Diplomatie
Volker Schlöndorff (2014)
Diplomatie repose sur un dispositif particulièrement efficace, tiré de son origine théâtrale: une unité de lieu (la suite de l'hôtel Meurice où le gouverneur allemand von Choltitz avait établi son QG), une unité de temps (la nuit de la libération de Paris du 24 au 25 août 1944) et une unité d'action autour d'un enjeu clair: le sauvetage de la capitale de la destruction ordonnée par Hitler. Le dialogue tendu à huis-clos entre von Choltitz et le consul de Suède Raoul Nordling parvient à captiver et Volker Schlondörff réussit également à éviter le théâtre filmé, d'une part en collant aux basques des acteurs (Niels Arestrup et André Dussollier, tous deux excellents qui reprennent les rôles qu'ils interprétaient déjà sur les planches) et de l'autre en n'oubliant jamais le troisième protagoniste de l'histoire: Paris. Le générique de début qui à l'aide d'images d'archives relate la destruction de Varsovie rappelle que la seconde guerre mondiale fut une guerre d'anéantissement dans laquelle des villes entières furent rasées au nom de la guerre totale. Plus discrètement, la fenêtre ouverte sur la ville pendant la joute verbale de Choltitz et Nordling reflète l'évolution de leur négociation: de silencieuse et plongée dans la pénombre, elle s'éclaire et s'anime peu à peu. Enfin, de nouvelles images d'archives montrent les rues de la capitale transformées en champ de bataille lors de l'arrivée de la division Leclerc.
La pièce de théâtre comme le film prennent cependant de grandes liberté avec la vérité historique. Nordling et Choltitz se sont rencontrés plusieurs fois et avaient besoin d'un interprète, supprimé dans la fiction parce que cela aurait alourdi la dramaturgie. L'action de Nordling qui jouait le rôle d'intermédiaire entre les allemands et la Résistance a été considérablement simplifiée alors que la décision de von Choltitz d'épargner la ville n'a pas seulement été motivée par l'intervention de Nordling. D'autres acteurs firent pression sur le général qui par ailleurs étant sur le terrain, avait conscience de l'inutilité voire de l'aspect contre-productif d'un tel acte, sans parler du fait qu'il n'aurait pas eu les moyens de l'accomplir (en tout cas pas comme cela est présenté dans le film). Enfin von Choltitz savait que la guerre était perdue et espérait ainsi que cet acte effacerait son ardoise, lui qui avait participé à de nombreux crimes commis par l'armée allemande à l'est. De même que le scénario évacue le fait que Nordling avait des intérêts dans la capitale et n'oeuvrait pas seulement pour la beauté du geste, il n'est jamais fait mention de la différence de traitement entre l'ouest et l'est, là où les nazis déployèrent toute l'étendue de leur barbarie au nom de la lutte contre le judéo-bolchévisme (et de leur théorie raciale du sous-homme slave).
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