Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Il était une fois dans l'ouest (Once Upon a Time in The West)

Publié le par Rosalie210

Sergio Leone (1968)

Il était une fois dans l'ouest (Once Upon a Time in The West)

De Quentin Tarantino à Luc Besson ("J'aime ces moments de calme avant la tempête" dit Gary Oldman dans Léon juste avant le massacre de la famille de Mathilda), ils sont nombreux les cinéastes inspirés par l'esthétique et la mise en scène saisissante et grandiose du film de Sergio Leone. Mais lui-même manifeste dans ce film un croisement d'influences tout à fait fascinant. Les deux plus évidentes sont celle du classicisme américain et du film de sabre japonais.

- Outre l'influence de Zimmerman (Le train sifflera 3 fois) L'ADN de John Ford évidemment est partout. Dans le langage visuel, notamment la composition des premières images avec l'utilisation de cadres dans le cadre et de silhouettes se découpant dans l'embrasure des portes; dans l'utilisation de décors emblématiques (Monument Valley) et de seconds rôles fétiches (comme Woody Strode lui aussi présent dès les premières images); dans l'identité de certains personnages (les McBain sont irlandais comme l'était Ford et Claudia CARDINALE joue un rôle qui rappelle celui de Dallas dans La chevauchée fantastique); et même dans l'intrigue qui a d'évidents points communs avec celle de L'Homme qui tua Liberty Valance. Les deux films sont des westerns crépusculaires où les aventuriers solitaires qu'ils soient héroïques ou criminels sont condamnés à périr pour laisser place à la loi et l'ordre de la civilisation symbolisé par le chemin de fer et ses ouvriers.

- Le cinéma asiatique et notamment le film de sabre à la Kurosawa est également très présent. Dans la relation quasi-organique de l'homme à son arme, véritable prolongement de lui-même au hiératisme de "l'homme-portemanteau" du cinéma asiatique (repris par Melville dans le Samouraï qui n'a rien de japonais en apparence mais qui reprend tous les codes de ce cinéma) en passant par la gestion du bruit et des silences. Les hommes parlant peu et exprimant peu, ce sont les bruits extérieurs qui expriment leurs états d'âme. Ainsi le personnage joué par Charles BRONSON (au visage lui-même très asiatique) se confond tellement avec l'air lancinant de son instrument (symbole de son désir de vengeance) qu'il est surnommé "Harmonica". Et la bande-son des 10 premières minutes relève elle de la musique d'avant-garde avec ces bruits amplifiés remplaçant la voix humaine pour exprimer une attente tendue (goutte d'eau qui tombe, moulin qui grince, mouche qui bourdonne, jointures qui craquent...)

Voir les commentaires

Faut pas s'en faire (Why Worry?)

Publié le par Rosalie210

Fred C. Newmeyer et Sam Taylor (1923)

Faut pas s'en faire (Why Worry?)

48 ans avant "Bananas" de Woody Allen et 53 ans avant "Tintin et les Picaros" d'Hergé, un hurluberlu (à moins que ce ne soit un joyeux Turluron) débarquait dans une république latino-américaine d'opérette en pleine révolution. Non pas San Theodoros ni San Marco mais Paradiso. Nom parfaitement ironique qui exprime le décalage entre l'image que les riches américains s'en font et ce qui s'y passe vraiment. Car Paradiso est une sorte de miroir grossissant des rapports Nord-Sud et plus précisément americano-mexicains. Outre sa fonction touristique pour VIP, l'île est à la merci sur le plan politique des aventuriers venu des USA qui veulent s'enrichir en y fomentant un coup d'Etat. Combien de coups d'Etat dans la région ont été commandités par les USA pour s'emparer par exemple des ressources pétrolières du Mexique?

C'est sur ce fond politico-bouffon (mais inspiré d'un contexte géopolitique réel) que se déploie une jolie histoire initiatique. Celle d'Harold, cet oisif milliardaire hypocondriaque (encore un point commun avec l'univers de Woody Allen) dont la vie tourne autour de son petit nombril ou plutôt de ses petites pilules et qui est tellement déconnecté de ce qui l'entoure qu'il ne comprend rien à ce qui se passe. Jusqu'à ce qu'il tombe amoureux de son infirmière (Jobyna Ralston) et que pour la protéger, il révèle des trésors de courage et d'ingéniosité. D'autre part il est aidé par l'Hercule du coin, Colosso (John Aasen), un beau bébé de 2 mètres 67 et 250 kg qui lui voue une reconnaissance éternelle après qu'il l'ait délivré de sa rage de dents. A eux trois, ils réussissent à mettre une armée entière en déroute, séquence hilarante où l'art de l'illusion de Lloyd fait merveille!

