorsque le gouverneur lui offre un trésor en échange de sa vie, il choisit de liquider le gouverneur. La perte de son ami le laisse seul au monde.

Et toute cette destruction pour quoi au final nous dit un Leone profondément désenchanté: pour que des puissants prennent la place d'autres puissants, les pauvres jouant le rôle de dindons de la farce. Toute révolution se bâtit sur un malentendu, tout gouvernement issu d'une révolution est fondé sur une trahison: "La révolution ? C’est quand ceux qui savent lire vont voir ceux qui savent pas lire et leur disent qu’il faut tout changer. Les pauvres bougres se mettent au boulot. Puis, le boulot fait, ceux qui savent lire se réunissent, puis parlent, puis bouffent, puis parlent, puis bouffent. Pendant ce temps-là, les pauvres, eux, ils sont morts. Et après, eh bien tout recommence comme avant !" Une diatribe qui vaut aussi pour les Etats-Unis, eux aussi nés d'une révolution.

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L'intendant Sanshô (Sanshô dayû)

Publié le par Rosalie210

Kenji Mizoguchi (1954)

L'intendant Sanshô (Sanshô dayû)

"L'intendant Sansho" est une œuvre aussi belle que profonde et émouvante. Deux visions du monde et deux systèmes de valeurs s'y opposent. D'un côté, le Japon féodal fondé sur l'exploitation des faibles par les forts et où le crime le plus terrible est la désobéissance aux supérieurs. Une société fondée sur la verticalité symbolisée par l'impitoyable intendant Sansho (Eitarô SHINDO), mielleux avec les puissants, cruel avec tous les autres. De l'autre, les valeurs humanistes issues du bouddhisme portées par le gouverneur Taira Masauji (Masao Shimizu) défenseur des opprimés et qui enseigne à son fils de 13 ans Zushio (Masahiko TSUGAWA) que "un homme sans pitié n'est pas un être humain". Mais est-il possible de rester humain lorsqu'on est en proie aux pires avanies, aux plus grands malheurs? Oui répond Kenji MIZOGUCHI et en grand cinéaste des femmes, il célèbre une fois de plus leur courage, leur fidélité, leur force, leur solidarité et leur compassion dans l'adversité. Si Zushio une fois adulte (Yoshiaki Hanayagi) rétablit la justice dans sa province en faisant libérer les esclaves et retrouve sa mère Tamaki (Kinuyo TANAKA) exilée dans l'île de Sado, il le doit à sa sœur Anju (Kyôko KAGAWA) qui contrairement à lui est restée fidèle à leur père et s'est sacrifiée pour le sauver. Le film regorge de scènes magnifiques comme la séparation des enfants et de leur mère ou le suicide d'Anju (mainte fois repris dans des œuvres japonaises ultérieures) mais l'une de celles qui m'a le plus remuée est celle où Zushio et Anju préparent un abri pour une esclave que ses maîtres veulent abandonner dans la montagne et qui leur a servi de mère de substitution. Par sa seule mise en scène, Kenji MIZOGUCHI fait monter l'émotion en reproduisant les mêmes gestes et les mêmes cadrages qu'au début du film lorsque Zushio et Anju enfants fabriquaient une cabane pour les abriter avec leur mère. C'est cette scène qui permet à Zushio victime du syndrome de Stockholm (il a embrassé la cause de ses bourreaux et renié l'héritage de son père) de se reconnecter à son enfance et par là même, à son humanité perdue. Il est intéressant de constater également que si Taro (Akitake Kono), le fils de Sansho est profondément révulsé par les actes de son père, il choisit de se retirer du monde en devenant moine alors que Zushio choisit d'agir en tant que gouverneur pour humaniser le monde.

