Jeune et Innocent (Young and Innocent)
Alfred Hitchcock (1937)
"Jeune et innocent" est un film complètement jouissif pour qui aime Alfred HITCHCOCK. L'un de ces films "tranche de gâteau" qu'il affectionnait. Sa tonalité est résolument légère mais son efficacité redoutable. Et il offre une sorte de best-of made in English de ce que le réalisateur offrira de mieux dans sa période américaine:
- Un travelling mémorable (c'est le passage le plus célèbre du film) qui part du hall d'un grand hôtel rempli de danseurs et s'approche d'un orchestre de jazz composé de blancs grimés en noirs (car on ne se mélangeait pas à cette époque et Hitchcock s'amuse beaucoup à transgresser la règle avec le clochard Will qui s'est introduit dans l'hôtel grimé en bourgeois pour identifier le coupable) jusqu'au très gros plan révélant le tic des yeux de celui que nous savons être le vrai coupable. Hitchcock utilisera un plan virtuose similaire dans "Les Enchaînés" (1945).
- Le thème du faux coupable charmeur en cavale fait beaucoup penser à "La Mort aux trousses" (1959). Et ce d'autant plus qu'il y a un passage où la fille du commissaire, Erica tombe dans un grand trou et est sauvée de justesse par Robert. La façon dont le visage d'Erica est filmé, les mains qui ont du mal à se tenir, tout fait penser à la scène du Mont Rushmore, la couleur en moins.
- Dans la scène de la plage d'où procède le malentendu qui accuse Robert, Hitchcock filme au ralenti des mouettes comme un présage funeste qui fait penser immanquablement à "Les Oiseaux (1962).
Mais le film ne doit pas être réduit à ces références écrasantes. C'est une délicieuse comédie policière proche de la screwball avec son renversement des rôles masculin et féminin (la référence s'impose d'autant plus que Derrick DE MARNEY qui joue Robert endosse un rôle à la Cary GRANT). C'est l'homme qui s'évanouit et est vigoureusement ranimé par une jeune fille intrépide qui avec sa guimbarde s'avère être le moteur de l'action. leur odyssée offre à Hitchcock le plaisir savoureux de caricaturer de nombreuses institutions britanniques (justice, police, famille, piliers de comptoirs) avec en particulier deux flics à la Dupond-Dupont qui m'ont fait beaucoup rire.
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