Voir les commentaires

American Beauty

Publié le par Rosalie210

Sam Mendes (1999)

American Beauty

C'est un film jouissif, beau, profond et mélancolique. Culte aussi. Et le phénoménal numéro de Kevin Spacey n'y est pas étranger. Looser léthargique piqué au vif par un démon de midi en forme de Lolita, le voilà qui rajeunit jusqu'à faire une crise d'adolescence carabinée, envoyant valdinguer au passage tous les faux-semblants de sa vie de salary man de l'upper middle class vivant dans ces interminables suburbs aseptisés symboles du "rêve américain". Un rêve qui se réduit à un empilement de choses mortes alors que c'est le désir qui réveille, qui enflamme, qui fait vibrer. Et ce désir, Sam Mendès le filme fichtrement bien. Soit à travers les rêves de Lester où les pétales de rose écarlate, symboles d'une passion brûlante pleuvent du corps de la belle Angela. Soit à travers l'image granuleuse d'un caméscope, celui de Ricky, le fils des voisins épris de l'étrange beauté de Jane, la fille de Lester mais qui noue également une amitié complice avec son père. Un père qu'il filme donc également en train de travailler avec rage son corps pour le rendre de nouveau désirable.

A ces trois freaks totalement marginaux s'opposent du moins en apparence des personnages américains modèle: Angela, la barbie de service; Frank, le militaire facho-réac, brute épaisse collectionnant les armes et élevant son fils à coups de poing et Carolyn, la femme de Lester, une femme d'affaires castratrice et psychorigide qui ne peut éprouver du désir que pour le winner qui la domine (coïncidence ou pas, son amant Buddy est joué par Peter Gallagher, un rôle très proche de celui qu'il interprétait dans "Sexe, mensonges et vidéos" le premier film de Soderbergh et ce n'est pas le seul point commun entre les deux films.) Sauf que le film met en pièces leur façade et que derrière, c'est un gouffre béant de solitude, d'angoisse, de misère affective et sexuelle, de mauvaise image de soi. Un gouffre d'impuissance qui ne peut s'exprimer que par la violence principalement dirigée contre Lester, véritable pyromane de l'histoire. Alors on se rend compte que les vrais freaks de l'histoire ce sont eux.

Voir les commentaires

On n'entre pas (Ask Father)

Publié le par Rosalie210

Hal Roach (1919)

On n'entre pas (Ask Father)

"On n'entre pas" est un petit bijou de comédie slapstick à la mécanique burlesque parfaitement huilée. Un jeune homme (Harold Lloyd), amoureux d'une jeune fille riche très courtisée réussit à s'imposer auprès d'elle en jouant des coudes et en la couvrant de cadeaux. Il décide de demander sa main à son père. Mais celui-ci, un homme d'affaires très occupé, est inaccessible. Qu'à cela ne tienne, Lloyd va imaginer toute une série de stratagèmes pour atteindre son bureau, bien gardé par deux agents de sécurité aux méthodes musclées ainsi que divers pièges dignes d'un cartoon (tapis roulant, trappe...) Les chutes acrobatiques et les coups pleuvent à chaque nouvelle tentative, tout cela pour faire chou blanc au final. Suivant l'adage "Qui va à la chasse perd sa place", pendant que Lloyd était occupé avec le père, la belle lui a filé entre les doigts en se mariant avec un autre. C'est pourquoi la fin ajoute une touche d'humour noir lorsque Lloyd se console auprès de l'opératrice (Bebe Daniels): elle a perdu son père ce qui le soulage car cela lui évitera des démarches compliquées.

Voir les commentaires

Pour le coeur de Jenny (An Eastern Westerner)

Publié le par Rosalie210

Hal Roach (1920)

Pour le coeur de Jenny (An Eastern Westerner)

"Pour le cœur de Jenny" ou bien "Viré à l'ouest" est une parodie burlesque du western qui mêle cascades, coups de feu et chevauchées. Mis au vert après avoir été puni par son père pour avoir semé la pagaille dans les soirées dansantes de la grande ville (un passage très drôle) Harold Lloyd joue un fils à papa qui redouble d'ingéniosité pour séduire (le gag bien trouvé du faux lasso est hilarant) ou pour tricher aux cartes dans un saloon. La course-poursuite finale où Lloyd accomplit des prouesses d'agilité évoque "Naissance d'une nation" avec des Anges masqués qui ressemblent beaucoup aux membres du Ku Klux Klan. Dommage que le scénario soit sans queue ni tête, cela affaiblit le film.