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Le Limier (Sleuth)

Publié le par Rosalie210

Kenneth Branagh (2007)

Le Limier (Sleuth)

Fan absolue du film "Le Limier" (1972) de Joseph L. MANKIEWICZ, j'ai beaucoup attendu avant de me décider à regarder le remake de Kenneth BRANAGH qui est pourtant un réalisateur que j'apprécie (contrairement à la critique française qui l'a pris en grippe et démolit systématiquement ses films). Néanmoins je trouve le résultat inabouti. Le film de Kenneth BRANAGH n'a pas la profondeur de celui de Joseph L. MANKIEWICZ. Peut-être parce que les enjeux de 1972 ne sont plus tout à fait les mêmes en 2007. Le film de Joseph L. MANKIEWICZ s'appuyait sur le clivage entre "sir" Laurence OLIVIER à l'accent distingué et un acteur d'origine prolétaire à l'accent cockney, Michael CAINE qui campait de plus un personnage aux origines ritales. Dans le film de Kenneth BRANAGH, en dehors de l'âge, on ne voit guère ce qui différencie Wyke et Tindle d'autant que c'est Michael CAINE qui campe désormais le richissime écrivain (il faut dire qu'entretemps, il a été anobli par Elizabeth II). Plutôt que Jude LAW, il aurait fallu embaucher un parvenu indo-pakistanais pour réactualiser la pièce d'Anthony Shaffer de façon pertinente. D'autre part, si l'idée de remplacer le décor rempli d'automates et de jeux de sociétés par une version 2.0 avec des caméras de surveillance et autres joujoux connectés est intéressante en soi, cela rend le film très froid et impersonnel. L'aspect dépouillé et design du décor ainsi que les jeux de lumières n'arrangent rien. Enfin, Branagh a décidé de changer la fin du film en rendant plus explicite l'attirance homosexuelle (à tendance sado-maso) entre les deux hommes. Le problème c'est que le résultat est pour le moins maladroit (voire balourd) et rend la fin du film très confuse. Heureusement que Michael CAINE sauve les meubles, il est magistral d'émotion contenue, rendant Wyke aussi pathétique qu'émouvant. Hélas, il se heurte à un mur car Jude LAW qui surjoue en permanence ne donne aucune substance à son rôle.

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Deux hommes dans l'ouest (Wild rovers)

Publié le par Rosalie210

Blake Edwards (1971)

Deux hommes dans l'ouest (Wild rovers)

Si "Deux hommes dans l'ouest" est le seul western réalisé par Blake Edwards, il ne faut pas croire pour autant que ce dernier était un novice dans le genre. Il avait en effet scénarisé et/ou joué dans plusieurs westerns au début de sa carrière. Si "Deux hommes dans l'ouest" est aussi peu connu c'est qu'il a souffert des démêlés entre le réalisateur et les studios MGM qui ont massacré sa grandiose fresque de trois heures. Le film a été amputé de plus d'une heure, la fin a été changée, des ralentis superflus ont été rajoutés. Tout cela n'a pas sauvé le film qui fut un échec commercial. Une version plus fidèle a la volonté du réalisateur a vu le jour en 1986 qui est celle qui est aujourd'hui visible mais celle de trois heures est à jamais perdue. On en voit les traces dans une composition en actes avec ouverture et entracte qui peut faire penser par exemple à "2001, l'Odyssée de l espace" (1968) de Stanley KUBRICK. Lequel est également indirectement présent au travers de l'acteur Ryan O NEAL quatre ans avant qu'il ne tourne "Barry Lyndon" (1975). Quant à William HOLDEN, il avait tourné deux ans auparavant "La Horde sauvage" (1969) dans un rôle assez proche. De fait "Deux hommes dans l'ouest" aurait pu être tourné par Sam PECKINPAH tant il rappelle son style.

En effet ce film couturé mérite le détour. D'abord parce qu'il est parfaitement interprété, ensuite parce qu'il traduit l'esprit d'une époque hippie et punk de façon remarquable. William HOLDEN et Ryan O NEAL campent deux cow-boys liés par une solide amitié à caractère filial qui décident de tout plaquer du jour au lendemain. Après avoir dérobé l'argent de la banque, ils se lancent dans une odyssée où ils peuvent enfin étancher leur immense soif de liberté (scène magnifique où Ross apprivoise un cheval sauvage tandis que Frank fait des cabrioles dans la neige). Mais avec les fils revanchards de leur ancien patron à leurs trousses qui incarnent une sorte de fatalité, on sent bien que cette échappée belle finira mal. D'autant que les deux hommes n'ont rien de truands en cavale. Leur disposition pour le banditisme est tellement nulle que Ross dédommage le banquier les autres ouvriers avant de s'enfuir avec le reste de l'argent tandis que Frank ne trouve pas mieux d'embarquer un chiot dans sa fuite, tellement il le trouve mignon. La suite est à l'avenant: ils flânent, planent, profitent de l'instant, suivent leurs envies avec une insouciance qui leur sera fatale. Une fatalité accueillie d'ailleurs avec une étrange résignation comme si c'était le prix à payer pour ces quelques moments de liberté et qu'il n'y avait rien d'autre à espérer de la vie que des rêves impossibles à concrétiser. Un état d'esprit nihiliste très seventies qui donne à ce western pourtant souvent frais et joyeux une teinte crépusculaire.
 

