Wendy et Lucy (Wendy and Lucy)
Kelly Reichardt (2008)
Joli petit film (je n'ai pas vu le précédent) qui en dit long sur l'état de l'Amérique profonde. Quand on voit les malheurs qui s'abattent sur la pauvre Wendy (Michelle WILLIAMS) pour quelques boîtes de canigou chapardées dans un magasin, on se dit que le pays ne tourne pas rond. D'ailleurs ironiquement le film est un road-movie qui fait du sur-place, l'héroïne, jeune femme un peu marginale, un peu paumée se retrouvant arrêtée près du parking d'un supermarché à la fois par la panne de sa voiture et la perte de son chien. D'elle, on ne sait presque rien. Le film ne s'attarde pas sur son passé, il filme l'instant présent. Tout au plus au détour d'une conversation téléphonique comprend-t-on qu'elle ne peut pas compter sur sa famille pour l'aider et qu'elle doit se débrouiller seule, quitte à faire des centaines de kilomètres pour trouver un boulot. Classique aux USA mais pas quand on a une guimbarde pourrie en guise de véhicule ni les moyens de se loger ou de se nourrir décemment.
Outre les efforts de la jeune femme pour sortir la tête de l'eau, retrouver son animal, faire réparer sa voiture, ce que le film scrute, ce sont les gens avec lesquels elle entre en contact. Ceux qui lui tendent une main bienveillante (la majorité d'ailleurs, le film n'est absolument pas misérabiliste, ni aigri, ni haineux et montre que même au pays de l'individualisme-roi, il existe de la solidarité!) et ceux qui jouent les petits chefs zélés pour se faire bien voir de leur patron. De ce point de vue, le film donne un bon aperçu de la diversité du comportement humain face à quelqu'un qui est dans la détresse: malveillance, indifférence ou au contraire solidarité. Le style très minimaliste et le rythme assez lent peuvent rebuter ainsi que la peinture anti-glamour de cette Amérique de la marginalité mais Michelle WILLIAMS est très touchante sans être larmoyante et suscite naturellement l'empathie. Elle est beaucoup plus humaine par exemple que "Rosetta" (1999) à qui on peut penser étant donné leur situation similaire (deux jeunes filles SDF en recherche d'emploi) et le style assez néoréaliste des films. On pourrait d'ailleurs remonter la généalogie jusqu'à "Le Voleur de bicyclette" (1948) comment l'Amérique a adapté à sa géographie et sa société un genre venu d'Europe.
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