Voir les commentaires

César

Publié le par Rosalie210

Marcel Pagnol (1936)

César

César est le troisième et dernier volet de la trilogie marseillaise de Pagnol. Le seul réalisé par Pagnol lui-même. Mais hélas, il est bien en deçà des deux premiers films de la trilogie.

Il y a d'abord le fait que contrairement à "Marius" et "Fanny", "César" n'est pas l'adaptation d'une pièce de théâtre. Cela se ressent au niveau des dialogues, moins travaillés ainsi que de l'intrigue qui comporte beaucoup de redites (pour n'en citer qu'une, la partie de pêche entre Marius et Césariot se résume à un récit de Marius copié-collé de la fin du deuxième film).

Ensuite la tonalité assez funèbre de ce film (à moins que ce ne soit la lassitude?) a une influence sur la prestation des acteurs. Ils n'ont pas l'énergie et l'allant qu'ils manifestaient dans les deux premiers comme si leur ressort était cassé. C'est particulièrement frappant chez Raimu qui manifeste plus de retenue que d'ordinaire mais Orane Demazis est tout aussi morose. Seul Paul Dullac de retour dans le rôle d'Escartefigue conserve une certaine fraîcheur avec son personnage quelque peu infantile et gros sabots.

Mais le véritable boulet du film, c'est Césariot et la façon assez irritante dont André Fouché l'interprète. Ce personnage complètement hors-sol est la négation de ce qu'est la trilogie. Vide, fade et moralisateur, il méprise sa famille et la juge sans arrêt avec des propos cyniques débités sur un ton hautain et détaché. On peut comprendre qu'il souffre d'avoir été élevé dans le mensonge mais César et Marius attribuent son comportement à l'instruction qu'il a reçue et non à son éducation ce qui est une façon de se déresponsabiliser. Plus grave encore, l'enfant est perçu par sa famille comme un vampire et non comme une source de bonheur. Une vision noire et désespérée qui heureusement est compensée par la scène finale qui ouvre in-extremis une perspective de bonheur et d'avenir quand César réintègre son fils dans la famille.

Voir les commentaires

Fannypa

Publié le par Rosalie210

Marc Allégret (1932)

Fannypa

"Fanny" est le deuxième volet de la trilogie marseillaise de Pagnol. C'est Marc Allégret qui après Alexandre Korda en assure la réalisation. Bien que "Fanny" reprenne la dernière scène de "Marius", assurant ainsi la continuité de l'histoire, il y a des différences sensibles entre les deux films.

Tout d'abord, il s'agit d'une réalisation beaucoup plus dynamique et vivante que "Marius" dont beaucoup de scènes assez statiques avaient été réalisées en studio avec un effet boîte et carton-pâte qui disparaît ici. Peut-être pour des raisons liées à l'amélioration de la prise de son, on voit apparaître des scènes extérieures de foule (le tramway stoppé par la partie de boules) et des scènes de rue dont celle, marquante du long travelling sur Fanny en train de marcher qui annonce le courant néoréaliste. Même la traditionnelle scène statique des 4 amis (César, Panisse, Escartefigue -joué par Auguste Mouriès et non plus par Paul Dullac- et Monsieur Brun) assis autour de la table se déroule dehors avec le bruit du vent et les effets d'ombres et lumière du soleil dans les arbres.

Ensuite, la disparition temporaire de Marius permet à d'autres personnages de passer au premier plan. C'est surtout Panisse qui en profite. Son personnage gagne considérablement en épaisseur lorsqu'il ouvre son cœur à Fanny et dévoile ses failles intérieures. On découvre également que derrière ses manières courtoises il s'agit d'un personnage franc (sauf lorsqu'il s'agit de rouler des clients dans la farine), capable d'aborder des sujets délicats sans pudibonderie. Le film étonne d'ailleurs par sa modernité concernant le traitement de la sexualité. Si le poids des mœurs de l'époque se fait sentir (le déshonneur de la grossesse hors-mariage et la nécessité sociale de cacher la faute par un mariage arrangé) il refuse de juger les personnages en restant toujours empathique à leur égard. Charpin fait une composition remarquable. Il est épaulé par un Raimu toujours aussi truculent dans le rôle de César dont la fierté dissimule bien mal qu'il se ronge les sangs pour son fils. Ses débordements gestuels et langagiers sont un régal. Enfin si Pierre Fresnay ne réapparaît qu'à la fin, il nous bouleverse lors d'une séquence d'anthologie qui l'oppose à son père sur la question de la filiation. "Le père c'est celui qui aime" répond-il à son fils qui prétend avoir des droits sur le bébé de Fanny parce qu'il est le père biologique. "Moi j'ai donné la part, elle aussi mais celui qui lui a le plus donné c'est Panisse. Et toi qu'est ce que tu lui as donné?"