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Deux têtes folles (Paris when it sizzles)

Publié le par Rosalie210

Richard Quine (1963)

Deux têtes folles (Paris when it sizzles)

Synopsis de "La Fête à Henriette" (1952) de Julien DUVIVIER:

"Deux scénaristes, l'un optimiste et l'autre pessimiste doivent écrire une histoire pour un nouveau film. Leurs inspirations contradictoires vont faire vivre des situations rocambolesques à leurs deux héros, Henriette et Maurice."

Et voici maintenant le synopsis du remake de Richard QUINE:

"A 48 heures de l'échéance, un scénariste n'a pas encore écrit une ligne du scénario qu'il doit remettre. En compagnie de sa secrétaire, il met sur pied une rocambolesque histoire dont ils sont les héros. Une idée derrière la tête : séduire la secrétaire."

Parce que les deux scénaristes ne sont plus deux hommes mais un homme et une femme, que Richard QUINE n'est pas Howard HAWKS et que Audrey HEPBURN n'est pas Marlene DIETRICH (qui fait une amusante apparition dans le film), le spectateur va donc avoir droit à un pur produit de la culture machiste autosatisfaite. Richard Benson est en panne d'inspiration certes mais il se croit tellement irrésistible qu'il se permet de jouer les frotteurs et les tripoteurs dès les premières minutes de l'entrée en scène de sa partenaire. Qui n'est évidemment pas mise sur un pied d'égalité, cela pourrait lui couper tous ses moyens (alors que le scénario pas plus subtil que le film s'intitule "La fille qui a volé la tour Eiffel"). Non seulement c'est une subordonnée (le secrétaire de service) mais elle est "muette d'admiration" devant le génie en herbe qu'elle est chargée de sauver de ses démons et de remettre sur le droit chemin (rôle sacrificiel habituellement dévolu aux femmes). Quant aux ardeurs sexuelles du type qui lui saute dessus dès qu'il la voit (au point de la faire travailler sur son lit quelques minutes après le début du film), elle n'attendait que ça bien sûr! Audrey HEPBURN surjoue tellement d'ailleurs l'admiration et les cris de pâmoison que je me suis demandé si elle n'avait pas inconsciemment voulu saborder le scénario!

Mais hélas on nous rappelle les antécédents de l'actrice au travers de la présence de William HOLDEN dans le rôle du scénariste Richard Benson (avec lequel elle avait eu une liaison sur le tournage du film de Billy WILDER "Sabrina") (1954), de la chanson "That face" interprétée par Fred ASTAIRE, hommage évident au film "Funny face" (1956) de Stanley DONEN et enfin du mythe de Pygmalion à travers la comparaison dans les dialogues entre Frankenstein et "My Fair lady" (1963) de George CUKOR. Dans tous ces rôles, l'actrice devait sourire et tomber amoureuse tout en étant placée en situation d'infériorité et malmenée par des mâles tout-puissants (et bien plus âgés qu'elle). A l'heure de Metoo, ce schéma patriarcal n'est plus l'évidence qu'il a représenté pendant des siècles.


