Pain, tulipes et comédie (Pane e tulipani)
Silvio Soldini (2001)
Pain, tulipes et comédie" est un récit d'émancipation qui m'a fait penser (les couleurs pop en plus) à un film français bien postérieur "Lulu femme nue" (2013). Dans les deux cas, les personnages principaux sont des femmes au foyer d'une quarantaine d'années opprimées par le patriarcat qui peu à peu se libèrent de leur mari goujat (et plus largement des injonctions sociales liées à la bonne épouse-bonne mère) en multipliant les actes manqués. Lulu ratait son train et perdait son alliance. Rosalba rate son car de tourisme, son train, fait tomber des objets dans les WC et casse un bibelot. Par conséquent ces femmes désormais sans foyer passent un moment de transition à l'hôtel et font de nouvelles rencontres avant de se créer un nouveau foyer bohème temporaire qui répond mieux à leurs aspirations. Dans le cas de Lulu il s'agissait d'une caravane. Dans celui de Rosalba (Licia MAGLIETTA) qui sur une impulsion soudaine fait une virée à Venise (la ville du cliché romantique où elle n'est jamais allé, tout un symbole), c'est une pièce dans un logement occupé par Fernando (Bruno GANZ) qu'elle a rencontré dans un restaurant où il faisait le service. Rosalba se trouve également rapidement un travail en tant qu'assistante d'un fleuriste anar, se lie d'amitié avec Grazia (Marina MASSIRONI), une masseuse holistique (!) et sort du placard un accordéon qui s'accorde avec la personnalité de Fernando, lequel n'a pas seulement des talents de cuisinier mais aussi de chanteur. Mais avant de pouvoir s'exprimer, il doit lui aussi se libérer des boulets qu'il a au pied. Léger et pétillant, le film est extrêmement plaisant à regarder en dépit d'une fin très prévisible. Les seconds rôles très proches de la bouffonnerie apportent leur lot d'humour*. Le film s'avère émouvant aussi quand on le regarde aujourd'hui. Car pour rendre hommage à cet acteur hors-normes qu'était Bruno Ganz**, sa tombe a été fleurie avec des centaines de tulipes comme on peut le voir dans le documentaire "Bruno Ganz, les Révolutions d'un Comédien" (2021).
* Le titre français se réfère également à la culture italienne, plus exactement à des comédies antérieures "Pain, amour et fantaisie" (1953) et "Pain, amour et jalousie" (1954).
** Bruno Ganz était polyglotte (il parlait couramment cinq langues) notamment en raison de ses origines: un père allemand, une mère italienne et une enfance en Suisse. Mais sa manière de parler l'italien, comme le français était plus littéraire que naturelle. Aussi le scénario en fait un... islandais!
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