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Armageddon Time

Publié le par Rosalie210

James Gray (2022)

Armageddon Time

Les éléments qui font que je n'adhère pas au cinéma de James GRAY, je les ai retrouvés dans son dernier opus "Armageddon Time": une certaine tendance à surligner plutôt qu'à suggérer et un personnage principal qui en dépit de ses velléités de rébellion manque de caractère, qui semble subir les événements avec résignation ou s'en accommoder jusqu'à un certain point. On a beaucoup comparé Paul à Antoine Doinel mais ce dernier me fait plutôt penser à son ami Johnny beaucoup plus attachant, lui dont les rêves se brisent implacablement contre "un monde sans pitié" qui ne lui laisse aucune chance. Paul en dépit de son inadaptation (lent, rêveur, artiste) bénéficie d'une protection familiale que n'a pas son ami défavorisé sur tous les plans. Cette inégalité des chances condamne leur amitié dans un contexte de montée en flèche du libéralisme débridé (la victoire de Reagan, le film étant fortement autobiographique).

Ceci étant il serait dommage de s'en tenir là. Car en dépit de ces maladresses (récurrentes dans le cinéma de James Gray) le film à la tonalité douce-amère donne aussi beaucoup à réfléchir. Paul est un adolescent indécis qui doit se positionner par rapport aux valeurs véhiculées par sa famille qui ne sont pas les mêmes selon les générations. Le grand-père (formidable Anthony HOPKINS), très marqué par la violence antisémite et l'exil encourage son petit-fils à se réaliser dans ce qu'il aime et à affronter les injustices en "mensch" (c'est à dire avec honneur et intégrité, ce mot m'arrache toujours des larmes tant il me renvoie à "La Garçonnière" (1960) où déjà un sage d'origine juive encourageait Baxter en ce sens face aux compromissions du "rêve américain"). Les parents en revanche sont avant tout soucieux de s'intégrer (au point d'avoir américanisé leur nom de famille) et de faire réussir leur progéniture. Qui pourrait les en blâmer? D'autant que le père qui semble si dur envers son fils sait ce qu'est l'humiliation sociale et reconnaît sans peine la noblesse de son beau-père qui est le seul à lui avoir tendu la main. Il semble au fond impuissant et résigné à jouer le jeu cynique et individualiste que la société lui impose de peur de se faire écraser ("sauve ta peau"). Paul semble suivre ses traces mais le très beau final avec ses travellings arrière sur les lieux de son apprentissage vidés de leur substance laisse entendre que cela ne sera peut-être pas le cas.

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