L'aspect réactionnaire du film ne concerne pas seulement les relations hommes-femmes, il touche aussi le domaine de l'art cinématographique. "Deux têtes folles" se moque ouvertement de la Nouvelle Vague (qui réalise des films ennuyeux sans histoire, mais très « avant-garde », type La partie de scrabble n’aura pas lieu – à propos d’une «soirée où les gens décident de ne pas jouer au scrabble») et prend parti pour le cinéma à l'ancienne tourné en studio et segmenté en genres bien identifiables. Le problème est que cet hommage lourdaud tend à donner raison à la critique de Truffaut sur le cinéma de papa tourné en studio tant tout y semble toc et vain: le film de vampires, de gangsters, d'espionnage, la comédie musicale, le polar, la comédie romantique. On se moque souvent de ce qu'on ne comprend pas. Richard QUINE et son scénariste George AXELROD auraient été mieux inspirés de remplacer les décors en carton-pâte de leur Paris d'opérette par celui bien réel de "À bout de souffle" (1959) de Jean-Luc GODARD qui aurait pu aussi leur donner des idées neuves en matière d'interprétation et de relation hommes-femmes.

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Un garçon séduisant (The Hayseed)

Publié le par Rosalie210

Roscoe Arbuckle (1919)

Un garçon séduisant (The Hayseed)

Dans "Un garçon séduisant" (que l'on connait également sous le titre "Fatty au village"), Fatty et Buster dont c'est le treizième court-métrage ensemble travaillent au Grimes Général Store, un magasin qui sert également de poste. Fatty est coursier et Buster est palefrenier/garagiste et vendeur. Comme dans "Fatty cuisinier" (1918), Roscoe ARBUCKLE jongle avec les objets qui comme par magie atterrissent à bon port c'est à dire dans la boîte aux lettre. Fatty est amoureux d'une belle jeune fille (Molly MALONE) mais il a un redoutable rival en la personne du garde-champêtre, joué par John Coogan, le père de Jackie COOGAN le futur héros du "Le Kid / Le Gosse" (1921) de Charles CHAPLIN (Al St JOHN n'a qu'un petit rôle car il était parti tenter sa chance en solo). Pour la convaincre de le préférer à son rival, Fatty use de moyens olfactifs puissants: du gruyère et des oignons. Enfin si le film est plaisant et parfois même hilarant (Fatty qui chante une romance et fait pleurer tout le monde dont Buster qui en fait des tonnes, à l'opposé de son style impassible !), il y a aussi des gags recyclés de précédents courts-métrages comme le jeu de quilles avec un balai ou avec une fille que l'on envoie valser dans les jambes su voisin.

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Fatty cuisinier (The Cook)

Publié le par Rosalie210

Roscoe Arbuckle (1918)

Fatty cuisinier (The Cook)


"Fatty cuisinier" a longtemps été considéré comme perdu, certains pensant même qu'il s'agissait d'un titre alternatif au court-métrage "Fatty chez lui" (1917). Mais une copie a été retrouvée en 1996 dans les caves de l'institut norvégien du film. Restaurée et complétée par d'autres fragments retrouvés en Europe, elle permet aujourd'hui d'avoir une vision quasi-complète du court-métrage. Il manque cependant quelques minutes ce qui est visible dans le passage abrupt d'une scène à l'autre où l'on sent que des plans de transition manquent. Mais rien de grave car comme dans la plupart des films de Roscoe ARBUCKLE, il n'y a pas d'intrigue à proprement parler mais une suite de sketches. Et ceux de "Fatty cuisinier" sont particulièrement nombreux et inventifs. Il faut dire que le jeu avec la nourriture est le domaine de prédilection de Roscoe ARBUCKLE et qu'il s'en donne à cœur joie, que ce soit avec des oignons ou des spaghettis. Il faut le voir notamment jongler avec les plats, les lancer n'importe comment à son serveur, Buster KEATON qui les rattrape toujours adroitement sans rien verser ce qui est physiquement impossible (mais pas au cinéma!) Buster KEATON joue d'ailleurs moins les serveurs que les joli-cœurs, draguant tout ce qui passe à sa portée, même en présence du mari. Il y a aussi quelques cascades très réussies avec Al St JOHN dans le rôle du trouble-fête. Enfin le film est connu pour la scène où Roscoe ARBUCKLE et Buster KEATON se mettent à singer de façon drolatique une danse orientale inspirée d'un film alors encore à l'affiche, "Salomé""(1918) de William FOX avec l'actrice Theda BARA. 

