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Le Combat dans l'île

Publié le par Rosalie210

Alain Cavalier (1962)

Le Combat dans l'île

"Le Combat dans l'île", premier film de l'ex-assistant de Louis Malle, Alain Cavalier (que personnellement, j'ai découvert avec "Thérèse" dans les années 80) raconte dans un style qui n'est pas sans rappeler "Ascenseur pour l'échafaud" (c'est à dire très fortement influencé par le film noir américain), la dérive criminelle et autodestructrice d'un jeune fasciste, membre d'un groupuscule d'extrême-droite terroriste que le contexte du tournage permet d'identifier comme étant l'OAS. Néanmoins le film se réfère encore davantage à la seconde guerre mondiale et à sa guerre de civilisation entre les valeurs républicaines universalistes et celles des nationalistes identitaires obsédés par "la décadence de l'occident". On voit avec quelle clairvoyance, Alain Cavalier met le doigt sur une fracture française qui perdure aujourd'hui (d'ailleurs le mentor de Clément, Serge n'est pas sans rappeler un certain Eric Zemmour, aussi bien dans son apparence que dans son discours). Parallèlement à cette trame politique, Alain Cavalier se fait le portraitiste de Clément (joué par un Jean-Louis Trintignant glaçant), ce sinistre fils d'industriel psychorigide adepte d'une culture de mort maquillée en code d'honneur. Le meilleur révélateur de la véritable nature de Clément est sa femme, Anne (jouée par Romy Schneider au début de sa carrière française) qu'il détruit à petit feu à force de possessivité et de jalousie. Cela va même au-delà puisqu'il devient violent dès qu'elle manifeste une quelconque spontanéité (qui contraste avec sa rigidité morbide). L'histoire du film est donc autant celle de la folie de Clément que celle de l'émancipation d'Anne qui finit par échapper à son emprise et à se reconstruire, devenant même un modèle pour Cécile (Diane Lepvrier), jeune provinciale encore sous la férule de son père qui travaille comme cuisinière chez Paul, l'ami de jeunesse de Clément à la sensibilité politique opposée à la sienne. Dommage que celui-ci (joué par Henri Serre) censé incarner la résistance face à Clément soit un peu trop en retrait en dépit de la spectaculaire scène de fin qui donne son titre au film. Quelques lourdeurs dans la narration (par exemple la manière dont Clément apprend qu'il a été trahi) sont compensées par la densité du récit qui tient en haleine, une mise en scène épurée et une très belle photographie signée Pierre Lhomme. De plus le narrateur est Jean Topart dont j'adore la voix.

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