Les 8 Salopards (The Hateful Height)
Quentin Tarantino (2015)
Le seul film de Quentin TARANTINO que je n'avais pas vu était "Les 8 Salopards". La raison? "Il y a des têtes qui explosent" m'avait-on dit et cela avait suffi à me bloquer. En réalité, la violence est tellement exagérée qu'elle en perd tout son côté horrifique (le terme "grand-guignol" convient parfaitement au film qui est en réalité très supportable) et "Les 8 Salopards" n'est au final pas plus violent que "Pulp Fiction" (1994). Mais celui auquel il ressemble le plus est sans conteste "Reservoir Dogs" (1992), le premier film de Tarantino, comme si celui-ci avait voulu revenir aux sources*, l'habillage western en plus (d'ailleurs Michael Madsen est présent dans les deux films). Car "Les 8 Salopards" a beau être un huis-clos façon panier de crabes dans lequel tout le monde finit par s'entretuer à la manière des polars d'Agatha Christie, l'habillage est quant à lui super classe. Il y a d'abord une atmosphère très particulière: le film commence dans les grands espaces mais ceux-ci sont brouillés par le blizzard qui oblige les hommes à se confiner d'abord dans une diligence puis dans la mercerie de Minnie où se déroule la majeure partie de l'intrigue. A cette photographie (bi)polaire vient s'ajouter la bande originale composée par Ennio MORRICONE qui lui valut sur le tard l'Oscar de la meilleure musique de film et qui donna enfin à Quentin TARANTINO l'occasion de travailler avec son compositeur de prédilection. Ensuite, si le film comporte des longueurs et est un poil trop bavard, il reste néanmoins assez jouissif grâce à une mise en scène maîtrisée qui lorgne ouvertement du côté de Alfred HITCHCOCK. Ainsi lorsque le Major Warren (Samuel L. JACKSON) pénètre dans la mercerie, il se focalise (et la caméra également) sur des indices (un bonbon orange coincé entre deux planches de parquet et un bocal de bonbons manquant sur l'étagère) qui permettront plus tard au spectateur d'anticiper les événements. Il en va de même avec une diligence garée près de la mercerie que l'on retrouvera plus tard, preuve que chaque détail a son importance et que le film des événements se reconstitue comme un puzzle dans lequel chaque pièce s'emboîte parfaitement avec les autres. Par delà l'aspect ouvertement ludique du film, c'est (une nouvelle fois) la question du racisme qui est au coeur de l'histoire et le film pourrait tout à fait s'appeler "la revanche du major Warren", sa principale antagoniste étant la tueuse manipulatrice Daisy Domergue (Jennifer JASON LEIGH de plus en plus tuméfiée et peinturlurée au cours du film, certains pensent que c'est un hommage à "Carrie au bal du diable" (1976), moi je pense que c'est surtout un moyen -très efficace au demeurant- de dissimuler son visage lifté).
* "Réservoir Dogs" et "Les 8 Salopards" ont tous deux pour modèle avoué par Quentin Tarantino le désormais classique film d'horreur de John CARPENTER, "The Thing" (1982) et pour mieux enfoncer le clou, son acteur fétiche, Kurt RUSSELL joue l'un des principaux rôles dans "Les 8 Salopards" sans parler du trait d'union effectué par Ennio MORRICONE compositeur de BO inoubliables pour les westerns de Sergio LEONE mais aussi du film de John CARPENTER.
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