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Meurtre à Hollywood (Sunset)

Publié le par Rosalie210

Blake Edwards (1988)

Meurtre à Hollywood (Sunset)

Blake EDWARDS s'amuse avec l'âge d'or d'Hollywood, ses paillettes et ses scandales. Le film est une satire qui entremêle les genres (western, polar, comédie burlesque) et de nombreuses références: il fusionne Chaplin et Hearst dans le personnage d'acteur et producteur Alfie Alperin joué par Malcolm McDOWELL, il fait revivre la rencontre entre le premier cow-boy de l'histoire du cinéma Tom Mix (Bruce WILLIS) et le marshall Wyatt Earp (James GARNER) qu'il doit interpréter au cinéma, il fait allusion à l'affaire du viol et du meurtre de Virginia Rape, faits pour lesquels Roscoe ARBUCKLE a été injustement accusé ainsi que d'autres affaires de décès non élucidées (le réalisateur Thomas Ince, l'actrice Natalie Wood), il recréée la première cérémonie des Oscars. Le titre en VO et l'époque (passage du muet au parlant) peuvent faire penser à "Sunset boulevard" de Billy Wilder qui évoquait les remugles nauséabonds du même microcosme. La phrase répétée telle un mantra "tout est vrai, à un ou deux mensonges près" évoque la fameuse citation du film de John FORD, "L Homme qui tua Liberty Valance" (1962) "Entre la légende et la vérité, imprimez la légende".

Bref, sans être un grand film (car la charge satirique est plus ludique que sérieuse et l'intrigue est volontairement confuse pour coller aux polars de type Chandler), "Meurtre à Hollywood" vaut mieux que ce que sa réception à l'époque de sa sortie (où il avait raflé un "razzie award") peut laisser penser. C'est juste un divertissement certes, mais haut de gamme.

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La Rue de la honte (Akasen chitai)

Publié le par Rosalie210

Kenji Mizoguchi (1956)

La Rue de la honte (Akasen chitai)

Le triste sort des femmes au Japon est le sujet de prédilection de Kenji MIZOGUCHI. Pour ce qui fut son dernier film, il dresse le portrait magistral de cinq prostituées du quartier de Yoshiwara à Tokyo (le "quartier de la lumière rouge" du titre en VO, celui de la VF introduisant un jugement de valeur étranger à la pensée de Kenji MIZOGUCHI) à la fin des années 50. Ironiquement surnommé "Le Rêve", le bordel où travaillent ces femmes est un microcosme entrepreneurial à travers le lequel il explore les ravages de cette variante de l'exploitation marchande de l'être humain par son semblable que sont les relations tarifées entre les femmes et les hommes. Le tout dans un remarquable style néo-réaliste quasi documentaire alors que les décors ont dû être reconstitués en studio, les patrons des maisons closes refusant d'ouvrir leurs portes aux caméras. Mais Kenji MIZOGUCHI n'en a pas besoin car étant un client régulier de ces lieux, et sa sœur, une ancienne victime, il les connaît par cœur.

Le film aborde toutes les facettes du problème que constituait la prostitution au Japon en 1956 et qui selon Kenji MIZOGUCHI ne peut être réglé par une loi l'interdisant (en débat au moment du tournage du film qui l'évoque en arrière-plan et adoptée un peu plus tard):

- La misère et l'absence d'un Etat-providence protégeant les citoyens des aléas de la vie. Hanaé (Michiyo KOGURE) est contrainte à la prostitution pour faire vivre son foyer composé d'un mari tuberculeux et d'un enfant en bas âge. Yorie (comme la sœur de Kenji MIZOGUCHI) est vendue à une maison de geishas pour rembourser des dettes ou comme moyen de subsister pour une famille rurale très pauvre. Yumeko qui est veuve a dû se prostituer pour élever son fils.

- L'attrait de l'argent facile. Yorie veut s'en sortir par le mariage ou un métier honnête mais elle déchante quand elle découvre qu'au sein du mariage la femme n'est qu'une esclave domestique et que le travail honnête ne rapporte pas assez pour couvrir les goûts de luxe qu'elle a contracté au contact du monde de la prostitution.

