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Les Incorruptibles (The Untouchables)

Publié le par Rosalie210

Brian de Palma (1987)

Les Incorruptibles (The Untouchables)

Dès les premières notes électrisantes du générique, signées par Ennio MORRICONE, on sent que l'on va voir un film iconique, enchaînant les morceaux de bravoure menés de main de maître. Un film à la fois brillant et obscur car derrière la lutte manichéenne du bien contre le mal qui sature le premier plan, le film est parcouru par d'autres enjeux qui lui donnent sa complexité. La première partie, dédiée à la formation et aux premiers succès du quatuor formé par Eliot Ness (Kevin COSTNER), Jim Malone (Sean CONNERY), George Stone (Andy GARCIA) et Oscar wallace (Charles Martin SMITH) se déroule sur une note claire, celle du clairon de la cavalerie sûr de son fait qui culmine dans la scène westernienne triomphale où les quatre hommes attaquent le pont à la frontière vers le Canada. Pourtant si on est attentif, les fausses notes sont nombreuses dans cette première partie. Il y a tout d'abord la fausse bonhommie de Al Capone (Robert De NIRO) qui nous est systématiquement présenté dans des plans en plongée, contre-plongée ou circulaires qui nous enserrent ou nous écrasent, sensation redoublée avec son homme de main cadavérique, Frank Nitti (Billy DRAGO) dont l'acte inaugural (la mort d'une petite fille, allusion à Alfred HITCHCOCK qui dans "Sabotage" (1936) faisait périr un enfant dans un attentat à la bombe) signe l'emprise du mal absolu sur la ville. Face à ces monstres, Eliot Ness fait bien pâle figure, lui et sa famille modèle montrée volontairement c'est Brian DE PALMA qui le dit comme "ce qu'il y a de plus faux dans le film". La séquence où il se fait ridiculiser souligne à quel point il n'est pas de taille. Seuls ses comparses peuvent lui permettre de parvenir à ses fins, mais comme ne cesse de le lui répéter Malone, il n'y a pas de retour possible lorsqu'on est prêt à plonger dans la fosse aux serpents. La deuxième partie du film, plus que jamais sous influence hitchcockienne décline à l'infini le vertige de cette chute à la manière (Brian DE PALMA est un grand maniériste) de "Vertigo" (1958). C'est dans ce cadre que la transposition dans la gare de Chicago de la séquence des escaliers d'Odessa de "Le Cuirassé Potemkine" (1925) prend tout son sens: Eliot Ness doit plonger les mains dans le cambouis s'il veut mettre la main sur le seul homme qui peut compromettre Al Capone en mettant notamment la vie d'un enfant en danger. De même, la seule manière d'en finir avec Nitti ne peut de toute évidence pas être propre. L'héroïsme de la première partie est remplacée par une ambiance crépusculaire voire tragique (scène d'opéra à l'appui) où les hommes qui ont guidé Eliot Ness sont destinés à tomber à leur tour dans un ascenseur (comme dans "Pulsions") (1979) ou au terme d'un long travelling subjectif comme dans les introductions de "Blow Out" (1981) et "Snake Eyes" (1998). Et si Al Capone finit sous les verrous, c'est grâce à l'obscur travail de fourmi du comptable de l'équipe et non grâce à une quelconque "La Chevauchée fantastique" (1939). Car effectivement, je rejoins Claude Monnier dans sa critique du film pour DVDClassik, "Les Incorruptibles" est un John FORD filmé par un Alfred HITCHCOCK. Et Eliot Ness, le chevalier sans peur et sans reproches finit dans de telles eaux troubles qu'il n'est pas loin de rejoindre le monstre que son patronyme suggère.

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