Voir les commentaires

Marius

Publié le par Rosalie210

Alexandre Korda (1931)

Marius

"Marius, à quoi tu penses?" dit Fanny (Orane Demazis) le visage tourné vers celui qu'elle aime.
"Eh! Peut-être à toi!" répond Marius (Pierre Fresnay), le regard littéralement aimanté par le lointain. Et la caméra de renchérir par un long travelling en nous montrant ce qu'il regarde: un bateau sur le point d'appareiller.
"Menteur, va!" répond Fanny, pas dupe.

Rarement entrée en matière aura aussi bien ramassé l'identité et les enjeux d'un film, le premier de la trilogie marseillaise de Pagnol réalisé par Alexandre Korda. Marseille, actrice à part entière de l'histoire, le vieux port, théâtre de l'action, la sieste des vieux piliers de boutiques et les petits jeunes qui en profitent pour flirter. Sauf qu'à ce quotidien débonnaire se greffe une dimension tragique: le désir éperdu de Marius pour la mer et le désir non moins éperdu de Fanny pour Marius. C'est sur cet équilibre miraculeux entre deux dimensions de l'expérience humaine (le quotidien et l'évasion, le comique et le tragique, le léger et le grave, le local et l'universel) que fonctionne le film. Un vrai film de cinéma en dépit de ses racines théâtrales. D'une part parce qu'il nous fait sentir l'atmosphère d'un port du sud de la France (l'utilisation du parlant qui permet de faire vibrer l'accent mais aussi de savourer des dialogues aux petits oignons, le vent qui gonfle les voiles, les marins en goguette, le marché aux poissons etc.) de l'autre parce qu'il est pétri d'humanité en magnifiant les acteurs par une foison de gros plans sur leurs visages. Et quels acteurs! Raimu bien sûr, véritable "bête fôve" à la présence hallucinante, excessif dans la tendresse comme dans la colère. Mais aussi Charpin, plus policé en apparence mais non moins complexe dans un rôle du barbon rival de Marius (thème littéraire par excellence de Molière à Beaumarchais). Pierre Fresnay que Raimu ne peut s'empêcher de chambrer dans le film en prenant l'accent alsacien mais qui apparaît plus marseillais que les marseillais et dont le déchirement se traduit par une fièvre qui le ronge de l'intérieur. Non moins fiévreuse est Orane Demazis, véritable tragédienne dans l'âme. Des acteurs de cette trempe, capables de cette passion venue du fond des tripes, on n'en trouve plus guère aujourd'hui.

Voir les commentaires

Les As de la jungle

Publié le par Rosalie210

David Alaux (2017)

Les As de la jungle


"Les As de la jungle" est le premier long-métrage de la société TAT productions basée à Toulouse. Créée en 2000 par David Alaux, Éric Tosti et Jean-François Tosti, elle a commencé par réaliser des publicités puis des courts-métrages et des téléfilms dont le premier "As de la jungle: opération banquise" en 2011 avant de connaître le succès en 2012 avec la série dérivée "Les As de la jungle en direct" puis en 2013 "Les As de la jungle à la rescousse" qui leur a permis de gagner plusieurs prix.

Nul besoin cependant de connaître les opus précédents pour apprécier le long-métrage même si l'intrigue adopte certains raccourcis. La formation de la bande ne nous est pas racontée par exemple.