- Le patriarcat oppresseur et la pression sociale aliénante. Mickey (Machiko KYÔ) surnommée ainsi parce qu'elle est l'ancienne maîtresse d'un G.I., s'est révoltée contre son père, un homme d'affaires entretenant de nombreuses maîtresses mais qui s'est vite remarié après la mort de sa femme. Il veut également ramener Mickey dans le droit chemin, non parce qu'il l'aime mais parce que pour lui, rien n'est plus important que la réputation de sa famille et que le métier de Mickey pourrait empêcher sa sœur de faire un beau mariage et son frère une excellente carrière. On comprend pourquoi de toutes les filles, Mickey est la plus cynique et la plus lucide. Même si elle est endettée jusqu'au cou et que les patrons du bordel l'exploitent sous couvert de paternalisme (on rappelle bien dans le film que les filles ne touchent que 40% des gains).

C'est la combinaison de tous ces facteurs qui explique que Yasumi (Ayako WAKAO) soit la seule des cinq filles à parvenir à se sortir du monde de la prostitution. Elle est en effet avare, manipulatrice et sans scrupules, utilisant des moyens crapuleux pour parvenir à ses fins. De quoi définitivement éteindre le "Rêve".

En dépit de scènes psychologiquement difficiles, le film est dénué de tout pathos. Il est plutôt trempé dans une colère froide, clinique, que soulignent tous les plans où l'on voit ces femmes dont Mizoguchi nous a dévoilé l'intimité jetées en pature dans la rue, contraintes de s'avilir en racolant lourdement et vulgairement les passants. C'est toute l'humanité qui en ressort salie et amoindrie. Une colère soulignée également par la musique dodécaphonique dissonante de Toshiro Mayuzumi.

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Sixième sens (The Sixth Sense)

Publié le par Rosalie210

M. Night Shyamalan (1999)

Sixième sens (The Sixth Sense)

"Sixième sens" est un très beau film fantastique qui rappelle "Shining" (1980) de Stanley KUBRICK (l'enfant doté de pouvoirs paranormaux, les travellings avant angoissants dans le couloir, le rôle important de la salle de bain, les lieux hantés) et "Vertigo" (1958) de Alfred Hitchcock (atmosphère onirique, poids des fantômes et du passé sur le présent, apparition-éclair du réalisateur dans son propre film). Mais le film est également profondément original de par sa construction en strates qui ne peut être appréciée que si on le voit au moins deux fois. La premier visionnage fait épouser au spectateur le point de vue de personnages démunis face à la mort qui n'est plus intégrée culturellement dans nos sociétés rationnalisées et qui ne peut donc plus être pensée. Cole (Haley Joel OSMENT) et Vincent Grey (Donnie WAHLBERG) sont rejetés par les autres et leur psychiatrisation les enfonce encore plus dans leur statut de freaks. Le twist final agit comme un "rideau déchiré" qui permet au deuxième visionnage de mesurer la profondeur de la mélancolie qui imprègne le film. Chacun est seul, enfermé en lui-même et incapable de parler aux autres ("seul" et "parler" sont sans doute les mots les plus récurrents dans le film). Une scène particulièrement forte suffit à mesurer le malentendu qui sépare Cole (et par extension, tous les enfants "extra-sensibles") des adultes hermétiques. Il s'agit du moment où le professeur demande aux élèves quel était autrefois l'usage de l'école où ils se trouvent. Le professeur attend une réponse politiquement correcte (un palais de justice), Cole lui donne celle qu'il connaît de par ses capacités extra-sensorielles (un lieu où on pendait les gens) avant de faire remonter à la surface l'enfant bègue qu'avait été ce professeur et qu'il a cherché à effacer. Même lorsqu'ils ont des liens affectifs et filiaux, les personnages ne parviennent pas à communiquer ou alors seulement par le truchement d'écrans, s'enfermant ainsi toujours davantage dans leur solitude et leur détresse. C'est toute la force du film de montrer comment Cole apprivoise les fantômes avec l'aide d'un psychologue pour enfants en quête de rédemption, Malcom (Bruce WILLIS) établissant ainsi un lien entre les morts et les vivants, le passé et le présent, l'enfance et l'âge adulte.

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