Si le scénario ne brille pas par son originalité en reprenant le thème archi-rebattu d'une bande de super-héros contre un super-méchant, il utilise la parodie et le décalage avec intelligence, fraîcheur et dynamisme. De plus il réussit à nous attacher aux personnages. Comme dans "Le grand méchant renard", il aborde le thème décidément très français des nouvelles familles à travers une filiation élective inter-espèces: Natacha la tigresse est une super-justicière qui recueille et élève Maurice, un pingouin qui pour lui ressembler se peint des rayures sur le corps et qui adulte, adopte à son tour Junior, un poisson-clown. Natacha fait partie des fortiches, une bande de justiciers à la retraite et Maurice a repris le flambeau en fondant les "As de la jungle" avec son fils adoptif et une bande de bestioles aussi hétéroclite qu'improbable: deux crapauds Alf et Bob, une chauve-souris Batricia, un tarsier, Gilbert qui est le scientifique de la bande et un gorille bien neuneu Miguel (qui n'a que deux mots de vocabulaire: bananes et taper!). Bien entendu le comique naît du décalage entre cette équipe de bras cassés et l'image que l'on se fait d'une équipe de super-héros. Là-dessus les réalisateurs s'amusent à placer de judicieuses références à "Mission: impossible", "Rocky" (Eye of The Tiger) et surtout "Indiana Jones et le temple maudit" avec la descente en wagonnets! Enfin sur le plan technique, le résultat est de bonne facture en dépit d'un budget réduit par rapport aux studios américains. L'animation française se porte bien et on espère qu'elle continuera à se développer.

Pour les toulousains et ceux qui iront séjourner dans la ville rose d'ici juillet 2018, une exposition très bien faite aborde les techniques d'animation et les aspects écologiques de l'univers des "As de la jungle" au muséum d'histoire naturelle.

Voir les commentaires

Harry Potter et l'ordre du Phénix (Harry Potter and the Order of the Phoenix)

Publié le par Rosalie210

David Yates (2007)

Harry Potter et l'ordre du Phénix (Harry Potter and the Order of the Phoenix)

Avec l'adaptation du tome 5 de la saga Harry Potter commence le règne sans partage de David Yates. Il réalisera en effet tous les films ultérieurs et a récemment remis le couvert pour le premier opus du spin-off des "Animaux fantastiques".

On comprend pourquoi ce réalisateur donne toute satisfaction aux producteurs et aux fans. Comme Christopher Colombus, c'est un élève appliqué qui produit des films parfaitement impersonnels calibrés pour ne pas faire de vagues. Une impression renforcée par les effets numériques qui gomment toutes les aspérités de l'image. Par conséquent l'adaptation du tome 5 est non seulement fade et décevante mais elle caricature tellement le livre qu'elle finit par le trahir.

Il faut dire que le tome 5 est beaucoup plus difficile à adapter que les précédents en raison de sa longueur et de sa complexité. S'il est plutôt mal-aimé c'est en raison de sa richesse, de ses subtilités et du comportement désagréable de Harry, en pleine crise d'adolescence. Tous aspects qui n'existaient pas dans le tome 4, plus axé sur l'action que sur la réflexion. Le tome 5 qui dresse le portrait saisissant d'un ado révolté rejeté de partout accentue la foncière ambivalence qui caractérise chacun de nous. Des membres de l'Ordre du Phénix poursuivant le même objectif (Sirius et Rogue) peuvent se haïr au point de chercher à s'entretuer, les êtres bafoués (Rogue et Kreattur) par le mépris de ceux qui se réclament du bien (James et Sirius) peuvent basculer dans les ténèbres. Parallèlement le livre dresse un panorama approfondi des mécanismes du totalitarisme au travers de la paranoïa du ministre de la magie, Cornelius Fudge (inspiré par Chamberlain célèbre pour s'être couché devant Hitler) ainsi qu'au travers de la figure fascistoïde de Dolorès Ombrage, nouvelle dame de fer en collants roses dont les méthodes coercitives et le sadisme n'ont rien à envier au 1984 de George Orwell.

Tout cela étant jugé trop complexe et mature pour le grand public, le film choisit de simplifier au maximum le livre. En rendant seulement comique le personnage d'Ombrage on ne prend plus au sérieux les aspects politiques du livre. D'autre part, le public étant jugé trop bête pour saisir l'implicite, on souligne lourdement les sentiments. Par exemple dans le livre, lorsque Harry est possédé par Voldemort il pense qu'il va mourir et qu'ainsi il retrouvera Sirius. Le lecteur doit alors comprendre par lui même que l'élan d'affection d'Harry pour son parrain brûle Voldemort au point de l'obliger à lâcher prise. Dans le film, Harry dit qu'il possède l'amour et l'amitié ce que Voldemort n'aura jamais. Or JK Rowling déteste tant les paroles creuses que dans le livre lorsque Dumbledore veut consoler maladroitement Harry, il augmente sa fureur. Harry finit par tout casser dans son bureau et se retient de lui sauter à la gorge. Un aspect trop dérangeant savamment gommé. Daniel Radcliffe, plus raide et inexpressif que jamais contribue à rendre le film insipide et inoffensif.

Voir les commentaires

<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 > >>